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VudeJerusalem.over-blog.com

Vers un gouvernement des juges en Israël?

December 31 2019, 09:25am

Posted by Pierre Lurçat, Richard Darmon

A la veille de la décision dramatique de la Cour suprême, censée décider si le Premier ministre B. Nétanyahou "a le droit" de former une coalition après les prochaines élections, je reviens au micro de Richard Darmon sur le processus par lequel la Cour suprême d'Israël est devenue le "premier pouvoir" et s'est arrogée des compétences exhorbitantes, y compris celle d'annuler toute loi de la Knesset et toute décision du gouvernement ou d'un autre organe élu. Histoire d'un véritable putsh judiciaire.

Ecouter l'émission ici

https://www.youtube.com/watch?v=aMm1YHk0ZRc

https://www.youtube.com/watch?v=aMm1YHk0ZRc

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« L’arrogance élitiste de la Cour suprême »

December 27 2019, 13:15pm

Posted by Pierre Lurçat

Au micro de Daniel Haïk, j'évoque les derniers développements du bras de fer entre les pouvoirs exécutif et législatif israéliens et la Cour suprême, le Procureur général et les médias et les racines de l'affrontement actuel. 

Résultat de recherche d'images pour ""cour supreme" "pierre lurçat""

https://www.youtube.com/watch?v=Y7ZOONTT6zY

 

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Tsomet Miller, la série qui se moque des Français en Israël

December 23 2019, 08:30am

Posted by Judith Assouly et Pierre Lurçat

 

Cette semaine, dans Cultura’Sion, Pierre Lurçat et Judith Assouly nous parlent de la série « Tsomet Miller », du célèbre Adir Miller, qui met en scène une française…. vaguement ridicule. 

 

Quelle image ont les Franco-Israéliens arrivés en Israël ces quinze dernières années aux yeux du reste du pays ?

Un journaliste israélien a réalisé sur l’image des juifs français et avait dénoncé les stéréotypes portant notamment sur les juifs sépharades.

En voici un résumé paru dans un article du journal Libération en 2018

 

“Selon une étude récente, près d’un quart de la population israélienne est convaincue que les olim français sont «vulgaires», «sans-gêne», «radins», «religieux-pratiquants», «de droite»… Bref, tous les préjugés accolés généralement aux mizrahim. 

Lorsque les personnes sondées ont dû «classer» les vagues d’immigrations en Israël, les nouveaux immigrants originaires des Etats-Unis et de l’ex-Union soviétique se trouvaient parmi les plus «désirables». Les «moins désirables» étaient ceux originaires d’Ethiopie et de l’alyah française”.

 

Dans “‘Tsomet Miller”, série comique à succès, Adir Miller utilise les stéréotypes les plus répandus parmi les Israéliens à l’encontre des Français pour tourner en ridicule les Français en Israël.

 

 

Adir Miller n’est pas seulement le comique talentueux qu’on peut voir dans Tsomet Miller ou dans Ramzor. En réalité, c’est un acteur qu’on a pu voir au cinéma dans deux beaux films d’Avi Nesher, Secrets avec Fanny Ardant, et The matchmaker adapté d’un roman d’Amir Gutfreund, pour lequel il a reçu le prix d’interprétation Ophir en 2010.
Adir Miller est aussi bon en acteur dramatique qu’en comique.

Pour la petite histoire, il est le fils de deux rescapés de la Shoah et a fait son service militaire dans l’unité 8200 (prononcez shmoné matayim) des Renseignements.

 

avi nesher,cinéma israélien

Adir Miller

Découvrir la suite dans Cultura’Sion no 14. https://www.youtube.com/watch?v=qBtjFP2I58A&feature=emb_logo

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Le dernier Hannoukah de ma mère

December 19 2019, 11:12am

Posted by Pierre Lurçat

 

Dans les dernières années de sa vie, usée par le temps et diminuée par la dépression consécutive à la mort de mon père, dont elle ne s’était jamais  vraiment remise, ma mère passait la plus grande partie de ses journées dans sa chambre, alitée, ou parfois assise sur une chaise, dans la salle à manger ou derrière le bureau où elle avait travaillé de si longues années et écrit tous ses livres. Parfois aussi, dans ses dernières semaines, allongée sur son lit qu’elle ne quittait plus guère, elle parvenait encore à lever la main en l’air et faisait le geste d’écrire, traçant d’invisibles phrases au-dessus de sa tête. Lorsque Marie, la dame qui l’accompagnait avec dévouement depuis le décès de mon père, lui demandait ce qu’elle faisait, ma mère lui répondait avec le plus grand sérieux : “J’écris un article!”.

 

 

Dans cet ultime combat contre la maladie et contre la mort, ma mère déploya des trésors de vitalité, qui étonnèrent à de nombreuses reprises les médecins et infirmières qui s’occupaient d’elle. A l’hôpital Saint-Joseph, où mon père était décédé plusieurs années auparavant et où ma mère avait été admise pour une infection pulmonaire, le personnel soignant - dévoué et attentionné - manifestait régulièrement le sentiment que tout était joué et qu’elle n’avait plus que quelques jours à vivre… “L’essentiel, c’est qu’elle ne souffre pas, qu’elle soit confortable” répétaient à l’envi les médecins et les infirmières, comme un mantra, idée bien conforme aux conceptions de l’époque, qui craint la souffrance bien plus que la mort. Lorsque je leur expliquai que l’essentiel, à mes yeux, était qu’elle vive encore - certes sans trop souffrir, mais sans trop hâter l’inéluctable non plus, on me regardait avec un regard de condescendance amusée, comme si j’étais fou ou naïf. “Ce pauvre monsieur ne sait-il donc pas que la vieillesse n’est que le prélude à la mort?”


 

En mon for intérieur, pourtant, je savais bien que c’était moi qui avais raison, contre les médecins et leurs certitudes d’airain. Car la force de vie de ma mère était capable de surmonter toutes les affections et les maladies, et sa flamme (à laquelle la tradition juive compare l’âme humaine, la neshama) tremblait, vacillait et faisait à chaque instant mine de s’éteindre, mais elle brûlait encore. Cette flamme de vie, qui avait résisté aux multiples épreuves de sa longue existence, à l’internement à Drancy, à la guerre et aux privations, elle était comme ces petites fioles d’huile qu’on allume à Jérusalem pendant Hannoukah, la fête des Lumières, et dont une coutume aujourd’hui très répandue veut qu’on les dispose à l’extérieur de la maison, pour faire la “publicité du miracle” de la victoire des Hasmonéens contre les Grecs. En décembre, à Jérusalem, le climat est parfois froid et venteux, et il est étonnant de voir les petites fioles, dans le soir tombant, trembloter au vent, paraissant sur le point de s’éteindre et continuant envers et contre tout de brûler et de diffuser leur lumière tout autour d’elles…

 

 

Ma mère était entrée à l’hôpital le lundi, et elle y resta jusqu’au mercredi de la semaine suivante. Me trouvant à Jérusalem lors de son hospitalisation, je pris le premier avion le lendemain. Les médecins que je rencontrai étaient très pessimistes et ne lui donnaient que quelques heures à vivre. Mais leurs pronostics furent démentis par l’opiniâtreté et la force de vie de ma mère. Sa flamme continuait de brûler, envers et contre tout. Comme dans le récit du miracle de Hannoukah - dont les lumières se consumèrent pendant huit jours alors que l’huile ne suffisait qu’à une seule journée - la flamme de ma mère brûla et éclaira encore pendant plus d’une semaine. Jusqu’à son dernier souffle, elle se montrât telle qu’elle avait été sa vie durant : forte, obstinée et indomptable. 


 

Une petite lumière chasse beaucoup d’obscurité”. Cet adage des hassidim de Habad me semblait alors, pendant les longues journées que je passai au chevet de ma mère, résumer parfaitement le secret de sa vie et de ses multiples combats, personnels, professionnels et intellectuels. Elle était née à Jérusalem, avait grandi et vécu à Paris, où elle avait passé toute son existence adulte. Elle s’était battue pour ses idées, pour son statut de chercheur indépendant au CNRS et pour le droit de mener ses recherches en solitaire, loin des foules, des modes, des idéologies et des crédits de recherche : “hors des sentiers battus”, selon l’expression qu’elle affectionnait particulièrement. Elle avait lutté, farouche et ombrageuse, contre ses patrons de labo - ces “mandarins” de la psychologie contre lesquels elle avait défendu becs et ongles,  aux côtés de son mari, lui aussi chercheur, une autre idée de la recherche scientifique, plus exigeante et plus austère. 

 

Drancy

 

Elle avait lutté contre les gardiens de Drancy, contre les dirigeants du Parti, qui n’appréciaient guère son esprit rebelle et la soupçonnaient d’accointances “sionistes” ; son frère n’était-il pas lieutenant-colonel de l’armée israélienne, comme elle l’avait déclaré sur un questionnaire officiel du Mouvement de la Paix, à Prague , en pleine période des procès antijuifs, avec une témérité qui frôlait l’inconscience? Elle s’était toute sa vie battue contre les partis, les institutions et les idéologies, restant jusqu’à son dernier jour un esprit libre et rebelle. Oui, ma mère avait gardé, toute sa vie durant, quelque chose d’étranger et d’insaisissable qui faisait d’elle une personne inclassable, fière et rétive.

 

Prague

 

Je suis née étrangère et je le suis demeurée”, écrivait-elle, désabusée, dans un de ses derniers textes. S’étant considérée, toute sa vie d’adulte, comme Française à part entière, elle redécouvrait, au soir de son existence, qu’elle ne l’était pas tout à fait. Car son identité française - celle de la femme publique (qui avait toujours fui les mondanités et les exigences de la vie sociale) - élève de l’école publique qu’elle avait aimée et défendue contre ses destructeurs, incarnant un modèle de réussite de “l’école de la République”, fille d’émigrés qui ne parlaient pas français, devenue maître de recherches au CNRS, ne définissait pas son identité la plus intime, celle qu’elle ne dévoilait qu’à ses proches. Française de coeur et d’adoption, elle était aussi restée étrangère.

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Pourquoi l'élection de Boris Johnson et le vote du Brexit sont une bonne nouvelle pour Israël, Pierre Lurçat

December 13 2019, 11:57am

Posted by Pierre Lurçat

2091Churchill.jpgDans un petit opuscule écrit en pleine guerre *, alors qu’il se trouve à Londres pour le compte de l’Agence juive, Albert Cohen parle avec empathie de ces Anglais silencieux “qui chérissaient la liberté et la justice parce qu’ils avaient lu le Livre…”. Relisant ces lignes au lendemain du vote du Brexit, on ne peut s’empêcher d’établir un parallèle entre l’Angleterre d’alors - celle de 1940, du Blitz sur Londres et de la résistance acharnée contre le nazisme - et celle d’aujourd’hui qui vient de dire un non retentissant à l’Union européenne.  

La plupart des commentateurs français déplorent le vote anglais et y voient une réaction populiste, lourde de conséquences pour la stabilité et l’avenir du Vieux continent, navire en perdition dont l’Angleterre vient de se séparer, en larguant les amarres qui la rattachaient - de manière sans doute artificielle et contraire à son histoire et à sa volonté profonde - à l’Europe continentale.

 

Mais en tant que Juif, on ne peut qu’être frappé de la concomitance de ce vote avec l’accueil triomphal réservé par l’Union européenne à Bruxelles au dirigeant corrompu de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, reçu comme un chef d’Etat pour prononcer devant un auditoire conquis d’avance un discours de haine contre Israël et le peuple Juif, accusé - comme au Moyen-Age - d’empoisonner les puits, sans qu’aucun député européen n’élève la moindre protestation.

 

Il est évidemment peu probable que les Anglais qui ont rejeté, dans leur grande majorité, l’Union européenne, aient eu à l’esprit l’attitude hostile de l’UE envers Israël lorsqu’ils ont voté, tout comme l’Angleterre de Churchill s’est battue contre Hitler pour ses raisons propres et non par amour des Juifs (même si Churchill lui-même était favorable au mouvement sioniste). Les Anglais qui ont voté le Brexit n’ont pas seulement rejeté une Europe devenue synonyme de bureaucratie et de réglementations abusives. Ils ont aussi voulu renouer avec leur histoire millénaire, étrangère au rêve européen, essentiellement franco-allemand.

 

L’Union européenne actuelle, qui est devenue un acteur hostile à Israël sur la scène internationale, a peu à voir avec le projet né au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale. Elle ressemble plus à l’Eurabia - entité politique décrite par Bat Ye’or, gagnée par l’idéologie palestiniste et par le rejet de ses racines judéo-chrétiennes - qu’à l’Europe pacifiée promise par Jean Monnet. Dans ces circonstances, on peut légitimement considérer que le vote anglais est une bonne nouvelle pour Israël.

 

Bat Ye'or Eurabia.jpg

Tout d’abord, comme le rappelle le député israélien Motti Yogev, parce qu’une Union européenne amoindrie et rendue plus modeste sera moins dangereuse pour Israël (« Cette Union européenne qui applaudit les discours d’Abou Mazen lorsqu’il calomnie Israël va devoir désormais s’occuper d’elle même et de ses nombreux problèmes au lieu de passer son temps à faire pression sur Israël”).

 

La réalité est que l’UE ne se contente pas d’applaudir les discours haineux de Mahmoud Abbas-Abou Mazen : c’est dans une large mesure elle qui les écrit et les finance! Comme l’a en effet révélé le site Palwatch, la calomnie moyen-âgeuse selon laquelle Israël empoisonnerait l’eau des Palestiniens n’est pas une invention d’Abbas : elle a été diffusée par une ONG israélienne anti-sioniste, “Breaking The Silence”, financée par l’UE dans le but avoué de calomnier l’armée israélienne et ses soldats**.

 

C’est donc l’argent de l’UE qui finance les calomnies antisémites répandues par cette ONG et repris à son compte par Mahmoud Abbas, selon un mécanisme bien huilé qui fonctionne depuis de nombreuses années. Même si le pronostic optimiste de Yogev s’avérait erroné et que l’Union européenne sans les Anglais poursuivait dans sa politique anti-israélienne, le Brexit aura néanmoins pour conséquence positive que l’Angleterre, délivrée des contraintes imposées par Bruxelles, pourra incarner une voix politique indépendante, qui sera probablement plus favorable à Israël que celle de l’UE propalestinienne.

 

Brexit, Union européenne, ChurchillDemain, d’autres pays européens, inspirés par l’exemple anglais, se libèreront à leur tour des chaînes de l’UE et deviendront peut-être des alliés d’Israël. Car l’Europe des nations, contrairement à ce que veulent faire croire les idéologues de la gauche européenne, n’est pas l’ennemie d’Israël. Elle a vocation, bien au contraire, à devenir la meilleure alliée du mouvement national juif, qui s’est inspiré à ses débuts des mouvements de libération nationale européens (ainsi, le dirigeant sioniste Jabotinsky était un admirateur de Mazzini et de Garibaldi).

 

L’Europe, libérée d’Eurabia, pourrait ainsi donner raison à Albert Cohen, qui écrivait en pleine Deuxième Guerre mondiale : “Enchaînés d’Europe, dites Hosannah avec nous. Demain, vos liens tomberont et le jour de bonté luira. Et vous, cloches, voix gentilles, voix lourdes, voix pieuses, portez vers le futur le nom de Churchill d’Angleterre”.

 

* Albert Cohen, Churchill d’Angleterre, éditions Lieu commun.

** http://www.palwatch.org/main.aspx?fi=157&doc_id=18211

NdA Cet article a été publié initialement en juin 2016, au lendemain du vote du Brexit. Il n'a pas été modifié, à l'exception du titre.

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Les femmes agunot vues par une série israélienne

December 10 2019, 10:38am

Posted by Pierre Lurçat et Judith Assouly

 

De nos jours, des centaines de femmes de par le monde sont concernées par le problème des ‘agounot. Il peut aussi bien s’agir de femmes auxquelles le mari refuse la délivrance du Guett (acte de divorce religieux), que de maris présumés décédés et dont la mort n’est pas avérée au regard du droit rabbinique : maris disparus ou absents.

 

La série israélienne “Metir Agounot” aborde cette question douloureuse sous un angle original et intéressant, à travers le personnage d’un rabbin-enquêteur interprété par l’acteur israélien Aviv Allouche, qu’on avait pu admirer dans “LiHyot Ita”. Cette série originale fait découvrir le monde du Beth Din rabbani et des lois sur les Agounot, de manière à la fois captivante (comme un film policier) et instructive

 

Dans un contexte politique où les clivages entre Israéliens religieux et laïcs sont souvent attisés par certains partis politiques, c’est un effort louable pour faire connaître le monde religieux…

 

Voir l’émission Culturasion consacrée à cette série israélienne : 

https://www.youtube.com/watch?v=De9vkx0Dqos&t=21s

 

Pour en savoir plus sur la question des femmes Agounot : 

https://presses-universitaires.univ-amu.fr/agounot-femmes-entravees

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Qu’est-ce que l’antisionisme? Pierre Lurçat

December 6 2019, 12:18pm

Posted by Pierre Lurçat

Après l’agression dont a été victime Alain Finkielkraut, en février 2019, le débat sur la nature de l’antisionisme a fait irruption dans les médias français, et jusque dans les couloirs du Parlement, où il a été question de pénaliser l’antisionisme, en en faisant une catégorie de l’antisémitisme…[1] Le président français Emmanuel Macron a lui-même déclaré que “l’antisionisme (était) une des formes modernes de l’antisémitisme…”.

 

Pour mémoire, le samedi 15 février 2019, le philosophe  Alain Finkielkraut était pris à partie par un manifestant en marge d’un cortège des Gilets jaunes, violemment insulté, et traité de "sale sioniste de merde". L’incident a soulevé une vive émotion en France et suscité un large débat.

 

 

La nature même de l’insulte incite à la réflexion : de toute évidence, lorsqu’on traite un intellectuel juif de “sale sioniste”, le mot sioniste tient lieu de mot-codé, dont le signifiant véritable est “juif”. Ainsi, dans la France aujourd’hui, comme dans l’URSS jadis, ou dans certains pays arabes, comme nous le verrons, “sioniste” est devenu pour certains l’équivalent de “juif”.

 

C’est en ce sens qu’on a pu soutenir que l’antisionisme était la forme la plus récente de l’antisémitisme. Mais, au-delà des polémiques et des joutes idéologiques, qu’en est-il vraiment? Qu’est-ce que l’antisionisme? S’agit-il de la dernière mutation de l’antisémitisme? Est-il seulement un discours radical, maniant slogans et insultes, ou bien peut-être une véritable idéologie, qui mérite d’être analysée, étudiée et si besoin réfutée?

 

Qu’y a-t-il de commun entre le manifestant parisien qui traite Alain Finkielkraut de “sale sioniste”, l’intellectuel arabe qui se dit “antisioniste” par conviction nationaliste ou islamiste, ou encore l’intellectuel juif assimilé qui prétend, lui, s’opposer au sionisme, “au nom du judaïsme”?

 

De toute évidence, il y a là des manifestations très diverses - voire totalement disparates - d’un phénomène multiforme, qu’on a peine à ranger sous le même vocable d’antisionisme. La différence entre ses manifestations très variées est-elle une simple différence de degré, ou bien s’agit-il de phénomènes véritablement distincts?

 

Prenons un exemple. Entre les deux énoncés “L’Amérique soutient Israël” et “Les Juifs dirigent l’Amérique”, il y a, de toute évidence, une différence de nature. Le premier énoncé est une affirmation factuelle, apparemment objective, qu’on peut évidemment discuter, mais qui ne contient aucun jugement de valeur apparent. Un premier glissement sémantique s’opère toutefois, lorsqu’on passe de l’énoncé “L’Amérique soutient Israël”, à “L’Amérique soutient toujours Israël”, puis à “Israël est l’instrument de l’impérialisme américain”. Nous sommes là, toutefois, dans une simple amplification du message, qui demeure malgré tout largement similaire.

 

 

Le véritable “saut” conceptuel s’effectue, lorsque l’énoncé précédent, “Israël est l’instrument de l’impérialisme américain” (ou occidental), devient cette-fois “Israël dirige la politique américaine”, ou encore, de manière plus lapidaire et radicale, “Les Juifs dirigent l’Amérique”. Cette fois-ci, le glissement sémantique n’est plus seulement quantitatif, mais qualitatif. On change de registre, et pour ainsi dire de paradigme…

 

L’historien des idées Pierre-André Taguieff définit ce procédé rhétorique, qu’on rencontre souvent dans le discours polémique, comme consistant à élargir “la cible de la stigmatisation”[2].  Il en donne pour exemple le passage de l’énoncé “tous les Juifs sont des criminels”, à l’énoncé “tous les criminels sont des Juifs”. Ce procédé rhétorique est utilisé de manière récurrente dans le discours antisioniste.

 

On en donnera un autre exemple, dans un cadre différent, avec l’affirmation que “tous les Israéliens sont des soldats”. Cette affirmation a servi au cheikh islamiste Youssouf Al-Qardawi, autorité sunnite proche de la mouvance des Frères musulmans, pour justifier les attentats du Hamas contre des civils israéliens. Dans ce cas précis, l’élargissement de la “cible de la stigmatisation”, équivaut à élargir la cible des attentats, c’est-à-dire les victimes permises par le droit islamique. Le discours antisioniste a ainsi des conséquences tout à fait concrètes, puisque la rhétorique de la haine est mise au service de la violence politique et terroriste, qu’elle justifie et qu’elle alimente.

 

Il y a donc bien, pour répondre à notre question préliminaire, une différence de degré entre ces différentes formes d’antisionisme.

 

RETROUVER LA SUITE SUR AKADEM,

 

http://www.akadem.org/sommaire/cours/sciences-politiques-les-mythes-de-l-antisionisme-pierre-lurcat/racines-et-visages-de-l-antisionisme-30-10-2019-115388_4873.php

 

[1] Débat qui a abouti à la résolution du Parlement adoptant la définition de l’antisémitisme de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA).

[2] La Judéophobie des Modernes, p. 261. Odile Jacob 2008.

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