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1978-2018 : Les accords de Camp David et le "faux Messie" de la paix, par Pierre Lurçat

March 26 2019, 09:06am

Posted by Pierre Lurçat

sadateL'anniversaire de la signature des accords de Camp David entre Israël et l'Egypte, il y a tout juste 40 ans - est l'occasion de revenir sur cet événement historique, dont la signification véritable apparaît bien différemment aujourd'hui. Par une ironie de l'histoire, c'est Menahem Begin, le "faucon", qui fixa le précédent dangereux et trompeur de "la paix contre les territoires". Le faux messianisme de la paix qui triompha par la suite à Oslo était déjà présent dans la société et dans la classe politique israélienne en 1977.

Le premier à avoir compris, dans le camp arabe, la transformation qu’avait subie l’État d’Israël au lendemain de la « guerre d’octobre » fut Anouar Al-Sadate. Un certain discours le présente aujourd’hui, à l’instar de Rabin, comme un « faucon devenu colombe ». Mais ce raccourci journalistique est faux et trompeur, pour l’un comme pour l’autre. Il faut relire le dernier discours de Rabin à la Knesset [1] pour comprendre qu’il n’a jamais renié son passé ; et il faut relire le discours de Sadate à Jérusalem, pour comprendre qu’il est lui aussi resté fidèle à ses engagements et à sa vision, conforme à la doctrine politique de l’Égypte établie depuis la Révolution des officiers libres en 1952. Le plus farouche ennemi d’Israël, admirateur d’Hitler dans sa jeunesse [2], ne s’est pas transformé du jour au lendemain en ami des Juifs : il a tout simplement compris que la meilleure façon de vaincre Israël était de se servir de la paix comme d’un cheval de Troie pour affaiblir et diviser l’opinion israélienne, et pour obtenir par la négociation ce que les armées arabes n’avaient pu remporter sur les champs de bataille.

 

sadate

Sadate et Moubarak

D’une société idéaliste à une société individualiste

 

Un des ouvrages qui a le mieux décrit cette transformation en Israël est celui d’un sociologue de l’université de Haïfa, Oz Almog [3], qui a montré le passage d’une société idéaliste et collectiviste (celle de la génération de 1948 ou « génération de l’État ») à une société plus matérialiste et individualiste, celle de l’après-guerre de Kippour. Cette transformation a pris des formes multiples, touchant tous les domaines de la société et de la vie publique et privée (les médias, les arts, les rapports hommes-femmes, etc.) Mais c’est dans le domaine politique que ses conséquences ont été les plus marquantes.

Le soldat des guerres d’Indépendance et des Six jours, animé par l’énergie du désespoir (celle des combattants de 1948, dont beaucoup sont tombés les armes à la main face à un ennemi supérieur en nombre mais beaucoup moins motivé ; et celle des soldats de 1967, conscients de protéger leur pays contre la menace d’extermination proférée par Nasser) s’est transformé en un soldat fatigué de se battre, qui doutait de la justesse de sa cause. Ces doutes sont apparus au grand jour dès le lendemain de la guerre de Kippour et ont culminé lors de la Première Guerre du Liban, en 1982. Sadate avait bien compris ce sentiment de lassitude animant la société israélienne lorsqu’il est venu à Jérusalem, non pas pour offrir une « paix des braves », selon l’image d’Epinal, mais pour exiger d’Israël qu’il accepte toutes ses conditions. Ce faisant, il a fixé le dangereux précédent de la « paix contre les territoires », paradigme trompeur accepté par Israël qui subsiste jusqu’à ce jour.

 

Le faux Messie de la paix, hier et aujourd’hui

 

Dans son beau livre Être Israël, publié en France quelques mois après les accords de Camp David [4], le journaliste Paul Giniewski raconte trente années de reportages et de voyages en Israël, de 1948 à 1978. Avec talent et justesse, il décrit l’euphorie qui a gagné la société israélienne lors de la visite de Sadate à Jérusalem. Dans un chapitre intitulé « 1977 : brève rencontre avec le Messie », il relate ses sentiments mitigés à l’écoute du discours de Sadate devant la Knesset :

 

sadate

« J’écoute. Ma déception augmente. Le mot paix revient de plus en plus souvent : [Sadate :] « Je prononce le mot paix, et que la miséricorde de Dieu tout-puissant soit sur vous, et que la paix vienne pour nous tous. Paix sur toutes les terres arabes, et paix sur Israël ! » Mais en même temps, l’accusation devient de plus en plus précise. Sadate est venu à la Knesset pour dénoncer Israël ! (…) Je viens d’entendre ce qui, chez les Arabes, fait l’unanimité des modérés et de ceux du camp du refus. Les uns réclament la destruction d’Israël. Les autres acceptent son existence, au prix de concessions qui conduiront à sa destruction : la restitution des territoires, un État palestinien. La différence est dans les mots, dans le style, mais pas dans le but final. .. »

 

Et Giniewski rapporte aussi les mots de Golda Meir, la dame de fer d’Israël, interrogée sur les accords de Camp David par un journaliste, qui lui déclare : « Sadate et Begin méritent le prix Nobel de la paix ». Elle sourit : - « Peut-être aussi l’oscar du cinéma ? ». A la buvette du Parlement, où les députés se congratulaient avant le discours [de Sadate], je l’entends dire de sa voix désabusée : - Vous attendez le Messie ? Quand nous sommes allés au kilomètre 101 [5], [le général] Aharon Yariv négociait avec un officier égyptien. Nous avons aussi cru que c’était le Messie. Mes enfants, quand le Messie viendra, il ne s’arrêtera pas au kilomètre 101 ».

 

Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts du Jourdain depuis lors, après l’assassinat de Sadate et celui de Rabin. L’euphorie née de la visite de Sadate à Jérusalem s’est depuis longtemps dissipée, et même la gauche israélienne, qui avait voulu faire d’Arafat un partenaire de paix, a dû déchanter. Le Messie n’est pas venu à Camp David, ni à Oslo, et il n’a même pas appelé au téléphone, comme l’a chanté Chalom Hanoch. Mais le messianisme de la paix, lui, est bien vivant. Et toujours aussi dangereux, comme tous les faux Messies.

(Extrait de mon livre La trahison des clercs d'Israël, La Maison d'édition 2016)

sadate

[1] Le 5 octobre 1995, Rabin prononça un discours politique qui devait être son dernier devant le Parlement israélien (Knesset), dans lequel il exposa sa vision des futures frontières de l’État d’Israël après les accords d’Oslo. Il y mentionna notamment son refus d’un retour aux « frontières de 1967 », l’importance de conserver des « blocs d’implantations » en Judée-Samarie et de maintenir le Jourdain comme frontière de sécurité et son refus de voir Jérusalem redivisée. Voir Dore Gold, « Rabin’s lats Knesset speech », Israel Hayom 2/11/2012.

[2] Voir à ce sujet la lettre adressée par Sadate à Hitler dans le journal cairote El-Moussaouar, le 18 septembre 1953 : « Mon cher Hitler, Je vous félicite du fond du cœur. Même s'il vous semble que vous avez été battu, en réalité vous êtes le vainqueur. Vous avez réussi en créant des dissensions entre le vieux Churchill et ses alliés, les fils de Satan. L'Allemagne vaincra car son existence est nécessaire à l'équilibre mondial. Elle renaîtra en dépit des puissances de l'Ouest et de l'Est. Il n'y aura pas de paix sans que l'Allemagne redevienne ce qu'elle a été...

Pour le passé, je pense que vous avez commis quelques fautes, comme d'ouvrir trop de fronts et [de ne pas avoir su parer à] l'imprévoyance de Ribbentrop face à l'experte diplomatie britannique. Mais ayez confiance en votre pays, et votre peuple réparera ces faux pas. Vous pouvez être fier d'être devenu immortel en Allemagne. Nous ne serions pas surpris si vous y apparaissiez de nouveau ou si un nouvel Hitler se levait dans votre sillage. » (Lettre reproduite par Jean-Pierre Péroncel-Hugoz dans Le radeau de Mahomet, Lieu Commun, 1983, réédité chez Flammarion en 1984).

 

[3] Farewell to Srulik - Changing Values Among the Israeli Elite, Zmora Bitan and Haifa University Press, 2004 [hébreu].

 

[4] Paul Giniewski, Être Israël, Stock 1978.

[5] Lieu où se déroulèrent les pourparlers de cessez-le-feu entre le général israélien Aharon Yariv et le général égyptien Gamassi qui mirent officiellement fin à la guerre de Kippour.

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Aharon Barak et la religion du droit (II) : Le fondamentalisme juridique au cœur du débat politique israélien actuel, Pierre Lurçat

March 25 2019, 07:55am

Posted by Pierre Lurçat

Suite de mon article sur le fondamentalisme juridique en Israël. (Lire la première partie ici).

 

Dans ses écrits sur le rôle du juge (8), Barak insiste ainsi sur le rôle créateur de droit du juge, tout en affirmant ne pas avoir “d’agenda politique”. “Lorsque je fais référence au rôle du juge, je n’entends nullement suggérer qu’il aurait un agenda politique. En tant que juge, je n’ai aucun agenda politique. Je ne m’engage pas dans la politique des partis, ni dans aucune autre forme de politique…” (On peut évidemment contester la sincérité de cette affirmation, et la rapprocher de la fameuse déclaration de Barak, pour justifier l’éviction de la candidate à la Cour suprême Ruth Gabison, une de ses plus farouches opposantes : “Elle a un agenda politique !”).

 

Barak a tenu des propos similaires dans le cadre de l’arrêt Zarzevski, qui abordait la légalité d’un accord de coalition conclu en 1990 entre le Premier ministre Itshak Shamir et le ministre des Finances, Itshak Modaï. “De par notre éducation juridique, notre expérience judiciaire et notre foi dans le droit, nous nous tenons comme un rocher solide, même lorsque les vents se déchaînent autour de nous, car nous autres juges, notre monde est fait de principes et de valeurs fondamentales et non de courants passagers et changeants”. Ces propos au ton imagé et quelque peu hautain lui valurent la réponse ironique du juge Menahem Elon : “J’envie mon confrère, qui a ce privilège, comme il en témoigne lui-même. Mais que faire-je, moi qui suis le plus humble des myriades de citoyens israéliens, je ne suis pas taillé dans la pierre et je suis quelque peu exposé, malgré moi, aux sentiments et aux courants passagers de la politique (9)”.

 

Le juge Menahem Elon, aux côtés d’Aharon Barak


 

L’opposition entre le juge Menahem Elon et le juge Aharon Barak

 

Au-delà de la controverse personnelle entre deux hommes que tout sépare, il y a là deux conceptions radicalement opposées de la fonction judiciaire et du rôle du droit dans la société israélienne. Il n’est pas inutile de dresser un rapide portrait des deux hommes, avant de nous arrêter sur leurs différends théoriques. Le premier, Aharon Barak, est né à Kovno, en Lituanie, en 1940, et a survécu à l’occupation allemande en se cachant dans le ghetto. Monté en Israël juste après la guerre, il étudie à l’université hébraïque de Jérusalem, puis à Harvard, avant de revenir à Jérusalem où il est nommé doyen de la faculté de droit en 1974.

 

Il devient ensuite procureur de l’Etat, inculpant plusieurs personnalités publiques haut-placées, dont le ministre Avraham Ofer (qui se suicide) et le Premier ministre Itshak Rabin (qui démissionne). Il est nommé juge à la Cour suprême en 1975 et devient son président en 1995, fonction qu’il occupera jusqu’à son départ en retraite en 2006. Il est l’inspirateur et le principal artisan de la “Révolution constitutionnelle”, expression désignant le rôle accru et considérable confié à la Cour suprême et son intervention grandissante dans la vie publique et politique en Israël depuis le début des années 1990 et le vote des Lois fondamentales sur la Dignité et la liberté de l’homme et sur la Liberté professionnelle.

 

Menahem Elon appartient à la génération précédente de juristes israéliens. Né en 1923 à Düsseldorf, dans une famille juive hassidique, il émigre en Israël avec ses parents en 1935. A l’âge de 16 ans, il est admis à la yeshiva Hébron, à Jérusalem, où il étudie pendant 6 années qu’il décrira bien plus tard comme les “plus belles années de sa vie”. Il est ordonné rabbin par les deux grands rabbins de l’époque, Itshak Herzog et Meir Uziel. C’est seulement à l’issue de ses études rabbiniques qu’il entreprend des études de droit, qu’il achève brillamment en 1948, année de la proclamation de l’Etat. Nommé procureur-adjoint de l’Etat, il est ensuite conseiller en droit hébraïque au ministère de la Justice. En 1973, il publie son oeuvre monumentale, Le droit hébraïque, son histoire, ses sources et ses principes (10). Il entre à la Cour suprême en 1977, et y reste jusqu’à son départ en retraite en 1993.


 

Menahem Elon à la yeshivat Hebron (premier en haut à gauche)


Ces biographies très succinctes mettent en évidence la différence considérable entre les deux hommes : Barak a été formé à l’école du droit laïc, nourri par les professeurs israéliens et américains et ses conceptions juridiques ont été influencées par son bref séjour à Harvard. Elon, de son côté, est un spécialiste reconnu du droit hébraïque millénaire, et la yéshiva a été, de son propre aveu, une expérience plus marquante que l’université. Ce n’est pas un hasard, par conséquent, si le différend fondamental qui opposera les deux hommes tout au long de leur carrière judiciaire portera sur la place du droit hébraïque dans le système judiciaire et juridique israélien. (A suivre).

P. Lurçat




 

Notes

8. Voir notamment A. Barak, The Judge in a Democracy, Princeton University Press 2001.

9. Cité par N. Levitsky, op. cit. p. 236.

10. Menahem Elon, Jewish Law: History, Sources, Principles, The Jewish Publication Society, 1994.

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Aharon Barak et la religion du droit (I) : Le fondamentalisme juridique au cœur du débat politique israélien actuel, Pierre Lurçat

March 24 2019, 16:39pm

“La terre entière est emplie de droit”

Aharon Barak

 

A l’approche des élections du 9 avril prochain, le débat public israélien semble parfois se résumer à un affrontement entre ceux qui croient encore que l’avenir politique d’Israël doit se décider dans les urnes, et ceux qui pensent qu’il doit être tranché par le procureur de l’Etat et par les autres membres de l’establishment judiciaire. Ou, pour dire les choses en d’autres termes, entre ceux qui croient encore que la démocratie représente le pouvoir du peuple, et ceux qui prétendent ‘remplacer le peuple’ (comme l’avait déclaré sans la moindre ironie Gideon Levy dans les colonnes du quotidien Ha’aretz, après les dernières élections) pour confier le pouvoir aux “élites éclairées”, mieux à même selon eux de décider de l’avenir de notre pays (1).

 

Pour comprendre comment le droit en général, et la Cour suprême en particulier, ont acquis la place qu’ils occupent aujourd’hui dans la vie publique et politique israélienne, il faut se pencher sur la figure de celui qui a - de l’avis de ses partisans comme de ses contempteurs - rempli le rôle le plus important au cours des trois dernières décennies pour modeler le visage des institutions et de la démocratie israélienne tout entière. Je veux parler du juge Aharon Barak, qui fut le huitième et le plus influent président de la Cour suprême et le père de la “Révolution constitutionnelle”. Dans les lignes qui suivent, je voudrais m’attacher à un aspect bien particulier de la doctrine juridique et de la philosophie d’Aharon Barak : sa dimension “religieuse”.

 

Si cette expression peut sembler étonnante a priori, elle ne surprendra pas les observateurs attentifs de la vie politique israélienne, qui connaissent le zèle quasi-religieux animant certains militants de la lutte contre la “coercition religieuse” (expression qui recouvre souvent toute manifestation publique du caractère juif de l'État d'Israël). Celui-ci s'inscrit dans un phénomène plus général, que le philosophe russe Boulgakov avait décrit au sujet des révolutionnaires russes d'origine juive, notant qu'ils étaient mus par une ferveur presque mystique et qu’ils avaient trouvé dans l’idéologie marxiste un substitut au judaïsme, qu’ils avaient abandonné et trahi (2).

 

Selon Menahem Elon - qui fut le principal adversaire de Barak au sein de la Cour suprême -  et selon d’autres juristes israéliens éminents, il ne fait aucun doute que le juge Aharon Barak est animé par un esprit révolutionnaire, quasiment religieux. “Barak pense que ‘la terre entière est emplie de droit. Il n’existe pas à ses yeux de vide juridique, et toute action que nous menons comporte selon lui un aspect juridique. Cette conception correspond à une vision du monde religieuse, et non à une conception juridique. L’expression employée par Barak, “Toute la terre est emplie de droit” est calquée sur l’expression tirée de la prière juive, “Toute la terre est emplie de Sa gloire”. Selon Barak, le système judiciaire présente un caractère religieux, qui intègre toute l’expérience humaine…” (3)


 

Aharon Barak - le “grand-prêtre” des élites laïques israéliennes

 

Le jugement porté par Menahem Elon rejoint celui de Menahem Mautner, ancien doyen de la faculté de droit de Tel-Aviv. Dans son livre Le déclin du  formalisme et l’essor des valeurs dans le droit israélien (4), Mautner établit une comparaison en apparence étonnante entre le droit en Israël aujourd’hui et l’église dans la société catholique autrefois. “Le droit dans les sociétés laïcisées, écrit-il, remplit la même fonction que remplissait l’église dans les sociétés religieuses”. Selon Mautner, le conflit culturel interne à Israël n’est plus ainsi, comme on le décrit souvent, un conflit entre les tenants du “fondamentalisme religieux” et les partisans d’une démocratie laïque et éclairée. Il est devenu, ces dernières décennies, un conflit entre deux fondamentalismes : un “fondamentalisme religieux” et un “fondamentalisme juridique” laïc (5).

 

De quoi s’agit-il précisément, et comment comprendre cette expression de “fondamentalisme juridique” dans la bouche de Mautner, qui se définit lui-même comme un membre des élites laïques libérales (au sens américain du mot liberal) ? En quoi ce concept permet-il de mieux saisir les enjeux du conflit actuel entre la Cour suprême et la Knesset, ou plus précisément entre les partisans de “l’activisme judiciaire” (concept qu’il nous faudra définir et préciser) et ses opposants?

 

La conception du droit d’Aharon Barak : un totalitarisme juridique

 

Pour comprendre les enjeux de la conception du droit que le juge Barak a insufflée dans le système judiciaire israélien, désignée communément comme “activisme judiciaire”, il faut analyser sa conception du rôle du juge. Selon sa biographe Naomi Levitsky, “dès son entrée en fonction (comme juge à la Cour suprême), le juge Barak a considéré la Cour suprême comme le gardien des murailles du pouvoir, et non pas seulement comme un organe ayant pour fonction de trancher des litiges entre deux parties”. Comme il l'a précisé dans un livre d'entretiens, paru après son départ à la retraite (6), le juge Barak considère que le président de la Cour suprême a notamment pour fonction de “protéger le système judiciaire” contre les pouvoirs législatif et exécutif. Cette conception est étroitement liée à l’idée qu’il se fait du pouvoir, explique Levitsky, car “à ses yeux, le pouvoir ne détient aucune légitimité propre, sinon celle qu’il tire du peuple et de la loi. Les compétences du pouvoir sont définies et limitées par la loi” (7).

 

La Cour suprême d’Israël

 

Cette définition, prise à la lettre, pourrait sembler anodine et banale. En réalité, cependant, Barak soumet entièrement la légitimité (et l’activité) du pouvoir (exécutif ou législatif) à la loi, que seuls les juges sont à même d’interpréter. A ce titre, les juges sont bien l’autorité suprême, devant laquelle doivent s’incliner tant les dirigeants élus du peuple que les législateurs. Ainsi,  le juge Barak n’est pas seulement intervenu pour protéger le pouvoir judiciaire contre les pouvoirs exécutif et législatif. En réalité, sa politique d’interventionnisme judiciaire a contraint la Knesset et le gouvernement à se défendre contre la suprématie de la Cour suprême dans la vie politique et publique. (A SUIVRE)

 

Notes

1. Le concept d’élites éclairées est au centre de la doctrine juridique du juge Barak, qui en a fait un élément essentiel de sa révolution constitutionnelle. Je renvoie sur ce point à mon article “Comment la gauche israélienne est devenue une minorité tyrannique”.

2. Cité par Raya Epstein, Post-Zionism and Democracy, in Israel and the Post-zionists, A nation at risk, ed. Shlomo Sharan, Sussex Academy Press.

3. Cité par Naomi Levistky, Your Honor (hébreu), Keter 2001.

4. Paru en hébreu en 1993. Il a notamment publié depuis Law and the Culture of Israel, Oxford University Press 2011.

5. Cette réflexion rejoint celle de Pierre Manent, dans son Cours de philosophie politique : le droit, censé résoudre les litiges entre personnes privées (ou entre les particuliers et l’administration, s’agissant du droit administratif ou public) a de plus en plus tendance à devenir un système de valeurs.

6. A. Bendor et Z. Segal, The Hat Maker [hébreu], Kinneret Zmora-Bitan 2009.

7. Naomi Levitsky, Kevodo (Your Honor) [hébreu], Keter, 2001.

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Mettre fin au gouvernement des juges et rendre le pouvoir au peuple israélien, Pierre Lurçat

March 19 2019, 18:47pm

Posted by Pierre Lurçat

Je remets en ligne cette analyse, à l’occasion de la récente décision de la Cour suprême d’invalider la candidature de l’ancien député Michael Ben Ari (tout en validant celle du parti arabe radical Balad) et de la réaction de la ministre de la Justice Ayelet Shaked, qui a annoncé le plan de son parti La Nouvelle Droite pour juguler le pouvoir exorbitant que s’est arrogée la Cour suprême depuis l’époque du juge Aharon Barak. Sujet essentiel qui n’a pas fini d’occuper le débat politique israélien. P.L.

 

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Lors d’une récente conférence à Jérusalem, j’expliquai comment la Cour suprême était devenue le “premier pouvoir” en Israël, depuis la Révolution constitutionnelle inaugurée par le juge Aharon Barak au début des années 1990. Mon intervention donna lieu à deux réactions opposées : la première, celle d’un avocat français à la retraite, mit en question mes critiques de l’interventionnisme de la Cour suprême, faisant valoir que la Cour suprême était la garante de l’Etat de droit. La seconde, celle d’un membre de l’auditoire non-juriste, abonda dans mon sens en faisant remarquer que les juges n’étaient pas élus.

 

La réflexion de cet auditeur était en l’occurrence plus pertinente que celle du juriste : elle concerne en effet un aspect essentiel, et rarement évoqué, de la polémique liée à l’interventionnisme grandissant de la Cour suprême israélienne dans la vie publique de notre pays : le fait que le “pouvoir judiciaire” (notion en elle-même problématique) jouit d’une légitimité moindre que celle des pouvoirs législatif et exécutif, ce qui ne l’empêche pas de se comporter actuellement comme s’il était le premier - voire le seul - pouvoir.

 

 

Au cours des six derniers mois, nous avons ainsi vu la Cour suprême israélienne intervenir de façon régulière et massive dans le débat et la vie politiques, en annulant plusieurs lois de la Knesset, qui portaient sur des questions politiques et économiques de premier plan (loi sur l’expulsion des clandestins, loi sur la taxation du troisième appartement, loi sur la conscription des Juifs orthodoxes, etc.) Ce faisant, la Cour suprême s’est instaurée en premier pouvoir, c’est-à-dire en véritable “gouvernement des juges”, ce qui représente la négation des fondements de toute démocratie authentique.

 

Comme le rappelle Pierre Manent, spécialiste de philosophie politique, dans des pages très éclairantes d’un ouvrage paru il y a une quinzaine d’années *, la notion d’Etat de droit et celle de séparation des pouvoirs qui en découle, donnent lieu à de fréquentes fausses interprétations. En particulier, écrit-il, “On se trompe souvent sur la thèse de Montesquieu, ou on s’en fait une idée confuse. Il n’y a pas pour lui le pouvoir judiciaire. La forme et la fonction de celui-ci dépendent du régime politique. Dans le régime monarchique, dans la France du temps de Montesquieu, il importe que le judiciaire soit véritablement un pouvoir distinct et consistant, faute de quoi le régime serait despotique… Dans le régime républicain moderne, la fonction et la nature du judiciaire sont toutes différentes. La liberté y est produite et garantie par le jeu des deux autres pouvoirs (législatif et exécutif, P.L.) et par les effets que ce jeu induit. Le judiciaire n’y est donc pas le gardien de la liberté, comme il l’était dans la monarchie. Et même, pour aider à la liberté, il doit en quelque sorte disparaître comme pouvoir”.

 

 

La réflexion de P. Manent prend tout son sens lorsqu’on observe la situation israélienne et le déséquilibre des pouvoirs, qui existe depuis la “Révolution constitutionnelle” du juge Aharon Barak. Loin de "disparaître comme pouvoir", la Cour suprême y occupe aujourd'hui tout l'espace politique, s'imposant comme le premier pouvoir avec un mépris souverain pour tous ses adversaires. Cette situation a atteint actuellement son paroxysme, avec l’annulation de lois de la Knesset par la Cour suprême, qui est presque devenue l’activité quotidienne des juges siégeant à Jérusalem. Il n’est pas inutile de rappeler à ce sujet comment les Pères fondateurs et auteurs de la Constitution américaine définissaient les conditions de l’annulation d’une loi par un tribunal : “le pouvoir donné à une cour de déclarer nuls les actes législatifs ne peut se fonder que sur la supériorité de la Constitution, c’est-à-dire sur la souveraineté populaire, déclarée dans la Constitution” (Le Fédéraliste no. 78 cité par P. Manent, op. cit.)

 


 

Or dans le cas israélien, non seulement nous n’avons pas de Constitution fondant un tel pouvoir d’annulation des lois de la Knesset par les tribunaux, mais le recours aux Lois fondamentales (Loi fondamentale sur la Liberté et la Dignité de l’homme, entre autres) par la Cour suprême, depuis Aharon Barak, pour justifier l’annulation de lois votées par la Knesset ne repose pas sur la souveraineté populaire, exprimée dans l’adoption d’une Constitution formelle (comme celle des Etats-Unis), mais uniquement sur l’interprétation entièrement novatrice que le juge Barak a donnée aux lois fondamentales de 1992, en inférant de ces lois un pouvoir de “contrôle judiciaire” élargi, qui n’a jamais existé auparavant et n’a jamais été soumis au vote du peuple israélien.

 

En d’autres termes : le pouvoir d’annulation des lois est une invention des juges, soutenue par une partie de la “doctrine” (c’est-à-dire de l’université, mais également contestée par d’éminents juristes) et de certains médias, qui n’a jamais obtenu la sanction du vote populaire. La situation actuelle peut ainsi se définir comme un véritable “putsch judiciaire”, par lequel la Cour suprême s’est placée au-dessus des pouvoirs exécutif et législatif, au mépris de toutes les règles de la démocratie, réduisant quasiment à néant la souveraineté populaire pour instaurer un gouvernement des juges. Nous avons atteint le point de non-retour : il est impératif et urgent de mettre fin à cette situation pour redonner le pouvoir au peuple et à ses élus.

 

 

Aharon Barak

 

L’incroyable hybris de la nouvelle présidente de la Cour suprême, Esther Hayot est apparue, comme l’a rapporté Caroline Glick, dans un récent discours devant l’Ordre des avocats, au cours duquel Hayot a comparé le pouvoir des juges en Israël… et le pouvoir du Créateur de l’univers! Il ne s’agissait pas d’une simple métaphore. Aharon Barak lui-même avait déclaré que “tout est justiciable” (מלוא כל הארץ משפט) pour justifier son interventionnisme judiciaire, en reprenant délibérément une expression tirée de la prière juive. Comme l’avait bien remarqué le juge Menahem Elon, adversaire résolu d’Aharon Barak, la conception du droit de ce dernier est quasiment “religieuse”...** En réalité, seul le Juge suprême (שופט כל הארץ) peut se prévaloir de juger toute chose. Puisse-t-il éclairer nos dirigeants pour mettre fin à cette situation et “rétablir nos juges comme autrefois”! שנה טובה וגמר חתימה טובה


Pierre Lurçat

 

*  P. Manent, Cours familier de philosophie politique, Fayard 2002, p. 289-290.

** C’est une religion laïque, à l’instar du communisme, dont Barak partage le caractère totalitaire.

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Vers la fin du judaïsme en France? par Pierre Lurçat La France sans les juifs, de Danny Trom

March 18 2019, 14:43pm

Posted by Pierre Lurcat

Les transformations de la condition juive en France depuis 1940, et au cours de la décennie écoulée - celle qui s’étend de l’assassinat d’Ilan Halimi à celui de Mireille Knoll - ont fait l’objet d’innombrables articles de presse, mais de peu d’analyses sociologiques et politiques  de fond récentes. Le livre de Danny Trom vient combler cette lacune. L’auteur, chercheur au CNRS, a publié plusieurs livres, à la croisée de la sociologie et de la science politique, parmi lesquels Persévérance du fait juif. Une politique de la survie (2018).

 

Tout point de vue est toujours aussi et déjà un exercice de description de soi et du monde”. Cette phrase extraite du préambule de son livre permet de comprendre la motivation de l’auteur. Son analyse n’est pas tant celle de l’observateur extérieur, que celle du “spectateur engagé”, pour citer Raymond Aron, dont la réflexion est très présente dans le livre de Trom.


 

Un livre passionnant

 

Le flux des juifs quittant la France a pris une ampleur et une régularité telles qu’il faut bien parler d’émigration de masse. Cela ne se dit jamais dans des termes aussi abrupts, parce qu’ils la quittent imperceptiblement, un à un. Et parce que l’on hésite: est-ce quelque chose qui arrive aux juifs ou à la France?” Pour comprendre ce qui “arrive aux juifs” et à la France, Trom commence par interroger la place spéciale qu’occupent les juifs dans l’histoire et dans la constitution de la nation française, reprenant à son compte la définition de Pierre Manent : la France est une “nation de marque chrétienne où les juifs jouent un rôle éminent”(1). Il remonte à l’époque de l’émancipation des juifs, par laquelle ceux-ci se trouvent “intriqués dans la définition moderne de la France”. On pense à l’ouvrage de Pierre Birnbaum sur les “fous de la République’(2).

 

Tout change avec la défaite de 1940 et la trahison que représente le Statut des Juifs. A la trahison du Statut des juifs d’octobre 1940 fait écho celle de 1967, quand la France gaullienne, non contente d’avoir reproché à Israël son attaque préventive, fait le procès des juifs, “peuple sûr de lui et dominateur”. Le départ des juifs de France n’est pas tant, dans cette perspective et comme l’explique Danny Trom, la conséquence d’une adhésion au projet sioniste - laquelle a longtemps été marginale chez les juifs français - que celle d’un amour déçu envers la France.


 

Ben Gourion et De Gaulle en 1967

 

Dans des pages très intéressantes, Trom compare l’attitude de Raymond Aron et celle d’Hannah Arendt, tous deux juifs assimilés, le premier farouchement Français et républicain, la seconde attachée à sa culture allemande et brièvement sioniste. “Nous voici donc au coeur d’une énigme : l’Etat d’Israël fait subitement intrusion, s’impose à l’expérience d’Aron et d’Arendt”. Citant les propos d’Aron, empreints d’un  pathos inhabituel sous sa plume : “Si les grandes puissances selon le calcul froid de leurs intérêts laissent détruire le petit Etat qui n’est pas le mien, ce crime… m’enlèverait la force de vivre”), Trom montre ce que le “moment 1967” signifie dans la pensée et dans l’expérience de ces deux penseurs.

 

L’auteur affirme avec lucidité que “les conseils insistants prodigués par l’Europe à l’Etat d’Israël en vue du règlement du conflit territorial sont peu crédibles, si ce n’est risibles”. Dans son chapitre consacré à l’Europe, aux fondements de laquelle se trouvent “la défaite” (de 1945) et “le crime” (de la Shoah), il soutient pourtant que l’Europe, “résolument technocratique et pacifiste”, aurait renoncé d’emblée à la politique. Or, rien n’est moins évident quand on analyse l’attitude de l’Union européenne à l’endroit d’Israël. Car l’Europe ne se contente pas de conseils, elle mène une politique pro-palestinienne agressive. Celle-ci se traduit notamment par le financement d’une multitude d’associations radicales, luttant avec acharnement pour influer sur la politique et pour modeler le visage de la démocratie israélienne, en soutenant sans la moindre retenue les terroristes palestiniens et en leur donnant accès à la Cour suprême, pour y attaquer les décisions législatives, exécutives et administratives à tous les niveaux de l’Etat.


 

Eurabia : l’élément manquant


 

Sur ce point crucial, l’analyse de l’auteur est insuffisante pour comprendre et analyser la politique de l’Union européenne envers Israël (et, par ricochet, envers les juifs, accusés de soutenir Israël). L’Union européenne incarne aujourd’hui la “nouvelle église du totalitarisme”, pour reprendre l’expression de la politologue israélienne Raya Epstein, et le discours pacifiste et technocrate qu’elle adopte n’est que le masque trompeur de ses visées impérialistes et totalitaires. La politique arabe de la France (et de l’Europe) est l’élément manquant du puzzle (3), qui permet de comprendre comment la “guerre contre les juifs” a pu prendre une telle ampleur ces dernières années en France, au point que l’antisémitisme, longtemps inabordé et quasiment tabou, est devenu aujourd’hui un sujet important de la vie publique française.

 

L’autre élément absent de son analyse est celui du sionisme et de l’attitude des institutions juives. Le premier, même marginal, est néanmoins présent dans l’histoire des Juifs en France depuis 1945 (et avant). Son histoire demeure à écrire. Quant à la seconde, comment comprendre l’attitude pusillanime de la plupart des dirigeants des institutions juives de France (rabbinat et Consistoire notamment), face aux enjeux et aux menaces sans précédent que les juifs affrontent? Au lieu d’accompagner et d’encourager le départ des juifs vers Israël - seule solution à long-terme - ils se contentent le plus souvent de “dénoncer” l’antisémitisme dans une attitude incantatoire et, pour le reste, de faire comme si de rien n’était. “Business as usual”... Un livre passionnant.

 

Pierre Lurçat

 

(1) Pierre Manent, Situation de la France. Desclée de Brouwer 2015.

(2) Les fous de la République : histoire politique des Juifs d'État, de Gambetta à Vichy, Paris, Fayard, 1992.

(3) Sur ce sujet, je renvoie notamment aux ouvrages essentiels de Bat Ye’or, Eurabia, l’axe euro-arabe, éd. Jean-Cyrille Godefroy 2006, et de David Pryce-Jones, Un siècle de trahison, la diplomatie française et les juifs, Denoël 2008.

 

Israël : seule solution à long terme pour les Juifs de France

 

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Droit, morale et politique : Trois réflexions sur Binyamin Nétanyahou et l’avenir d’Israël, Pierre Lurçat

March 7 2019, 15:34pm

Droit, morale et politique :  Trois réflexions sur Binyamin Nétanyahou et l’avenir d’Israël, Pierre Lurçat

 

Au lendemain de l’annonce dramatique de la procédure d’inculpation visant le Premier ministre Binyamin Nétanyahou, l’impression générale était que la campagne menée depuis des années contre lui et contre sa famille venait enfin de déboucher sur un résultat concret et que sa chute n’était plus qu’une question de temps. Mais au-delà des titres racoleurs de la presse, qu’en est-il véritablement des accusations qui pèsent sur lui? Nétanyahou est-il vraiment l’homme corrompu que décrivent les médias israéliens - souvent repris par la presse internationale - faisant fi de la présomption d’innocence et de tous les principes du droit au nom desquels ils prétendent s’exprimer?

 

Une campagne menée depuis des années contre Binyamin Netanyahou et sa famille


 

1) Le mensonge du droit : ‘summum jus’, summa injuria

 

Du point de vue strictement juridique, comme l’a écrit le professeur Dershowitz, autorité en la matière, représentant éminent de la fraction de la gauche juive américaine restée fidèle à Israël (et soutien traditionnel du parti démocrate aux Etats-Unis), “les relations entre le monde politique et les médias - et entre les politiciens et les rédacteurs en chef - sont trop nuancées et complexes pour être soumises à la main de fer du droit pénal”. “Renverser un Premier ministre dûment élu sur le fondement de l’application sans précédent d’une loi pénale large et extensible met en danger la démocratie”(1).

 

Mais les arguments juridiques, aussi fondés soient-ils, n’épuisent pas le débat autour des procédures visant le Premier ministre. Celles-ci mêlent en effet de manière inextricable le droit, la morale et la politique politicienne. L’appareil juridique n’est, ici comme ailleurs, qu’un outil au service d’une croisade politique, comme l’ont démontré les manifestants qui se sont réunis, semaine après semaine, devant le domicile du procureur de l’Etat Avishaï Mandelblit, pour l’appeler à inculper Nétanyahou, par une campagne de pression sans précédent et contraire à tous les principes de l’Etat de droit et de la démocratie.

 

Si les opposants à Nétanyahou avaient véritablement pour préoccupation première la justice et la morale -  et cette critique vise tout autant les responsables de la police et de la justice qui se sont acharnés contre lui ces dernières années - ils ne pratiqueraient pas la politique du “deux poids deux mesures” de manière aussi éhontée. Car la corruption politique n’est pas un phénomène nouveau en Israël.

 

Où étaient ses pourfendeurs, durant les affaires qui ont égrené la vie politique israélienne pendant des décennies, depuis “l’île grecque” d’Ariel Sharon, la “Mitsubishi” de Gonen Segev (aujourd’hui emprisonné pour trahison au profit de l’Iran) et jusqu’aux affaires mêlant Ehoud Olmert? A l’époque, ils ont “rempli d’eau leur bouche”, dans le meilleur des cas, quand ils n’ont pas soutenu les dirigeants incriminés - Ariel Sharon notamment - au nom de leurs intérêts politiques étroits et de leur idéologie. Pour promouvoir les accords d’Oslo ou le “retrait” de Gaza, tous les moyens étaient bons. La fin justifiait les moyens.

 

Synagogue détruite au Goush Katif - quand la fin justifiait les moyens


 

2) Le mensonge de l’argument moral

 

Ce même double standard moral est apparu ces derniers jours, quand la gauche israélienne et ses puissants alliés médiatiques ont lancé une nouvelle campagne contre Nétanyahou, accusé de s’être “allié aux kahanistes”.. En réalité, il n’y a là aucune alliance, mais le simple jeu normal de la politique, qui a amené les partis de la droite religieuse à s’unir, pour éviter de rejouer le scénario de 1992, quand la dispersion des voix de droite avait conduit à la défaite électorale, suivie par la catastrophe des accords d’Oslo.

 

Contrairement à ce qu’écrit le correspondant du journal Le Monde, faisant feu de tout bois contre Nétanyahou, celui-ci n’a pas “abattu l’interdit qui isolait les héritiers du rabbin Meir Kahane”. Cette affirmation comporte deux erreurs au moins. La première est que le parti Otsma yehoudit n’est frappé aujourd’hui d’aucun interdit par la commission électorale, ni par la Cour suprême (la même Cour qui avait invalidé la liste Kach en 1988) (2). Au contraire, son dirigeant Michaël Ben-Ari a déjà siégé à la Knesset, dans les années 2009-2013 et il s’y est fait remarquer comme un député professionnel, qui entretenait des relations amicales dans tous les partis.

 

Michael Ben Ari lors d’une interview à la Knesset

 

Quant à un prétendu interdit moral visant les héritiers du rabbin Kahana, ceux qui crient aujourd’hui au scandale et prétendent incarner la “conscience morale” de la politique sont restés étonnamment muets, lorsque des députés arabes soutenaient ouvertement les attentats du Hamas et le Hezbollah au sein même de la Knesset… Rappelons que lorsque la députée Zoabi monta à bord du Marmara, navire affrété par une organisation terroriste turque proche des Frères musulmans, et que la Knesset vota la levée de son immunité parlementaire, le procureur de l’Etat décida en 2011 de clore l’enquête la visant. En 2014, elle fit l’éloge des terroristes assassins de trois adolescents israéliens. La commission électorale décida de l’exclure des élections à la Knesset de 2015, décision qui fut annulée par la Cour suprême (3).

 

L’ex députée Hanin Zoabi - un soutien ouvert aux terroristes et aux assassins


 

3) L’intérêt supérieur de la nation

 

En fin de compte, l’électorat israélien, dans son immense majorité, n’est pas dupe des argumentations juridiques et morales tendancieuses. Il sait bien que la question véritable, la seule qui importe, est de savoir si Nétanyahou est digne de rester en fonction, et si un autre candidat valable est en mesure de le remplacer. A cet égard, la réponse demeure aujourd’hui la même qu’il y a six mois ou trois ans. Nétanyahou est - de loin - le seul candidat qui peut aujourd’hui diriger Israël. Ses accomplissements politiques et diplomatiques en font un des meilleurs Premiers ministres qu’a connus Israël depuis 1948. Comme l’écrit avec clairvoyance Caroline Glick, il existe un écart considérable entre l’image de Nétanyahou véhiculée par les médias israéliens et sa personnalité véritable.

 

C’est en effet Binyamin Nétanyahou qui a “transformé Israël en puissance économique et militaire” et a utilisé cette puissance économique pour “asseoir une nouvelle stratégie diplomatique” qui a permis le “retour d’Israël en Afrique, après quarante ans d’absence” sur le continent noir. Nétanyahou, conclut Glick (4), est le “dirigeant le plus important qu’a connu Israël depuis Ben Gourion” et aussi le plus sous-estimé. Le principal reproche qu’on peut lui faire aujourd’hui, alors que son destin politique et celui d’Israël sont en jeu, à quelques semaines des élections, est de n’avoir jamais préparé sa succession, préférant écarter tous ceux qui pouvaient s’épanouir et grandir dans son entourage.

Pierre Lurçat

 

(1) https://www.jpost.com/Israel-News/Alan-Dershowitz-publishes-open-letter-to-A-G-defending-Netanyahu-581888 C’est moi qui souligne.

(2) Au moment où nous écrivons ces lignes, la Commission électorale a validé la candidature de Michael Ben Ari, après que  le procureur de l’Etat se soit exprimé en faveur de l’invalidation de sa candidature.

(3) Dans la même décision, la Cour suprême autorisa le député de droite Baruch Marzel à se présenter.

(4) http://carolineglick.com/considering-netanyahus-transformational-leadership/

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L’espion du Shin Bet, mon mari qui ne m’aimait pas, Par Jacob MAGID

March 7 2019, 08:11am

Posted by Jacob MAGID

Avishai Raviv

Avishai Raviv

Un témoignage glaçant sur la réalité de la "section juive" du Shin Bet. A lire et à méditer. La "section juive" (qui rappelle la tristement célèbre Yevsektsia...) doit être supprimée. P.L

 

À l’automne 1986, Riki Eyal et son futur mari passaient un tête-à-tête sur la plage de Tel Aviv lorsque celui-ci lui a posé une question étrange.

« Si tu savais que quelqu’un était un informateur du Shin Bet, tu l’épouserais ? » demanda Amit Amit (ce n’est pas son vrai nom). Il se référait spécifiquement aux personnes recrutées par la division dite juive du service de sécurité pour recueillir des renseignements sur les ultra-nationalistes israéliens.

« Bien sûr que non, répondit Eyal en toute honnêteté, se demandant si son fiancé testait sa loyauté envers la cause des militants d’extrême droite, dont beaucoup étaient ciblés par le Shin Bet dans leur implantation à Kiryat Arba.

La conversation a rapidement changé de sujet. Il faudra de nombreuses années avant qu’elle ne réfléchisse à nouveau à la question.

« Malheureusement, ma réponse n’avait servi à rien », a déclaré Eyal, 52 ans, dans une récente interview accordée au Times of Israel depuis sa maison d’Arad, dans le sud du pays. « Le Shin Bet l’avait déjà recruté, et il travaillait comme informateur ».

Riki Eyal se tient devant la porte de sa maison à Arad, en janvier 2019. (Johanna Chisholm/Times of Israel)

Quatre ans plus tard, Amit, dont le vrai nom est interdit de publication, a révélé à sa femme qu’il faisait partie du Shin Bet et a promis de quitter l’agence. En réalité, cependant, il n’est pas parti et a continué à recevoir des paiements secrets pour son travail du Shin Bet – des fonds qu’il n’a jamais partagés avec sa famille.

En 2001, Eyal s’est séparé d’Amit, et ils ont divorcé par la suite. Mais au cours des quelque 15 années qu’ils ont passées ensemble, elle a subi des mauvais traitements sous diverses formes et a élevé sept enfants dans la pauvreté la plus totale, a-t-elle raconté.

Son histoire est une étonnante saga de souffrance et de subterfuge, ce dernier étant quelque chose que le Shin Bet justifierait sans doute comme essentiel aux raisons d’État dans sa lutte contre le terrorisme juif. Mais pour Eyal, ce « plus grand bien » s’est traduit par le fléau de sa vie et de celle de sa famille.

L’agence de renseignement a-t-elle spécifiquement ordonné aux informateurs de se marier avec des habitants de communautés telles que Kiryat Arba afin de recueillir des renseignements ? Le Shin Bet dit que non. Mais le service de sécurité était-il conscient de la destruction des familles causée par la tromperie d’agents comme Amit ? Eyal affirme que la réponse est un oui sans équivoque.

Eyal a raconté son histoire pour la première fois en 2004, mais ce n’est que maintenant qu’elle commence à prendre de l’importance grâce à un documentaire présenté le mois dernier par le radiodiffuseur public Kan. Après avoir interviewé Eyal, le Times of Israel a contacté Amit pour tenter d’entendre sa version. Bien qu’il ne nie pas avoir travaillé comme informateur, il a raccroché le téléphone avant que d’autres questions ne puissent lui être posées.

Eyal, qui conduit maintenant un taxi pour essayer de rembourser les dettes laissées par Amit, n’avait pas grand-chose à dire sur la « misère » de son mariage, mais elle a quand même dit très clairement que ses reproches allaient bien au-delà de son ex-mari – jusqu’au sommet du service de sécurité qui l’avait recruté pendant son service militaire.

« Le sous-fifre ne m’intéresse pas. Je veux le commandant », dit-elle fermement. « Mon ex-mari n’était qu’un pion dans tout ça. Ils ont tout dirigé et étaient pleinement conscients de notre situation à la maison ».

Selon Eyal, l’agence a ciblé Kiryat Arba, une implantation à l’idéologie bien ancrée près de Hébron, et savait à tout le moins que ses informateurs épouseraient des résidentes sans révéler à leurs épouses qu’ils travaillent pour le Shin Bet. Lorsqu’elle a essayé de divorcer d’Amit après avoir découvert la vérité au sujet de son travail secret, le Shin Bet a mis le couple en consultation matrimoniale « bidon » où elle a subi des pressions pour que la relation se poursuive.

Des policiers arrêtent un juif orthodoxe soupçonné d’incitation à la violence après avoir brandit une affiche de l’extrémiste de droite Meir Kahane, dans l’implantation juive de Kiryat Arba, en Cisjordanie, le 3 mars 2007. (Michal Fattal/Flash90)

En 2004, elle a poursuivi le Shin Bet en dommages-intérêts, réussissant finalement à obtenir une petite somme – « des cacahuètes par rapport à ce que mes enfants et moi avons vécu. Ils avaient une machine bien huilée d’avocats et nous avons été contraints d’accepter ».

Environ une décennie s’est écoulée depuis la conclusion de l’accord, et Eyal dénonce toujours le Shin Bet, une organisation largement considérée par les Israéliens comme l’un des piliers de la sécurité de l’Etat. « Ils ont ruiné ma vie. Les dommages émotionnels et financiers me suivent encore aujourd’hui », dit-elle. « Ce qu’ils ne réussiront jamais à faire, cependant, c’est me faire taire ».

Pour Eyal, il ne fait aucun doute que le Shin Bet a énormément bénéficié de l’intégration complète d’Amit dans l’implantation de Kiryat Arba, où elle s’était installée quelques mois seulement avant de le rencontrer.

« J’ai vécu un mensonge », a ajouté Eyal. « Je n’étais pas seulement mariée à un homme que je ne connaissais pas, mais il a amené avec lui – chez moi – une organisation qui m’a exploitée de la manière la plus cynique qui soit ».

De plus, Eyal affirme que son histoire est loin d’être unique et qu’il y a des « dizaines » d’autres femmes qui, à leur insu, étaient et sont mariées à des hommes qui travaillent pour recueillir des renseignements sur leurs voisins, amis et même famille.

Le service de sécurité, ainsi que d’anciens agents qui ont pris la parole pour sa défense, ont déclaré, en réponse aux plaintes d’Eyal, qu’elle avait épousé Amit, et non le Shin Bet, et que ses reproches étaient mal dirigés quant à ses expériences passées. De plus, ont-ils fait valoir, le cas d’Eyal était une exception, une histoire très différente de celle vécue par la plupart des familles dans lesquelles un conjoint est employé par l’agence de renseignement.

 

L’agence a investi des ressources considérables dans la lutte contre le terrorisme juif à Kiryat Arba, qui a servi en quelque sorte de plaque tournante pour le Jewish Underground, au début des années 1980. Le groupe a été démasqué en 1986 après que le Shin Bet a intercepté une tentative des membres du groupe d’incendier cinq bus arabes à Jérusalem-Est. Quinze membres du groupe, au nombre de 29 au total, ont été condamnés et ont purgé des peines de prison. L’un des dirigeants du groupe fondamentaliste était Moshe Livni, un résident de Kiryat Arba.

En 1984, les forces de sécurité ont fait une descente dans la ville et ont trouvé une cache d’armes militaires et d’explosifs que le Jewish Underground avait l’intention d’utiliser pour faire sauter le Dôme du Rocher. Dix ans plus tard, Baruch Goldstein, médecin et résident de Kiryat Arba, massacrera 29 Palestiniens en prière au Tombeau des Patriarches à Hébron, non loin de là.

Riki Eyal (à gauche) pendant son mariage avec Amit (nom fictif) en février 1987. (Autorisation)

Ciblée depuis le début ?

Eyal a rencontré Amit peu après son arrivée à Kiryat Arba au début de 1986. Elle avait 19 ans et il avait trois ans de plus. Elle était amoureuse d’un autre jeune homme à l’époque, mais il avait mis fin à la relation après trois ans.

« J’avais le cœur brisé quand je suis arrivé à Kiryat Arba et je suis sûr qu’Amit le savait. Il en a peut-être même profité », suppose Eyal.

Elle parlait sur un ton constamment défensif, et ses sourcils bruns et fins se fronçaient souvent sous sa frange en se souvenant des détails précis de son passé. Son pull en laine bleue se fondait avec le canapé du salon où nous étions assis.

Eyal raconte une conversation qu’elle a eue il y a quelques années avec son premier petit ami, qui s’est demandé à haute voix si les deux avaient été ciblés par Amit. Bien qu’Eyal ait refusé de révéler l’identité de son petit ami, elle a déclaré qu’il avait été l’un des trois adolescents recrutés par le militant d’extrême droite Yoel Lerner pour une opération visant à faire sauter le Dôme du Rocher. Lerner a été arrêté et envoyé en prison, tandis que les trois mineurs qu’il a enrôlés ont reçu une tape sur les doigts et ont été renvoyés chez eux sans être punis.

Eyal avait grandi dans la même rue que Lerner, et habitaient en face l’un de l’autre dans la Vieille Ville de Jérusalem et passait régulièrement du temps avec sa famille. Elle a également fait partie pendant une brève période du mouvement de jeunesse Hashmonaïm, qui était influencé par l’idéologie du rabbin Meir Kahane. Le parti d’extrême droite Kach du rabbin a été interdit en Israël en vertu de lois antiterroristes dans les années 1980.

Cependant, Eyal a rejeté catégoriquement l’idée qu’elle avait été radicalisée, expliquant que son lien avec les ultra-nationalistes découlait de son intérêt pour un garçon qu’elle aimait.

Yoel Lerner, 63 ans, lit chez lui dans la Vieille Ville de Jérusalem, le 7 septembre 2004. (AP Photo/Lefteris Pitarakis)

Bien qu’elle souffrait d’avoir été éconduite par son premier amour, elle a admis avoir été séduite par Amit, qui ne ressemblait pas aux autres garçons arrivant dans le village pour étudier à la yeshiva toute proche.

« Il avait de longs cheveux bouclés, une boucle d’oreille et un aspect très mature », se souvient Eyal.

Comme elle le dit, Amit a poursuivi cette « adolescente encore sous le choc » et les deux se sont fiancés seulement trois mois après leur rencontre – ce qui n’est pas rare pour les couples de la communauté religieuse dans laquelle ils vivaient.

Le couple s’est marié en février 1987, bien que la propre mère d’Eyal n’ait pas assisté au mariage. « Elle ne l’approuvait pas du tout. Elle sentait que quelque chose n’allait pas, mais était incapable de le dire avec précision », se souvient sa fille.

« Ne pose pas de questions »

Eyal a dit qu’à l’époque, tout ce qu’elle désirait, c’était de pouvoir construire un foyer et fonder une famille « comme tout le monde ».

Neuf mois après son mariage, elle a donné naissance à son premier enfant. Son deuxième a suivi un an plus tard.

Et pourtant, au fur et à mesure que la famille s’agrandissait, ce dont elle se souvenait le plus, c’était « un sentiment de solitude totale ».

Selon Eyal, Amit n’était presque jamais à la maison. « Il disparaissait pendant des heures et des heures, parfois des jours entiers, sans dire où il allait ».

Quand elle commençait à poser des questions, Amit lui donnait des réponses vagues sur le fait qu’il était occupé au travail. « Mais l’argent ne rentrait pas ! » déplora Eyal.

Il n’a pas fallu longtemps avant que des questions innocentes sur ses allées et venues ne commencent à agacer profondément Amit, et bientôt la seule réponse qu’elle obtenait de lui a été un ferme : « Ne pose pas de questions ».

Alors qu’il y avait beaucoup de choses qu’elle ignorait sur son mari, elle comprit qu’il traînait dans les cercles les plus « extrémistes » de Kiryat Arba.

Riki Eyal photographiée vers 1993. (Autorisation)

« Je sais qu’il s’est lié d’amitié avec de jeunes militants qui ont été arrêtés par la suite. Je sais qu’il a quitté la maison et quand il est rentré le matin, il y avait un reportage à la radio sur l’incendie du champ d’un Arabe à Halhoul », a expliqué Eyal, faisant référence à un village palestinien adjacent à Hebron.

La « révélation »

Alors qu’ils étaient mariés depuis presque trois ans, Amit est rentré un jour à la maison et a dit à sa femme qu’ils avaient une réunion à laquelle ils devaient assister à Jérusalem.

Deux hommes les attendaient lorsqu’ils sont arrivés à leur chambre d’hôtel, et Eyal a compris plus tard qu’ils étaient les responsables du Shin Bet d’Amit.

Ils saluèrent chaleureusement Eyal et commencèrent immédiatement à faire l’éloge de son mari. « Il protège notre peuple. Il veille à ce qu’il ne soit pas en danger », lui ont-ils dit à plusieurs reprises se souvient-elle.

Selon Eyal, les mots « Shin Bet » n’ont jamais été prononcés pendant la réunion. Ce que les agents ont dit au couple, c’est qu’il leur était interdit d’avoir de l’argent sur leur compte bancaire, pour ne pas éveiller les soupçons de leurs voisins.

Un Israélien armé tient un enfant dans les bras dans l’implantation de Kiryat Arba, en Cisjordanie, le 3 mars 1994, en attendant qu’un bus les emmène à Jérusalem. (AP Photo/Eyal Warshawsky)

C’était au plus fort de la Première Intifada et, tout en essayant de mettre fin au terrorisme palestinien contre des cibles israéliennes, le Shin Bet travaillait également avec des dizaines d’informateurs juifs dans toute la Cisjordanie pour recueillir des renseignements sur d’éventuelles attaques de représailles des Juifs contre des Palestiniens.

« Puis, il y a eu une intense atmosphère de méfiance à Kiryat Arba. Tout le monde soupçonnait son voisin d’être un informateur du Shin Bet », se souvient Naftali Werzberger, un ancien résident de l’implantation et avocat qui a par la suite représenté Eyal dans sa plainte contre le service de renseignement.

A l’époque, Kiryat Arba comptait environ 3 000 habitants, laïcs et religieux, mais ce dernier groupe dominait la cité urbaine et comptait des militants nationalistes radicaux recherchés par le Shin Bet pour leurs activités terroristes contre les Palestiniens en réponse aux attaques terroristes meurtrières visant les Israéliens. Lors d’une de ces attaques, en 1980, six étudiants de la yeshiva ont été abattus alors qu’ils regagnaient Kiryat Arba en revenant du lieu saint du Tombeau des Patriarches à Hébron.

M. Werzberger a déclaré qu’un certain nombre de membres de la communauté étaient au courant, avec une grande certitude, du travail d’Amit en tant qu’informateur. « Mais il s’agissait encore de rumeurs et nous ne savions pas ce qui se passait derrière des portes closes. Il ne revenait à personne de s’immiscer dans la vie du couple ».

Eyal a dit qu’elle avait quitté la réunion à Jérusalem profondément perturbée, mais qu’elle ne comprenait toujours pas pleinement la signification et les ramifications de qui étaient ces hommes et ce qu’ils lui demandaient.

À ce moment-là, la jeune mère avait de la difficulté à nourrir ses enfants, comptant beaucoup sur des colis de produits de base que les voisins laissaient périodiquement à leur porte.

Peu après avoir eu son troisième enfant en 1990, son état mental a commencé à se détériorer. « Je n’avais personne à qui parler de ce que je vivais. Que pouvais-je faire ? Se pointer chez une amie et lui dire que je pense que mon mari est un informateur du Shin Bet ? »

La solitude l’a menée à faire une tentative de suicide. « Je me suis mis une arme à feu dans la bouche mais à chaque fois que j’essayais d’appuyer sur la gâchette, ma fille commençait à gémir dans la pièce à côté », se rappelle Eyal.

Alors qu’elle raconte les points les plus obscurs de son mariage, sa voix s’affaiblit et son corps se balance doucement, comme malgré elle. Elle a les mains agrippées à ses genoux. L’intensité de ces souvenirs semble l’empêcher de seulement s’enfoncer sur le canapé au cours de cet entretien qui aura duré trois heures et demi.

Eyal a ensuite demandé le divorce à son époux. Amit a initialement accepté, revenant au domicile familial le lendemain et disant à son épouse qu’ils iraient plutôt consulter une conseillère conjugale.

Dvir Kariv, ancien agent de la Division juive [Jewish Division] du Shin Bet de 1994 à 2012, confirme que le service de sécurité finance des consultations avec des conseillers conjugaux pour ses informateurs lorsque c’est nécessaire, stipulant que ces conseillers travaillent indépendamment de l’agence. « C’est dans l’intérêt du Shin Bet que les relations conjugales là-bas soient saines », explique-t-il.

Eyal rejette ce point de vue. « Ils ne se sont intéressés qu’à la poursuite de mon mariage, aucunement de mon bien-être », a-t-elle dit.

La jeune mère attendait alors son quatrième enfant. Le conseiller lui dit qu’une grossesse n’est pas le moment souhaitable pour évoquer des sujets graves comme l’est le divorce.

‘Est-ce que tu veux que je quitte le Shin Bet ?’

Vers la fin des années 1990, Amit s’est approché d’Eyal en lui soumettant la proposition d’installer la famille au sein de l’implantation de Susya, dans le sud de la Cisjordanie, où il serait gardien de la sécurité sur un site archéologique situé aux abords de la communauté.

Eyal a d’abord refusé, ne souhaitant pas vivre sur une colline isolée, à l’écart du reste de l’implantation.

Riki Eyal à son domicile d’Arad, au mois de janvier 2019 (Crédit : Johanna Chisholm/Times of Israel)

« Est-ce que tu veux que je quitte le Shin Bet ? », a alors riposté Amit. C’était la première fois que son mari prononçait ses mots devant elle.

Espérant que ce déménagement offrirait à la famille une opportunité de changer radicalement d’existence, Eyal a rapidement répondu : « Oui ».

Et ils se sont installés à Susya – mais pas, comme elle le croyait initialement, en raison de son départ du Shin Bet. « Ce que j’ai appris seulement récemment, c’est qu’il a voulu partir de Kiryat Arba parce que sa couverture avait été percée à jour », a expliqué Eyal. « Mais à ce moment-là, il m’a dit qu’il partait du Shin Bet et je l’ai cru. »

Au cours des trois années qui ont suivi, la famille a parcouru les implantations du sud de la Cisjordanie en proie à une situation financière précaire.

Tandis qu’Eyal aura essayé plusieurs formes de contraceptifs – pilules et implants compris – et qu’elle aura même procédé à un avortement manqué, elle n’a jamais pu s’empêcher de tomber enceinte. « Après mon deuxième enfant, toutes les grossesses que j’ai eues sont arrivées alors que je prenais une forme ou une autre de contraceptif ».

Lorsqu’elle a donné naissance à son quatrième enfant, a raconté Eyal, elle a supplié les infirmières de l’emmener loin d’elle. « Le pauvre ! Qu’est-ce que j’allais faire avec lui ? Nous vivons dans une minuscule caravane et nous traversions un hiver glacé ».

« Mais les médecins et mon mari ont dit que tout irait bien. Bien sûr, cela n’a pas été le cas ».

Il y avait une atmosphère intense de soupçons à Kiryat Arba à cette époque. Chacun soupçonnait son voisin d’avoir été un informateur au Shin Bet.

Elle partage un autre souvenir douloureux : Le jour où l’une de ses petites filles, encore jeune, s’est approchée, demandant un morceau de fruit. « J’ai dû la regarder dans les yeux et lui dire que je n’avais rien à lui donner. C’est un sentiment que je ne pourrai jamais oublier ».

Au cours de cette période, Eyal raconte qu’elle recevait encore régulièrement des appels téléphoniques du responsable d’Amit, qui souhaitait lui parler. Elle trouvait étrange que l’agent soit encore en contact avec ce dernier alors qu’il avait cessé de travailler au service de sécurité, mais elle transmettait toutefois les messages qu’il laissait à son époux.

« J’étais tellement naïve alors, c’en était presque criminel », réfléchit-elle. « En même temps, je ne peux pas juger – et je ne jugerai pas – celle que j’étais alors ».

« Je grandissais et j’élevais des enfants en même temps. Ma vie entière se passait dans les couches, les biberons, je ne dormais pas la nuit, j’allaitais et je donnais les soins pendant la journée. Je n’avais pas le temps de penser aux agents du Shin Bet ou aux conspirations », dit-elle rapidement.

Une Palestinienne et ses enfants recherchent de la nourriture et des métaux dans les déchets de l’implantation de Kiryat Arba, le 15 juillet 1996 (Crédit : Nati Shohat Flash90)

En 1993, Eyal et son mari ont déménagé avec leurs cinq enfants à Nehusha, une petite communauté religieuse du centre du pays. Avant leur arrivée, le comité des admissions de la ville est allé voir Eyal pour lui faire part de certaines préoccupations concernant le passé de son mari.

« Je leur ai innocemment assuré qu’il n’avait été employé par l’agence que pendant quelques années, mais qu’il l’avait quitté depuis un certain temps déjà. »

La famille a été acceptée dans la communauté.

Un an plus tard, un militant ultra-nationaliste nommé Yehoyada Kahalani s’est caché chez eux pendant plusieurs jours, sans aucune explication de la part d’Amit, qui l’avait fait venir.

Peu après le départ de Kahalani, Eyal a appris aux informations que lui et son frère avaient été arrêtés pour tentative de meurtre sur un Palestinien aux abords de Jérusalem.

Eyal a commencé à assembler les pièces du puzzle, réalisant peu à peu que son mari était toujours impliqué dans le Shin Bet, mais que cette idée ne s’était toujours pas concrétisée dans sa tête.

Tout s’écroule entièrement

En 2001, après que le couple a eu son septième enfant, ce qui restait du mariage s’est effondré.

« Le comportement agressif d’Amit a tourné à la violence contre moi et les enfants », dit Eyal. « J’étais une femme battue. Pas dans le sens où il me battait tous les jours, mais sous toutes ses formes – physique, émotionnelle et financière ».

Un jour, Amit s’est mis tellement en colère pendant qu’il conduisait qu’il a accéléré en direction d’une falaise déserte en Cisjordanie, est sorti du véhicule pendant qu’il oscillait sur le bord et en laissant sa femme et sa jeune fille assises à l’intérieur.

J’étais si naïve à l’époque, c’était presque criminel. En même temps, je ne peux pas et ne veux pas juger la personne que j’étais alors

« J’ai raconté cette histoire à une conseillère juridique de l’ONG Yad Sarah, en lui demandant si elle considérait que c’était de la violence de la part d’Amit. Elle m’a regardé en état de choc et m’a crié : « Vous me parlez de violence ? Ce que vous décrivez est une tentative de meurtre ! » Eyal a admis qu’elle n’avait pas réalisé le degré de violence que sa famille subissait.

Peu de temps après, cette mère de sept enfants, âgée de 34 ans à l’époque, a décidé qu’elle ferait un test une fois pour toutes pour déterminer si les problèmes de son mariage avaient quelque chose à voir avec elle. « C’était un jeudi soir et j’ai décidé de nettoyer la maison jusqu’à ce qu’elle soit absolument propre. J’ai fait prendre un bain aux enfants et je les ai préparés pour aller au lit tôt. »

 

LIRE LA SUITE SUR https://fr.timesofisrael.com/lespion-du-shin-bet-mon-mari-qui-ne-maimait-pas/?utm_source=A+La+Une&utm_campaign=a-la-une-2019-03-06&utm_medium=email

 

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Préparation à l'examen d'agent immobilier de mai 2019

March 5 2019, 17:54pm

Posted by Pierre Lurcat

Formation à l’examen d’agent immobilier israélien

Session mars-avril 2019 / Israël-France

La prochaine formation à l'examen d'agent immobilier aura lieu entre mars et avril, en vue de l’examen d’agent immobilier israélien qui se tiendra le 5 mai 2019. Au terme de la formation et après avoir réussi l’examen, les élèves pourront obtenir la carte professionnelle permettant d’exercer la profession d’agent immobilier (metave’h) en Israël, dans une agence ou à leur compte. 

J’ai mis en place cette formation depuis 2006 en Israël, et j’ai préparé plusieurs centaines d’Olim francophones (avec un taux de réussite dépassant 75%) à l’examen organisé par le ministère israélien de la Justice, seul habilité à délivrer la carte professionnelle. Important : il n’est pas nécessaire d’être israélien pour travailler comme agent immobilier en Israël !

Niveau d'hébreu exigé

Cet examen est un examen théorique portant sur le droit israélien, qui a lieu 4 fois par an en Israël. Il s’agit d’un QCM (questionnaire à choix multiple), ce qui signifie qu’il n’est pas indispensable de savoir écrire en hébreu. Il n'est pas non plus nécessaire d'avoir un très bon niveau de lecture pour suivre le cours. Un niveau moyen est suffisant, à condition de fournir un travail personnel en plus des cours de préparation.

Pour plus d’informations, n’hésitez pas à me contacter par email pierre.lurcat@gmail.com ou par téléphone au 050 286 5143 ou 06 80 83 26 44  (France).

       

                           Pierre Lurçat, avocat au barreau israélien,

spécialiste de la formation aux examens de droit

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Le Churchill d’Angleterre et le Churchill d’Israël, par Pierre Lurçat

March 1 2019, 15:12pm

Posted by Pierre Lurçat

Le Churchill de "Darkest Hours"

Le Churchill de "Darkest Hours"

 

לג'ודית

 

Tout homme naît et se forme pour une grande heure de sa vie. Sa plus belle heure a été la plus belle de l’Angleterre. Dans le granit des âges et l’amour des générations, il apparaîtra prophète d’Angleterre, prophète de la plus belle heure d’Angleterre, Churchill d’Angleterre.

 

Albert Cohen *

 

A l'occasion de la sortie sur les écrans israéliens du film de Joe Wright sur Winston Churchill, un ancien dirigeant politique israélien était invité sur les ondes de Galei Tsahal pour commenter le film. On  comprenait en l’écoutant qu’il s’identifiait au héros de la Deuxième Guerre mondiale, sur les épaules duquel a reposé le sort du monde pendant les jours fatidiques de 1940, ces “heures sombres” durant lesquelles s’est joué l’avenir de notre humanité. Même si la comparaison n’était pas, dans son cas, justifiée, son propos était intéressant et révélateur. Car, si le film “Darkest hours” a été salué par la critique israélienne, ce n’est pas seulement pour ses qualités cinématographiques - et notamment pour les prouesses de son acteur principal, Gary Oldman - mais également en raison de son message politique.

 

Le film n’est pourtant pas exempt de défauts. L’image qu’il donne du dirigeant du monde libre pèche ainsi parfois par une insistance excessive sur les défauts de l’homme privé : irascible, incapable de se contenir, aimant la boisson… On a parfois l’impression que Wright a voulu rabaisser quelque peu la stature de son personnage, comme s’il avait eu peur qu’on l’accuse de lui dresser une nouvelle statue. Mais en réalité, cela aussi participe de la vérité de celui que le réalisateur a voulu dépeindre comme un homme, et pas seulement comme le héros des livres d’histoire que chacun connaît et admire.

 

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Nous avons en effet naturellement tendance à croire que le destin de Churchill était tracé d’avance, du palais de Blenheim où il est né en 1874, jusqu’au palais de Westminster et au 10 Downing Street… Cette illusion rétrospective, propre à celui qui contemple l’histoire, nous fait oublier qu’aucun homme n’est d’emblée lui-même ; le drame de la vie est précisément, comme le dit lumineusement Ortega Y Gasset, cette “lutte frénétique avec les choses pour obtenir d’être effectivement celui que nous sommes en projet” (1).

 

Si Churchill a réussi à devenir Churchill, ce fut au prix de cette “lutte frénétique”, qui l’opposa non seulement à l’opinion publique - au début hostile à la guerre, comme celle des Etats-Unis - et à la classe politique, où il faisait figure d’outsider et d’excentrique, jusque dans les rangs de son propre parti - mais aussi au War Cabinet qui était, comme le montre bien le film de Wright, très largement acquis aux thèses pacifistes de Lord Halifax. Or c’est sur ce sujet précisément - celui de l’illusion mortelle du pacifisme - que réside sans doute l’intérêt le plus brûlant du film. Entre Neville Chamberlain, qui promettait à ses compatriotes “la paix pour notre temps”, et Churchill qui ne leur offrait que “du sang et des larmes”, l’histoire a donné raison au second, et cette leçon est aussi valable aujourd’hui qu’hier.

 

“Peace in our time” : Quelles leçons pour Israël ?

 

Le testament politique de Winston Churchill peut se résumer ainsi : on ne négocie pas avec un régime voué à votre destruction, ou pour reprendre son langage imagé : “On ne peut pas négocier avec un tigre, lorsqu’on a la tête enfoncée entre ses machoires”. Cela valait pour l’Angleterre face à l’Allemagne nazie en 1940, et cela vaut tout autant pour Israël aujourd’hui, face à l’Iran des ayatollahs, au Hamas ou à l’Autorité palestinienne.

 

Comme l’écrivait un homme politique israélien en septembre 1993 - à la veille de la signature des accords d’Oslo - dans les colonnes du New York Times, “Neville Chamberlain avait cru acheter la ‘paix pour notre temps’ en cédant la Tchécoslovaquie à Hitler, dans un accord fondé sur la “paix contre les territoires”. Le gouvernement d’Itshak Rabin et de Shimon Pérès a lui aussi cru acheter la paix en édifiant un état-OLP au coeur d’Israël, “menaçant les villes d’Israël”. Les accords d’Oslo, “au lieu de donner une chance à la paix, sont une garantie de tension accrue, de terrorisme à venir et, en fin de compte, de guerre”.

 

Le dirigeant qui écrivait ces lignes prémonitoires en 1993 s’appelle Binyamin Nétanyahou (2). L’avenir lui a donné entièrement raison (ce qui ne l’a pas empêché de manquer succomber lui aussi, à un moment de son parcours politique, aux sirènes de la “paix pour notre temps” - lors des accords de Hébron en janvier 1997). Mais le Nétanyahou de 2018 n’est pas celui de 1997. Il a gagné en maturité, en lucidité et aussi en profondeur de vue. Celui que les médias s’obstinent avec malice à décrire comme un Premier ministre avide de pouvoir et corrompu est en réalité un dirigeant obsédé par le bien de son pays et par les dangers qui le menacent. C’est de son père, l’historien Bentsion Nétanyahou (3), qu’il a hérité cet engagement.

 

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Avec son père

 

La constance avec laquelle Binyamin Nétanyahou dénonce le péril iranien depuis des années n’a d’égal que celle avec laquelle Churchill dénonçait Hitler en 1940, à une époque où nul ne connaissait encore les horreurs de la Shoah. Les temps ont certes changé à bien des égards, mais le danger du totalitarisme demeure tout aussi actuel. Israël a depuis trop longtemps suivi la politique des concessions à ses ennemis et de la “paix en notre temps” initiée à Olso et avant. Mais les illusions mortelles du pacifisme se sont dissipées dans le fracas des attentats et des espoirs de paix trompeurs. Israël n’a pas besoin aujourd’hui de promesses fallacieuses à la Chamberlain, mais de dirigeants courageux et lucides : en un mot, d’un “Churchill d’Israël”.

Pierre Lurçat


 

* Churchill d’Angleterre, Lieu commun 1985.

(1) José Ortega y Gasset, Le Spectateur, Rvages Poche 1992.

(2) http://www.nytimes.com/1993/09/05/opinion/peace-in-our-time.html

(3) Voir Bentsion Nétanyahou (1909-2012) : Historien, militant sioniste et… père de Premier ministre

 

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Prochaine formation à l'examen d'agent immobilier à Jérusalem / Tel-Aviv

Formation à l’examen d’agent immobilier israélien

Session mars 2018 – Tel Aviv / Jérusalem

Les prochaines formations à l'examen d'agent immobilier auront lieu du 14 au 21 mars à Tel-Aviv *, en vue de l’examen d’agent immobilier israélien qui se tiendra le 24 avril 2018. Au terme de la formation et après avoir réussi l’examen, les élèves pourront obtenir la carte professionnelle permettant d’exercer la profession d’agent immobilier (metave’h) en Israël, dans une agence ou à leur compte. * Une formation est également prévue à Jérusalem, me contacter. 

Pour plus d’informations, n’hésitez pas à me contacter par email pierre.lurcat@gmail.com ou par téléphone au 050 286 5143 ou 06 80 83 26 44  (France).

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Message de Binyamin Netanyahou à la Nation après sa mise en examen (texte intégral)

March 1 2019, 08:01am

Message de Binyamin Netanyahou à la Nation après sa mise en examen (texte intégral)

“J’ai rencontré hier à Moscou le president russe Vladimir Poutine et je lui ai dit que nous continuerons à agir avec détermination contre l’Iran et sa tentative de s’installer durablement en Syrie. Je remercie mon ami le président Poutine qui a accepté mes propos.

Lorsque je suis revenu en Israël j’ai entendu les déclarations du président Trump. Il a salué je cite: ‘le leadership fort, intelligent et déterminé avec lequel je dirige l’Etat d’Israël’. Je remercie mon ami Donald Trump pour ses paroles et pour son soutien sans faille à Israël. Ce lien particulier avec ces deux grandes puissances ne va pas de soi. Je le construis depuis de longues années et il nous aide à assurer notre avenir et notre sécurité. A protéger notre pays. La politique que je mène avec mes amis capables et expérimentés du Likoud nous a permis qu’Israël vive la meilleure décennie de son histoire. Dans l’économie, dans la politique étrangère, dans la sécurité et dans tous les domaines. Nous avons trannsformé Israël en puissance mondiale montante mais sans pour cela faire des concessions dangereuses, sans baisser la tête. Nous avons fait cela en renforçant constamment notre puissance.

La gauche sait très bien qu’avec de pareils succès elle ne pourra pas nous battre dans les urnes. Alors, depuis trois ans, elle se livre à une véritable persécution politique, une chasse à l’homme sans précédent dans un seul but: faire tomber le gouvernement de droite sous ma direction et de former un gouvernement de gauche dirigé par Lapid et Gantz. Ils ont exercé de constantes et lourdes pressions, je dirai presque inhumaines, sur le conseiller juridique du gouvernement afin qu’il annonce son intention de me mettre en examen sous condition d’audition alors qu’il est clair qu’il n’y a rien dans le dossier. L’objectif principal: influer sur les élections tout en sachant que ce château de cartes finira par s’écrouler après les élections. Et comme le conseiller juridique est finalement un être humain, il s’est laissé convaincre par les pressions de la gauche. Je veux vous dire qu’il s’est passé aujourd’hui quelque chose de particulièrement grave qui porte atteinte à la démocratie israélienne: pour la première fois dans l’histoire de l’Etat d’Israël, on entamne un processus d’audition peu de temps avant des élections. Chaque citoyen comprend qu’il s’agit d’un timing scandaleux destiné à faire tomber un gouvernement de droite et mettre à la place un gouvernement de gauche. Il n’y a pas d’autre explication à cette obstination à vouloir le faire maintenant, à tout prix, encore avant les élections. C’est là leur intention, en inondant la population de calomnies ridicules me concernant sans que me donner la possibilité de les réfuter avant les élections, mais seulement après. Mais n’ayez aucun doute là-dessus, je les réfuterai toutes, du début à la fin.

Il ne faut pas que cette pression influe sur les élections. Je sais que cela n’influencera pas la majorité d’entre les électeurs du Likoud, dont les médias méprisent d’ailleurs la sagesse. Mais il suffit que cela en influence une petite partie pour que cela amène la gauche au pouvoir.

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Que se passe-t-il maintenant dans les médias? Et cela va continuer! Emissions spéciales, exultations dans les studios. Je ne me souviens pas d’une époque où la gauche ait été aussi heureuse. On fabrique des dossiers de toutes pièces. On se souvient des dossiers fabriqués contre le ministre de la Justice de droite Yaakov Neeman?s héros d’Israël Rafaël Eitan ou Avigdor Kahalani. Les médias les avaient détruits et on exultait dans les studios de télévision. Et des ‘actes d’accusation détaillés’ avaient été émis contre eux. Il y avait des ‘témoins’, il y avait des ‘preuves’. Tout cela ne veut absolument rien dire. Et vous souvenez-vous comment cela s’est terminé, comme dans tant d’autres cas également? Cela s’est terminé avec rien var il n’y avait rien! Tout comme ce sera le cas pour moi.

Il y a encore quelque chose que je tiens à vous dire et que je n’ai pas encore dites. Dans cette chasse à l’homme contre moi, ils n’ont renoncé à aucun moyen. Ils se sont acharnés et s’acharnent encore contre mon épouse, contre mon fils. Ils ont fait vivre un enfer à ma famille depuis trois ans. Ils ont commencé en tentant de nous coller, à mon épouse et à moi-même six cas de corruption. C’est un château de cartes qui s’écroule. Maintenant déjà, avant l’audition, avant même que je ne prenne la parole ou que présente les documents qui réfutent tout cela, cinq accusations sur les six ont déjà été balayées. Et cela va continuer, les dossiers seront vides et s’évaporeront comme de la poussière. Ils s’avèreront vides lorsque je pourrai enfin être confrontés aux témoins d’Etat qui ont produits de faux-témoignages contre moi pour sauver leur peau. Ils sont d’ailleurs accusés de choses qui ne me concernent même pas. Mais on leur a dit: ‘Où vous trouvez des accusations contre Netanyahou ou c’est vous qui irez en prison. Les dossiers s’écrouleront car je ferai comparaître des dizaines de témoins qui curieusement n’ont jamais été sollicités. Ils s’écrouleront lorsque je présenterai tous les documents et protocoles qui prouvent que j’ai agi en toute légalité. Il ne restera même pas le souvenir de toutes ces accusations. Dans les dossiers fabriqués 1000, 2000 et 4000, tout est mensonger. Ils ont transformé tout ce qu’ai fait ou dit en infraction pénale. Il y a tant d’exemples, mais je les fournirai lors de l’audition.

Le Prof. Alan Dershowitz, l’un des plus grands juristes au monde, a déclaré que les dossiers 1000 et 2000 sont des dangers pour la démocratie et pour l’équilibre entre le journalisme et la police, entre le gouvernement et les journalistes. Il dit que c’est un fait sans précédent dans l’histoire du droit en Israël mais aussi du droit international de considérer une couverture médiatique favorable comme une forme de corruption. Il faut que vous compreniez bien ce qu’ils entendent lorsqu’ils parlent de corruption. Ils ne parlent pas d’argent, d’enveloppes. d’espèces, ils parlent de 2,5 articles sur le site Walla parmi un océan d’articles hostiles à mon égard. Il est absurde de prétendre que j’ai pris le contrôle de Walla. Ce site a été et reste un site d’extrême gauche qui m’est très hostile. Allez sur Google et regardez par vous-mêmes. Quel est le premier dirigeant dans l’Histoire qui est accusé de corruption pour une couverture médiatique positive ? Moi, Binyamin Netanyahou, l’homme politique le plus Sali par les médias israéliens ! Il est intéressant que l’on ne fasse pas la même chose à d’autres politiciens qui ont bénéficié d’une couverture médiatique très flatteuse de la part de Yediot Aharonot en contrepartie de leur soutien à la loi de fermeture du journal Israël Hayom, ce qui aurait rapporté des millions à Noni Moses (ndlr : propriétaire de Yediot Aharonot).

Faisons maintenant un exercice de réflexion : quelqu’un peut-il m’expliquer si l’on admet qu’une couverture médiatique est de l’ordre de la corruption, pourquoi n’a-t-on jamais interrogé Yaïr Lapid à propos des dizaines d’entrevues secrètes qu’il a eues avec Noni Moses, pour le soutien de son parti à la fermeture d’Israël Hayom et la couverture médiatique élogieuse dont il a bénéficié? Je vous le dis, et essayez de me comprendre : moi qui ai stoppé cette loi, je suis mis en accusation, et eux n’ont même pas été interrogés! Le monde à l’envers! A moins que la réponse soit: une couverture médiatique constitue un acte de corruption uniquement si vous vous appelez Netanyahou!

Qu’en est-il du dossier 1000 ? Ils ont utilisé des centaines de millions de la poche des contribuables pour une enquête, et qu’ont-ils trouvé ? Des cigares, des plateaux-repas, des broutilles. Les montants ont été gonflés et ils ont compté les bouteilles de champagnes et les cigares que Miltshin a acheté pour son compte et ils ont tout mis sur le mien ! Pour l’ancien Premier ministre Olmert, qui avait reçu des stylos de luxe pour plus d’un million de shekels, de la part d’hommes d’affaires, le conseiller juridique de l’époque avait considéré qu’il n’y avait pas lieu d’ouvrir une enquête. Vous avez compris le principe : pas de Bibi, pas d’enquête ! Il y a aujourd’hui une pression énorme de la part des médias, de la gauche ainsi que de fonctionnaires juridiques afin de publier des accusations mensongères encore avant les élections.

D’après les médias, les deux procureurs qui ont adopté une ligne extrême contre moi ont été Shaï Nitzan et Liat Ben-Ari. Nouvel exercice de réflexion : comment expliquer que Liat Ben-Ari, qui a poussé le conseiller juridique à annoncer sa décision avant les électionms, avait fait stopper en 2013 les enquêtes contre Tsipi Livni en arguant qu’il s’agirait d’une ingérence dans le processus électoral? Et Shaï Nitzan, qui s’est acharné contre les hommes de droite ? Il y a une loi pour tout le monde, et une loi pour le Premier ministre Binyamin Netanyahou. Il y a des normes électorales pour tout le monde, et il y a des normes électorales pour Netanyahou et le Likoud.

Je vous le redis, citoyens d’Israël, tout ce château de cartes finira par s’écrouler. J’en suis absolument convaincu. J’en suis convaincu à 4000% ! J’ai l’intention de vous servir et de servir l’Etat d’Israël comme Premier ministre pendant de longues années encore, et ne croyez pas à toutes les manipulations. J’ai l’intention de vous servir encore longtemps, mais cela dépendra de vous et non pas de fonctionnaires, de studios de télévision, de journalistes ou commentateurs politiques. Cela dépendra uniquement de vous, citoyens d’Israël.

Ne laissez pas cette chasse à l’homme vous perturber. Ce scrutin se joue entre un parti de gauche faible avec Lapid et Gantz, avec les partis arabes et un gouvernement de droite fort sous ma direction et celle du Likoud. De très nombreux d’entre vous viennent vers nous ces derniers jours et nous disent : ‘Bibi, nous sommes avec vous et avec Sarah!’ ‘Ne craquez pas!’ Je leur réponds : ‘Je ne craquerai pas. Ils me demandent d’où je tire ma force?Alors je leur répond: ‘Je tire ma force de trois sources. De ma chère et merveilleuse famille qui est la colonne vertébrale de ma vie. Ensuite, de la certitude que ces accusations contre moi sont sans fondement et que la vérité, et enfin de vous, chers citoyens d’Israël, qui me soutenez et m’encouragez afin que je continue à diriger ce pays pour notre avenir à tous ».

Vidéo:

Lecteur vidéo
 
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Photo Tomer Neuberg / Flash 90

SOURCE https://lphinfo.com/message-de-binyamin-netanyahou-a-la-nation-apres-sa-mise-en-examen-texte-integral/

Conférence exceptionnelle le 3 mars 2019 à Tel-Aviv:


Elections israéliennes 2019: Connaître le passé, comprendre le présent et réfléchir au futur

“La contestation de l'Etat juif par les élites israéliennes”

 

9 avril 2019

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Une conférence pour tout savoir des institutions israéliennes, du sionisme politique, des grands hommes à l’origine de ce projet (Herzl, J‎abotinsky, Ben Gourion…) et de l'histoire des partis politiques israéliens de 1920 à aujourd’hui.


Une conférence animé par Pierre Lurçat, essayiste et traducteur, auteur de plusieurs essais sur le sionisme, Israël et l'islam radical.

Son dernier ouvrage "Israël, le rêve inachevé" est paru en novembre 2018 aux Editions de Paris.

Date : 3 mars 2019
Horaire : 20h - 22h
Lieu : Ulpan Neve Tzedek, 7 Lilienblum Tel Aviv


Entrée : 20 shekels


Inscriptions auprès de Déborah Pewzer : 052 67 69 746




03/03/19 - 3e conférence : “La contestation de l'Etat juif par les élites israéliennes”

 

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