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Pourquoi le 7 octobre ? Ces “Gatekeepers” qui ont ouvert la porte à l’ennemi (I), Pierre Lurçat

January 26 2024, 07:06am

Posted by Pierre Lurçat

Ami Ayalon (au centre)

Ami Ayalon (au centre)

 

Comment les “Gatekeepers”, ces gardiens de la sécurité d’Israël et ces grands soldats, se sont-ils mués en promoteurs de slogans pacifistes aussi simplistes, et presque puérils, que “c’est avec ses ennemis qu’on fait la paix” ? Et quelle est leur responsabilité dans l’échec colossal du 7 octobre ? Premier volet.

 

Le 24 janvier, alors qu’Israël pleurait et enterrait les morts du terrible accident militaire de la veille, deux Israéliens publiaient chacun une tribune dans le quotidien Le Monde, connu pour son hostilité endémique envers l’Etat juif. Le premier, Elie Barnavi, expliquait pourquoi, après s’être opposé pendant les 100 premiers jours de la guerre à un “cessez-le-feu immédiat”, il avait fini par rejoindre le camp des défaitistes, qui affirment que “la guerre s’enlise” et qu’Israël ne peut pas gagner face au Hamas. Le second, Ami Ayalon, va encore plus loin dans le défaitisme : il explique tout simplement que la victoire est impossible et qu’Israël doit “repenser le concept d’ennemi”.

 

Ami Ayalon n’est pas simplement un intellectuel comme Barnavi. Ancien commandant de la Marine, il a été le patron du Shin-Beth (service de sécurité intérieure) entre 1996 et 2000. En 2012, il a participé activement au documentaire de Dror Moreh, The Gatekeepers (“Les gardiens”), dans lequel plusieurs anciens dirigeants du Shin-Beth évoquaient leurs problèmes de conscience et donnaient leur point de vue sur le conflit israélo-arabe. Ce film, tout comme la récente interview d’Ayalon dans Le Monde, permettent de comprendre l’univers conceptuel d’une large partie de l’establishment sécuritaire israélien depuis au moins trois décennies. On y découvre ce que pensent ceux qui – plus que tout autre secteur de la vie publique en Israël – portent la responsabilité de l’échec colossal du 7 octobre.

 

A ce titre, il faut écouter et lire ce que dit Ayalon. Il incarne un visage de l’Israël laïc, de gauche et pacifiste, dont l’influence sur les décisions essentielles pour le pays est inversement proportionnelle à son poids électoral (Ami Ayalon a été membre du Parti travailliste, aujourd’hui moribond). On y découvre surtout les valeurs et le mode de pensée de ces anciennes élites qui continuent, en grande partie, à modeler la politique d’Israël. Ayalon, soldat d’élite qui a pris part à toutes les guerres d’Israël entre 1967 et la première Intifada, a commandé la prestigieuse “Shayetet”, unité d’élite de la marine. A cet égard, on peut le comparer à Ehoud Barak, Ariel Sharon, Yitshak Rabin, ou bien d’autres grands soldats qui ont “tourné casaque”, pour devenir des promoteurs de “plans de paix” tous aussi foireux les uns que les autres, des accords d’Oslo aux retraits de Gaza et du Sud-Liban qui ont installé le Hamas et le Hezbollah aux portes d’Israël.

 

Des grands soldats devenus pacifistes

 

Comment ces “Gatekeepers”, ces gardiens de la sécurité d’Israël et ces grands soldats se sont-ils mués en promoteurs de slogans pacifistes – aussi simplistes et presque puérils – que “C’est avec ses ennemis qu’on fait la paix” ? Ayalon apporte des éléments de réponse à cette question cruciale, qui interroge l’histoire récente d’Israël mais aussi son avenir. Quand le journaliste lui demande si le retrait d’une partie des troupes israéliennes de Gaza signifie un tournant dans la guerre, il lui répond : “Je crois que cette question va bien au-delà des détails de cette campagne militaire. Au fond, quelle est la situation ? Notre problème réside dans la tension entre la terreur et les droits de l’homme. Toutes les démocraties libérales sont confrontées à un conflit entre violence terroriste et droits fondamentaux”.

 

Cette réponse qui peut sembler anodine met en évidence un aspect crucial du débat intérieur israélien et de la vision du monde de cet establishment sécuritaire et militaire, dont Ayalon est la parfaite incarnation : leur incapacité de penser Israël autrement que dans le cadre conceptuel de l’Occident et de la démocratie libérale, qu’ils voudraient que l’Etat juif incarne. Ce point essentiel permet à la fois de comprendre leur attitude envers les ennemis d’Israël (“Nous renonçons donc aux droits d’une minorité dans l’idée que nous allons combattre le terrorisme. Et nous ne comprenons pas qu’un jour, sans doute, nous allons nous féliciter d’avoir tué des bad guys, mais que nous aurons perdu notre identité”) et leur vision de ce qu’est et de ce que doit être Israël.

 

En décrivant le conflit entre Israël et ses ennemis selon le modèle réducteur de l’affrontement entre les démocraties et le terrorisme, l’ancien patron du Shin-Beth montre qu’il n’a pas compris une dimension importante du conflit, qui est apparue le 7 octobre dans sa criante évidence. Le Hamas, contrairement à Al-Qaïda, n’a pas seulement voulu tuer des Juifs et porter un coup symbolique à Israël (comme les terroristes du 11 septembre). Il a voulu (et réussi de manière partielle et momentanée) envahir le territoire israélien pour le conquérir.

 

Cette dimension territoriale propre à l’islam est, paradoxalement, un aspect crucial de ce qui échappe aux “Gatekeepers” devenus pacifistes, comme à l’ensemble du “camp de la paix” israélien. Ceux qui prétendaient échanger “les territoires contre la paix” s’avèrent ainsi les promoteurs d’une vision totalement inadéquate du conflit, dont leur “impensé” occulte bien des aspects essentiels. Dans la suite de cet article, nous verrons comment cet impensé concerne également l’identité juive de l’Etat d’Israël. (à suivre…)

Pierre Lurçat

 

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Une étincelle d’hébreu : “Bé-Damayikh Hayyi” - Quand la Bible et Naomi Shemer éclairent notre quotidien, P. Lurçat

January 23 2024, 08:49am

Posted by Pierre Lurçat

Une étincelle d’hébreu :  “Bé-Damayikh Hayyi” - Quand la Bible et Naomi Shemer éclairent notre quotidien, P. Lurçat

 

 

C’est le génie de la langue hébraïque de rester toujours jeune. Elle est, pourrait-on dire, la langue antique et jeune du peuple éternel, de retour sur sa terre retrouvée. Pour illustrer ce phénomène sui generis, j’ai choisi le texte d’une chanson de Naomi Shemer, qui résonne de manière tragique avec l’actualité terrible de ce matin. “Bé-Damayikh Hayyi” est une des dernières chansons écrites par la grande Naomi Shemer. Elle porte en titre le fameux verset du prophète Ezechiel – que chaque Juif connaît au moins pour l’avoir entendu lors de la cérémonie de la Brith Mila – “Vis dans ton sang”.

 

Ce verset, rappelle Avraham Zigman dans le très beau livre qu’il a consacré à l’œuvre de Naomi Shemer[1], est la parole adressée par Dieu, par la voix du prophète Ezechiel, à Jérusalem. “L’obligation de ‘vivre dans le sang’ n’a malheureusement pas changé depuis l’époque du prophète et jusqu’à nos jours, car l’histoire du peuple Juif baigne dans le sang”, écrit encore Zigman. C’est sans doute la raison pour laquelle les mots de la Bible nous sont tellement proches, ces jours-ci plus encore que d’habitude.

 

Les mots antiques me donnent de la force, dans les voix anciennes je puise un réconfort” : c’est ainsi que Naomi Shemer décrit sa relation intime avec l’hébreu de la Bible, dans la chanson Bé-Damayikh Hayyi. On ne saurait mieux décrire ce que de nombreux Juifs en Israël et à travers le monde trouvent actuellement dans le Livre des Livres (Sefer ha-Sefarim), depuis le début de la guerre qui a commencé le jour de Simhat Torah, où nous avons repris la lecture du Livre de Berechit. Personnellement, la lecture de la section hebdomadaire de la Bible m’éclaire plus sur la guerre que bien des commentaires savants entendus à la radio, et je suis certain de ne pas être le seul dans ce cas.

 

La Bible n’est pas seulement le récit de notre histoire nationale et le trésor que nous avons légué à l’humanité (qui a encore tant de mal à le lire et à le comprendre). Elle est aussi le Livre dans lequel nous trouvons la clé des événements que nous vivons et aussi, avec l’aide de D., la capacité d’endurer les difficultés de notre histoire. “Et soudain, un arc-en-ciel apparaît au-dessus de ma tête, un éventail coloré se déploie, annonciateur de vie et d’espoir, de paix, de tranquillité et de Hessed”. Que les mots de Naomi Shemer nous donnent la force et la persévérance, et que D.ieu protège nos soldats, ramène nos captifs et console nos familles endeuillées !

P. Lurçat

 

 

[1] Midrash Naomi, Les sources juives de la poésie de Naomi Shemer, Yad Ben Tsvi 2009.

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7 octobre 2023 : L’effondrement de la “conceptsia”, Pierre Lurçat

January 21 2024, 09:15am

Posted by Pierre Lurçat

7 octobre 2023 : L’effondrement de la “conceptsia”, Pierre Lurçat

 

La “conceptsia” qui s’est effondrée en Israël le 7 octobre 2023 est encore plus mensongère que celle qui régnait avant octobre 1973. Alors, il s’agissait de savoir si l’Egypte et la Syrie attaqueraient Israël et à quelle date précise, question classique pour tout service de renseignement militaire confronté à un ennemi. L’aveuglement israélien en 1973 procédait d’une forme d’hybris et de certitudes de l’échelon militaire et politique, qui ont été analysés mille fois depuis lors.

 

L’aveuglement face au Hamas est, à bien des égards, beaucoup plus grave, parce qu’il met en question notre conception même de l’ennemi, de sa nature profonde et de ses objectifs. Personne ne doutait en 1973 que Sadate voulait attaquer Israël et qu’il se donnait les moyens de le faire. La question principale était de savoir quand… (A certains égards, Israël a plutôt “surévalué” les intentions de l’Egypte, qui voulait surtout laver l’humiliation de 1967 et non pas envahir ou vaincre militairement Israël). 

 

Israël en 2023 s’est aveuglé sur le Hamas au point de penser qu’on pouvait établir un modus vivendi avec lui, de négocier avec ses dirigeants (par l’intermédiaire de l’Egypte ou d’autres acteurs) et de le “modérer” ou tout du moins de l’amadouer, au moyen de promesses et d’avantages économiques. Cette “conceptsia”, largement partagée par l’ensemble de l’establishment israélien, repose sur l’illusion mortelle de la « Pax islamica », que le Hamas nous a imposée et que nous avons acceptée, en raison d’un mélange de peur (comme me l’expliquait Simha Goldin[1], dont le fils Hadar a été capturé par le Hamas en 2014) et d’incompréhension. 

 

Face au Hamas: peur et incompréhension

 

Or, dans la vision du monde de l’islam radical – qui est celle du Hamas, du Djihad islamique et de Daesh – la peur est précisément l’élément-clé qui permet d’asseoir la domination de l’islam. C’est bien cette peur qui a été instillée dans l’esprit de nos dirigeants et leur a fait croire qu’on pouvait « acheter » un semblant de tranquillité, en faisant entrer l’argent du Qatar à Gaza et en autorisant des milliers de Gazaouis à venir travailler en Israël. 

 

Cette « conception » réside aussi dans l’idée qu’on pourrait négocier avec le Hamas des trêves provisoires, en le laissant se réarmer entre chaque manche d’affrontement armé, au lieu de considérer que son réarmement constitue un casus belli, justifiant (selon le droit international et les principes de toute doctrine militaire communément acceptée) une nécessaire intervention préventive au cœur de la bande de Gaza, pour détruire les missiles pointés contre le territoire israélien avant même leur utilisation, au lieu de se fier entièrement au système de Défense « Bouclier de fer »

 

Il y a donc, au-delà même de l’échec des services de renseignement (Aman, Shabak, Mossad), un échec conceptuel dont les racines sont plus profondes, qui concerne la manière même dont Israël appréhende le conflit avec ses ennemis actuels (Hamas au Sud, Hezbollah au Nord). Cet échec s’apparente à une sorte d’incapacité récurrente à comprendre l’ennemi, comme si les échelons dirigeants d’Israël s’obstinaient à penser avec des concepts occidentaux l’affrontement avec des ennemis qui appartiennent à un univers conceptuel et culturel bien différent, celui du monde arabe et iranien et celui de l’islam politique. C’est cette incompréhension fondamentale (dont on a déjà vu les conséquences dramatiques lors des accords d’Oslo et du retrait du Goush Katif) dont nous payons aujourd’hui le prix cruel, et à laquelle il importe de remédier au plus vite.

P. Lurçat

(Extrait d'un article paru dans Israël Magazine. Retrouvez chaque mois mes analyses dans le journal pionnier de la presse francophone en Israël!)

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Les intellectuels juifs face à la guerre de Gaza (IV) : Ceux qui refusent d’écouter les témoins du massacre

January 17 2024, 07:39am

Posted by Pierre Lurçat

Mia Shem

Mia Shem

 

Il faut absolument écouter le témoignage glaçant de l’ex-otage franco-israélienne Mia Shem, qui relate le calvaire qu’elle a subi le 7 octobre et dans les semaines qui ont suivi, capturée par le Hamas puis détenue pendant de longues semaines à Gaza. “J’ai vécu une Shoah”, déclare-t-elle, et ces quelques mots en disent plus long que bien des analyses savantes. Il faut écouter le témoignage de Mia Shem, car c’est celui d’une survivante du “jour de Shoah” que nous ont infligé nos ennemis de Gaza, et parce que son témoignage est l’égal – par son contenu sinon par son style – de celui des survivants de la précédente Shoah, des Primo Levi et des Aharon Appelfeld.

 

Après la Shoah, disait le philosophe Emil Fackenheim, nous avons le devoir de ne pas donner de victoire posthume à Hitler. Après la nouvelle Shoah que le Hamas a tenté de perpétrer contre Israël (la “Shoah en keffieh”, selon l’expression du regretté Paul Giniewski), nous avons l’obligation de ne pas donner de victoire posthume au Hamas et aux autres ennemis d’Israël, lorsque leurs dirigeants auront été tous éliminés. Mais le premier devoir est celui d’écouter les survivants. Or c’est précisément ce que certains intellectuels juifs refusent de faire.

 

Dans une longue interview donnée récemment à la chaîne LCI, le philosophe Alain Finkielkraut a ainsi tenu des propos stupéfiants et scandaleux sur le témoignage de Mia Shem. Reconnaissant tout d’abord que sa déclaration “j’ai vécu une Shoah” est terrible, il affirme dans la foulée avoir été “beaucoup choqué” sicde la déclaration de Mia Shem selon laquelle “tout le monde est terroriste à Gaza”. Selon lui, prétendre qu’il n’y a “pas de civils innocents à Gaza” est comparable au propos de l’indigéniste Houria Bouteldja, affirmant qu’il “n’y a pas d’Israélien innocent”.

 

La comparaison établie par A. Finkielkraut montre deux choses : la première, c’est que comparaison n’est pas raison. Comparer le propos de l’otage franco-israélienne Mia Shem à celui de Houria Bouteldja n’est pas seulement indécent, c’est également stupide. Mais cette comparaison montre aussi que Finkielkraut, en dépit de son intelligence et de son courage intellectuel, vit dans un univers conceptuel très éloigné de celui d’Israël, éloignement qui le rend totalement incapable de comprendre la réalité de notre Etat et des problèmes existentiels qu’il affronte.

 

Le propos d’A. Finkielkraut atteste à la fois d’un refus d’écouter les victimes du 7 octobre (imagine-t-on un intellectuel juif faire la même chose avec un rescapé de la Shoah ?), et d’un refus conceptuel de donner crédit à leur témoignage. La société israélienne tout entière, après le 7 octobre, a entrepris un immense travail de remise à zéro de compteurs et de remise en cause, travail qui n’est pas terminé. On peut attendre des intellectuels juifs de diaspora qu’ils fassent la même chose. Cette capacité de se remettre en question est en définitive ce qui distingue l’intellectuel dogmatique, enfermé dans ses convictions et ses propres références, de l’intellectuel ouvert à l’événement et à la nouveauté qu’il comporte.

 

Le 7 octobre – comme d’autres événements qui ont marqué l’histoire juive depuis ses débuts – appelle à la réflexion et à l’écoute. Il nous oblige à repenser ce que nous croyions comme acquis, à nous remettre en question. Et il nous oblige à écouter et à accepter les témoignages des otages. Nul ne peut écouter le témoignage glaçant de Mia Shem et son terrible propos – irréfutable dans sa clarté morale – sur le fait qu’il n’y avait pas d’innocents à Gaza. Vérité difficilement audible en Occident, mais vérité tout de même.

 

Pierre Lurçat

Ma conférence "Comment restaurer la dissuasion d'Israël" est en ligne ici, abonnez-vous à ma chaîne YouTube pour accéder à mes dernières conférences !

 

Les intellectuels juifs face à la guerre en Israël (III) : entre mobilisation et “business as usual” - VudeJerusalem.over-blog.com

Les intellectuels juifs face à la guerre en Israël (II) Biais cognitifs, préjugés et présupposés idéologiques - VudeJerusalem.over-blog.com

Les intellectuels juifs face à la guerre en Israël (I) : le serment solennel d’André Neher - VudeJerusalem.over-blog.com

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L’intention exterminatrice arabe et son “inversion victimaire” dans l’accusation portée contre Israël

January 14 2024, 12:51pm

Posted by Pierre Lurçat

Hassan Nasrallah

Hassan Nasrallah

La plainte déposée par l'Afrique du Sud devant la CJI n'est pas seulement un scandale sur le plan moral et juridique. Elle s'inscrit en fait dans l'histoire longue de l'antisémitisme et de "l'inversion victimaire", comme je l'explique dans les lignes suivantes extraites de mon livre Les mythes fondateurs de l'antisionisme contemporain.

L’intention exterminatrice et génocidaire était bien présente dans le camp arabe, dès l’origine du conflit, et elle n’a pas disparu à ce jour. Citons, à titre d’exemples récents, les déclarations génocidaires du chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, affirmant de manière récurrente que le Hezbollah est “capable de détruire Israël”, et les déclarations de dirigeants du Hamas ou de l’Iran qui vont dans le même sens. Ainsi, le dirigeant iranien du Corps des Gardiens de la Révolution islamique, Qassem Soleimani, récemment tué dans une frappe américaine, avait déclaré en septembre 2019 que la “destruction d’Israël n’était plus un rêve”

 

Cette intention exterminatrice arabe (ou iranienne) n’a jamais disparu et a reçu un commencement d’exécution à plusieurs reprises (en 1948, en 1967, etc.). Elle s’accompagne d’un discours auto-justificatif, qui prétend faire d’Israël le coupable d’un plan d’extermination génocidaire des Palestiniens. Tout se passe donc comme si les ennemis d’Israël projetaient sur celui-ci leurs propres intentions génocidaires. C’est dans cette projection permanente que réside le fondement du mythe du génocide du peuple palestinien.

 

Pour comprendre comment fonctionne ce mécanisme, constant dans le discours et dans la stratégie politique arabe, prenons pour exemple le discours prononcé à Davos par Yasser Arafat, dirigeant de l’OLP et chef de l’Autorité palestinienne, en janvier 2001. Cet épisode révélateur se situe quelques mois après le déclenchement de la “Deuxième Intifada”, vague de violences ayant pris pour prétexte la visite du Premier ministre israélien Ariel Sharon sur le Mont du Temple, mais avait été en réalité préméditée plusieurs mois à l’avance par Arafat lui-même, après l’échec des négociations de Camp David.

 

Comme le rapporte l’historien Benny Morris dans son livre Victimes, le dirigeant israélien Shimon Pérès - qui était encore porté par l’euphorie du “processus de paix” et du “Nouveau Moyen-Orient”, malgré la sanglante vague de violences déclenchée l’année précédente par Arafat - évoquait “la nécessité et le caractère inévitable d’un partenariat, de la paix et de la coopération entre Israël et les Palestiniens”. Le dirigeant palestinien, de son côté, peu soucieux de polir son propos devant le forum économique mondial, qualifiait l’État juif de “fasciste”, de “colonialiste” et “d’assassin” et accusait Israël “d’utiliser des munitions à l’uranium” contre les Palestiniens, en s’efforçant de les “affamer”, pour “détruire le peuple palestinien”. Ce faisant, Arafat reprenait à son compte le mythe du génocide, soi-disant fomenté par les Juifs contre le peuple palestinien.

 

Benny Morris, qui relate cette anecdote, décrit bien le décalage entre l’état d’esprit du dirigeant de la gauche israélienne, qui croyait toujours que la paix pouvait être atteinte au moyen de concessions territoriales, et celui des Palestiniens (et des Syriens) qui lui opposaient une attitude radicale et intransigeante. “L’Intifada, explique Morris, réponse palestinienne aux efforts de paix israéliens, sema la confusion dans l’idéologie de la gauche israélienne... Il y régnait un sentiment de désarroi et de trahison par le raïs palestinien”. Ce désarroi tient en large partie à l’incompréhension, chez une partie de la gauche israélienne, de la nature profonde de l’hostilité arabe envers Israël, c'est-à-dire de l’antisionisme.

 

La filiation historique entre l’antisionisme et l’antijudaïsme 

 

En réalité, ce mécanisme d’inversion permanent consistant à vouloir détruire l’adversaire tout en l’accusant de ses propres intentions n’a rien de nouveau. L’historien Georges Bensoussan écrit à ce propos que “tout discours meurtrier impute en effet à sa victime le dessein qu’il nourrit à son endroit”. Pierre André Taguieff analyse également ce mécanisme, auquel il a donné le nom, que nous lui empruntons, d’inversion victimaire, dans ses “trois grands moments historiques” : celui de l’antijudaïsme antique et médiéval, celui de l’antisémitisme moderne, et enfin celui de l’antisionisme contemporain. Cette perspective historique plus large nous permet de comprendre comment le mythe du “génocide du peuple palestinien” s’inscrit dans le droit fil de l’accusation de crime rituel, qu’il reprend à son compte et auquel il donne des formes nouvelles.

P. Lurçat

(Extrait de mon livre Les mythes fondateurs de l'antisionisme contemporain, éditions L'éléphant 2021)

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Aharon Barak, bouclier d’Israël? Réflexions sur la procédure contre Israël devant la Cour de La Haye

January 11 2024, 15:39pm

Posted by Pierre Lurçat

Aharon Barak, bouclier d’Israël? Réflexions sur la procédure contre Israël devant la Cour de La Haye

“Israël mobilise un vieux juge de gauche en soutien de l’armée” : le titre (et le contenu) de l’article du quotidien Le Monde publié hier en dit long sur le mépris affiché du quotidien de référence français pour Israël, mépris qui s’étend au juge Aharon Barak, qualifié par le correspondant du Monde en Israël Louis Imbert de “vieux juge” “auréolé d’une réputation de progressiste”. Aux yeux du quotidien de l’intelligentsia progressiste en France, il ne saurait en effet y avoir de “progressiste” authentique en Israël, pays "colonialiste" qui mène actuellement une guerre sans merci au Hamas, pour lequel la gauche française progressiste a les yeux de Chimène. Pour le journaliste du Monde, comme pour le Hamas, il n’y a apparemment pas de bon Israélien.

 

Le quotidien français pousse le cynisme jusqu’à citer un avocat israélien d’extrême-gauche, Michael Sfard, accusant le juge Barak d’avoir “usé de sa réputation pour approuver et blanchir chaque mesure draconienne introduite par l’occupant israélien…”  Mais tout cela n’est que “patûre de vent”. La vraie question que se pose chaque Israélien aujourd’hui, à la veille de l’audience devant la Cour de La Haye, est de savoir si notre Premier ministre a eu raison de dépêcher Aharon Barak en tant que juge israélien. Nous serons fixés très bientôt à cet égard.

 

L’ancien président de la Cour suprême, qui a toute sa vie œuvré au renforcement sans limite de la Cour suprême, au point de la transformer en premier pouvoir israélien et de lui donner des pouvoirs exorbitants qu’aucune Cour équivalente ne détient dans le monde démocratique, saura-t-il, au crépuscule de sa vie, user de ses talents rhétoriques pour défendre Israël accusé à tort de “génocide”, alors qu’il mène la guerre la plus juste qu’il soit? Si le calcul de Nétanyahou s’avère judicieux, alors le juge Barak démontrera au monde entier que les accusations de génocide sont non seulement infondées juridiquement, mais qu’elles sont en réalité une calomnie moralement ignoble.

 

Au passage, Aharon Barak pourra aussi, ironie de l'histoire, démontrer en direct au peuple d'Israël la validité, ou au contraire, l'inanité d'un des principaux arguments des opposants à la réforme judiciaire dont il fait partie : celui selon lequel le système judiciaire actuel offre à l'état d'Israël, à ses dirigeants et à ses officiers une protection contre les poursuites judiciaires devant des tribunaux étrangers. Si la cour de justice rejette les demandes de l'Afrique du Sud, alors le juge Aharon Barak pourrait bien devenir, après avoir contribué à la division de la société israélienne et à l’affaiblissement d’Israël face à ses ennemis, le bouclier d’Israël.

Pierre Lurçat

 

NB Ma conférence donnée dans le cadre de la Midreshet Yehuda sur le thème “Comment restaurer la capacité de dissuasion d’Israël” à la lumière du Mur de Fer de Jabotinsky est en ligne ici. Abonnez-vous à ma chaîne YouTube pour être informé de mes dernières conférences et interviews!

 

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De “Beyrouth-Varsovie” à Gaza, en passant par Deir Yassin et Djénine : variations autour du mythe du génocide du peuple palestinien

January 10 2024, 16:48pm

Posted by Pierre Lurçat

De “Beyrouth-Varsovie” à Gaza, en passant par Deir Yassin et Djénine : variations autour du mythe du génocide du peuple palestinien

(Extrait de P. Lurçat, Les Mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain, éditions l’éléphant 2021. En vente sur Amazon et B.O.D.).

La Première Guerre du Liban, en 1982, marque une étape importante dans le développement du discours antisioniste contemporain et dans l’élaboration du mythe du “génocide du peuple palestinien”. Comme l’écrivait alors Léon Poliakov, dans un petit livre publié en 1983[1], “la guerre du Liban fit passer Israël et plus généralement les Juifs au premier plan de l’actualité. L’invasion israélienne fournit aux médias la possibilité de déchaîner des passions jusque-là tenues en laisse, ou simplement inexistantes. C’est dans ces conditions qu’un climat s’instaura dans les sphères gouvernementales (occidentales), qui poussait M. Pierre Mauroy (alors Premier ministre) à déclarer, dès le 18 juin 1982 : “Ce n’est pas en détruisant le peuple palestinien qu’on réduira le terrorisme”.

 

Poliakov estime que “le principal responsable de cette désinformation fut la télévision française”. De son côté, l’ancien ministre Pierre Mendès-France pouvait écrire alors, dans les colonnes du Nouvel Observateur, que “le spectateur qui voit les images projetées (à la télévision) est naturellement enclin à penser que c’est toute une nation qui est écrasée sous les bombes… On parle de Juifs tueurs d’enfants, de génocide, d’holocauste… comme si c’était l’objectif même du gouvernement israélien de massacrer délibérément des civils et des enfants[2].

 

Le diagnostic porté par Mendès-France (et par Poliakov, qui le reprend à son compte) a tendance à faire porter la responsabilité de la vague d’antisémitisme, concomitante à la guerre du Liban, aux seules images diffusées par la télévision française. Près de quarante ans plus tard, dans un contexte assez similaire, non plus au Liban mais à Gaza, Pierre-André Taguieff portera un diagnostic tout aussi sévère à l’égard de la responsabilité des médias dans la diffusion du discours et des mythes antisionistes, écrivant [3]:

 

La mise en accusation quasi-planétaire d’Israël est moins le résultat de la propagande palestino-islamiste, qu’un effet du fonctionnement du système médiatique. La condamnation unanime d’Israël, avant toute enquête et indépendamment de toute analyse des faits, témoigne d’abord du mode de formation et de diffusion de l’information journalistique…”. En effet, poursuit-il : “les médias choisissent de privilégier les récits allant dans le sens des présupposés de la culture politique majoritaire dans le monde professionnel des journalistes. Or, l’anti-israélisme et le pro-palestinisme, depuis les années 1990, se sont inscrits dans la doxa journalistique, reflétant le parti-pris “antisioniste” partagé, avec plus ou moins de virulence, par toutes les gauches”.


              Quand le Premier ministre Mauroy parle de “détruire le peuple palestinien” (à propos du siège de Beyrouth par l’armée israélienne), il montre la perméabilité de la classe politique française au discours antisioniste radical, jusque dans ses accusations les plus insensées. Citons à ce sujet la remarque faite dans un contexte différent par Éric Marty, professeur de littérature française, au sujet de la visite d’Ariel Sharon sur le Mont du Temple en octobre 2000 : “Que les Palestiniens jouent du symbole, du mythe, de la mystification, c’est de bonne guerre. Que les médias français, que les hommes politiques et les plus grands responsables comme le Président de la République, soient les canaux passifs de cette propagande laisse rêveur quant à  la maturité politique et intellectuelle de la France[4].

Sabra et Chatila – événement historique ou événement mythique ?

L’outrance manifestée dans le récit médiatique du siège de Beyrouth, devenue Varsovie assiégée sous la plume de nombreux journalistes occidentaux, sera encore dépassée lors de l’épisode de Sabra et Chatila. Rappelons brièvement les faits : entre le 16 et le 18 septembre 1982, des centaines de réfugiés palestiniens étaient massacrés par des milices chrétiennes phalangistes dans la banlieue de Beyrouth, sur l’instigation du chef des services secrets libanais, Elie Hobeika. Paul Giniewski, auteur de plusieurs ouvrages sur l’antisionisme, note à ce sujet qu’aucun des grands thèmes de la démonisation d’Israël n’a occupé l’avant-scène avec une permanence sans faille, autant que le massacre de Sabra et Chatila et le rôle prêté à Ariel Sharon, alors ministre de la Défense.

 

On mesure à quel point le thème de Sabra et Chatila est demeuré vivace, dans la propagande palestinienne et dans ses relais occidentaux, à l’aune des innombrables textes, films, reportages et œuvres d’art qui lui sont consacrés jusqu’à ce jour. Citons à titre d’exemple, un remake du Guernica de Picasso, intitulé sobrement “Le massacre de Sabra et Chatila”, exposé au Tate Modern de Londres[5]. La véritable logorrhée verbale, médiatique, artistique et intellectuelle, autour du massacre de Sabra et Chatila et de la prétendue responsabilité israélienne prouve, si besoin était, la véracité du constat fait par l’écrivain Paul Giniewski [6]:

 

Quatre des plus grands journaux américains y avaient consacré davantage d’espace qu’aux dix plus grands massacres qui avaient marqué la décennie 1972-1982, et qui comprenaient celui de  l’Ouganda sous Idi amine, les 20 000 civils massacrés à Hama en Syrie, la boucherie de 2,5 millions de Cambodgiens par leurs compatriotes. Trois ans après les faits, un autre massacre eut lieu dans les mêmes camps, alors sous contrôle des Libanais chiites, faisant plus de 500 morts”. Et Giniewski de poursuivre : “Les mêmes quatre quotidiens américains y consacrèrent dix fois moins d’espace qu’au Sabra et Chatila “enjuivé”. En 1982, ce vrai, cet unique Sabra et Chatila digne de mobiliser la conscience universelle avait produit 10 000 mots sur 7 pages dans le même numéro de l’un des grands quotidiens : davantage que l’espace mérité par le débarquement allié en Normandie pendant la Deuxième Guerre mondiale”.

 

Autre exemple de cette disproportion et de cette logorrhée médiatique : le fameux texte de l’écrivain Jean Genet, “Quatre heures à Chatila”, auquel il doit une partie non négligeable de sa célébrité. Ce texte a donné lieu à d’innombrables commentaires, mises en scène, et jusqu’à un récent spectacle de danse[7]. L’écrivain français au passé trouble, (qui se présentait lui-même par les mots “Jean Genet, voleur” à ses compagnons de cellule, pendant la Deuxième guerre mondiale[8]), n’a jamais été autant apprécié et célébré que lorsqu’il a écrit ce texte et qu’il est devenu ainsi le “porte-parole” des Palestiniens, auxquels il a consacré de nombreux autres textes. Lisons à ce sujet l’analyse éclairante d’Éric Marty, dans son livre Bref séjour à Jérusalem [9]:

 

Sabra et Chatila n’est jamais apparu comme un événement au sens purement historique du terme – tel Austerlitz qui n’efface pas Wagram et qui n’est pas éclipsé par Waterloo -, il est apparu comme un surévènement, en tant qu’il rend inaudible le nom de tous les autres, en tant que les trois jours qu’il dura effacent les sept ou huit ans de guerre civile et de massacre qui le précédèrent et les huit ans de tueries qui suivirent ; il est apparu comme événement en tant qu’il est devenu l’unique événement par lequel l’on se remémore un très long épisode historique.

 

Cette analyse d’Éric Marty décrit très précisément le processus par lequel Sabra et Chatila, en tant qu'élément du mythe plus large du “génocide du peuple palestinien” - devient un événement mythique, qui efface toute la réalité historique de la guerre civile au Liban et de ses innombrables crimes, commis par des factions tellement diverses et variées, qu’il est difficile de s’y retrouver… Mais dans la version mythifiée, tout devient très simple : il ne reste plus qu’un seul crime, celui des Juifs. “Des goyim ont tué d’autres goyim, et ce sont les Juifs qu’on accuse” – la fameuse expression d’Ariel Sharon - lui-même transformé en accusé principal - dit très bien, de manière lapidaire, ce que Marty analyse sous un angle littéraire.

 

La lecture par Éric Marty du récit de Sabra et Chatila fait par Jean Genet lui permet d’établir une distinction - essentielle pour notre compréhension du discours et des mythes antisionistes – entre le fait et l’événement : “Grâce à Genet, nous avons compris… ce qu’était un événement, nous avons compris qu’un événement était tout le contraire d’un fait, nous avons compris que pour qu’un événement soit, il suppose de porter en lui une dimension métaphysique - il doit, comme phénomène, toucher à l’essence de ce qu’il représente[10].

Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain – Éditions L’éléphant.

Mon livre Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain vient d’être réédité aux éditions B.O.D. et peut désormais être commandé dans toutes les librairies.


[1] De Moscou à Beyrouth. Essai sur la désinformation, Paris, Calmann-Lévy, 1983.

[2] Le Nouvel Observateur, 14-20.8.1982, cité par Poliakov, op. cit. p. 164.

[3] Israël et la question juive, Les provinciales 2011, p. 177.

[4] Éric Marty, “L’angélisme progressiste des belle âmes”, Le Monde 11 octobre 2000, repris dans Bref séjour à Jérusalem, op. cit.

[6] P. Giniewski, Antisionisme, le nouvel antisémitisme, Cheminement 2005, p. 84.

[7] Voir le site de la ville de Créteil https://www.ville-creteil.fr/danse-sabra-et-chatila

[8] Témoignage rapporté par mon grand-père, l’architecte André Lurçat, emprisonné à la prison des Tourelles pour faits de résistance.

[9] Éric Marty. Bref séjour à Jérusalem, Gallimard 2002, p.175.

[10] Éric Marty. Bref séjour à Jérusalem, op. cit, p.175

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Le mythe du “génocide du peuple palestinien”, Pierre Lurçat

January 8 2024, 16:55pm

Posted by Pierre Lurçat

Le mythe du “génocide du peuple palestinien”, Pierre Lurçat

 

Alors que la Cour de justice de La Haye s'apprête à examiner la plainte pour génocide de l'Afrique du Sud contre Israël, je publie ici un extrait de mon livre Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain, consacré au mythe du “génocide du peuple palestinien”. A travers les accusations récurrentes de génocide portées contre Israël et son armée, c’est en effet le discours mythique de l’antisémitisme séculaire qui se perpétue. P.L.

 

 

La présentation constante d’Israël et de son armée comme “tuant des Palestiniens” n’est pas une simple accusation polémique. Derrière l’accusation de meurtre délibéré, de “crimes de guerre” et de “génocide”, il y a un véritable discours mythique. Lisons à ce propos les remarques éclairantes de Pierre-André Taguieff, au sujet de l’affaire Al-Dura[1] :

 

Dans la construction du sionisme comme une entreprise génocidaire, les propagandistes font feu de tout bois : après avoir transformé les Palestiniens en symboles des pauvres, des humiliés et des offensés, puis en victimes de “l’impérialisme d’Israël”, ou plus largement d’un “complot américano-sioniste”, ils leur donnent le visage de prétendus “enfants-martyrs”. C’est en effet par assimilation avec la légende du crime rituel juif “que s’est opérée l’exploitation internationale, par toutes les propagandes antisionistes, du prétendu “assassinat par l’armée israélienne du jeune Palestinien Mohammed Al-Dura”.

 

Cette analyse relie de manière très significative l’affaire du petit Mohammed Al-Dura à l’accusation séculaire du “crime rituel”, qui est une des thématiques les plus anciennes de l’antisémitisme. La propagande contemporaine n’a en l’occurrence rien inventé : elle ne fait que recycler constamment des thèmes anciens, qu’elle puise dans l’imaginaire collectif et dans l’arsenal de la propagande antisémite, développé au cours des siècles.

 

Ajoutons qu’on ne saurait comprendre l’acharnement avec lequel les médias français et occidentaux présentent chaque Palestinien tué dans un “affrontement” (le plus souvent alors qu’il était lui-même l’assaillant) comme une “victime innocente”, si on ne tient pas compte de ce ‘subtexte’, ou fondement sous-jacent - conscient ou non - du mythe du crime rituel, à travers le prisme duquel le conflit israélo-arabe est constamment présenté. Ce mythe ancien est apparemment resté présent dans l’inconscient collectif occidental. C’est en faisant cette hypothèse et en gardant à l’esprit ces remarques préliminaires, que nous allons analyser le mythe du “génocide du peuple palestinien”. (...)

 

La filiation historique entre l’antisionisme et l’antijudaïsme

 

En réalité, ce mécanisme d’inversion permanent consistant à vouloir détruire l’adversaire tout en l’accusant de ses propres intentions n’a rien de nouveau. L’historien Georges Bensoussan écrit à ce propos que “tout discours meurtrier impute en effet à sa victime le dessein qu’il nourrit à son endroit[2]”. Pierre André Taguieff analyse également ce mécanisme, auquel il a donné le nom, que nous lui empruntons, d’inversion victimaire, dans ses “trois grands moments historiques”[3] : celui de l’antijudaïsme antique et médiéval, celui de l’antisémitisme moderne, et enfin celui de l’antisionisme contemporain. Cette perspective historique plus large nous permet de comprendre comment le mythe du “génocide du peuple palestinien” s’inscrit dans le droit fil de l’accusation de crime rituel, qu’il reprend à son compte et auquel il donne des formes nouvelles.

 

Un élément essentiel à la compréhension du mythe du génocide et des autres mythes de l’antisionisme contemporain est en effet celui de la filiation historique qui relie ce dernier à l’antisémitisme moderne et à l’antijudaïsme de l’Antiquité et du Moyen-Âge. Ce n’est pas par hasard que les analyses les plus éclairantes de l’antisionisme contemporain ont été faites par des historiens, comme Pierre-André Taguieff, souvent cité dans le cadre de notre ouvrage, et l’historien de l’antisémitisme Léon Poliakov, dont il poursuit les travaux. Un exemple récent nous est donné par le discours de Mahmoud Abbas en décembre 2019, dans lequel il a accusé Israël d’être responsable de la diffusion de drogues au sein de la société palestinienne[4]. En juin 2016, Abbas avait déjà accusé Israël d’empoisonner les puits et l’eau potable bue par les Palestiniens[5].

 

 
Le mythe du “génocide du peuple palestinien”, Pierre Lurçat

Cette accusation était de toute évidence la remise au goût du jour d’un thème antisémite ancien, largement répandu au Moyen-Age. La légende des “Juifs empoisonneurs” réapparaît ensuite au 16e siècle, sous la plume de Martin Luther, qui affirmait que “si les Juifs pouvaient nous tuer tous, ils le feraient volontiers, certes, spécialement ceux qui exercent la médecine[6]. Plus tard, cette accusation revient sur le devant de la scène à l’époque contemporaine, lors de la tristement célèbre affaire du “complot des Blouses blanches”, orchestré par Staline en janvier 1953. Plus récemment encore, l’accusation d’empoisonnement est formulée à l’encontre d’Israël, lors du décès de Yasser Arafat en novembre 2004, dans un hôpital français.

 

Cet exemple - parmi beaucoup d’autres - permet de comprendre comment fonctionne le discours antisioniste, et plus précisément comment il s’alimente à la source de l’antijudaïsme antique et de l’antisémitisme moderne. Il le fait en puisant dans l’éventail de stéréotypes négatifs concernant les Juifs, qui s’est constitué depuis des siècles. Le discours antisioniste radical, comme le discours antisémite “classique”, fait feu de tout bois : il puise indistinctement dans les accusations antijuives d’origine religieuse, chrétienne notamment. Citons encore Taguieff : “La sécularisation des accusations contre les Juifs, à l’exception de celle de déicide, n’a nullement interrompu, à partir du 18e siècle, le processus de transmission de leurs formes religieuses”[7].

 

De même, pourrait-on dire en extrapolant cette remarque, la sécularisation des accusations contre Israël dans l’antisionisme contemporain n’a pas interrompu le processus de transmission de thèmes antijuifs anciens, comme on le voit dans le discours d’un Mahmoud Abbas accusant Israël (et les rabbins) d’empoisonner les puits des Palestiniens.

 

(Extrait de P. Lurçat, Les Mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain, éditions l’éléphant 2021. En vente sur Amazon).

Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain – Éditions L’éléphant

 

 

[1] La Judéophobie des Modernes, op. cit. p. 300. Le 30 septembre 2000, la chaîne France 2 diffusait des images d’un échange de tirs au carrefour Netsarim, dans la bande de Gaza. Le correspondant Charles Enderlin affirmait que le jeune Mohammed Al-Dura avait été tué par des tirs israéliens. Cette affirmation qui ne reposait sur aucun élément incontestable donna lieu à des accusations contre Tsahal d’avoir délibérément tué Al-Dura. 

[2] In “Antisémitisme et négationnisme dans le monde musulman”, Revue d’histoire de la Shoah no. 180, janv-juin 2004. p. 12.

[3] Pierre-André Taguieff, « Un exemple d’inversion victimaire : l’accusation de meurtre rituel et ses formes dérivées », Argumentation et Analyse du Discours [En ligne] 18/10/2019. http://journals.openedition.org/aad/3500

[4]Abbas accuse Israël d'être à l'origine de la corruption chez les Palestiniens”, i24news.tv, 20/12/2019

https://www.i24news.tv/fr/actu/international/moyen-orient/1576834118-abbas-accuse-israel-d-etre-a-l-origine-de-la-corruption-chez-les-palestiniens

[6] Trachtenberg, Joshua. 1983 [1943]. The Devil and the Jews : The Medieval Conception of the Jew and Its Relation to Modern Antisemitism (New Haven : Yale U. P.) Cité par Taguieff 2019.

[7] Pierre-André Taguieff, « Un exemple d’inversion victimaire : l’accusation de meurtre rituel et ses formes dérivées », 2019 https://journals.openedition.org/aad/3500#bodyftn11

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Cour suprême d'Israël : nouvelle victoire du “Deep State” contre le peuple et ses représentants

January 5 2024, 14:32pm

Posted by Pierre Lurçat

Cour suprême d'Israël : nouvelle victoire du “Deep State” contre le peuple et ses représentants

Israël : nouvelle victoire du “Deep State” contre le peuple et ses représentants

 

La décision scandaleuse rendue par la Cour suprême cette semaine a une double signification, politique et juridique. Juridiquement, elle signifie pas moins qu’une “Deuxième Révolution constitutionnelle”, dont les conséquences sont encore plus étendues que celles de la première, menée par le juge Aharon Barak dans les années 1990 (que j’ai relatée dans mon livre Quelle démocratie pour Israël ?). A l’époque, il s’agissait de faire de la Cour suprême le “premier pouvoir” en Israël, en lui donnant un pouvoir d’annulation des lois et actes de l’administration et une compétence de contrôle constitutionnel la plus large possible, qu’aucune loi ne lui avait jamais conférés, et en la plaçant ainsi au-dessus de la loi et de la Knesset.

 

La Deuxième révolution constitutionnelle – celle de la juge Esther Hayot, qui marche dans les pas de son maître Barak dont elle est la fidèle disciple – va encore plus loin. Elle donne en effet à la Cour suprême un pouvoir sans équivalent dans aucune démocratie au monde, celui d’invalider des Lois fondamentales, ayant une valeur supra-législative et quasi-constitutionnelle. En termes simples, la Cour suprême devient ainsi un “super-législateur” et un pouvoir supra-législatif et supra-exécutif, qui peut désormais annuler toute décision, toute loi et toute Loi fondamentale: son pouvoir est sans aucune limite. Le gouvernement des juges atteint un niveau sans précédent, au détriment du pouvoir des élus, réduit à la portion congrue.

 

Politiquement, cette monstruosité juridique signifie que le “Deep state” israélien vient de porter - en plein milieu d’une guerre existentielle dont l’enjeu est la survie de l’Etat juif, un coup sans précédent à la démocratie et à l’équilibre des pouvoirs. La seule considération qui a guidé la juge Hayot et les 12 juges qui ont voté en faveur du pouvoir théorique d’annulation de Lois fondamentales – était celle d’accroître encore les pouvoirs déjà exorbitants de la Cour suprême. Comme l’écrivait la commentatrice israélienne Caroline Glick, “l’usurpation du pouvoir des élus par “l’État profond” au cours des trois dernières décennies est la question politique la plus brûlante en Israël aujourd’hui”. Ce diagnostic toujours actuel revêt une gravité décuplée alors que les ennemis extérieurs menés par l’Iran et la Russie ont imposé à Israël la guerre la plus longue de son existence depuis 1948. La Cour suprême s’est ainsi rangée définitivement dans le camp de ceux qui affaiblissent Israël face à ses ennemis.

 

Pierre Lurçat

 

NB J’ai évoqué la décision de la Cour suprême au micro de Daniel Haïk sur Radio Qualita

 

 

ILS ONT LU “QUELLE DÉMOCRATIE POUR ISRAEL?”

 

“Une étude magistrale et édifiante!” 

Jean-Pierre Allali, Crif.org

 

Un livre politique qui se lit comme un roman policier”.

 

Liliane Messika, écrivain Mabatim

 

“Pierre Lurçat balaye en quelques pages les slogans de la gauche israélienne qui manifeste aujourd’hui massivement au nom de la « défense de la démocratie » contre le « coup d’Etat ». “ 

 

Yves Mamou, Revue politique et parlementaire

 

 

Cour suprême d'Israël : nouvelle victoire du “Deep State” contre le peuple et ses représentants

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Retourner au Goush Katif : rêve ou réalité ? Pierre Lurçat

January 3 2024, 10:19am

Posted by Pierre Lurçat

Retourner au Goush Katif : rêve ou réalité ? Pierre Lurçat

Retourner au Goush Katif : rêve ou réalité ?

Pierre Lurçat

 

Revenir au Goush Katif, reconstruire les localités florissantes qui ont symbolisé – jusqu’au retrait fatidique de l’été 2005 – la présence israélienne dans la bande de Gaza : cela peut sembler aujourd’hui encore un rêve impossible, voire fantasmatique. Pourtant, de plus en plus d’Israéliens comprennent maintenant que la présence juive sur cette partie d’Eretz Israël est une des composantes de la sécurité israélienne, laquelle a volé en éclats le 7 octobre. Daniella Weiss, la passionaria de l’implantation juive en Samarie, parle déjà de faire revenir des habitants dans la bande de Gaza, avant même que les canons se taisent… D’autres voix, au centre et à gauche de l’échiquier, font plus modestement leur mea culpa pour avoir soutenu l’expulsion des habitants juifs du Goush Katif. Alors, le retour de la présence juive dans la bande de Gaza : rêve ou réalité ?

 

L’histoire juive de Gaza

 

            Avant de parler d’actualité, un détour par l’histoire est nécessaire. La première chose à savoir est que la ville de Gaza – aujourd’hui associée au Hamas – a été une ville juive dans l’antiquité. La présence juive dans la région de Gaza remonte à l’époque des Patriarches et le port de Gaza fut un port de commerce juif important au 4e siècle de l’ère vulgaire. Des communautés juives s’y développèrent et des rabbins fameux y vécurent, comme le rav Israël Najara. La présence juive dans la région est attestée à toutes les périodes de l’histoire, ancienne et récente. Après les émeutes arabes de 1929, les Anglais expulsent les habitants juifs de Gaza. Le premier retour se fait en 1946, avec la création de Kfar Darom. Le kibboutz, situé au centre de la bande de Gaza, jouera un rôle important pendant la guerre d’Indépendance, pour freiner l’avancée des troupes égyptiennes en direction de Tel-Aviv.

 

            En fin de compte, Kfar Darom est évacué. Il sera recréé après 1967, en tant qu’avant-poste du Nahal (implantation pionnière) du mouvement Bné Akiva. La reconquête par Israël de la bande de Gaza pendant la Guerre des Six Jours marque le renouveau de la présence juive à l’époque contemporaine. A partir de 1970, vingt-et-une localités juives sont créées, entre Rafiah au Sud-Ouest et Dir Al-Balah au Nord. Ces localités occupaient 18 pour cent de la superficie totale de la bande de Gaza et le tiers de la bande côtière, et elles avaient pour principale activité l’agriculture, d’où le nom de Goush Katif (qui signifie littéralement le “bloc des récoltes”). A la veille du retrait israélien en 2005, quelque 8600 Juifs et 600 bédouins peuplaient la bande de Gaza.

 

            Le renouveau de la présence juive après 1967 est lié au plan Allon (élaboré par Yigal Allon), qui justifiait ainsi la création de localités juives dans la bande de Gaza : “Ces localités auront une importance cardinale pour l’avenir politique de la région, du fait qu’elles permettront de séparer le sud de la bande de Gaza de la ville de Gaza. Par ailleurs, la présence juive au cœur de la bande de Gaza revêt une grande importance sécuritaire”. Ces mots prennent évidemment un sens prémonitoire lorsqu’on voit ce qu’il est advenu de Gaza après le retrait de 2005.

 

La réalisation du plan Allon se fit de manière graduelle. En février 1977 est créé la localité de Netser Hazani. Lors de son inauguration, le Premier ministre de l’époque, Itshak Rabin, déclare : “C’est un grand jour pour l’Etat d’Israël et pour l’implantation juive, un jour qui symbolise notre présence ancienne dans la région, qui fait partie intégrante de l’Etat et de sa sécurité depuis la guerre des Six Jours”. La même année, trois autres localités sont créées : Ganei Tal, Katif et Gan Or. Après le retrait israélien du Sinaï, consécutif aux accords de Camp David, sont fondées les localités de Névé Dekalim, Atsmona et Bedolah.

 

Agriculture et Torah

 

            L’agriculture dans le Goush Katif représentait un total de 320 mille tonnes de production annuelle, pour une valeur économique d’un demi-milliard de shekels. 65% des exportations de légumes organiques et 90% des salades sans insectes provenaient de la région. Les débuts de l’agriculture locale n’ont pourtant pas été faciles. De nombreux experts doutaient de la capacité de développer des cultures dans les dunes sablonneuses. Mais les fermiers du Goush Katif ont triomphé des obstacles et réussi à développer une agriculture ultra-moderne, reposant notamment sur l’irrigation au goutte-à-goutte. Parmi les productions locales, les tomates cherry, les poivrons, les salades et les fleurs ont fait la renommée du Goush Katif.

 

Mais l’agriculture locale n’était pas seulement caractérisée par la nature de ses productions et par ses réussites technologiques, mais aussi par le fait que beaucoup d’agriculteurs étaient des Juifs observants, qui prenaient soin de respecter les commandements liés à la terre d’Israël. Ceux-ci ne représentaient toutefois qu’une partie de la population du Goush Katif, dont le tissu social était marqué par une grande mixité sociale.

 

Reconstruire le Goush Katif ?

 

Cela fait plus de 18 ans que les localités juives du Goush Katif ont été détruites et évacuées sur l’ordre du gouvernement d’Ariel Sharon, en août 2005. On sait quelles ont été les conséquences désastreuses, à court et moyen terme, de cette décision : l’arrivée au pouvoir du Hamas, la transformation de Gaza en base terroriste, qui a fait vivre Israël sous la menace de ses missiles depuis plus de quinze ans, jusqu’à la date fatidique du 7 octobre dernier, où l’illusion mortelle du “désengagement” nous a explosé à la figure, au sens propre et au sens figuré.

 

Depuis le mois d’août 2005, nombreux sont ceux qui ont exprimé le rêve du retour au Goush Katif. Certains en ont fait un leitmotiv de leur combat politique, et l’entrée des troupes israéliennes dans la bande de Gaza a donné un nouvel élan aux projets de reconstruction. Parmi ceux qui caressent le rêve du retour, Meir Dana-Picard est un ancien habitant de Kfar Darom. Dans une interview au journal Besheva, il déclarait le 12 octobre : “Israël doit reprendre le contrôle de l’ensemble du territoire. Il faut aussi changer l’appellation de la bande de Gaza, pour qu’elle devienne une partie du Néguev occidental. Ensuite, il faut y créer plusieurs villes juives de la taille d’Ashkélon et d’Ofakim, qui serviront de monuments vivants en souvenir du massacre… Pas seulement des villages agricoles de 40-50 familles (comme autrefois), mais de véritables villes : une Gaza juive, une Khan Younis juive, etc.

 

Interrogé aujourd’hui pour Israël Magazine, Meir Dana-Picard se dit plus optimiste qu’il y a un mois. Selon lui, l’idée d’un retour dans la bande de Gaza se fraie un chemin dans le public israélien. Le public comprend aujourd’hui que le contrôle sécuritaire implique une présence civile. Dana-Picard n’est pas seul à penser que le retour à Gaza doit se faire à une échelle plus grande que celle de l’ancien Goush Katif. Une réunion virtuelle doit se tenir bientôt sur ce sujet. La reconstruction (ou l’expansion) des anciennes localités juives dans la bande de Gaza ne revêt pas seulement une importance symbolique ou morale. Comme l’ont expliqué plusieurs porte-parole du lobby en faveur de la reconstruction, il s’agit d’un impératif moral, existentiel et stratégique, de première importance pour la sécurité d’Israël.

 

Tout comme le Goush Katif a représenté une “ceinture de sécurité” pour le sud du pays, qui a été enlevée en 2005, plaçant les localités du pourtour de Gaza en première ligne, sa reconstruction redonnera au Sud et à l’ensemble du pays une sécurité qui a été perdue en 2005. Elle servira aussi de leçon aux ennemis d’Israël, car le territoire est plus important pour eux que les vies humaines. La reconstruction d’une Gaza juive sera donc un élément de dissuasion plus important que la seule destruction du Hamas.

 

Le député Likoud Amit Halevy, qui figure parmi les auteurs d’une lettre récemment adressée par seize députés de droite au gouvernement, explique : “Il est temps de changer de paradigme, et d’abandonner l’ancien paradigme selon lequel nous évacuons des territoires pour les confier à des éléments étrangers. Nous devons assumer l’entière responsabilité du territoire, dans la bande de Gaza tout comme au Sud-Liban et en Judée-Samarie”. Comme l’avaient bien compris les pères fondateurs de l’Etat d’Israël, les frontières de l’Etat sont situées là où vivent des Juifs. La présence militaire ne suffit pas à garantir la sécurité, car celle-ci exige aussi une présence civile.

 

Le retour au calme à Gaza ne se fera que le jour où la synagogue de Névé Dekalim sera reconstruite, et où les prières juives retentiront de nouveau entre ses murs. Ce jour-là – qui n’est sans doute pas aussi lointain qu’il n’y paraît aujourd’hui – ce ne sont plus les appels au djihad et à la guerre qu’on entendra à Gaza, mais les mots du Hallel et ceux du prophète Jérémie : “Tes enfants reviendront dans leur territoire”.

P. Lurçat/Israël Magazine 2023 (c)

Retourner au Goush Katif : rêve ou réalité ? Pierre Lurçat

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