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hebreu

Une étincelle d’hébreu: “Ha-Bsora”, la bonne nouvelle de la guerre à Gaza

September 13 2024, 10:42am

Posted by Pierre Lurçat

Une étincelle d’hébreu: “Ha-Bsora”, la bonne nouvelle de la guerre à Gaza

“Ha-Bsora”: la “bonne nouvelle”: c’est – selon des sources étrangères se fondant sur un site d’information israélien d’extrême gauche – le nom d’un outil d’intelligence artificielle destiné à “accroître le nombre de frappes à Gaza”. Mais avant de savoir s’il s’agit d’une bonne nouvelle, arrêtons-nous un instant sur le mot B’sora. Dans son beau livre Jonas, que j’ai récemment trouvé dans une bibliothèque de rue à Jérusalem, l’éditeur Jérôme Lindon qui était hébraïsant, fait justement remarquer que “traduire de l’hébreu en français est une entreprise désespérée…” Je m’en suis aperçu en lisant que l’outil d’IA utilisé par Tsahal aurait pour nom Ha-Bsora, qui signifierait L’Evangile!

 

Comme nous l’écrivions dans ces colonnes, le mot B’sora (בשורה) signifie un message ou une nouvelle, bonne ou mauvaise. Dans la plupart des cas, il désigne en fait une bonne nouvelle, au point que l'expression biblique "Ich B’sora" (איש בשורה) signifie un "bon messager", c'est-à-dire le porteur d'une bonne nouvelle, comme dans le passage du livre de Shmuel, où Ahimaats court apporter au roi la bonne nouvelle que l'Eternel l'a vengé de ses ennemis (II Samuel 18).

 

            L’information des médias français selon laquelle Israël utiliserait un outil d’IA dans la guerre à Gaza est donc erronée au moins sur un point : Ha-Bsora ne veut pas dire l’Evangile (cela aurait été une blague de mauvais goût envers nos amis chrétiens…). Son sens premier signifie la “bonne nouvelle”, sens qui a été détourné par les chrétiens pour désigner l’Evangile. Mais alors, quel rapport avec la guerre contre le Hamas ?

 

Pour répondre à cette question, je rappellerai le livre du regretté Mickaël Bar Zvi, Eloge de la guerre après la Shoah. Sa thèse, pour la résumer en une phrase, était que la guerre était une nécessité éthique et politique pour le peuple Juif. Cette vérité essentielle est tout aussi actuelle aujourd’hui qu’en 1940. Le peuple Juif, comme l’expliquait l’écrivain Yossef Haïm Brenner il y a cent ans, n’a pas encore atteint le stade du militarisme…

 

Depuis un siècle, nous avons certes accompli quelques progrès en ce domaine, mais le virus pacifiste demeure bien vivant en nous. C’est précisément là qu’intervient la “bonne nouvelle” de l’après 7 octobre. Non seulement le peuple israélien n’a pas oublié le métier des armes, malgré trois décennies de lavage de cerveau post-sioniste, mais il est prêt à s’engager jusqu’au sacrifice suprême pour défendre sa terre et son peuple !

 

            Voilà la grande et belle nouvelle, la “Bsora” qui nous a été dévoilée dans l’effroi et la stupeur de l’après 7 octobre. Israël est fort et il est beau quand il combat et quand il triomphe de ses ennemis, sans pitié et sans aucune retenue ! Avec ou sans outil d’intelligence artificielle, Tsahal est en train d’écraser militairement le Hamas, avant de s’occuper du Hezbollah et du régime des mollahs. Réjouissons-nous de cette “bonne nouvelle”! Am Israël Haï !

P. Lurçat

Une étincelle d’hébreu: “Ha-Bsora”, la bonne nouvelle de la guerre à Gaza

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Une étincelle d’hébreu : “Hitpak’hout”, retrouver la vue et renoncer à ses illusions

March 13 2024, 09:32am

Posted by Pierre Lurçat

Une étincelle d’hébreu :  “Hitpak’hout”, retrouver la vue et renoncer à ses illusions

Parmi les mots d’hébreu qui ont connu un regain d’actualité depuis le 7 octobre, celui d’Hitpakhout mérite qu’on s’y arrête un instant. Marc Cohn, dans le dictionnaire Larousse, le définit simplement par son sens originel, “recouvrement de la vue” ou de l’ouïe, et par le sens figuré : “fait de devenir plus sage”. C’est ce dernier sens qui lui a donné sa signification très actuelle, celle de renoncer à des illusions et à des espoirs infondés. Les illusions, en l’occurrence, sont les illusions mortelles de l’avant 7 octobre, qui ont conduit aux événements tragiques qu’Israël a connus.

 

Pour illustrer ce dernier sens, nous prendrons un des exemples les plus marquants, celui du secrétaire du mouvement kibboutzique, Nir Meir. Interviewé dans Ha’aretz le 16 février dernier, il a donné à Meirav Moran des réponses étonnantes de sincérité. “Est-ce que vous vous définissez encore comme un homme de gauche ?” lui a-t-elle demandé? “Non, je me définis comme un homme qui sait dans quel environnement il vit”. Et d’ajouter : “Les habitants des implantations ne se trompent pas. La droite a raison : la méthode (des Arabes) est de conquérir des territoires. Et elle a raison d’affirmer que seule l’implantation permet d’asseoir notre souveraineté…

 

Lorsque la journaliste lui demande ce qu’il pense de l’Autorité palestinienne, il répond sans hésiter : “Il n’y aura pas de paix avec les Palestiniens. Je ne me raconte pas d’histoires”. Et quand elle l’interroge pour savoir si ses opinions reflètent celles du mouvement kibboutzique, il rétorque que “les avis concernant le conflit ont été modifiés de fond en comble depuis le 7 octobre. La plupart des habitants des kibboutz qui ont vécu le 7 octobre ne peuvent plus entendre un mot d’arabe, et souhaitent que Gaza soit rasée…” Autre exemple de hitpak’hout, tout aussi marquant: celle du YIVO, la vénérable institut d’études juives créé à Vilna et basé à New-York, qui a récemment annoncé une série de conférences sur les liens entre le Hamas et le nazisme.

           

En lisant les propos de Nir Meir, on comprend la signification très actuelle du mot Hitpak’hout. Il s’agit bien de retrouver la vue, dans son acception la plus large. Pendant des décennies, la gauche israélienne a en effet refusé de voir l’évidence : nos ennemis ne nous ont toujours pas accepté. Les habitants des kibboutz frontaliers de la bande de Gaza ont ainsi cru se faire “amis” des Gazaouis en leur donnant du travail ou en les emmenant dans les hôpitaux israéliens subir des traitements médicaux… On connaît la suite.

 

            Il faut saluer la clairvoyance, tardive mais bienvenue, de Nir Meir et des autres représentants de cette gauche qui s’est si longtemps trompée. Tout comme les anciens communistes devenus les plus lucides critiques de l’URSS, ces kibboutnikim doivent aujourd’hui jouer le rôle de lanceurs d’alerte et d’éveilleurs des consciences en Israël et à l’étranger. Leur hitpak’hout doit inspirer tous ceux qui, en Israël comme ailleurs, continuent de penser selon les schémas dépassés de l’avant 7 octobre. Après le 7.10.23, le mot d’ordre doit être : “Titpak’hou!” Recouvrez la vue !

 

P. Lurçat

           

NB A l’occasion du début du Ramadan, j’analyse au micro de Daniel Haïk la question occultée de la violence de l’islam.

La légitimation de la violence est imprégnée dans l'Islam L'invité de la rédac - YouTube

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Une étincelle d’hébreu : “Shatefet”, la maladie de l’information en temps de guerre

December 12 2023, 13:00pm

Posted by Pierre Lurçat

Une étincelle d’hébreu : “Shatefet”, la maladie de l’information en temps de guerre

“Shatefet” : le mot, néologisme récemment créé, est intéressant tant du point de vue linguistique que du point de vue de la guerre psychologique. Je ne l’avais jamais entendu avant le 7 octobre. Construit sur la racine SH-T-F (שתפ) qui signifie “partage”, avec le suffixe “ET” qui est employé pour décrire de nombreuses pathologies, il désigne donc la “maladie du partage”. Mais de quel partage et de quelle maladie s’agit-il ?

 

Pour le savoir, il faut aller sur le site de la “Direction nationale du Cyber d’Israël” (Maarakh ha-Cyber ha-Léumi). On y trouve un bandeau intitulé “Nous allons surmonter la Shatefet” et une vidéo humoristique sur une mère juive qui partage toutes sortes d’informations, plus ou moins sérieuses (“Les Houthis débarquent à Eilat !”), avec tout un chacun. La vidéo, très drôle, se termine par un message sérieux : “la maladie du partage aide l’ennemi et peut nous contaminer tous”.

 

Il s’agit donc, on l’aura compris, d’un message destiné à contrer la guerre psychologique du Hamas et des autres ennemis d’Israël. Cette vidéo met l’accent sur un phénomène très répandu dans notre monde actuel, dont les conséquences sont certes moins graves, mais parfois aussi dommageables en temps de paix : celui du partage incessant d’informations.

 

Dans un livre récent, je le décris comme une nouvelle façon de communiquer, qui remplace le débat d’idées véritable. Nous sommes constamment en proie à cette manie insurmontable de partager des contenus à tout venant, habitude qui est devenue une seconde nature. Oui, la “shatefet” est une véritable maladie, en temps de paix comme en temps de guerre ! Hag Hannoukah Saméah !

P. Lurçat

 

J'évoquerai mon dernier livre jeudi soir dans une conférence sous l'égide de l'Organisation sioniste mondiale (département pour la promotion de l'alyah)

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Comment défendre Israël à l’ère de la post-vérité ?

Conférence animée par Pierre Lurçat
 🗓️ le jeudi 14 décembre 2023
 ⏰ À 19h (heure française)
 📎 Via Zoom : https://bit.ly/Pierre_Lurcat

Inscription ici

Une étincelle d’hébreu : “Shatefet”, la maladie de l’information en temps de guerre

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Une étincelle d’hébreu : Timroun, les manœuvres terrestres et le retour de l’infanterie

November 27 2023, 08:21am

Posted by Pierre Lurçat

Une étincelle d’hébreu : Timroun, les manœuvres terrestres et le retour de l’infanterie

 

Depuis six semaines, les médias et le discours public israélien sont évidemment remplis de vocabulaire lié à la guerre. Parmi les mots les plus souvent entendus ces derniers jours (avant la trêve), figure en bonne place celui de “Timroun”, les manœuvres. Comme l’observait un commentateur, cette guerre voit le grand retour des blindés (shirion), quelque peu oubliés depuis la guerre de Kippour.

 

Mais en réalité, cette guerre voit surtout le retour en force de l’infanterie (Heyl raglayim) qui avait été délaissée depuis plusieurs décennies, au profit de l’armée de l’air notamment. Alors que le “dôme d’acier” et le développement technologique avaient pu faire croire à l’illusion d’une guerre menée de haut – ou de loin – la guerre de Simhat Torah démontre que l’on ne peut vaincre l’ennemi sans être présent sur le terrain, avec des divisions d’infanterie soutenues par l’artillerie (tot’hanim) et accompagnées par les blindés et par le génie civil (heyl ha-handassa).

 

Le mot même de guerre avait quasiment disparu du discours public depuis vingt ans, remplacé par celui de “mivtsa” ou de “péoula” (opération). Avec le retour de la guerre à grande échelle (un des commandants se trouvant à Gaza déclarait hier sur la chaîne 14 que le Hamas avait été surpris par la puissance de feu de Tsahal, laquelle l’avait étonné lui-même…), c’est surtout le mot de victoire (Nitsa’hon) qui fait son grand come-back dans le vocabulaire de Tsahal.

 

Finis les atermoiements sur la “dissuasion” et sur la nécessité d’écourter les opérations pour préserver le “retour au calme”... Les chefs de Tsahal, tout comme ceux du gouvernement d’union nationale, savent aujourd’hui que le peuple d’Israël ne se satisfera pas de moins que la victoire. “Yahad nénatsea’h !” (Unis nous vaincrons) est devenu le slogan de tout un peuple. Mais Israël a aussi redécouvert un secret qui l’accompagne depuis les débuts de son histoire : la victoire appartient à D.ieu. Que D. guide nos dirigeants, qu’Il protège nos soldats et nos civils et qu’Il nous donne la victoire !

P. Lurçat

Une étincelle d’hébreu : Timroun, les manœuvres terrestres et le retour de l’infanterie

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Une étincelle d’hébreu : Hashem Ish mil'hama, L’Eternel est un soldat

November 22 2023, 08:41am

Posted by Pierre Lurçat

Une étincelle d’hébreu : Hashem Ish mil'hama, L’Eternel est un soldat

La guerre qui a commencé le jour de Simhat Torah est l’occasion de relire nos textes fondateurs et d’y trouver un sens nouveau. La « Shirat ha-Yam », le Cantique de la mer que nous lisons tous les matins dans la prière quotidienne contient cette expression mystérieuse, tirée du livre de l’Exode : « L’Eternel est le maître des batailles, l’Eternel est son nom ». Que signifie cette expression, Ish mil’hama, en quoi l’Eternel peut-il être qualifié de « Ish » et comment son Nom est-il lié à la guerre ?

 

            A ces questions d’ordre théologique, nous avons reçu une réponse éclatante depuis le début de la guerre. Comme l’explique le rav Yoav Ouriel, dans un cours de Torah diffusé depuis le front où il actuellement mobilisé, « le peuple d’Israël a découvert un nouveau Nom de Dieu… Découvrir un nouveau Nom de Dieu, c’est comme expérimenter une nouvelle Création ! Il y a des facettes du Créateur que nous ne connaissions pas jusqu’à ce jour. ‘’L’Eternel maître des batailles” est un nouveau Nom de Dieu ».

 

            Mais en réalité, l’expression Ish mil’hama signifie autre chose que la traduction qu’en donne la Bible du rabbinat français, sous la direction du grand-rabbin Zadoc Kahn, de « maître des batailles ». Ish mil’hama veut dire littéralement un « homme de guerre », c’est-à-dire un soldat. Cette expression, ce nouveau Nom de D.ieu, comme l’explique le rav Yoav Ouriel, signifie que D.ieu combat avec nos soldats, Il est bien présent sur le champ de bataille de Gaza, comme en ont attesté des dizaines de soldats et d’officiers qui combattent en ces moments mêmes contre l’ennemi.

 

            Après le grand Hilloul Hashem, la « profanation du Nom » du 7 octobre, et ce que certains ont voulu interpréter comme un « Hester Panim », un voilement de la face de D.ieu, nous assistons à présent au grand dévoilement de la présence divine, d’un D.ieu qui combat avec Son peuple, contre Ses ennemis. Oui, « Hashem Ish mil’hama, Hashem Shemo ! »

           

P. Lurçat

NB Mon nouveau livre, Face à l’opacité du monde, paraît ces jours-ci aux éditions l’éléphant. Il est disponible sur Amazon, B.O.D et dans les bonnes librairies. Je l’ai évoqué à l’antenne d’Antoine Mercier sur sa chaîne Youtube Mosaïque.

Une étincelle d’hébreu : Hashem Ish mil'hama, L’Eternel est un soldat

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Une étincelle d’hébreu : “Shok Al-Yarekh”, à plate couture

November 15 2023, 08:43am

Posted by Pierre Lurçat

Une étincelle d’hébreu : “Shok Al-Yarekh”, à plate couture

“Nous allons vaincre le Hamas à plate couture”. De telles déclarations abondent dans les médias israéliens depuis le 7 octobre. L’expression employée en hébreu, “Shok al-yarekh”, mérite qu’on s’y arrête. On la trouve pour la première fois au Livre des Juges (15-9), dans le récit de la guerre menée par Samson contre les Philistins. “Et il les battit dos et ventre” (Shok al-Yarekh). La traduction du rabbinat rend de manière plaisante l’original, qui signifie mot à mot “cuisse sur le jarret”.

 

D’où vient cette expression ? Selon de nombreux commentateurs, elle signifie que les cavaliers (désignés de manière métaphorique par la cuisse) triomphent des fantassins (désignés par le jarret). Nous n’avons plus de cavaliers aujourd’hui, pourtant l’expression est demeurée bien vivante. Mais pour qu’Israël batte le Hamas et ses autres ennemis à plate couture, il ne suffit pas de faire montre de sa force militaire.

 

Comme l’a dit hier soir le ministre de la Défense, Yoav Galant, qui porte le prénom d’un chef de l’armée du roi David, “nous vaincrons avec l’aide de D.”. Il est frappant de constater que des soldats, des officiers et des dirigeants de plus en plus nombreux prennent aujourd’hui conscience de ce “secret” qui accompagne le peuple Juif depuis les débuts de son histoire : la victoire appartient à l’Eternel. Que l’Eternel protège nos soldats et qu’il nous donne la victoire, “Shok al-Yarekh”!

P. Lurçat

NB J'ai donné une interview à Antoine Mercier sur la chaîne Mosaïque, sur le sujet "La guerre du bien absolu contre le mal absolu".

 

Pierre Lurçat - Israël face à l'opacité du monde - La guerre du bien absolu contre le mal absolu - YouTube

 

Une étincelle d’hébreu : “Shok Al-Yarekh”, à plate couture

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Une étincelle d’hébreu : Kitour, l’encerclement

November 6 2023, 08:22am

Posted by Pierre Lurçat

Une étincelle d’hébreu : Kitour, l’encerclement

Alors que nos valeureux soldats se battent autour de la ville de Gaza, arrêtons-nous sur un mot qu’on entend beaucoup ces derniers jours dans les médias israéliens : Kitour. La racine K-T-R est celle du mot Keter, bien connu de tout Juif qui a entendu parler des dix Sephirot. Keter, c’est la couronne, au sens classique et également dans celui plus moderne, de couronne d’une dent. C'est aussi la  première Sephira et la plus élevée. Forgé sur la même racine, le mot Kitour désigne le fait de couronner, et au sens militaire, d’encercler. Mais quel rapport entre l’encerclement de Gaza par Tsahal et la “couronne”, Keter ?

 

Le pogrome du 7 octobre a été un immense “Hilloul Hachem”, une profanation du Nom divin. Le but de la guerre actuelle n’est pas seulement d’éliminer le Hamas et de reconquérir Gaza (bH) mais il est aussi de restaurer la force de dissuasion de Tsahal et, au-delà, la dignité et l’honneur d’Israël. C’est donc bien la “Couronne” (Keter) qu’il faut rétablir, celle de la royauté d’Israël et celle de la Royauté divine, du “Dieu des armées” qui guide nos soldats et leur donne la victoire.

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Une étincelle d’hébreu - “Am ségoula” : quelle est la couleur du peuple d’Israël?, Pierre Lurçat

June 22 2020, 06:29am

Posted by Pierre Lurçat

 

Si vous gardez mon alliance, vous serez mon trésor entre tous les peuples ! Car toute la terre est à moi, mais vous, vous serez pour moi une dynastie de pontifes et une nation sainte”. (Chemot 19, 5-6).


 

L’expression ‘Am segoula’, difficilement traduisible en français, figure à plusieurs reprises dans le Tanakh, la Bible hébraïque. On la retrouve notamment dans le livre de Chemot, à la parashat Yitro, et aussi au Deutéronome. Avant de tenter de la traduire, arrêtons-nous un instant sur sa signification. La Segoula (סגולה), au sens premier, c’est la qualité ou la vertu spécifique d’une chose ou d’une personne. On parlera ainsi des vertus (segoulot) curatives, dormitives ou digestives de certaines plantes. Par extension, la Segoula désigne un trésor, comme dans ce discours du Roi David : “Dans mon amour pour la maison de mon Dieu, les trésors (Segoula) d’or et d’argent que je possède” (Chroniques I, 29-3). Quel rapport avec le peuple d’Israël ? 

 

La réponse à cette question tient aux circonstances extraordinaires de sa naissance, rappelées dans la Haggada de Pessah : “Et quelle divinité entreprit jamais d'aller se chercher un peuple au milieu d'un autre peuple, à force d'épreuves, de signes et de miracles, en combattant d'une main puissante et d'un bras étendu, par de grandes apparitions, toutes choses que I'Eternel, notre Dieu, a faites pour vous, en Egypte, à vos yeux?” C’est ce caractère surnaturel de la naissance d’Israël qui explique sa “Segoula”, son caractère spécifique et unique, que l’expression de “peuple élu” (am nivhar, עם נבחר) ne rend que très imparfaitement.


 

Chagall, L’Exode. Knesset, Jérusalem.

 

Alors comment traduire Am Segoula ? Marc Cohn, dans son Dictionnaire hébreu-français, parle de “peuple de prédilection”. Menahem Macina adopte l’expression “bien propre de Dieu”, calquée du latin Peculium. Le grand-rabbin Lazare Vogue, éminent traducteur et philologue, préfère celle de “peuple spécial”, que nous lui empruntons. Oui, Israël est bien un peuple spécial, comme en atteste son destin incomparable ! Sur ce point, tous s’accordent, qu’ils soient convaincus que l’élection d’Israël est d’origine divine, ou qu’ils y voient la conséquence de son histoire profane. 

 

Sur la même racine que Segoula, l’hébreu comporte plusieurs mots, parmi lesquels nous mentionnerons le Sigoul (סיגול), qui désigne l’adaptation, l’accomodation, et le Segol (סגול) qui désigne la couleur violette. Le lien entre le premier et notre peuple est évident : le secret de sa survie a résidé à la fois dans sa fidélité à sa vocation d’Am Segoula, et à sa capacité d’adaptation et d’accomodation aux circonstances, parfois très dures, découlant de la jalousie que les autres peuples ont vouée au “peuple élu” de Dieu. Quant au second, lisons les explications d’Irit Slomka Saguiv, dans son beau livre L’hébreu, miroir de l’être (1) : 

 

La couleur violette est un mélange à proportions égales de deux couleurs : le rouge et le bleu. Le rouge est symbole de «sang», de charnel et terrestre. Le bleu évoque le ciel, le spirituel. Ce mariage crée le violet, qui symbolise la tempérance, le juste milieu (2). Or, la racine SGL (Sameh Guimel Lamed) signifie s’habituer, s’adapter. C’est là que nous découvrons notre singularité, notre spécifité, nos «trésors» que personne d’autre au monde ne possède. C’est alors que nous devenons «capables» et «aptes» à être et à agir au mieux dans ce monde. Cela demande une longue adaptation, qui dure de longues années, parfois toute une vie. Mais si nous en sommes conscients, chaque jour nous y rapproche”.

 

David Ben Gourion à Sdé Boker

 

Nous laisserons le dernier mot à David Ben-Gourion, premier Premier ministre de l’Etat d’Israël et lecteur assidu de la Bible, qui avait déclaré à un journaliste anglais, dans une de ses dernières interviews : “Nous avons eu un grand Juif, il y a environ 3300 ans. C’est le plus grand Juif que notre peuple a connu. Son nom était Moshé. Il a dit :”Vous êtes la plus petite des nations et vous devez être un peuple spécial (Am Segoula)”. A la question de savoir si Israël avait rempli cette mission, Ben Gourion répondit : “Pas encore” (3).

 

Pierre Lurçat

 

(1) Editions Grancher 2001.

(2) Ajoutons que le violet est en Occident, symbole de la noblesse et de la royauté.

(3) Cette interview a été diffusée en Israël en 2016, dans le beau film de Yariv Mozer and Yael Perlov intitulé "Ben-Gurion: Epilogue".

 

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Etincelle d'hébreu - Bessorot Yob - bonnes et mauvaises nouvelles

December 24 2018, 20:18pm

Posted by Pierre Lurçat

 

La semaine écoulée a été marquée par le décès tragique de Rona Ramon, veuve de l'astronaute Ilan Ramon. Il y a quelques années, Rona Ramon avait soutenu une proposition de loi, intitulée "Hoq Meqablei Bessorot Yob", visant à interdire aux journalistes de s'approcher des familles de soldats tombés pendant les 48 heures suivant leur décès. Rona Ramon avait en effet appris la terrible nouvelle de la disparition de son fils Assaf – devenu pilote sur les traces de son père – par une meute de journalistes venus l'assaillir, dès que l'information était tombée sur leurs téléscripteurs…

 

Rona Ramon z.l.

 

Cette proposition de loi est riche d'enseignements sur la réalité israélienne et sur les mœurs de certains journalistes, mais c'est uniquement sur l'aspect linguistique que nous voudrions nous arrêter. "Bessorot Yov" – de mauvaises nouvelles, littéralement des "nouvelles de Job"- est une expression parlante qui évoque le personnage biblique de Job (Yov איוב en hébreu). Le mot Bessora (בשורה) signifie un message ou une nouvelle, bonne ou mauvaise. Dans la plupart des cas, il désigne en fait une bonne nouvelle, au point que l'expression biblique "Ich Bessora" (איש בשורה) signifie un "bon messager", c'est-à-dire le porteur d'une bonne nouvelle, comme dans le passage du livre de Shmuel ou Ahimaats court apporter au roi la bonne nouvelle que l'Eternel l'a vengé de ses ennemis (II Samuel 18).

 

"Joab lui répondit : tu ne serais pas aujourd'hui un bon messager, apporte des nouvelles un autre jour, n'en fais rien aujourd'hui, puisque le fils du roi est mort". Ce passage contient l'expression "Ich Bessora", porteur de bonne nouvelle, et le verbe Lé-vasser, announcer une nouvelle. Notons que le mot Bessora, avec l'article défini, Ha-Bessora, désigne aussi L'Evangile (La "Bonne Nouvelle"). Ce sens religieux est, comme souvent, un emprunt du christianisme au judaïsme, puisque le mot Mévasser – Messager – désigne aussi le prophète Elie, annonciateur de la bonne nouvelle de la Délivrance.

Mevasseret Tsion

A l'époque moderne et contemporaine, de nombreux journaux ont adopté le titre "Ha-Mevasser" – le Messager. Le plus fameux était un journal sioniste publié à Constantinople entre 1909 et 1911. Un de ses rédacteurs était le leader sioniste Vladimir Zeev Jabotinsky. A noter aussi, la ville de Mévasseret-Tsion, littéralement "L'annonciatrice de Sion", qui se trouve sur la route de Jérusalem. Terminons cette rubrique par le souhait traditionnel, utilisé notamment chez les Juifs Habad, "Bessorot tovot !"- De bonnes nouvelles !

Pierre Lurçat

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