Une étincelle d’hébreu : “Bé-Damayikh Hayyi” - Quand la Bible et Naomi Shemer éclairent notre quotidien, P. Lurçat
C’est le génie de la langue hébraïque de rester toujours jeune. Elle est, pourrait-on dire, la langue antique et jeune du peuple éternel, de retour sur sa terre retrouvée. Pour illustrer ce phénomène sui generis, j’ai choisi le texte d’une chanson de Naomi Shemer, qui résonne de manière tragique avec l’actualité terrible de ce matin. “Bé-Damayikh Hayyi” est une des dernières chansons écrites par la grande Naomi Shemer. Elle porte en titre le fameux verset du prophète Ezechiel – que chaque Juif connaît au moins pour l’avoir entendu lors de la cérémonie de la Brith Mila – “Vis dans ton sang”.
Ce verset, rappelle Avraham Zigman dans le très beau livre qu’il a consacré à l’œuvre de Naomi Shemer[1], est la parole adressée par Dieu, par la voix du prophète Ezechiel, à Jérusalem. “L’obligation de ‘vivre dans le sang’ n’a malheureusement pas changé depuis l’époque du prophète et jusqu’à nos jours, car l’histoire du peuple Juif baigne dans le sang”, écrit encore Zigman. C’est sans doute la raison pour laquelle les mots de la Bible nous sont tellement proches, ces jours-ci plus encore que d’habitude.
“Les mots antiques me donnent de la force, dans les voix anciennes je puise un réconfort” : c’est ainsi que Naomi Shemer décrit sa relation intime avec l’hébreu de la Bible, dans la chanson Bé-Damayikh Hayyi. On ne saurait mieux décrire ce que de nombreux Juifs en Israël et à travers le monde trouvent actuellement dans le Livre des Livres (Sefer ha-Sefarim), depuis le début de la guerre qui a commencé le jour de Simhat Torah, où nous avons repris la lecture du Livre de Berechit. Personnellement, la lecture de la section hebdomadaire de la Bible m’éclaire plus sur la guerre que bien des commentaires savants entendus à la radio, et je suis certain de ne pas être le seul dans ce cas.
La Bible n’est pas seulement le récit de notre histoire nationale et le trésor que nous avons légué à l’humanité (qui a encore tant de mal à le lire et à le comprendre). Elle est aussi le Livre dans lequel nous trouvons la clé des événements que nous vivons et aussi, avec l’aide de D., la capacité d’endurer les difficultés de notre histoire. “Et soudain, un arc-en-ciel apparaît au-dessus de ma tête, un éventail coloré se déploie, annonciateur de vie et d’espoir, de paix, de tranquillité et de Hessed”. Que les mots de Naomi Shemer nous donnent la force et la persévérance, et que D.ieu protège nos soldats, ramène nos captifs et console nos familles endeuillées !
P. Lurçat
[1] Midrash Naomi, Les sources juives de la poésie de Naomi Shemer, Yad Ben Tsvi 2009.