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frederic encel

Frédéric Encel est-il le nouveau porte-parole du Quai d'Orsay?

November 19 2023, 06:31am

Posted by Philippe Karsenty et Pierre Lurçat

F. Encel recevant un prix du ministère des Affaires étrangères français, 2021

F. Encel recevant un prix du ministère des Affaires étrangères français, 2021

Il se passe des choses stupéfiantes en France.  Un « humoriste » antisémite, qui traite le Premier Ministre israélien de « nazi sans prépuce », ne reçoit qu’un simple avertissement de la direction de France Inter.  Un autre « humoriste » sert de conseiller au président français et lui recommande de ne pas aller manifester contre l’antisémitisme pour ne pas enflammer les banlieues.  Une exposition intitulée « Ce que la Palestine apporte au monde » est prolongée en raison de son succès, et l’antisémitisme atteint de nouveaux sommets. Mais le plus désolant est sans doute de voir un commentateur médiatique juif, qui depuis trente ans se fait passer pour « pro-Israélien », défendre bec et ongles la politique arabe de la France et l’attitude de plus en plus hostile du président Macron envers Israël.

 

            Alors que la position de la France dans la guerre lancée par le Hamas contre Israël suscite l’indignation générale, il faut écouter l’interview très révélatrice qu’a donnée Frédéric Encel sur Radio France Internationale. Il s’y livre à un plaidoyer pro-Macron et pro-Quai d’Orsay, qui n’étonnera que ceux qui croyaient encore que F. Encel défendait des valeurs proches de celles d’Israël. Plutôt que de longs commentaires, mieux vaut livrer au lecteur la transcription des moments clés de cette interview, intitulée sobrement « Dans le discours diplomatique français, il y a une volonté d’originalité ».

 

Verbatim :

 

F. Encel. « Le discours diplomatique français a évolué de manière relativement logique… Je m’inscris en faux par rapport à beaucoup d’observateurs qui considèrent que la politique d’Emmanuel Macron est erratique… En réalité il y a une volonté d’originalité, avec deux faits marquants qui ont paru contradictoires mais qui me paraissent assez cohérents. Le premier c’est la proposition française d’une coalition internationale contre le Hamas, façon Daech. Même Biden ne l’a pas proposé. Et puis la demande assez originale d’un cessez-le-feu… Ce cessez-le-feu correspond finalement après cinq semaines de guerre à quelque chose d’assez banal… Il y a une quête d’originalité, quant à l’efficacité des propositions françaises, c’est difficile de préjuger de leur succès

 

RFI : La France a appelé à une trêve humanitaire à Gaza, puis à un cessez-le-feu, c’est quand même un changement de position ?

F.E. Oui, vous avez raison… Mais c’est un changement qui paraît cohérent avec la durée, l’ampleur et la nature de la guerre. Une trêve humanitaire, cela signifie laisser souffler la plus grande partie de la population civile palestinienne, qui évidemment n’est pour rien dans les massacres du 7 octobre.

RFI. Ces changements de sémantique que vous estimez logiques, Frédéric Encel, ne sont-ils pas dus à la peur d’une importation du conflit sur le territoire français ?

F.E. Je vais vous dire quelque chose d’assez fort, avec beaucoup de vigueur… La France est un Etat souverain, c’est en principe une puissance considérable. L’instrumentalisation de la cause palestinienne c’est juste intolérable ! (...) Je ne pense pas pour l’instant qu’Emmanuel Macron joue la partition de la France au Proche-Orient en fonction de la paix civile sur le sol de la République…

RFI. Mais est-ce que la position de la France dans ce dossier est vraiment si différente de celle des alliés occidentaux de la France ?

F.E. Eh bien non, non seulement elle n’est pas très différente, mais elle n’est pas différente de celle qui prévalait depuis 1967… En réalité, le Quai d’Orsay et l’Elysée ont maintenu systématiquement la même position française depuis 1967, qui d’ailleurs est une position onusienne, c’est la solution des deux Etats, moyennant une sécurité et des frontières sûres et reconnues pour Israël… Il n’y a rien de nouveau. On le dit peut-être avec moins de conviction. La France comme d’autres Etats ont considéré avec raison que ce conflit était devenu un simple contentieux local… »

 

Mais le meilleur est pour la fin (In cauda venenum !) :

RFI. Frédéric Encel, on apprend ce matin que plusieurs ambassadeurs de France au Moyen-Orient disent regretter le virage pro-israélien d’Emmanuel Macron dans ce dossier, c’est quelque chose de nouveau ?

F.E.  Oui, c’est vrai… Le Quai d’Orsay n’est pas, contrairement à ce que fantasment beaucoup de gens, super pro-arabe... Il tient compte des réalités. Il y a 22 Etats arabes, il y a un Etat juif c’est Israël et on considère chez ces diplomates que la France est en train de perdre une partie de son influence dans le monde arabe ».

 

Non, M. Encel, la politique étrangère d’Emmanuel Macron n’est ni logique, ni originale, ni cohérente et le Quai d’Orsay ne tient pas « compte des réalités ». Non, M. Encel, la population civile de Gaza n’est pas innocente des crimes du Hamas, nombreux sont ceux qui y ont participé et encore plus s’en sont réjouis, à Gaza comme à Ramallah. Oui, M. Encel, « Emmanuel Macron joue la partition de la France au Proche-Orient en fonction de la paix civile sur le sol de la République », c’est son conseiller banlieues, Yassine Bellatar, qui l’a confirmé.

 

Si le Quai d’Orsay a trahi l’amitié franco-israélienne depuis des lustres, cela ne rend pas sa politique plus respectable. Quand Israël se bat pour sa survie, chacun a le droit d’espérer que les démocrates du monde entier se rangent aux côtés de l’Etat d’Israël qui défend les valeurs que tous devraient promouvoir. Aujourd’hui, défendre la politique étrangère d’Emmanuel Macron au Proche-Orient n’est pas seulement une erreur politique. C’est une faute morale.

 

Après avoir écouté Frédéric Encel encenser la politique étrangère française et flatter Charles Enderlin sur BFM TV, reste à se demander ce qu’il attend de ses flagorneries. Un poste au Quai d’Orsay ? Une ambassade ? Des contrats bien rémunérés ? Se réconcilier avec Pascal Boniface ? Ah, qu’il est loin le temps où Frédéric Encel signait ses messages par « Salutations Jabotinskiennes »

Pierre Lurçat et Philippe Karsenty

Article paru initialement sur Dreuz.info

 

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Réponse à Frédéric Encel, qui accuse Israël d’être une « voyoucratie » et au CRIF qui cautionne ses propos

January 12 2023, 17:10pm

Posted by Pierre Lurçat

F. Encel recevant un Prix du Ministère français des Affaires étrangères : géopoliticien ou politicien?

F. Encel recevant un Prix du Ministère français des Affaires étrangères : géopoliticien ou politicien?

 

Cher Frédéric,

 

Tu me permettras de te tutoyer, en souvenir de notre ancienne amitié, lorsque nous étions étudiants à Paris et que tu n’avais pas encore entamé ton brillant parcours à l’institut de sciences politiques de Grenoble. A l’époque, nous partagions la même passion pour Israël et pour le sionisme, qui nous paraissait alors un idéal lointain. Trois décennies et demie plus tard, nos chemins ont divergé ; tu as mené ta carrière en France, qui t’a mené aux « sommets » de la géopolitique française, tandis que j’ai fait mon alyah et vis à Jérusalem depuis 30 ans.

 

Si je t’écris aujourd’hui publiquement, c’est parce que tu viens de publier sur le site du CRIF une interview dans laquelle – tout en revendiquant une « géopolitique humaniste » (sic) et en prônant une « Europe puissante » – tu qualifies Israël de « voyoucratie ». Je ne remets pas en question tes compétences de géopoliticien, que tu as prouvées en publiant plusieurs livres intéressants, depuis ta Géopolitique de Jérusalem que j’avais lue autrefois. Non, cher Frédéric, ce qui m’attriste et me choque, c’est la manière dont tu disqualifies le nouveau gouvernement israélien et voues aux gémonies notre petit pays, dans des termes qui conviendraient mieux au Monde diplomatique ou à L’Humanité qu’à un site communautaire juif (lequel aurait été mieux inspiré de ne pas laisser passer ces propos outranciers et insultants).

 

Car vois-tu, « voyoucratie » signifie, selon le Larousse, le « Pouvoir exercé par des voyous », ou le « gouvernement des voyous ». Est-ce vraiment ainsi que tu considères notre pays, la seule démocratie du Moyen-Orient, comme nous le proclamions alors, lorsque nous militions ensemble dans les rangs du Tagar, mouvement des étudiants juifs de France ? J’ai du mal à le croire. Je préfère penser que tu es, toi aussi, désinformé, à force de lire Le Monde et les autres médias français et que tu devrais venir plus souvent ici, au lieu d’asséner tes jugements à l’emporte-pièce depuis Paris.

 

Si l’envie te prenait de nous rendre visite, je pourrais te faire rencontrer Betsalel Smotrich, qui n’a selon toi « rien à faire au sein du gouvernement d’un État de droit » (depuis quand es-tu devenu l’autorité morale, habilitée à décider qui a le droit de siéger au gouvernement d’Israël ?) Tu constaterais que c’est un homme très intelligent et qui pourra sans aucun doute t’en apprendre beaucoup sur notre pays et sur notre Etat, que tu crois connaître. On peut certes ne pas partager ses opinions ou celles d’Itamar Ben Gvir, c’est ton droit le plus strict. Moi-même, en tant que traducteur et disciple de Jabotinsky, je peux comprendre ceux qui préféraient le Likoud d’autrefois à celui d’aujourd’hui. Mais je ne m’autoriserai jamais à insulter le gouvernement israélien comme tu le fais aujourd’hui.

 

Quant aux « actes tout à fait répréhensibles aux yeux de la loi israélienne » qu’auraient commis « Smotrich et Ben Gvir » selon toi, je te rappellerai ici quelques faits de notre jeunesse militante, puisque tu te permets de juger et de condamner sans appel les ministres du gouvernement de notre Etat. Quand nous étions tous deux militants du Tagar, branche étudiante du Betar, certains notables de la communauté nous qualifiaient aussi de « voyous ». A l’époque, tu savais bien que la justice était de notre côté, quand nous sifflions Robert Badinter au Vel D’Hiv, quand nous taguions « Arafat assassin » sur les murs, ou quand nous défilions fièrement avec le drapeau d’Israël dans les rues de Paris. Cela faisait-il de nous des « voyous » ?

 

Mais sans doute cette lettre est vaine, car tu évolues aujourd’hui dans des sphères bien différentes de celles que nous fréquentions jadis. Peut-être est-ce pour cela que tu te crois désormais autorisé à décider qui doit siéger dans le gouvernement israélien… et qui a la « compétence dans les domaines sécuritaires et/ou militaires » (quelles sont les tiennes pour écrire cela ?) J’ai appris que tu avais été nommé Chevalier de l’ordre du mérite et que tu avais reçu un « Grand Prix de géopolitique » décerné par le ministère des Affaires étrangères et que t’a remis le ministre en personne ! Je me suis laissé dire que tu entretenais des relations très amicales avec M. Le Drian, ce même ministre du quai d’Orsay qui « mettait en garde Israël contre le risque d’apartheid” » (« Oï a broch » aurait dit ma grand-mère).

 

Bien entendu, ceci ne justifie pas cela. On peut faire carrière en France, sans pour autant renoncer à ses convictions et à son passé. Il n’est plus nécessaire, comme à l’époque de Heine, de se convertir ou de renoncer à son identité pour être un bon Français. Qualifier Israël de « voyoucratie » ne t’apportera aucune distinction et aucun honneur (à moins que tu ne brigues le poste de ministre des Affaires étrangères ?) Je te prie donc, cher Frédéric, au nom de nos engagements et de notre lointaine amitié, de relire tes propos et de réfléchir à leur sens. L’erreur est humaine, mais comme tu le sais bien, « perseverare diabolicum ». Je terminerai par le salut traditionnel du Betar, dont tu n’as peut-être pas oublié le sens, celui de Yossef Trumpeldor, de Jabotinsky et des autres héros de notre jeunesse, Tel-Haï !


Pierre Lurçat

 

PS A Monsieur Yonathan Arfi, président du CRIF,

 

Est-ce vraiment le rôle du CRIF de publier des propos qui incriminent Israël et son gouvernement, surtout lorsqu’ils sont ceux d’un géopoliticien juif, considéré (à tort ?) comme pro-israélien ? Comment pourrez-vous encore protester quand les médias français insultent Israël et le qualifient de « démocratie illibérale » ou de « démocratie illusoire », si le CRIF lui-même cautionne le qualificatif de « Voyoucratie » apposé à l’Etat juif ? Et comment pensez-vous être accueilli par un ministre du gouvernement d’Israël lorsqu’il saura ce que vous publiez sur votre site ?

 

 

VERBATIM – LES PROPOS DE F. ENCEL SUR LE SITE DU CRIF

 

« Sur l’État hébreu, ce qui me préoccupe plus que la droitisation et le nationalisme – après tout, un nationaliste fervent, Begin, fit la paix avec l’Égypte, et un autre, Sharon, évacua toute la bande de Gaza – c’est la voyoucratie. Smotrich et Ben Gvir ont tenu des propos et commis des actes tout à fait répréhensibles aux yeux de la loi israélienne et, en outre, n’ont strictement aucune compétence dans les domaines sécuritaires et/ou militaires qu’ils prétendent révolutionner. Ces individus objectivement extrémistes n’ont à mon sens rien à faire au sein du gouvernement d’un État de droit, et pas davantage un Arié Derhy déjà lourdement condamné dans l’exercice de ses fonctions ministérielles et à nouveau mis en examen ! Jamais nulle part la voyoucratie n’est positive. »

L'entretien du Crif - Frédéric Encel, géopolitologue et essayiste : "Aux Européens d’avancer vers l’Europe puissance !" | Crif - Conseil Représentatif des Institutions Juives de France

F. Encel à la tribune d'une conférence du Tagar, 1992

F. Encel à la tribune d'une conférence du Tagar, 1992

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