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temoignage

Paris 1943 - L’arrestation de Fanny et Florette

April 8 2021, 09:18am

Posted by Liliane Lurçat

Dans l’extrait qui suit, ma mère raconte le départ de son frère aîné en Palestine, en pleine guerre, et l’arrestation de ses cousines, Florette et Fanny, qui ne sont pas revenues de déportation. Ma fille aînée porte le prénom de la cousine Fanny Hyd. P. Lurçat

 

“Je reçois un jour une lettre de Christiane. Sur l’enveloppe, elle a écrit en gros caractères “urgent et confidentiel”. Elle me donne rendez-vous dans un endroit discret et m’explique que toute sa famille est recherchée par la police. Les flics sont des salauds, ils torturent les gens qu’ils arrêtent et leur mettent du poivre sur les parties. J’ai rencontré son frère dans le métro, il portait la barbe. Bonjour Louis ! Vous faites erreur, mademoiselle, je ne vous connais pas. La sœur de Christiane, Janette, c’est la grande copine de ma cousine Florette. Elle m’appelle la grande Liliane. Florette, enfant, était très livrée à elle-même. Elle est très peu allée à l’école. A 6 ans, elle a appris des danses acrobatiques dans un cirque, elle sait se contourner dans tous les sens. Sa mère a quitté la rue des Carmes, pour un logement du 3ème arrondissement. Un long couloir noir et puant, où de vilains messieurs vous agressent. Deux pièces obscures et minuscules, donnant sur une cour nauséabonde. Florette et sa sœur, Fanny, sont dehors toute la journée. Le père est joueur et épileptique et la mère se lamente.

 

La cousine Fanny

La vie de Florette a changé le jour où, après avoir hésité longtemps, elle a franchi le seuil du local des Jeunes Filles de France. “Je veux venir ici”. “Va te débarbouiller d’abord”, lui a répondu Janette. Elles sont devenues amies. Florette soigne sa toilette, Florette fait du camping et elle chante, elle a une belle voix sonore : “Allons au-devant de la vie, allons au-devant de l’amour”. Comme toutes les filles de la famille, elle a le sein fort, la joue rose et la lèvre charnue. Ss yeux sont noirs et brillants et elle rit d’un grand rire. Si un garçon l’approche, elle le rabroue d’une tape. Elle travaille, elle fait de la couture et elle en profite pour rafistoler les hardes des siens.

C’est une militante, elle lit les brochures du Parti, elle comprend le monde. Quand la guerre éclate, elle fait tourner la ronéo dans le petit logement. Elle sait, la veille, que c’est la grande Rafle de juillet. Elle dort chez nous. Au matin, Fanny arrive : ils arrêtent Papa et Maman. Elle y court. Elle s’interpose. “Viens avec!” Elle y va et Fanny aussi. Elle est partie pour rien, on les a tous séparés à Pithiviers. Elle est arrivée à Auschwitz, dans un convoi de femmes et d’enfants. La douche pour tout le monde. Le lendemain matin, elle a rencontré Janette, sa meilleure amie. Elles ont parlé toute la nuit. Florette est morte à 18 ans. Fanny est morte aussi, je ne sais où, Fanny est morte je ne sais quand. Elle n’avait pas beaucoup plus de 15 ans.

 

Menahem, le frère aîné

Les amitiés changent pendant l’Occupation. Le père n’est plus là, le frère aîné est parti pour la Palestine. Il s’intéressait trop à la Résistance et la mère avait peur. Les Allemands ont organisé un jour un échange entre sujets britanniques vivant dans les territoires occupés et prisonniers allemands en Palestine. Le frère est parti pour un long voyage en train, qui devait l’amener à Jérusalem, en contournant la Méditerranée. Il avait 17 ans. Le lecteur assidu de L’Heure joyeuse, l’enfant rêveur et absorbé a pris le grand tournant. Il sera un homme d’action, un militaire, un défenseur d’Israël. Par lui, la famille reprend racine en terre promise. Il réussit la vie rêvée par le père. Il épousera une petite Juive irakienne aux yeux bleus et vivra dans l’ambiance orientale d’une belle-mère, d’oncles et de tantes, de cousins et d’aïeuls centenaires, tous unis comme les doigts de la main. Mais dans ses rêves, les bouquinistes des quais de Seine garderont la bonne place. Plus de grand frère pour me guider vers les professions enviées du secrétariat. Ma vie? C’est mon affaire.

 

Extrait de Un parapluie pour monter jusqu’au ciel, de Liliane Lurçat

Disponible sur Amazon

 

 

“Ce livre vous donne un coup dans l’estomac. C’est un document extraordinaire, avec une grande force littéraire”.

Michel Gurfinkiel

“Un très beau livre”.

Monique Naccache, Times of Israel

“Il y a dans ce livre de Liliane Lurçat une acuité du regard qui le rapproche des caricaturistes… et les portraits qu’elle fait défiler en quelques coups de crayon alertes sont hauts en couleurs. Les portraits de ses parents sont des petits chefs-d’œuvre qui intègrent le physique, le psychologique et le sociologique, un peu comme Honoré Daumier”.

Olivier Ypsilantis, Zakhor Online

 

“Ce livre ravira les amoureux de Paris, qui le redécouvriront sous les yeux d'une enfant espiègle et libre, les amoureux d'histoire, qui auront la chance de lire le témoignage unique d'une enfant qui a survécu a la déportation par des concours de circonstance inhabituels, et ravira les amoureux de fins mots d'enfants et d'humour cocasse”.

Gabrielle Pittiglio, Amazon

“Les souvenirs de Liliane Lurçat sont écrits au présent, ce qui leur donne un rythme rapide et presque haletant…”

Liliane Messika, Mabatim.info

“Très beau récit auto-biographique, d'une époque où de nombreux quartiers de Paris étaient encore populaires. Petite histoire qui s'inscrit dans la grande, on rit volontiers à des situations décrites avec simplicité. Même dans une époque très compliquée, il reste toujours de l'espoir. A lire absolument…

Dominique Pulejo, Amazon 

 

Ce récit, sobre et dénué de sentimentalisme, d’une jeune Juive née en Palestine, mais dont la famille a dû s’installer à Paris, faute de travail à Jérusalem, est un témoignage, à la fois réaliste et émouvant. un très beau texte à l’écriture incisive et enlevée”. 

 

Evelyne Tschirhart, Lettres d’Israël

 

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