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genocide

L’intention exterminatrice arabe et son “inversion victimaire” dans l’accusation portée contre Israël

January 14 2024, 12:51pm

Posted by Pierre Lurçat

Hassan Nasrallah

Hassan Nasrallah

La plainte déposée par l'Afrique du Sud devant la CJI n'est pas seulement un scandale sur le plan moral et juridique. Elle s'inscrit en fait dans l'histoire longue de l'antisémitisme et de "l'inversion victimaire", comme je l'explique dans les lignes suivantes extraites de mon livre Les mythes fondateurs de l'antisionisme contemporain.

L’intention exterminatrice et génocidaire était bien présente dans le camp arabe, dès l’origine du conflit, et elle n’a pas disparu à ce jour. Citons, à titre d’exemples récents, les déclarations génocidaires du chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, affirmant de manière récurrente que le Hezbollah est “capable de détruire Israël”, et les déclarations de dirigeants du Hamas ou de l’Iran qui vont dans le même sens. Ainsi, le dirigeant iranien du Corps des Gardiens de la Révolution islamique, Qassem Soleimani, récemment tué dans une frappe américaine, avait déclaré en septembre 2019 que la “destruction d’Israël n’était plus un rêve”

 

Cette intention exterminatrice arabe (ou iranienne) n’a jamais disparu et a reçu un commencement d’exécution à plusieurs reprises (en 1948, en 1967, etc.). Elle s’accompagne d’un discours auto-justificatif, qui prétend faire d’Israël le coupable d’un plan d’extermination génocidaire des Palestiniens. Tout se passe donc comme si les ennemis d’Israël projetaient sur celui-ci leurs propres intentions génocidaires. C’est dans cette projection permanente que réside le fondement du mythe du génocide du peuple palestinien.

 

Pour comprendre comment fonctionne ce mécanisme, constant dans le discours et dans la stratégie politique arabe, prenons pour exemple le discours prononcé à Davos par Yasser Arafat, dirigeant de l’OLP et chef de l’Autorité palestinienne, en janvier 2001. Cet épisode révélateur se situe quelques mois après le déclenchement de la “Deuxième Intifada”, vague de violences ayant pris pour prétexte la visite du Premier ministre israélien Ariel Sharon sur le Mont du Temple, mais avait été en réalité préméditée plusieurs mois à l’avance par Arafat lui-même, après l’échec des négociations de Camp David.

 

Comme le rapporte l’historien Benny Morris dans son livre Victimes, le dirigeant israélien Shimon Pérès - qui était encore porté par l’euphorie du “processus de paix” et du “Nouveau Moyen-Orient”, malgré la sanglante vague de violences déclenchée l’année précédente par Arafat - évoquait “la nécessité et le caractère inévitable d’un partenariat, de la paix et de la coopération entre Israël et les Palestiniens”. Le dirigeant palestinien, de son côté, peu soucieux de polir son propos devant le forum économique mondial, qualifiait l’État juif de “fasciste”, de “colonialiste” et “d’assassin” et accusait Israël “d’utiliser des munitions à l’uranium” contre les Palestiniens, en s’efforçant de les “affamer”, pour “détruire le peuple palestinien”. Ce faisant, Arafat reprenait à son compte le mythe du génocide, soi-disant fomenté par les Juifs contre le peuple palestinien.

 

Benny Morris, qui relate cette anecdote, décrit bien le décalage entre l’état d’esprit du dirigeant de la gauche israélienne, qui croyait toujours que la paix pouvait être atteinte au moyen de concessions territoriales, et celui des Palestiniens (et des Syriens) qui lui opposaient une attitude radicale et intransigeante. “L’Intifada, explique Morris, réponse palestinienne aux efforts de paix israéliens, sema la confusion dans l’idéologie de la gauche israélienne... Il y régnait un sentiment de désarroi et de trahison par le raïs palestinien”. Ce désarroi tient en large partie à l’incompréhension, chez une partie de la gauche israélienne, de la nature profonde de l’hostilité arabe envers Israël, c'est-à-dire de l’antisionisme.

 

La filiation historique entre l’antisionisme et l’antijudaïsme 

 

En réalité, ce mécanisme d’inversion permanent consistant à vouloir détruire l’adversaire tout en l’accusant de ses propres intentions n’a rien de nouveau. L’historien Georges Bensoussan écrit à ce propos que “tout discours meurtrier impute en effet à sa victime le dessein qu’il nourrit à son endroit”. Pierre André Taguieff analyse également ce mécanisme, auquel il a donné le nom, que nous lui empruntons, d’inversion victimaire, dans ses “trois grands moments historiques” : celui de l’antijudaïsme antique et médiéval, celui de l’antisémitisme moderne, et enfin celui de l’antisionisme contemporain. Cette perspective historique plus large nous permet de comprendre comment le mythe du “génocide du peuple palestinien” s’inscrit dans le droit fil de l’accusation de crime rituel, qu’il reprend à son compte et auquel il donne des formes nouvelles.

P. Lurçat

(Extrait de mon livre Les mythes fondateurs de l'antisionisme contemporain, éditions L'éléphant 2021)

Ma conférence "Comment restaurer la dissuasion d'Israël" est en ligne ici, abonnez-vous à ma chaîne YouTube pour accéder à mes dernières conférences!

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De “Beyrouth-Varsovie” à Gaza, en passant par Deir Yassin et Djénine : variations autour du mythe du génocide du peuple palestinien

January 10 2024, 16:48pm

Posted by Pierre Lurçat

De “Beyrouth-Varsovie” à Gaza, en passant par Deir Yassin et Djénine : variations autour du mythe du génocide du peuple palestinien

(Extrait de P. Lurçat, Les Mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain, éditions l’éléphant 2021. En vente sur Amazon et B.O.D.).

La Première Guerre du Liban, en 1982, marque une étape importante dans le développement du discours antisioniste contemporain et dans l’élaboration du mythe du “génocide du peuple palestinien”. Comme l’écrivait alors Léon Poliakov, dans un petit livre publié en 1983[1], “la guerre du Liban fit passer Israël et plus généralement les Juifs au premier plan de l’actualité. L’invasion israélienne fournit aux médias la possibilité de déchaîner des passions jusque-là tenues en laisse, ou simplement inexistantes. C’est dans ces conditions qu’un climat s’instaura dans les sphères gouvernementales (occidentales), qui poussait M. Pierre Mauroy (alors Premier ministre) à déclarer, dès le 18 juin 1982 : “Ce n’est pas en détruisant le peuple palestinien qu’on réduira le terrorisme”.

 

Poliakov estime que “le principal responsable de cette désinformation fut la télévision française”. De son côté, l’ancien ministre Pierre Mendès-France pouvait écrire alors, dans les colonnes du Nouvel Observateur, que “le spectateur qui voit les images projetées (à la télévision) est naturellement enclin à penser que c’est toute une nation qui est écrasée sous les bombes… On parle de Juifs tueurs d’enfants, de génocide, d’holocauste… comme si c’était l’objectif même du gouvernement israélien de massacrer délibérément des civils et des enfants[2].

 

Le diagnostic porté par Mendès-France (et par Poliakov, qui le reprend à son compte) a tendance à faire porter la responsabilité de la vague d’antisémitisme, concomitante à la guerre du Liban, aux seules images diffusées par la télévision française. Près de quarante ans plus tard, dans un contexte assez similaire, non plus au Liban mais à Gaza, Pierre-André Taguieff portera un diagnostic tout aussi sévère à l’égard de la responsabilité des médias dans la diffusion du discours et des mythes antisionistes, écrivant [3]:

 

La mise en accusation quasi-planétaire d’Israël est moins le résultat de la propagande palestino-islamiste, qu’un effet du fonctionnement du système médiatique. La condamnation unanime d’Israël, avant toute enquête et indépendamment de toute analyse des faits, témoigne d’abord du mode de formation et de diffusion de l’information journalistique…”. En effet, poursuit-il : “les médias choisissent de privilégier les récits allant dans le sens des présupposés de la culture politique majoritaire dans le monde professionnel des journalistes. Or, l’anti-israélisme et le pro-palestinisme, depuis les années 1990, se sont inscrits dans la doxa journalistique, reflétant le parti-pris “antisioniste” partagé, avec plus ou moins de virulence, par toutes les gauches”.


              Quand le Premier ministre Mauroy parle de “détruire le peuple palestinien” (à propos du siège de Beyrouth par l’armée israélienne), il montre la perméabilité de la classe politique française au discours antisioniste radical, jusque dans ses accusations les plus insensées. Citons à ce sujet la remarque faite dans un contexte différent par Éric Marty, professeur de littérature française, au sujet de la visite d’Ariel Sharon sur le Mont du Temple en octobre 2000 : “Que les Palestiniens jouent du symbole, du mythe, de la mystification, c’est de bonne guerre. Que les médias français, que les hommes politiques et les plus grands responsables comme le Président de la République, soient les canaux passifs de cette propagande laisse rêveur quant à  la maturité politique et intellectuelle de la France[4].

Sabra et Chatila – événement historique ou événement mythique ?

L’outrance manifestée dans le récit médiatique du siège de Beyrouth, devenue Varsovie assiégée sous la plume de nombreux journalistes occidentaux, sera encore dépassée lors de l’épisode de Sabra et Chatila. Rappelons brièvement les faits : entre le 16 et le 18 septembre 1982, des centaines de réfugiés palestiniens étaient massacrés par des milices chrétiennes phalangistes dans la banlieue de Beyrouth, sur l’instigation du chef des services secrets libanais, Elie Hobeika. Paul Giniewski, auteur de plusieurs ouvrages sur l’antisionisme, note à ce sujet qu’aucun des grands thèmes de la démonisation d’Israël n’a occupé l’avant-scène avec une permanence sans faille, autant que le massacre de Sabra et Chatila et le rôle prêté à Ariel Sharon, alors ministre de la Défense.

 

On mesure à quel point le thème de Sabra et Chatila est demeuré vivace, dans la propagande palestinienne et dans ses relais occidentaux, à l’aune des innombrables textes, films, reportages et œuvres d’art qui lui sont consacrés jusqu’à ce jour. Citons à titre d’exemple, un remake du Guernica de Picasso, intitulé sobrement “Le massacre de Sabra et Chatila”, exposé au Tate Modern de Londres[5]. La véritable logorrhée verbale, médiatique, artistique et intellectuelle, autour du massacre de Sabra et Chatila et de la prétendue responsabilité israélienne prouve, si besoin était, la véracité du constat fait par l’écrivain Paul Giniewski [6]:

 

Quatre des plus grands journaux américains y avaient consacré davantage d’espace qu’aux dix plus grands massacres qui avaient marqué la décennie 1972-1982, et qui comprenaient celui de  l’Ouganda sous Idi amine, les 20 000 civils massacrés à Hama en Syrie, la boucherie de 2,5 millions de Cambodgiens par leurs compatriotes. Trois ans après les faits, un autre massacre eut lieu dans les mêmes camps, alors sous contrôle des Libanais chiites, faisant plus de 500 morts”. Et Giniewski de poursuivre : “Les mêmes quatre quotidiens américains y consacrèrent dix fois moins d’espace qu’au Sabra et Chatila “enjuivé”. En 1982, ce vrai, cet unique Sabra et Chatila digne de mobiliser la conscience universelle avait produit 10 000 mots sur 7 pages dans le même numéro de l’un des grands quotidiens : davantage que l’espace mérité par le débarquement allié en Normandie pendant la Deuxième Guerre mondiale”.

 

Autre exemple de cette disproportion et de cette logorrhée médiatique : le fameux texte de l’écrivain Jean Genet, “Quatre heures à Chatila”, auquel il doit une partie non négligeable de sa célébrité. Ce texte a donné lieu à d’innombrables commentaires, mises en scène, et jusqu’à un récent spectacle de danse[7]. L’écrivain français au passé trouble, (qui se présentait lui-même par les mots “Jean Genet, voleur” à ses compagnons de cellule, pendant la Deuxième guerre mondiale[8]), n’a jamais été autant apprécié et célébré que lorsqu’il a écrit ce texte et qu’il est devenu ainsi le “porte-parole” des Palestiniens, auxquels il a consacré de nombreux autres textes. Lisons à ce sujet l’analyse éclairante d’Éric Marty, dans son livre Bref séjour à Jérusalem [9]:

 

Sabra et Chatila n’est jamais apparu comme un événement au sens purement historique du terme – tel Austerlitz qui n’efface pas Wagram et qui n’est pas éclipsé par Waterloo -, il est apparu comme un surévènement, en tant qu’il rend inaudible le nom de tous les autres, en tant que les trois jours qu’il dura effacent les sept ou huit ans de guerre civile et de massacre qui le précédèrent et les huit ans de tueries qui suivirent ; il est apparu comme événement en tant qu’il est devenu l’unique événement par lequel l’on se remémore un très long épisode historique.

 

Cette analyse d’Éric Marty décrit très précisément le processus par lequel Sabra et Chatila, en tant qu'élément du mythe plus large du “génocide du peuple palestinien” - devient un événement mythique, qui efface toute la réalité historique de la guerre civile au Liban et de ses innombrables crimes, commis par des factions tellement diverses et variées, qu’il est difficile de s’y retrouver… Mais dans la version mythifiée, tout devient très simple : il ne reste plus qu’un seul crime, celui des Juifs. “Des goyim ont tué d’autres goyim, et ce sont les Juifs qu’on accuse” – la fameuse expression d’Ariel Sharon - lui-même transformé en accusé principal - dit très bien, de manière lapidaire, ce que Marty analyse sous un angle littéraire.

 

La lecture par Éric Marty du récit de Sabra et Chatila fait par Jean Genet lui permet d’établir une distinction - essentielle pour notre compréhension du discours et des mythes antisionistes – entre le fait et l’événement : “Grâce à Genet, nous avons compris… ce qu’était un événement, nous avons compris qu’un événement était tout le contraire d’un fait, nous avons compris que pour qu’un événement soit, il suppose de porter en lui une dimension métaphysique - il doit, comme phénomène, toucher à l’essence de ce qu’il représente[10].

Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain – Éditions L’éléphant.

Mon livre Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain vient d’être réédité aux éditions B.O.D. et peut désormais être commandé dans toutes les librairies.


[1] De Moscou à Beyrouth. Essai sur la désinformation, Paris, Calmann-Lévy, 1983.

[2] Le Nouvel Observateur, 14-20.8.1982, cité par Poliakov, op. cit. p. 164.

[3] Israël et la question juive, Les provinciales 2011, p. 177.

[4] Éric Marty, “L’angélisme progressiste des belle âmes”, Le Monde 11 octobre 2000, repris dans Bref séjour à Jérusalem, op. cit.

[6] P. Giniewski, Antisionisme, le nouvel antisémitisme, Cheminement 2005, p. 84.

[7] Voir le site de la ville de Créteil https://www.ville-creteil.fr/danse-sabra-et-chatila

[8] Témoignage rapporté par mon grand-père, l’architecte André Lurçat, emprisonné à la prison des Tourelles pour faits de résistance.

[9] Éric Marty. Bref séjour à Jérusalem, Gallimard 2002, p.175.

[10] Éric Marty. Bref séjour à Jérusalem, op. cit, p.175

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