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la bibliotheque sioniste

“Never again” : Qu’auraient dit Golda Meir et Menahem Begin après le 7 octobre 2023 ?

October 25 2023, 10:33am

Posted by Pierre Lurçat

“Never again” : Qu’auraient dit Golda Meir et Menahem Begin après le 7 octobre 2023 ?

France Culture a rediffusé samedi dernier la belle émission qu’Elodie Maillot a consacrée à Golda Meir, à laquelle j’ai eu plaisir à participer. En la réécoutant, je me suis demandé ce qu’elle aurait pensé des événements terribles qu’Israël a vécus depuis le 7 octobre. Je n’ai aucun doute qu’elle aurait réagi avec une force et une détermination à la hauteur de l’événement. Je me souviens bien sûr du reproche qui lui a été fait au lendemain de la guerre de Kippour, de n’avoir pas mobilisé les réservistes et de s’être abstenue de lancer une attaque préventive contre l’Egypte et la Syrie. L’écho de ces reproches est très présent aujourd’hui, dans le débat public en Israël, à travers les critiques lancées contre le gouvernement de Nétanyahou, qui n’a pas su éviter la sanglante attaque du 7 octobre.

 

Mais c’est à la Golda Meir d’après la surprise initiale que je pense aujourd’hui. Celle qui a su encourager son peuple et mener la contre-offensive avec une fermeté inébranlable, y compris lorsque les Etats-Unis ont fait pression sur Israël. Je repense à cet épisode, qu’on a rappelé récemment, durant lequel la troisième armée égyptienne, encerclée dans le Sinaï, s’est trouvée à court de provisions d’eau. Face aux demandes incessantes des Américains, pour qu’Israël laisse passer un ravitaillement pour les soldats égyptiens encerclés, Golda a rétorqué : “Qu’ils nous rendent d’abord nos soldats prisonniers !” Et elle a eu gain de cause.

 

Le 7 octobre 2023 a été, selon le mot de mon ami journaliste Michel Gurfinkiel, “à la fois notre 11 septembre, notre second Kippour et un terrible rappel de la Shoah”. Dans ces trois événements historiques, c’est évidemment le dernier qui est le plus difficile à revivre pour la conscience nationale israélienne. Les images d’enfants terrorisés, de grands-mères emmenées en captivité par les bourreaux du Hamas et de corps martyrisés évoquent un passé qu’on pensait – bien à tort – être entièrement révolu. “Never again !” s’était exclamé Menahem Begin, avant de lancer l’audacieuse opération Osirak, pour annihiler la centrale nucléaire construite avec l’aide de la France.

 

Never again !”, ce n’est pas seulement le cri du cœur de Begin, qui était véritablement habité par la Shoah, dans laquelle avaient péri un grand nombre de ses proches. C’était la croyance de tout un peuple, qui pensait vraiment avoir échappé pour toujours au risque d’être à nouveau victimes de tortionnaires et d’assassins de la trempe des nazis. Dans l’éthos sioniste, la figure du “Nouveau Juif’ signifie essentiellement cela : ne plus jamais se laisser “mener à l’abattoir” sans combattre ! Mourir, peut-être, mais les armes à la main. A cet égard, on peut dire que la réaction des Israéliens pendant et après l’attaque du 7 octobre n’a pas failli au serment implicite du “Never more” (qui n’est pas seulement celui des soldats, mais aussi des civils).

 

Et David Ben Gourion ? Le père fondateur aurait peut-être été lui aussi surpris, et sûrement terriblement affecté par la capacité des terroristes du Hamas à pénétrer sur le territoire souverain de l’Etat d’Israël pour y accomplir leurs exactions. Mais il aurait certainement su réagir avec une vigueur biblique qui fait cruellement défaut à nos dirigeants actuels, toutes tendances confondues. Oui, c’est bien dans la Bible – qui était son livre de chevet, parmi tant d’autres – que le “vieux Lion” aurait cherché l’inspiration pour rendre au centuple le coup porté à Israël par les assassins de Gaza. Et c’est dans la Bible qu’il aurait pu trouver la justification à la riposte israélienne, peut-être en citant les mots du roi David dans les Psaumes : “Je poursuis mes ennemis, je les atteins ; point de relâche que je ne les aie détruits”.

P. Lurçat

 

J’invite mes lecteurs à découvrir la Bibliothèque sioniste, collection que j’ai fondée en 2021 pour faire connaître les écrits des Pères fondateurs de l’Etat d’Israël.

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Vers le sionisme suprême : De la religion dans l’État d’Israël, Pierre Lurçat

January 19 2023, 09:07am

Posted by Pierre Lurçat

Jabotinsky passant en revue une troupe du Betar/ Camp d’ Hunter/État de New York/ 3 août 1940/Jabotinsky Institute

Jabotinsky passant en revue une troupe du Betar/ Camp d’ Hunter/État de New York/ 3 août 1940/Jabotinsky Institute

Je dédie cet article à la mémoire de Jacques Kupfer, dont la Hazkara aura lieu ce soir (jeudi)

La cause sioniste a rallié de brillantes personnalités, des « caractères » … Dans la grande galerie de ces personnages souvent étonnants, Vladimir Jabotinsky occupe une place éminente, mais aussi singulière. Cet orateur incisif, ce propagandiste zélé fut un homme d’action infatigable : fondateur du Parti révisionniste hostile à la puissance mandataire britannique et initiateur de la Légion juive, il a milité ardemment pour préserver son peuple et bâtir un État affranchi de toute tutelle étrangère. Mais, parallèlement à toutes ses actions, éclatantes sinon toujours couronnées de succès, il n’a cessé de mener, au cours de son existence mouvementée, une réflexion soutenue sur la mission d’un futur État d’Israël, sur la spécificité de la nation juive, sur le rôle qu’elle est appelée à jouer dans l’histoire. On découvre ainsi, dans ses écrits nombreux, une pensée politique originale et fort consistante. Dans le recueil de textes réunis sous le titre : Questions autour de la tradition juive, il réfléchit sur le rôle que doit prendre la religion dans l’État hébreu qu’il appelle de ses vœux.

Un éloignement mêlé de respect

Moshé Bella, auteur d’un livre de référence sur Jabotinsky, relate l’anecdote suivante : quand Eri Jabotinsky, le fils du Roch Betar, qui se trouvait alors à Addis-Abeba, lui donna son accord pour publier un recueil d’articles de son père, il lui fit cette demande : « S’il vous plaît, ne transformez pas mon père en Juif religieux ». Et il ajouta : « Mon père n’était pas religieux. Si vous publiez des articles exprimant une attitude positive envers la religion, publiez également des articles hérétiques (“אפיקורסים/apikorsim”) ». Cette anecdote permet de saisir la complexité de l’attitude de Jabotinsky envers la religion juive (et envers la religion en général). On peut résumer ainsi son attitude : un éloignement mêlé de respect. Cette double attitude a évolué au fil du temps, et Jabotinsky s’est “rapproché” du judaïsme, non certes en devenant un Juif pratiquant, mais en approfondissant son respect pour la tradition juive. Certains éléments biographiques apportent un éclairage intéressant sur cette position idéologique et permettent parfois de mieux la comprendre.

Rappelons quelques moments marquants de sa vie

Jabotinsky a perdu, très jeune, son père et c’est sa mère qui s’est chargée de son éducation. Elle lui a transmis entièrement son judaïsme, tenant à lui faire donner des leçons d’hébreu, dès l’âge de huit ans. Dans son autobiographie, le leader de la droite sioniste écrit cependant : « hormis ces leçons d’hébreu, je n’avais alors aucun contact intérieur avec le judaïsme », p. 18. Il relate aussi qu’après la mort de son père, il s’est rendu matin et soir dans une petite synagogue ; « mais je ne m’y suis pas acclimaté et je ne prenais pas part aux prières, sinon à la récitation du kaddish », p. 18. Cet épisode est significatif, et pour ainsi dire fondateur, dans la vie et dans l’attitude de Jabotinsky envers la tradition : respect pour la mitsva du kaddish, accompagné d’un sentiment de distance à l’égard des rites et de la synagogue. Comme il l’explique encore : « Chez nous, il régnait une cacheroute stricte, maman allumait les bougies la veille du shabbat et priait matin et soir, et elle nous enseigna le ‘modé ani’/prière du lever et la lecture du Chema, mais toutes ces coutumes me laissaient indifférent », p.18. Cette description du foyer dans lequel il a grandi permet de mesurer combien celui-ci était différent de celui de Theodor Herzl, lui aussi souvent considéré, tout comme Jabotinsky (et à tort) comme un Juif parfaitement assimilé. Non seulement il n’était pas un Juif assimilé, mais il a reçu une certaine éducation juive – même s’il n’a fréquenté ni le ‘hédère/école juive pour enfants, ni la yeshiva/école juive pour adultes – ; il a été élevé par une mère observant les rites. Cela n’est pas négligeable.

Un esprit européen 

Bien entendu, cette formation élémentaire ne suffit pas à faire de lui ce qu’on appellerait un “Juif religieux”. Car à côté de la culture juive dans laquelle il a baigné enfant, c’est surtout la culture générale, russe et profane qui a prévalu dans son adolescence, pendant sa période de formation, à Odessa puis à Rome. De ce point de vue, le jeune homme s’est très tôt imprégné de culture européenne, comme il le reconnaît dans son autobiographie, où il qualifie l’Italie de « patrie spirituelle », dans laquelle il s’est assimilé et a forgé « ses conceptions relatives aux problèmes nationaux, de l’État et de la société ». C’est là, explique-t-il, qu’il a appris à aimer « l’architecture, la sculpture et la peinture », mais aussi « le chant latin ; la poésie de Leopardi, les livres de Tchékhov et de Gorki », p. 29. C’est là aussi, à l’Université, qu’il s’initie à la pensée politique.

 

Ce tableau ne doit pourtant pas laisser croire que le jeune Jabotinsky soit devenu un Juif parfaitement assimilé, un Européen épris exclusivement de culture non-juive à l’instar d’ un Stefan Zweig, par exemple. En réalité, ce n’était qu’un passage, une phase dans l’élaboration de sa pensée et de sa personnalité riche, aux facettes multiples. À la même époque, il lisait Bialik avec enthousiasme, et lorsqu’il fit ses débuts littéraires en tant que traducteur, il choisit de traduire en russe le Cantique des Cantiques (pas moins que cela!) et un poème de Yehouda Leib Gordon,  ce qui donne une idée de ses talents littéraires et de ses prédilections.

La religion dans ses rapports avec l’État

L’attitude que le penseur adopte envers le judaïsme considéré comme religion ne peut bien être comprise qu’en fonction de sa pensée politique, notamment de sa doctrine de la nation (dont le sionisme n’est qu’un élément particulier).

Il a en effet consacré de vastes recherches théoriques, passant une année entière à Vienne (1907-1908), enfermé dans des salles de bibliothèques, apprenant spécialement à lire le tchèque et le croate comme il le relate dans son autobiographie : « Je dévorai des livres. L’Autriche, à cette époque, était une école idéale pour étudier la « question des nationalités » : je passais matin et soir à la bibliothèque de l’université ou à celle du ‘Reichsrat’. (…) ; j’étudiais l’histoire des Ruthènes et des Slovaques – et jusqu’à celle des quarante mille Romanches des Grisons… en passant par l’histoire des tsiganes de Hongrie et de Roumanie », Histoire de ma vie, p. 90.

C’est ainsi que s’est formée sa conception générale de l’État. C’est en effet celle-ci qui commande sa vision des rapports avec religion, et non ses idées religieuses. Beaucoup de contre-sens ont été faits à ce sujet :  le fondateur du Betar est parfois présenté comme un partisan d’un État fort, d’un régime autoritaire, militariste, voire fasciste ! Or c’est exactement le contraire qui est vrai : non seulement il n’a jamais eu la moindre sympathie pour les régimes autoritaires et s’est opposé à ceux-ci dès le début des années 1930, avec une lucidité exceptionnelle (y compris au sein du monde juif et du mouvement sioniste), mais il a toujours été partisan d’une intervention minimale de l’État.

Lisons plutôt un extrait de son article Bné Melakhim /Fils de Roi publié, à titre posthume, en 1940 à New York. Cet article constitue à de nombreux égards une sorte de testament politique, ne serait-ce que parce qu’il est un des derniers qu’il ait écrits, peu de temps avant sa mort subite, après avoir passé en revue une revue d’armes du Betar : « (Quelle) est la véritable tendance fondamentale de notre antique tradition, concernant le pouvoir de l’État. Cette tradition déteste de toute évidence l’idée même du pouvoir de l’État, et ne le tolère que dans la mesure où il est indispensable et inévitable. Dans la vie et l’activité de chaque homme – dans son “royaume’ individuel – qui doit autant que possible être laissé hors de portée de l’interférence de l’État ; la meilleure règle consisterait à ce qu’on le laisse tranquille ».

On ne peut être plus aux antipodes d’un interventionnisme étatique.

Mais, poursuit-il : « Si cela s’avère vraiment impossible, car il existe malheureusement des dangers extérieurs et des besoins intérieurs, qui rendent nécessaire un effort collectif, que celui-ci soit strictement limité au minimum véritablement inévitable. Il s’agit, en résumé, d’une mentalité pour laquelle un État “totalitaire” serait un anathème. Son idéal authentique, au contraire, serait une sorte de sage anarchie, mais comme cela est impossible, qu’il s’agisse au moins d’un “État minimalitaire ».

Ainsi s’exprime son idéal politique et sa conception du rôle de l’État, précisément fondé sur l’interprétation qu’il donne de la tradition d’Israël. Le royaume individueldoit échapper à toute intrusion de l’État ! Cette idée est essentielle dans la pensée politique de Jabotinsky. C’est précisément au nom de cette notion qu’il considère que l’État doit respecter dans la mesure la plus étendue la liberté de pensée, d’opinion et de croyance et la liberté de culte. Il en découle que toute notion de “coercition religieuse” est totalement étrangère à sa pensée. Comme il l’exprime déjà en 1935 : « La religion est l’affaire privée de l’individu… Ici doit régner la liberté la plus totale », cité par Shmuel Katz, Lone Wolf, p. 942.

Une pensée en mouvement

      Une erreur courante, lorsqu’on envisage les conceptions d’un penseur politique est de les considérer de manière figée, hors du temps, comme s’il les avait élaborées d’emblée sous une forme définitive et achevée. Toute pensée est dynamique et se déploie dans le temps et sur la durée. Cela est d’autant plus vrai concernant Jabotinsky, qui n’a guère eu le temps d’élaborer de doctrine politique achevée et qui a abordé les thèmes essentiels de sa pensée politique au fil de ses incessantes pérégrinations autour du monde.

Dans Le sionisme et Eretz-Israël (1905), un article que Jabotinsky écrit alors qu’il est âgé de vingt-cinq ans, expose sa conception du rôle de la religion dans l’histoire juive pendant la période de l’exil. Il écrit : « C’est ainsi qu’est mort le judaïsme : car toute chose qui cesse de se développer est considérée comme morte, même si elle renferme un éclair de vie profondément enfoui… Il est mort dès l’instant où Israël est devenu un peuple sans terre et a entamé sa longue marche héroïque de deux mille ans de souffrances pour préserver son trésor sacré », Cité dans Rafaella Bilski Ben Hur, p.163.

Il exprime ainsi la conviction – largement partagée par les autres théoriciens du sionisme politique – que la religion juive a servi à conserver vivante l’identité nationale juive pendant les longs siècles de l’exil. Mais, filant la métaphore, il explique que le “trésor sacré” que le peuple Juif a su conserver pendant l’exil n’est pas la religion elle-même ; celle-ci n’en est que l’enveloppe : « Si ce trésor sacré était le judaïsme, le peuple l’aurait abreuvé d’eaux vives et aurait bénéficié de sa croissance et de son développement, tout comme avant la dispersion. Mais si le peuple a enfermé de son plein gré sa conscience religieuse dans un cadre de fer, l’a desséché au point qu’il se fossilise et a transformé une religion vivante en un cadavre de religion embaumée – alors il est clair, que ce n’est pas dans la religion que réside le trésor sacré, mais dans une autre chose, dans une chose à laquelle le cadavre embaumé devait servir uniquement d’enveloppe et de protection », cité dans Rafaella Bilski Ben Hur, p. 163.

Cette vision du “cadavre embaumé” de la religion, servant d’enveloppe et d’isolant à l’identité nationale du peuple Juif en exil, est un topos classique dans la pensée sioniste laïque. Elle dénote une attitude négative très courante envers la religion qu’on peut qualifier d’utilitariste.

Quel est donc ce “trésor sacré” pour lequel le peuple Juif a enduré deux mille ans de souffrances et d’exil ?

La réponse se trouve dans un article ultérieur (1933), intitulé Exposé sur l’histoire d’Israël : c’est ce qu’il appelle le “mécanisme spirituel”, – concept qui désigne selon lui l’élément occulté par Marx dans sa conception des “moyens de production” comme facteur déterminant de l’histoire. En effet, explique-t-il : « À partir du moment où l“isolant” naturel – à savoir le territoire national – est perdu, chaque chose se transforme en succédané du territoire, et en particulier ce moyen considérable de séparation qui a pour nom la tradition religieuse : mais pour cela il est nécessaire que cette tradition soit absolument immobile », p.46.

 

La religion, au fondement de la tradition

Dans cet article important, Jabotinsky analyse avec sincérité son attitude envers la religion, qu’il considère comme le fruit de son époque, celle de “l’assimilation russe”. Il affirme que la religion joue un rôle important dans l’histoire des peuples et dans l’histoire mondiale. Cette affirmation se trouvait déjà dans son Exposé sur l’histoire d’Israël, publié deux ans plus tôt à Varsovie. Mais son article, Religion (1935), va plus loin et dépasse la doctrine marxiste en général, et le “matérialisme historique” en particulier, en ajoutant aux fameux “moyens de production” l’élément spirituel qui en est totalement absent.

Il analyse et réfléchit aux raisons pour lesquelles la religion était absente chez les membres de sa génération et pourquoi elle jouera un rôle important à l’avenir. Jabotinsky décrit son indifférence à la religion comme une lacune, une sorte de cécité spirituelle et artistique, qu’il compare à l’incapacité d’apprécier la poésie et la musique, concluant par ces lignes révélatrices : « Chez l’homme qui est pleinement évolué, il n’est pas possible qu’une émotion aussi considérable fasse défaut. L’homme de l’avenir, l’homme entier, auquel aucun sens ne manquera, sera “religieux”. Je ne sais pas quel sera le contenu de sa religion ; cependant il sera porteur du lien vivant entre son âme et l’infini qui l’accompagnera partout où il ira », p. 73.

Le pronostic formulé par Jabotinsky, selon lequel « l’homme entier sera religieux », marque de toute évidence une évolution marquante de sa pensée, depuis celle exprimée trente ans plus tôt dans Le sionisme et Eretz Israël. Que s’est-il passé entre-temps ? Comment le jeune dirigeant sioniste russe, convaincu que la religion n’est plus  qu’un “cadavre embaumé”, en est-il venu à y voir une dimension importante de la personnalité, aux côtés de la musique et de l’art?

Les raisons de cette évolution radicale sont multiples.

Mentionnons tout d’abord le cheminement personnel d’un homme qui a mûri et a eu le temps d’approfondir sa réflexion sur de multiples domaines. Le leader sioniste endurci qui s’exprime en 1935 n’est évidemment plus le jeune homme fougueux de 1905.

Le second facteur est celui des rencontres qu’il a faites et de personnes qui l’ont marqué, parmi lesquelles on peut mentionner le rabbin Falk, qui servit comme aumônier militaire dans les rangs des Muletiers de Sion, qui ont combattu avec bravoure à Gallipoli, le rabbin Nathan Milikovsky, qui n’est autre que le grand-père de Binyamin Nétanyahou, mais aussi et surtout le grand-rabbin Avraham Kook, qui exerça une influence importante sur l’idée que l’agnostique se faisait du judaïsme et de la religion.

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JABOTINSKY Vladimir, Questions autour de la tradition d’Israël | Sifriaténou/Notre Bibliothèque (sifriatenou.com)

Vladimir JABOTINSKY, Questions autour de la tradition d’Israël, Traduit de l’hébreu, présenté et annoté par P. Lurçat, Jérusalem, Recueil rassemblant : Exposé sur l’histoire d’Israël (1933) ; Questions autour de la tradition juive (1934) ; De la religion (1935) ; Lettre à Eri Jabotinsky : Naharayim (14 septembre 1935), s.l., Éditions l’Éléphant, 2021, Collection « La Bibliothèque sioniste ».

Jabotinsky, jeune homme, Varsovie, s.d.

Jabotinsky, jeune homme, Varsovie, s.d.

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La rédemption sociale de Jabotinsky : une troisième voie économique pour Israël?

February 22 2021, 14:16pm

Posted by Pierre Lurçat

Le livre La rédemption sociale, recueil de textes inédits en français de Vladimir Z. Jabotinsky qui vient de paraître, offre un aperçu des conceptions sociales originales du grand dirigeant sioniste, inspirées de la Bible, et méconnues du lecteur francophone. Outre leur intérêt historique, ces textes - qui présentent un visage très différent du fondateur de l’aile droite du mouvement sioniste - ont aussi un intérêt très actuel, les conceptions de Jabotinsky montrant la voie pour que la "Start-Up Nation" devienne aussi un pays où règneront la prospérité et la justice sociale pour tous.

 

La rédemption sociale: Éléments de philosophie sociale de la Bible hébraïque par [Vladimir Zeev Jabotinsky, Pierre Lurcat]

 

Les textes ici publiés en français pour la première fois exposent les conceptions originales de Jabotinsky en matière sociale et économique, inspirées par la Bible hébraïque. La pensée économique et sociale de Jabotinsky n’est exposée de manière exhaustive et systématique dans aucun livre, ni même dans un recueil. On la trouve éparse dans quelques discours et articles, et notamment dans les Éléments de philosophie sociale de la Bible et dans L’idée du Yovel, qu’on lira ci-après. C’est dans la Bible hébraïque que Jabotinsky trouve le fondement de toute sa philosophie économique et sociale, qu’il résume dans la notion de Tikkoun Olam (réparation du monde).

 

Comme il l’explique, “Dieu a certes créé le monde tel qu’il est, mais que l’homme se garde bien de se satisfaire que le monde reste toujours “tel qu’il est” - car il est tenu de s’efforcer à tout moment de le perfectionner… car si Dieu y a laissé de si nombreuses lacunes - c’est précisément pour que l’homme lutte et aspire à la “réparation du monde”. L’idée de Tikkoun Olam trouve son application dans l’impératif de combattre la pauvreté, qui est à ses yeux non pas tant un mal inévitable qu’un mal inutile, qu’il incombe de faire disparaître en “réparant” le monde.

Pierre Lurçat

Le livre est disponible sur Amazon. Pour recevoir un service de presse, merci de m’écrire à pierre.lurcat@gmail.com

Voir sur le même sujet ma récente conférence donnée sous l'égide de l'Organisation sioniste mondiale, ici 

https://www.youtube.com/watch?v=lUIYVOAvMws

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