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guerre de gaza

Le Rav Avraham Zerbib, juge rabbinique et combattant : “J’ai détruit cinquante immeubles par jour à Gaza”

January 30 2025, 11:50am

Posted by Pierre Lurçat

Le Rav Avraham Zerbib, juge rabbinique et combattant :  “J’ai détruit cinquante immeubles par jour à Gaza”

Le rabbin Avraham Zerbib incarne à lui seul la métamorphose du peuple Juif vivant en Israël au lendemain du 7 octobre. Jusqu’au 7 octobre, il était rabbin et dayan au tribunal rabbinique de Tel-Aviv. Le 8 octobre, sa vie a basculé, comme celle de très nombreux Israéliens, et il s’est transformé en soldat. Il a passé depuis lors la majeure partie de son temps à Gaza – laissant derrière lui femme et enfants, Kollel et son travail au Beth Din – pour devenir un soldat et un combattant.

 

Le trait le plus marquant de la personnalité du rav Avraham Zerbib, tel qu’il apparaît dans les nombreuses interviews qu’il a données depuis lors, est ce mélange d’humour et de modestie propre aux grands talmidé hakhamim (Sages de la Torah). Comme il l’expliquait avec un large sourire sur la chaîne 14, répondant à Yinon Magal, qui s’étonnait de voir un homme de la cinquantaine, rabbin qui plus est, en première ligne à Gaza, “je suis devenu un habitant de Khan Younès”.

 

Zerbib fait partie intégrante de la “Sayeret Givati” (unité d’élite du corps de fantassins Givati) depuis 30 ans. A ses yeux, il était donc naturel d’accompagner son unité sur le front. Habitant de Beth-El en Samarie, il avait l’habitude de commencer sa journée – avant le 7 octobre – par un bain de mer à Tel-Aviv, avant d’entamer sa journée de juge rabbinique. Mais au-delà de la forme physique, indispensable pour un combattant de tout âge, c’est son optimisme débordant qui frappe en l’écoutant.

 

C’est d’ailleurs cet optimisme qu’on retrouve chaque soir dans l’émission “Les patriotes” (et qui tranche avec le défaitisme des médias israéliens mainstream), qui explique le succès grandissant de la chaîne 14, vers laquelle le public israélien se tourne de plus en plus. Une interview récente du rabbin Zerbib sur la 14 a fait le “buzz” sur les médias et forums anti-israéliens du monde entier : on y voit le rabbin-combattant raconter son quotidien de soldat et de conducteur de bulldozer, en expliquant qu’il a détruit une cinquantaine de bâtiments tous les jours à Gaza.

 

Aux yeux du public algérien ou mélenchonien en France, de tels propos sont révoltants. C’est d’ailleurs le “scandale” que ces propos ont suscité chez les ennemis d’Israël qui a fait découvrir la figure charismatique du rabbin Zerbib aux grands médias israéliens, qui l’avaient ignoré jusque-là. A tous ceux qui ne l’ont pas encore entendu et vu, je recommande de chercher ses interviews sur le Net. Le rabbin Zerbib est l’incarnation du “Nouveau Juif” et de cette “race fière et cruelle” à laquelle aspirait Jabotinsky. Face à des ennemis assoiffés de sang juif, nous devons prendre exemple sur lui et sur tous ceux qui savent qu’il n’y a pas de “civils innocents” à Gaza. Hodesh tov !

P. Lurçat

Le "tribunal rabbinique" de Khan Younès

Le "tribunal rabbinique" de Khan Younès

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Comment définir la puissance militaire ? Entretien avec Michel Gurfinkiel

December 2 2024, 08:18am

Posted by Pierre Lurçat/Israël Magazine

Comment définir la puissance militaire ? Entretien avec Michel Gurfinkiel

Rédacteur en chef à Valeurs actuelles, fin observateur de l'actualité française, israélienne et internationale, Michel Gurfinkiel est aussi féru d'histoire militaire. Dans un entretien passionnant qui est paru dans la dernière livraison d'Israel Magazine, il m'a livré sa définition de la puissance militaire. Extraits:

Pierre Lurçat: On pourrait définir la force militaire d’un pays par sa capacité de reprendre le dessus après avoir essuyé un revers ?

Michel Gurfinkiel: Absolument. L’après 7 octobre est un retournement prodigieux sur le plan militaire ! Toutes les armées du monde observent avec fascination ce qu’Israël est en train de faire. Lorsque je discutais avant le 7 octobre avec les experts militaires, il y avait un débat très virulent sur les capacités militaires d’Israël.

I.M. Est-ce que la dissuasion israélienne a été restaurée depuis le 7 octobre ?

M.G. Très largement, mais il ne faut pas perdre de vue le fait que nous sommes un petit pays vulnérable. Pour que les Arabes ne soient pas tentés de nous attaquer, comme me l’avait expliqué jadis Youval Neeman, il faut faire une piqûre de rappel, en leur infligeant régulièrement une défaite militaire.

La puissance d’un pays, selon le général Eisenhower, se mesure par trois facteurs : la force militaire, l’économie et le moral. Si un seul manque, la puissance est affectée.

I.M. Que pensez-vous de la dépendance d’Israël sur le plan de l’armement ?

M.G. Aucune armée du monde occidental ne contrôle entièrement sa chaîne de production d’armement.

I.M. Face au Hamas, la supériorité technologique d’Israël s’est-elle avérée impuissante ?

M.G. On ne peut pas du tout dire ça. Aucun des concepteurs de la “barrière intelligente” ne pensait qu’elle pouvait à elle seule arrêter l’intrusion d’ennemis. Tous avaient lancé l’alerte avant le 7 octobre !

Comment expliquer que le même pays peut frapper à Téhéran et se faire prendre par surprise à la frontière de Gaza ? Je n’ai pas de réponse.

I.M. La réponse est peut-être dans l’élément moral dont parlait Eisenhower ?

M.G. Cela faisait 20 ans que le Hamas évoquait le scénario du 7 octobre ! Tout cela était accessible et publié dans les médias israéliens… D’où les théories du complot qui pullulent sur ce sujet.

Nous savons que l’armée en Israël est un “Etat dans l’Etat”, qui rend très peu de comptes. Le Premier ministre ne peut rien faire, sans faire confiance aux analyses qu’il reçoit de l’armée. Aujourd’hui tout le monde comprend que la responsabilité principale du 7 octobre se trouve au sein de l’armée. Pourtant, l’état-major actuel mène très bien la guerre actuelle.

I.M. Quel bilan dressez-vous d’un an de guerre ?

M.G. Le bilan est que nous avons anéanti le Hamas. La mort de Sinwar signifie que le Hamas en tant que structure est anéanti. Depuis un an, on s’aperçoit qu’Israël a de la ressource. Tsahal a été capable de repousser à 80 % toutes les attaques de missiles, y compris les attaques massives venues d’Iran. L’Iran a envoyé le 13 avril plus de missiles contre Israël que l’ensemble des pays européens n’en possèdent !

Lire la suite dans Israël Magazine

 

Comment définir la puissance militaire ? Entretien avec Michel Gurfinkiel

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Une étincelle d’hébreu: “Ha-Bsora”, la bonne nouvelle de la guerre à Gaza

September 13 2024, 10:42am

Posted by Pierre Lurçat

Une étincelle d’hébreu: “Ha-Bsora”, la bonne nouvelle de la guerre à Gaza

“Ha-Bsora”: la “bonne nouvelle”: c’est – selon des sources étrangères se fondant sur un site d’information israélien d’extrême gauche – le nom d’un outil d’intelligence artificielle destiné à “accroître le nombre de frappes à Gaza”. Mais avant de savoir s’il s’agit d’une bonne nouvelle, arrêtons-nous un instant sur le mot B’sora. Dans son beau livre Jonas, que j’ai récemment trouvé dans une bibliothèque de rue à Jérusalem, l’éditeur Jérôme Lindon qui était hébraïsant, fait justement remarquer que “traduire de l’hébreu en français est une entreprise désespérée…” Je m’en suis aperçu en lisant que l’outil d’IA utilisé par Tsahal aurait pour nom Ha-Bsora, qui signifierait L’Evangile!

 

Comme nous l’écrivions dans ces colonnes, le mot B’sora (בשורה) signifie un message ou une nouvelle, bonne ou mauvaise. Dans la plupart des cas, il désigne en fait une bonne nouvelle, au point que l'expression biblique "Ich B’sora" (איש בשורה) signifie un "bon messager", c'est-à-dire le porteur d'une bonne nouvelle, comme dans le passage du livre de Shmuel, où Ahimaats court apporter au roi la bonne nouvelle que l'Eternel l'a vengé de ses ennemis (II Samuel 18).

 

            L’information des médias français selon laquelle Israël utiliserait un outil d’IA dans la guerre à Gaza est donc erronée au moins sur un point : Ha-Bsora ne veut pas dire l’Evangile (cela aurait été une blague de mauvais goût envers nos amis chrétiens…). Son sens premier signifie la “bonne nouvelle”, sens qui a été détourné par les chrétiens pour désigner l’Evangile. Mais alors, quel rapport avec la guerre contre le Hamas ?

 

Pour répondre à cette question, je rappellerai le livre du regretté Mickaël Bar Zvi, Eloge de la guerre après la Shoah. Sa thèse, pour la résumer en une phrase, était que la guerre était une nécessité éthique et politique pour le peuple Juif. Cette vérité essentielle est tout aussi actuelle aujourd’hui qu’en 1940. Le peuple Juif, comme l’expliquait l’écrivain Yossef Haïm Brenner il y a cent ans, n’a pas encore atteint le stade du militarisme…

 

Depuis un siècle, nous avons certes accompli quelques progrès en ce domaine, mais le virus pacifiste demeure bien vivant en nous. C’est précisément là qu’intervient la “bonne nouvelle” de l’après 7 octobre. Non seulement le peuple israélien n’a pas oublié le métier des armes, malgré trois décennies de lavage de cerveau post-sioniste, mais il est prêt à s’engager jusqu’au sacrifice suprême pour défendre sa terre et son peuple !

 

            Voilà la grande et belle nouvelle, la “Bsora” qui nous a été dévoilée dans l’effroi et la stupeur de l’après 7 octobre. Israël est fort et il est beau quand il combat et quand il triomphe de ses ennemis, sans pitié et sans aucune retenue ! Avec ou sans outil d’intelligence artificielle, Tsahal est en train d’écraser militairement le Hamas, avant de s’occuper du Hezbollah et du régime des mollahs. Réjouissons-nous de cette “bonne nouvelle”! Am Israël Haï !

P. Lurçat

Une étincelle d’hébreu: “Ha-Bsora”, la bonne nouvelle de la guerre à Gaza

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Pourquoi le 7 octobre ? Ces “Gatekeepers” qui ont ouvert la porte à l’ennemi (I), Pierre Lurçat

January 26 2024, 07:06am

Posted by Pierre Lurçat

Ami Ayalon (au centre)

Ami Ayalon (au centre)

 

Comment les “Gatekeepers”, ces gardiens de la sécurité d’Israël et ces grands soldats, se sont-ils mués en promoteurs de slogans pacifistes aussi simplistes, et presque puérils, que “c’est avec ses ennemis qu’on fait la paix” ? Et quelle est leur responsabilité dans l’échec colossal du 7 octobre ? Premier volet.

 

Le 24 janvier, alors qu’Israël pleurait et enterrait les morts du terrible accident militaire de la veille, deux Israéliens publiaient chacun une tribune dans le quotidien Le Monde, connu pour son hostilité endémique envers l’Etat juif. Le premier, Elie Barnavi, expliquait pourquoi, après s’être opposé pendant les 100 premiers jours de la guerre à un “cessez-le-feu immédiat”, il avait fini par rejoindre le camp des défaitistes, qui affirment que “la guerre s’enlise” et qu’Israël ne peut pas gagner face au Hamas. Le second, Ami Ayalon, va encore plus loin dans le défaitisme : il explique tout simplement que la victoire est impossible et qu’Israël doit “repenser le concept d’ennemi”.

 

Ami Ayalon n’est pas simplement un intellectuel comme Barnavi. Ancien commandant de la Marine, il a été le patron du Shin-Beth (service de sécurité intérieure) entre 1996 et 2000. En 2012, il a participé activement au documentaire de Dror Moreh, The Gatekeepers (“Les gardiens”), dans lequel plusieurs anciens dirigeants du Shin-Beth évoquaient leurs problèmes de conscience et donnaient leur point de vue sur le conflit israélo-arabe. Ce film, tout comme la récente interview d’Ayalon dans Le Monde, permettent de comprendre l’univers conceptuel d’une large partie de l’establishment sécuritaire israélien depuis au moins trois décennies. On y découvre ce que pensent ceux qui – plus que tout autre secteur de la vie publique en Israël – portent la responsabilité de l’échec colossal du 7 octobre.

 

A ce titre, il faut écouter et lire ce que dit Ayalon. Il incarne un visage de l’Israël laïc, de gauche et pacifiste, dont l’influence sur les décisions essentielles pour le pays est inversement proportionnelle à son poids électoral (Ami Ayalon a été membre du Parti travailliste, aujourd’hui moribond). On y découvre surtout les valeurs et le mode de pensée de ces anciennes élites qui continuent, en grande partie, à modeler la politique d’Israël. Ayalon, soldat d’élite qui a pris part à toutes les guerres d’Israël entre 1967 et la première Intifada, a commandé la prestigieuse “Shayetet”, unité d’élite de la marine. A cet égard, on peut le comparer à Ehoud Barak, Ariel Sharon, Yitshak Rabin, ou bien d’autres grands soldats qui ont “tourné casaque”, pour devenir des promoteurs de “plans de paix” tous aussi foireux les uns que les autres, des accords d’Oslo aux retraits de Gaza et du Sud-Liban qui ont installé le Hamas et le Hezbollah aux portes d’Israël.

 

Des grands soldats devenus pacifistes

 

Comment ces “Gatekeepers”, ces gardiens de la sécurité d’Israël et ces grands soldats se sont-ils mués en promoteurs de slogans pacifistes – aussi simplistes et presque puérils – que “C’est avec ses ennemis qu’on fait la paix” ? Ayalon apporte des éléments de réponse à cette question cruciale, qui interroge l’histoire récente d’Israël mais aussi son avenir. Quand le journaliste lui demande si le retrait d’une partie des troupes israéliennes de Gaza signifie un tournant dans la guerre, il lui répond : “Je crois que cette question va bien au-delà des détails de cette campagne militaire. Au fond, quelle est la situation ? Notre problème réside dans la tension entre la terreur et les droits de l’homme. Toutes les démocraties libérales sont confrontées à un conflit entre violence terroriste et droits fondamentaux”.

 

Cette réponse qui peut sembler anodine met en évidence un aspect crucial du débat intérieur israélien et de la vision du monde de cet establishment sécuritaire et militaire, dont Ayalon est la parfaite incarnation : leur incapacité de penser Israël autrement que dans le cadre conceptuel de l’Occident et de la démocratie libérale, qu’ils voudraient que l’Etat juif incarne. Ce point essentiel permet à la fois de comprendre leur attitude envers les ennemis d’Israël (“Nous renonçons donc aux droits d’une minorité dans l’idée que nous allons combattre le terrorisme. Et nous ne comprenons pas qu’un jour, sans doute, nous allons nous féliciter d’avoir tué des bad guys, mais que nous aurons perdu notre identité”) et leur vision de ce qu’est et de ce que doit être Israël.

 

En décrivant le conflit entre Israël et ses ennemis selon le modèle réducteur de l’affrontement entre les démocraties et le terrorisme, l’ancien patron du Shin-Beth montre qu’il n’a pas compris une dimension importante du conflit, qui est apparue le 7 octobre dans sa criante évidence. Le Hamas, contrairement à Al-Qaïda, n’a pas seulement voulu tuer des Juifs et porter un coup symbolique à Israël (comme les terroristes du 11 septembre). Il a voulu (et réussi de manière partielle et momentanée) envahir le territoire israélien pour le conquérir.

 

Cette dimension territoriale propre à l’islam est, paradoxalement, un aspect crucial de ce qui échappe aux “Gatekeepers” devenus pacifistes, comme à l’ensemble du “camp de la paix” israélien. Ceux qui prétendaient échanger “les territoires contre la paix” s’avèrent ainsi les promoteurs d’une vision totalement inadéquate du conflit, dont leur “impensé” occulte bien des aspects essentiels. Dans la suite de cet article, nous verrons comment cet impensé concerne également l’identité juive de l’Etat d’Israël. (à suivre…)

Pierre Lurçat

 

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Une étincelle d’hébreu : “Bé-Damayikh Hayyi” - Quand la Bible et Naomi Shemer éclairent notre quotidien, P. Lurçat

January 23 2024, 08:49am

Posted by Pierre Lurçat

Une étincelle d’hébreu :  “Bé-Damayikh Hayyi” - Quand la Bible et Naomi Shemer éclairent notre quotidien, P. Lurçat

 

 

C’est le génie de la langue hébraïque de rester toujours jeune. Elle est, pourrait-on dire, la langue antique et jeune du peuple éternel, de retour sur sa terre retrouvée. Pour illustrer ce phénomène sui generis, j’ai choisi le texte d’une chanson de Naomi Shemer, qui résonne de manière tragique avec l’actualité terrible de ce matin. “Bé-Damayikh Hayyi” est une des dernières chansons écrites par la grande Naomi Shemer. Elle porte en titre le fameux verset du prophète Ezechiel – que chaque Juif connaît au moins pour l’avoir entendu lors de la cérémonie de la Brith Mila – “Vis dans ton sang”.

 

Ce verset, rappelle Avraham Zigman dans le très beau livre qu’il a consacré à l’œuvre de Naomi Shemer[1], est la parole adressée par Dieu, par la voix du prophète Ezechiel, à Jérusalem. “L’obligation de ‘vivre dans le sang’ n’a malheureusement pas changé depuis l’époque du prophète et jusqu’à nos jours, car l’histoire du peuple Juif baigne dans le sang”, écrit encore Zigman. C’est sans doute la raison pour laquelle les mots de la Bible nous sont tellement proches, ces jours-ci plus encore que d’habitude.

 

Les mots antiques me donnent de la force, dans les voix anciennes je puise un réconfort” : c’est ainsi que Naomi Shemer décrit sa relation intime avec l’hébreu de la Bible, dans la chanson Bé-Damayikh Hayyi. On ne saurait mieux décrire ce que de nombreux Juifs en Israël et à travers le monde trouvent actuellement dans le Livre des Livres (Sefer ha-Sefarim), depuis le début de la guerre qui a commencé le jour de Simhat Torah, où nous avons repris la lecture du Livre de Berechit. Personnellement, la lecture de la section hebdomadaire de la Bible m’éclaire plus sur la guerre que bien des commentaires savants entendus à la radio, et je suis certain de ne pas être le seul dans ce cas.

 

La Bible n’est pas seulement le récit de notre histoire nationale et le trésor que nous avons légué à l’humanité (qui a encore tant de mal à le lire et à le comprendre). Elle est aussi le Livre dans lequel nous trouvons la clé des événements que nous vivons et aussi, avec l’aide de D., la capacité d’endurer les difficultés de notre histoire. “Et soudain, un arc-en-ciel apparaît au-dessus de ma tête, un éventail coloré se déploie, annonciateur de vie et d’espoir, de paix, de tranquillité et de Hessed”. Que les mots de Naomi Shemer nous donnent la force et la persévérance, et que D.ieu protège nos soldats, ramène nos captifs et console nos familles endeuillées !

P. Lurçat

 

 

[1] Midrash Naomi, Les sources juives de la poésie de Naomi Shemer, Yad Ben Tsvi 2009.

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Les intellectuels juifs face à la guerre de Gaza (IV) : Ceux qui refusent d’écouter les témoins du massacre

January 17 2024, 07:39am

Posted by Pierre Lurçat

Mia Shem

Mia Shem

 

Il faut absolument écouter le témoignage glaçant de l’ex-otage franco-israélienne Mia Shem, qui relate le calvaire qu’elle a subi le 7 octobre et dans les semaines qui ont suivi, capturée par le Hamas puis détenue pendant de longues semaines à Gaza. “J’ai vécu une Shoah”, déclare-t-elle, et ces quelques mots en disent plus long que bien des analyses savantes. Il faut écouter le témoignage de Mia Shem, car c’est celui d’une survivante du “jour de Shoah” que nous ont infligé nos ennemis de Gaza, et parce que son témoignage est l’égal – par son contenu sinon par son style – de celui des survivants de la précédente Shoah, des Primo Levi et des Aharon Appelfeld.

 

Après la Shoah, disait le philosophe Emil Fackenheim, nous avons le devoir de ne pas donner de victoire posthume à Hitler. Après la nouvelle Shoah que le Hamas a tenté de perpétrer contre Israël (la “Shoah en keffieh”, selon l’expression du regretté Paul Giniewski), nous avons l’obligation de ne pas donner de victoire posthume au Hamas et aux autres ennemis d’Israël, lorsque leurs dirigeants auront été tous éliminés. Mais le premier devoir est celui d’écouter les survivants. Or c’est précisément ce que certains intellectuels juifs refusent de faire.

 

Dans une longue interview donnée récemment à la chaîne LCI, le philosophe Alain Finkielkraut a ainsi tenu des propos stupéfiants et scandaleux sur le témoignage de Mia Shem. Reconnaissant tout d’abord que sa déclaration “j’ai vécu une Shoah” est terrible, il affirme dans la foulée avoir été “beaucoup choqué” sicde la déclaration de Mia Shem selon laquelle “tout le monde est terroriste à Gaza”. Selon lui, prétendre qu’il n’y a “pas de civils innocents à Gaza” est comparable au propos de l’indigéniste Houria Bouteldja, affirmant qu’il “n’y a pas d’Israélien innocent”.

 

La comparaison établie par A. Finkielkraut montre deux choses : la première, c’est que comparaison n’est pas raison. Comparer le propos de l’otage franco-israélienne Mia Shem à celui de Houria Bouteldja n’est pas seulement indécent, c’est également stupide. Mais cette comparaison montre aussi que Finkielkraut, en dépit de son intelligence et de son courage intellectuel, vit dans un univers conceptuel très éloigné de celui d’Israël, éloignement qui le rend totalement incapable de comprendre la réalité de notre Etat et des problèmes existentiels qu’il affronte.

 

Le propos d’A. Finkielkraut atteste à la fois d’un refus d’écouter les victimes du 7 octobre (imagine-t-on un intellectuel juif faire la même chose avec un rescapé de la Shoah ?), et d’un refus conceptuel de donner crédit à leur témoignage. La société israélienne tout entière, après le 7 octobre, a entrepris un immense travail de remise à zéro de compteurs et de remise en cause, travail qui n’est pas terminé. On peut attendre des intellectuels juifs de diaspora qu’ils fassent la même chose. Cette capacité de se remettre en question est en définitive ce qui distingue l’intellectuel dogmatique, enfermé dans ses convictions et ses propres références, de l’intellectuel ouvert à l’événement et à la nouveauté qu’il comporte.

 

Le 7 octobre – comme d’autres événements qui ont marqué l’histoire juive depuis ses débuts – appelle à la réflexion et à l’écoute. Il nous oblige à repenser ce que nous croyions comme acquis, à nous remettre en question. Et il nous oblige à écouter et à accepter les témoignages des otages. Nul ne peut écouter le témoignage glaçant de Mia Shem et son terrible propos – irréfutable dans sa clarté morale – sur le fait qu’il n’y avait pas d’innocents à Gaza. Vérité difficilement audible en Occident, mais vérité tout de même.

 

Pierre Lurçat

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Les intellectuels juifs face à la guerre en Israël (III) : entre mobilisation et “business as usual” - VudeJerusalem.over-blog.com

Les intellectuels juifs face à la guerre en Israël (II) Biais cognitifs, préjugés et présupposés idéologiques - VudeJerusalem.over-blog.com

Les intellectuels juifs face à la guerre en Israël (I) : le serment solennel d’André Neher - VudeJerusalem.over-blog.com

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De “Beyrouth-Varsovie” à Gaza, en passant par Deir Yassin et Djénine : variations autour du mythe du génocide du peuple palestinien

January 10 2024, 16:48pm

Posted by Pierre Lurçat

De “Beyrouth-Varsovie” à Gaza, en passant par Deir Yassin et Djénine : variations autour du mythe du génocide du peuple palestinien

(Extrait de P. Lurçat, Les Mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain, éditions l’éléphant 2021. En vente sur Amazon et B.O.D.).

La Première Guerre du Liban, en 1982, marque une étape importante dans le développement du discours antisioniste contemporain et dans l’élaboration du mythe du “génocide du peuple palestinien”. Comme l’écrivait alors Léon Poliakov, dans un petit livre publié en 1983[1], “la guerre du Liban fit passer Israël et plus généralement les Juifs au premier plan de l’actualité. L’invasion israélienne fournit aux médias la possibilité de déchaîner des passions jusque-là tenues en laisse, ou simplement inexistantes. C’est dans ces conditions qu’un climat s’instaura dans les sphères gouvernementales (occidentales), qui poussait M. Pierre Mauroy (alors Premier ministre) à déclarer, dès le 18 juin 1982 : “Ce n’est pas en détruisant le peuple palestinien qu’on réduira le terrorisme”.

 

Poliakov estime que “le principal responsable de cette désinformation fut la télévision française”. De son côté, l’ancien ministre Pierre Mendès-France pouvait écrire alors, dans les colonnes du Nouvel Observateur, que “le spectateur qui voit les images projetées (à la télévision) est naturellement enclin à penser que c’est toute une nation qui est écrasée sous les bombes… On parle de Juifs tueurs d’enfants, de génocide, d’holocauste… comme si c’était l’objectif même du gouvernement israélien de massacrer délibérément des civils et des enfants[2].

 

Le diagnostic porté par Mendès-France (et par Poliakov, qui le reprend à son compte) a tendance à faire porter la responsabilité de la vague d’antisémitisme, concomitante à la guerre du Liban, aux seules images diffusées par la télévision française. Près de quarante ans plus tard, dans un contexte assez similaire, non plus au Liban mais à Gaza, Pierre-André Taguieff portera un diagnostic tout aussi sévère à l’égard de la responsabilité des médias dans la diffusion du discours et des mythes antisionistes, écrivant [3]:

 

La mise en accusation quasi-planétaire d’Israël est moins le résultat de la propagande palestino-islamiste, qu’un effet du fonctionnement du système médiatique. La condamnation unanime d’Israël, avant toute enquête et indépendamment de toute analyse des faits, témoigne d’abord du mode de formation et de diffusion de l’information journalistique…”. En effet, poursuit-il : “les médias choisissent de privilégier les récits allant dans le sens des présupposés de la culture politique majoritaire dans le monde professionnel des journalistes. Or, l’anti-israélisme et le pro-palestinisme, depuis les années 1990, se sont inscrits dans la doxa journalistique, reflétant le parti-pris “antisioniste” partagé, avec plus ou moins de virulence, par toutes les gauches”.


              Quand le Premier ministre Mauroy parle de “détruire le peuple palestinien” (à propos du siège de Beyrouth par l’armée israélienne), il montre la perméabilité de la classe politique française au discours antisioniste radical, jusque dans ses accusations les plus insensées. Citons à ce sujet la remarque faite dans un contexte différent par Éric Marty, professeur de littérature française, au sujet de la visite d’Ariel Sharon sur le Mont du Temple en octobre 2000 : “Que les Palestiniens jouent du symbole, du mythe, de la mystification, c’est de bonne guerre. Que les médias français, que les hommes politiques et les plus grands responsables comme le Président de la République, soient les canaux passifs de cette propagande laisse rêveur quant à  la maturité politique et intellectuelle de la France[4].

Sabra et Chatila – événement historique ou événement mythique ?

L’outrance manifestée dans le récit médiatique du siège de Beyrouth, devenue Varsovie assiégée sous la plume de nombreux journalistes occidentaux, sera encore dépassée lors de l’épisode de Sabra et Chatila. Rappelons brièvement les faits : entre le 16 et le 18 septembre 1982, des centaines de réfugiés palestiniens étaient massacrés par des milices chrétiennes phalangistes dans la banlieue de Beyrouth, sur l’instigation du chef des services secrets libanais, Elie Hobeika. Paul Giniewski, auteur de plusieurs ouvrages sur l’antisionisme, note à ce sujet qu’aucun des grands thèmes de la démonisation d’Israël n’a occupé l’avant-scène avec une permanence sans faille, autant que le massacre de Sabra et Chatila et le rôle prêté à Ariel Sharon, alors ministre de la Défense.

 

On mesure à quel point le thème de Sabra et Chatila est demeuré vivace, dans la propagande palestinienne et dans ses relais occidentaux, à l’aune des innombrables textes, films, reportages et œuvres d’art qui lui sont consacrés jusqu’à ce jour. Citons à titre d’exemple, un remake du Guernica de Picasso, intitulé sobrement “Le massacre de Sabra et Chatila”, exposé au Tate Modern de Londres[5]. La véritable logorrhée verbale, médiatique, artistique et intellectuelle, autour du massacre de Sabra et Chatila et de la prétendue responsabilité israélienne prouve, si besoin était, la véracité du constat fait par l’écrivain Paul Giniewski [6]:

 

Quatre des plus grands journaux américains y avaient consacré davantage d’espace qu’aux dix plus grands massacres qui avaient marqué la décennie 1972-1982, et qui comprenaient celui de  l’Ouganda sous Idi amine, les 20 000 civils massacrés à Hama en Syrie, la boucherie de 2,5 millions de Cambodgiens par leurs compatriotes. Trois ans après les faits, un autre massacre eut lieu dans les mêmes camps, alors sous contrôle des Libanais chiites, faisant plus de 500 morts”. Et Giniewski de poursuivre : “Les mêmes quatre quotidiens américains y consacrèrent dix fois moins d’espace qu’au Sabra et Chatila “enjuivé”. En 1982, ce vrai, cet unique Sabra et Chatila digne de mobiliser la conscience universelle avait produit 10 000 mots sur 7 pages dans le même numéro de l’un des grands quotidiens : davantage que l’espace mérité par le débarquement allié en Normandie pendant la Deuxième Guerre mondiale”.

 

Autre exemple de cette disproportion et de cette logorrhée médiatique : le fameux texte de l’écrivain Jean Genet, “Quatre heures à Chatila”, auquel il doit une partie non négligeable de sa célébrité. Ce texte a donné lieu à d’innombrables commentaires, mises en scène, et jusqu’à un récent spectacle de danse[7]. L’écrivain français au passé trouble, (qui se présentait lui-même par les mots “Jean Genet, voleur” à ses compagnons de cellule, pendant la Deuxième guerre mondiale[8]), n’a jamais été autant apprécié et célébré que lorsqu’il a écrit ce texte et qu’il est devenu ainsi le “porte-parole” des Palestiniens, auxquels il a consacré de nombreux autres textes. Lisons à ce sujet l’analyse éclairante d’Éric Marty, dans son livre Bref séjour à Jérusalem [9]:

 

Sabra et Chatila n’est jamais apparu comme un événement au sens purement historique du terme – tel Austerlitz qui n’efface pas Wagram et qui n’est pas éclipsé par Waterloo -, il est apparu comme un surévènement, en tant qu’il rend inaudible le nom de tous les autres, en tant que les trois jours qu’il dura effacent les sept ou huit ans de guerre civile et de massacre qui le précédèrent et les huit ans de tueries qui suivirent ; il est apparu comme événement en tant qu’il est devenu l’unique événement par lequel l’on se remémore un très long épisode historique.

 

Cette analyse d’Éric Marty décrit très précisément le processus par lequel Sabra et Chatila, en tant qu'élément du mythe plus large du “génocide du peuple palestinien” - devient un événement mythique, qui efface toute la réalité historique de la guerre civile au Liban et de ses innombrables crimes, commis par des factions tellement diverses et variées, qu’il est difficile de s’y retrouver… Mais dans la version mythifiée, tout devient très simple : il ne reste plus qu’un seul crime, celui des Juifs. “Des goyim ont tué d’autres goyim, et ce sont les Juifs qu’on accuse” – la fameuse expression d’Ariel Sharon - lui-même transformé en accusé principal - dit très bien, de manière lapidaire, ce que Marty analyse sous un angle littéraire.

 

La lecture par Éric Marty du récit de Sabra et Chatila fait par Jean Genet lui permet d’établir une distinction - essentielle pour notre compréhension du discours et des mythes antisionistes – entre le fait et l’événement : “Grâce à Genet, nous avons compris… ce qu’était un événement, nous avons compris qu’un événement était tout le contraire d’un fait, nous avons compris que pour qu’un événement soit, il suppose de porter en lui une dimension métaphysique - il doit, comme phénomène, toucher à l’essence de ce qu’il représente[10].

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[1] De Moscou à Beyrouth. Essai sur la désinformation, Paris, Calmann-Lévy, 1983.

[2] Le Nouvel Observateur, 14-20.8.1982, cité par Poliakov, op. cit. p. 164.

[3] Israël et la question juive, Les provinciales 2011, p. 177.

[4] Éric Marty, “L’angélisme progressiste des belle âmes”, Le Monde 11 octobre 2000, repris dans Bref séjour à Jérusalem, op. cit.

[6] P. Giniewski, Antisionisme, le nouvel antisémitisme, Cheminement 2005, p. 84.

[7] Voir le site de la ville de Créteil https://www.ville-creteil.fr/danse-sabra-et-chatila

[8] Témoignage rapporté par mon grand-père, l’architecte André Lurçat, emprisonné à la prison des Tourelles pour faits de résistance.

[9] Éric Marty. Bref séjour à Jérusalem, Gallimard 2002, p.175.

[10] Éric Marty. Bref séjour à Jérusalem, op. cit, p.175

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