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apartheid

"Israël - État d’apartheid", racines d'un mythe politique antisémite, Pierre Lurçat

July 27 2022, 08:18am

Posted by Pierre Lurçat

"Israël - État d’apartheid", racines d'un mythe politique antisémite, Pierre Lurçat


La résolution de la NUPES sur le soi-disant “apartheid” israélien vise à implanter au cœur du débat politique français le discours mythique antisioniste. Dans les lignes qui suivent, extraites de mon livre Les mythes fondateurs de l'antisionisme contemporain, lui-même tiré d'un cours donné sur Akadem, je retrace l’origine de ce mythe antisioniste.

 

Il est toujours délicat d’établir avec précision les origines d’un mythe politique. Celui-ci, comme tout mythe, puise ses sources dans une histoire déjà ancienne et floue. L’accusation d’apartheid portée contre Israël a des origines multiples : parmi ses promoteurs, on trouve des acteurs très divers - États, organisations et personnes physiques - qui incluent à la fois les militants anti-apartheid en Afrique du Sud et ailleurs, l’URSS et ses satellites, l’OLP etc. C’est toutefois cette dernière, avec l’appui et sans doute sur l’instigation de l’URSS, qui a transformé l’accusation d’apartheid lancée contre Israël en un véritable mythe, lequel perdure jusqu’à nos jours.

 

Pour comprendre comment est apparu et s’est développé ce mythe, il est nécessaire de rappeler les origines du mouvement national palestinien. L’émergence du nationalisme arabe palestinien est en effet étroitement liée aux trois grands totalitarismes du vingtième siècle : le mouvement islamiste des Frères musulmans (qui ont exploité la cause de la Palestine arabe, avec l’aide du père fondateur du mouvement national palestinien, le grand mufti Hadj Amin al-Husseini) ; l’Allemagne nazie, qui s’est servie du nationalisme arabe pour combattre ses deux ennemis irréductibles, l’Angleterre et les Juifs ; et enfin l’URSS et ses satellites.

 

Le père fondateur du mouvement national palestinien avec Adolf Hitler

 

Le mouvement national palestinien et les trois grands totalitarismes du 20e siècle

 

Cette dernière a joué un rôle décisif - et largement oublié ou occulté aujourd’hui - pour promouvoir la cause palestinienne et transformer l’OLP, organisation relativement marginale dirigée par Ahmed Choukeiry depuis 1964, en représentant « légitime » du peuple palestinien sur la scène internationale. Comme le relate Ion Pacepa, ancien conseiller de Ceaucescu qui fit défection en 1978, c’est en effet le KGB qui fut à l’origine de la création de l’OLP et du personnage même de Yasser Arafat.

 

Dans son livre The Kremlin Legacy (1), Pacepa raconte ainsi qu’un jour de 1964, “nous avons été convoqués à une réunion conjointe du KGB, à Moscou. Il s’agissait de redéfinir la lutte contre Israël, considéré comme un allié de l’Occident. La guerre arabe pour la destruction d’Israël n’était pas susceptible d’attirer beaucoup de soutiens dans les «mouvements pour la paix», satellites de l’Union Soviétique. Il fallait la redéfinir. L’époque était aux luttes de libération nationale. Il fut décidé que ce serait une lutte de libération nationale : celle du « peuple palestinien ».

 

L’organisation s’appellerait OLP : Organisation de Libération de la Palestine. Des membres des services syriens et des services égyptiens participaient. Les Syriens ont proposé leur homme pour en prendre la tête, Ahmed Choukeiry, et il fut choisi. Les Egyptiens avaient leur candidat : Yasser Arafat. Quand il apparut que Choukeiry ne faisait pas l’affaire, il fut décidé de le remplacer par Arafat, et celui-ci fut “façonné” : costume de Che Guevara moyen-oriental, barbe de trois jours de baroudeur… « Il fallait séduire nos militants et nos relais en Europe ! » (2).

 

C’est dans ce contexte de la création de l’OLP et de l’invention du peuple palestinien, instrument de la lutte idéologique de l’URSS contre Israël et contre les États-Unis, que se situe l’apparition du mythe de l’État d’apartheid, dont nous allons à présent retracer les étapes.

 

Première étape : Choukeiri à l’ONU et la Charte de l’OLP

 

Selon le politologue américain Daniel Pipes, le premier à accuser Israël d’être un État d’apartheid fut Ahmed Choukeiri, futur dirigeant de l’OLP en 1964. Cela se passait en 1961, au moment du procès Eichmann, et Choukeiri était alors diplomate à l’ONU. Auparavant, il avait été le bras droit du mufti pro-nazi Ami Al-Husseini (3). En 1961, le procès Eichmann battait son plein à Jérusalem, attirant l’attention des journalistes du monde entier. Citons, parmi les plus connus, le correspondant de France Soir, Joseph Kessel, ou la philosophe Hannah Arendt, devenue reporter pour l’occasion. 

 

L’accusation d’apartheid, lancée contre Israël devant la tribune des Nations unies devait permettre, dans l’esprit de celui qui était alors ambassadeur d’Arabie saoudite aux Nations Unies et de ses commanditaires, de noircir l’image d’Israël - alors même que le procès Eichmann rappelait au monde entier les horreurs de la Shoah - et de préparer ainsi le terrain idéologique en vue de sa destruction physique. Après le discours de Choukeiri devant les Nations Unies, c’est logiquement dans la Charte de l’OLP (à la rédaction de laquelle auraient collaboré les commanditaires soviétiques de Choukeiri, selon Pacepa) qu’on retrouve l’amalgame sionisme=racisme. Ainsi, à l’article 22, la Charte de l’OLP affirme que “Le sionisme… est raciste et fanatique par nature, agressif, expansionniste et colonialiste dans ses buts et fasciste par ses méthodes”.
 

Deuxième étape : la Résolution “Sionisme = Racisme”

 

L’assimilation du sionisme au racisme, initiée par l’URSS et par l’OLP, va culminer dans l’adoption de la Résolution “Sionisme = Racisme” par l’Assemblée générale des Nations Unies, le 10 novembre 1975 (4). Lors du vote, l’ambassadeur d’Israël à l’ONU, Abba Eban, déclara que celle-ci pourrait tout aussi bien voter une résolution proclamant que “la Terre est plate”. Rappelons que la résolution 3379 fut adoptée à la majorité de 72 voix pour, 35 voix contre et 32 abstentions. Elle “Considère que le sionisme est une forme de racisme et de discrimination raciale”, et affirme également dans son avant-dernier paragraphe :

 

Prenant note également de la résolution 77 (XII), adoptée par la Conférence des chefs d’États et de gouvernements de l'Organisation de l’Unité Africaine, tenue à Kampala, du 28 juillet au 1er août 1975, qui a estimé que “le régime raciste en Palestine occupée et les régimes racistes au Zimbabwe et en Afrique du Sud ont une origine impérialiste commune, constituent un tout et ont la même structure raciste, et sont organiquement liés dans leur politique tendant à la répression de la dignité et l’intégrité de l’être d’humain". 

 

Manifestation antisioniste à Washington, 2014



 

Dans l’esprit des promoteurs de la Résolution “Sionisme = Racisme”, le racisme supposé de l’État d’Israël découle donc de sa nature impérialiste. Notons que l’accusation d’impérialisme et celle de colonialisme - son corollaire - sont plus anciennes que celle de racisme. L’examen des déclarations successives des conférences des pays arabes et africains(5), des années 1950 aux années 1970, permet de retracer la généalogie de cette dernière, qui constitue en quelque sorte le point d’orgue de la dénonciation du “colonialisme” et de “l’impérialisme” israéliens. 

 

Ainsi, en avril 1955, à Bandung, la 1ère conférence afro-asiatique a “déclaré son soutien au peuple arabe de Palestine”. De manière notable, l’expression de “peuple palestinien” ne figure pas encore dans le vocabulaire politique international de l’époque. (Elle n’apparaîtra que dans les années 1960, et sera consacrée sur la scène internationale, notamment par les résolutions de l’Assemblée générale des Nations Unies établissant une “Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien”(6), fixée au 29 novembre, date de la résolution de partage de 1947). 

 

En janvier 1961, la Conférence des pays africains de Casablanca “appelle à une juste résolution du problème de Palestine”, rappelle la conférence de Bandung et “observe avec indignation qu’Israël a toujours choisi le camp des impérialistes, chaque fois qu’une position devait être prise sur des problèmes essentiels concernant l’Afrique, notamment l’Algérie, le Congo ou les essais nucléaires en Afrique”. Elle “dénonce Israël comme un instrument au service de l’impérialisme et du néo-colonialisme”. 

 

La même année, à Belgrade, la conférence des pays non-alignés condamne les “politiques impérialistes poursuivies au Moyen-Orient”. En octobre 1964, cette même conférence, réunie au Caire, “condamne la politique impérialiste poursuivie au Moyen-Orient” et “déclare son total soutien au peuple arabe de Palestine dans son combat pour la libération du colonialisme et du racisme”. C’est donc la Conférence du Caire qui a employé pour la première fois - sur la scène internationale - le qualificatif de “racisme” au sujet d’Israël, en 1964. 

 

Neuf ans plus tard, le 14 décembre 1973, l’Assemblée générale des Nations unies condamne dans une résolution “l’alliance entre le racisme sud-africain et le sionisme”. En août 1975, l’Organisation de l’Unité Africaine, réunie à Kampala en Ouganda, dénonce le “régime raciste en Palestine occupée”. Cette résolution est citée à l’appui de la fameuse Résolution “Sionisme = Racisme” du 10 novembre 1975, parmi d’autres textes antérieurs. Cette dernière résolution sera abrogée, mais le mal est fait. 

 

Ainsi, comme le fait observer P.A. Taguieff, “Depuis le milieu des années 1970, l’association des mots « racisme » et « sionisme » est devenue une évidence idéologique, qui a inspiré nombre de slogans et de mots d’ordre, en particulier ceux qui appellent au boycottage d’Israël (en matière de commerce, de culture, de recherche et d’enseignement, etc.), ainsi traité en État criminel. La force symbolique de l’amalgame nazifiant a donc survécu à l’abrogation de la Résolution 3370” (7).

 

La conférence de Durban en 2001

 

Troisième étape : la conférence de Durban

 

A la Conférence de Durban de 2001, Israël est transformé en principal accusé de la part des pays participants arabes et musulmans, mais aussi et surtout des ONG qui font de cette conférence ‘“contre le racisme” un tribunal, où les accusés sont, indistinctement, Israël (qualifié d’État raciste et d’État d’apartheid’), le sionisme et les Juifs. Le forum des ONG de Duurban adopte ainsi une déclaration qualifiant Israël d’État raciste, l’accusant d’actes de génocide et affirmant l’existence d’un apartheid israélien. Durban est une étape clé dans la constitution du mythe “Israël État d’apartheid”. En raison du lieu même de la conférence, en Afrique du Sud, mais aussi et surtout du fait de l’importance grandissante des ONG dans la politique internationale, et dans le conflit israélo-arabe en particulier (8).

P. Lurçat

 

NB L’article ci-dessus est extrait de mon livre Les mythes de l’antisionisme contemporain, fondé sur le cours donné en 2019-20 dans le cadre de l’Université populaire du judaïsme dirigée par Shmuel Trigano. 

 

Notes

1. The Kremlin Legacy, Bucarest 1993

2. Voir notamment Jamie GlazovFrom Russia With Terror”, Jewish Press 31.3.2004

 https://www.jewishpress.com/indepth/front-page/239217/2004/03/31/2/

3. Amnon Lord, Israel Hayom 4/8/2018, https://www.israelhayom.co.il/article/576893

4. Consultable sur le site de l’ONU, https://www.un.org/french/documents/view_doc.asp?symbol=A/RES/3379(XXX)&Lang=F

5.Voir http://www.freedomarchives.org/Documents/Finder/DOC12_scans/12.zionist.colonialism.palestine.1965.pdf

6. Voir notamment https://www.un.org/fr/observances/International-day-of-solidarity-with-the-palestinian-people

7. P.A. Taguieff, La Nouvelle Propagande anti-juive, op. cit.

8. Sur cet aspect voir notamment le rapport de NGO Monitor, “The Centrality of NGOs in the Durban Strategy”, 11.7.2006. 

 

 

ILS ONT LU “LES MYTHES DE L’ANTISIONISME”

 

“Magistral, il a le mérite d'être clair et de permettre de repondre à tous les arguments de nos détracteurs”

Dorah Husselstein

 

“Un livre excellent par sa qualité argumentative et sa qualité de raisonnement et de savoir historique”.

Yana Grinshpun

 

“Ce livre est un véritable pense-bête et une Bible de poche du militant pro-israélien. Avec Bat Ye Or, Pierre Lurçat dément une thèse en vogue : le monde musulman ne serait que comme une « page blanche » sur laquelle on aurait transposé, à l’identique, l’antisémitisme européen”.

Marc Brzustowsky, Terre-des-Juifs

 

Un ouvrage d'une grande érudition historique, rigoureux, documenté et sourcé. Toutes les sources sont vérifiables dans les ouvrages cités en anglais, en français, en hébreu et en arabe. Ce livre est un document précieux pour discerner la réalité derrière les discours tendancieux de la presse européenne”.

Cléo, Amazon.fr

 

 

 

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Au-delà du mythe de l’État d’apartheid : Israël, État égalitaire et démocratique

February 7 2022, 15:49pm

Posted by Pierre Lurçat

 

L’apartheid n’existe pas en Israël. Les non-Juifs en général et les Arabes en particulier jouissent de droits identiques à ceux des Juifs. Ils votent à la Knesset et y sont élus, et ils jouissent des mêmes droits civiques, politiques, sociaux et économiques que tous les autres citoyens. Israël n’est pas un État juif au sens ethnique, c'est-à-dire au sens où tous ses habitants seraient juifs, mais un État dont la population est diverse et hétérogène, et dont la majorité est juive. L’exigence d’une majorité juive, inscrite dans le programme sioniste bien avant 1948, tenait à la volonté de créer un État (le seul!) dans lequel les Juifs seraient la majorité. Comme l’écrit Emmanuel Lévinas, “l’idée inaliénable” du sionisme politique, “c’est la nécessité pour le peuple juif de ne pas continuer à être minorité dans son cadre politique”[1]. Le refus de cette exigence trahit le refus arabe de l'existence même de l’État d’Israël, c’est-à-dire le refus de la souveraineté juive, pour des raisons profondes tenant tant à l’histoire du monde arabe qu’à la conception de la dhimma.

 

(Photo Ben Goldstein, reprise de l’excellent blog Bokertovyerushalayim)

             Le seul “apartheid” qu’on peut constater en Israël, si tant est que cette expression ait un sens, vise non pas les citoyens arabes, mais bien plutôt les Juifs. Ce sont les Juifs qui ne peuvent pas se rendre dans les territoires passés sous le contrôle de l’Autorité palestinienne, devenus “judenrein” de manière tout à fait officielle, au nom de la “paix”. Des pancartes rouges préviennent d’ailleurs les automobilistes juifs, sur les routes de Judée Samarie - les fameuses “routes de l’apartheid” dénoncées par les militants antisionistes - qu’ils ne doivent pas pénétrer dans les territoires de l’AP, sous peine d’y risquer leur vie. Dans le même ordre d’idées, on peut constater qu’il existe en Israël des compagnies d’autobus israéliennes (comme Egged ou Dan) dans lesquelles chacun peut voyager, sans aucune distinction ethnique ou nationale (les chauffeurs d’Egged étant indistinctement juifs, arabes ou druzes). Dans les compagnies d’autobus arabes, en service notamment à Jérusalem, ne voyagent que des habitants arabes. Ce que signifient ces exemples - choisis parmi d’autres - c’est que la vie quotidienne en Israël dément tous les clichés et slogans de l’antisionisme, largement répandus par les médias occidentaux. En Israël règne une égalité de droits totale entre citoyens juifs, arabes, druzes, circassiens, etc. A cet égard, l’État juif offre un modèle de pluralisme et de coexistence inter-ethnique, dont de nombreux pays occidentaux pourraient s’inspirer.

 

             La réalité ontologique, et phénoménologique de l’État juif (ou pour dire les choses plus simplement, la réalité de l’État d’Israël tel qu’il existe, tout comme la nature du projet sioniste) apportent un démenti cinglant aux critiques antisionistes visant sa nature supposément “raciste” et à la comparaison avec l’apartheid sud-africain. Lisons à ce sujet les remarques d’Elhanan Yakira, répondant à la qualification de “démocratie ethnique” (ou ethnocratie) [2]: “C’est faux, pour deux raisons principales : d’abord, le peuple juif n’est pas un ethnos. La communauté juive d’Israël - et il suffit de faire un tour rapide de Jérusalem pour s’en rendre compte - n’est pas une communauté ethnique. Elle n’est pas une communauté religieuse non plus… Parler du qualificatif “juif” comme ayant essentiellement une signification religieuse et/ou ethnique est une simplification, voire une abjection par rapport à la réalité”. Juif, dans l’expression “État juif” signifie un fait national dans le sens politique du mot”.

Cette réalité s’illustre sur le plan démographique dans la présence en Israël de plusieurs centaines de milliers de citoyens qui ne sont pas Juifs sur le plan de la halakha (loi religieuse juive), venus de l’ex-URSS et des autres pays d’Europe de l’Est. Elle s’illustre aussi, sur le plan idéologique et historique, dans les textes fondateurs du sionisme politique, et notamment dans ceux du père fondateur du mouvement national juif moderne, Theodor Herzl.

 

 

L’idéal de tolérance et d’égalité du fondateur du sionisme politique

Rappelons ici les deux ouvrages essentiels du fondateur du sionisme politique : Altneuland et l’État juif . Le premier, roman utopique écrit dans le style des romanciers futuristes du 19e siècle, comme Jules Verne (dont Herzl partageait la foi en la science, émancipatrice de l’humanité), décrit le futur État juif, pays à la fois ancien et nouveau, “nouvelle société” établie “sur notre chère vieille terre”. Dans un passage clé du roman, David Littwak, futur président de l’État (qui ressemble à Herzl lui-même) décrit ainsi l’idéal de tolérance du futur pays ancien-nouveau : 

“Pour ce qui est de la religion, vous trouvez à côté de nos temples les lieux de culte des chrétiens, des musulmans, des bouddhistes et des brahmanes. Permettez-moi de vous dire que mes compagnons ne font aucune différence entre les hommes. Nous ne demandons à personne à quelle religion et à quelle race il appartient. Il est un homme, cela nous suffit”. Cet idéal de tolérance est aussi exprimé dans la devise figurant sur le fronton du Palais de la Paix, un des deux édifices construits au centre de la nouvelle Jérusalem imaginée par Herzl (aux côtés du Temple) : “Nil humani a me alienum puto” (“Rien de ce qui est humain ne m’est étranger”, devise empruntée au poète latin Térence).

Dans le second livre, L’État juif, ouvrage programmatique qui décrit, avec une exactitude de visionnaire, le futur État d’Israël, Herzl écrit ce qui suit : “S’il se trouve parmi nous des fidèles appartenant à d’autres religions ou à d’autres nationalités, nous leur garantirons une protection honorable et l’égalité des droits”. Le traducteur du livre, Claude Klein, professeur de droit à l’université hébraïque de Jérusalem, note que cette vision égalitaire est reprise dans un passage du Journal de Herzl, intitulé : “Mon testament pour le peuple Juif”, dans les termes suivants : “établissez votre État de sorte que l’étranger s’y sente bien” .

Ce testament politique et cet idéal sont devenus une réalité dans l’État d’Israël aujourd’hui, où l’étranger se sent bien, comme en atteste l’afflux de travailleurs étrangers venus des quatre coins de la planète, pour travailler dans l’hôtellerie, les services aux personnes, la construction où l’agriculture, mais aussi dans le high-tech ou l’immobilier. Non seulement les étrangers se sentent bien en Israël, mais les Arabes eux-mêmes s’y sentent mieux que dans la plupart des pays arabo-musulmans, au point que les Arabes israéliens, généralement bien intégrés au sein de l’État juif, n’échangeraient pour rien au monde leur statut actuel contre celui de citoyens d’un futur et hypothétique État palestinien, dans lequel leur situation politique, sociale et économique serait bien moins confortable, comme ils ne l’ignorent pas

Si l’État d’Israël est devenu un modèle d’égalité, il est également un îlot de tolérance et de démocratie au sein du monde arabe, où l’intolérance et l’autoritarisme règnent encore trop souvent, malgré de récents signes d’évolution encourageants ici et là. Contrairement au mythe de “l’État d’apartheid”, Israël encourage et favorise la coexistence pacifique entre différentes ethnies, races et religions, tandis que ce sont souvent des États musulmans qui ont développé la haine de l’étranger, des non-musulmans et des Juifs en particulier. 

Citons à cet égard la confidence faite à Jean Daniel par deux dirigeants du FLN, à la fin de la guerre d’Algérie, qui lui expliquaient que “l’Algérie serait arabe et musulmane et qu’il n’y aurait aucune place pour les non musulmans” .  Ce programme a bien été appliqué, avec constance, dans le nouvel État algérien, aujourd’hui judenrein, à l’instar de nombreux États de l’espace arabo-musulman. Car le monde arabo-musulman vit encore, en grande partie – même si des signes de changement se font jour dans certains pays - à l’heure de la dhimma, ce statut d'infériorité imposé aux non-musulmans depuis les débuts de l'islam.

Comme l’explique Georges Bensoussan  : “Le statut du dhimmi n’a jamais disparu des consciences. Il tapisse l’imaginaire d’une partie des musulmans à l’endroit des Juifs. Quand bien même la liste (fort longue) des obligations auxquelles est soumis le sujet juif (et chrétien) n’a pas toujours été appliquée. Savoir qu’elle existe érige une digue entre les uns et les autres, qui rend l’égalité inconcevable. La soumission du Juif demeure le maître mot de cet univers mental”.

Pierre Lurçat

 


[1] E. Lévinas, L’au-delà du verset, lectures et discours talmudiques, éd. de Minuit 1982, p. 14.

[2] E. Yakira, Post-sionisme, post-Shoah, op. cit. p. 59.

NB L’article ci-dessus est extrait de mon livre Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain, fondé sur le cours donné en 2019-20 dans le cadre de l’Université populaire du judaïsme dirigée par Shmuel Trigano. 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pierre Lurçat présente le livre au micro de Cathy Choukroun sur RADIO QUALITA

 

https://www.youtube.com/watch?v=T5aGrpsaHI4

 

“Une des plus grandes dames de la scène politique israélienne…”

Ilana Ferhadian, RADIO J

 

https://www.youtube.com/watch?v=iiJLxxXn3-M

 

On éprouve du bonheur à lire ces pages où la famille apparaît comme un puissant socle”.

Olivier Ypsilantis, Zakhor Online

 

“La biographie la plus précoce de la« grand-mère d’Israël », avec

une riche préface offrant un éclairage enrichissant”.

 

Liliane Messika

 

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