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antisemitisme musulman

Aux sources de l’antisémitisme musulman : Les Juifs dans le Coran, de Meir Bar-Asher, par Pierre Lurçat

May 4 2021, 13:06pm

Posted by Pierre Lurçat

Aux sources de l’antisémitisme musulman : Les Juifs dans le Coran, de Meir Bar-Asher, par Pierre Lurçat

 

Voilà un livre qui arrive à point nommé. Alors que l’antisémitisme musulman fait des ravages en France et ailleurs, et qu’une nouvelle flambée de haine se déchaîne, la question mérite d’être posée : le Coran est-il antisémite? Cette question brûlante et souvent taboue (voir le procès intenté à l’historien Georges Bensoussan, “coupable” d’avoir laissé entendre qu’il existait un antisémitisme musulman ancestral), a fait l’objet de nombreuses polémiques, mais de peu d’études savantes récentes. Elle renvoie à d’autres questions, tout aussi cruciales. Quelle est l’attitude du Coran et de la tradition de l’islam envers les Juifs? Celle-ci est-elle univoque, ou bien a-t-elle plusieurs facettes?


 


 

C’est à ces questions que répond le livre du professeur Meir Bar-Asher, qui dirige le département de Langues et de Littérature arabes de l’université hébraïque de Jérusalem. L’auteur y aborde des questions diverses et variés, telles que l’histoire des relations avec les Juifs à l’époque de Muhammad, la représentation des juifs et la présence des récits bibliques dans le Coran, la comparaison entre loi juive et loi coranique, ou encore les sources coraniques de la dhimma - le statut des juifs dans l’islam (1). Il consacre aussi un chapitre à la place des Juifs dans l’islam chiite, dont l’actualité est tout aussi brûlante, alors que l’Iran vient de marquer le 40e anniversaire de la Révolution khomeiniste.

 

Les juifs sont très présents dans le Coran; qui les qualifie tantôt de Banu-Isra’il (Enfants d’Israël, expression calquée de l’hébreu), al-yahûd (juifs) ou encore ahl al-kitab (peuple du Livre). Cette dernière expression est ambivalente, explique Bar-Asher, car le “peuple du Livre est parfois qualifié dans la tradition musulmane “d’âne chargé de livres”, c’est-à-dire un peuple porteur d’un héritage dont il n’est pas digne. Cette qualification renvoie à l’accusation récurrente envers les juifs, selon laquelle ils auraient “falsifié” les textes sacrés dont ils étaient dépositaires.

 

C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre l’appellation de “meilleure communauté”, par laquelle le Coran désigne les musulmans (Sourate 3-110). Si les musulmans sont devenus la “meilleure communauté”, c’est en effet parce que les juifs ont failli à leur mission et que Dieu les a donc punis. L’islam incarnerait alors le “Nouvel Israël”, dans une optique théologique qui rappelle celle de la polémique chrétienne antijuive et du “Verus Israël”.

 

 

L’auteur montre bien comment l’attitude envers les juifs est motivée par des considérations diverses, qui tiennent à la fois à la volonté de se démarquer et de s’affranchir des sources juives (concernant par exemple le calendrier et certains aspects du rite) et à des visées politiques, liées aux rapports conflictuels que le prophète a entretenus avec les juifs à Médine. Bar-Asher fait le lien entre les aspects historiques et l’actualité récente. Ainsi, le fameux hadith des pierres et des arbres est repris dans la Charte du Hamas et dans le discours islamiste contemporain (2).

 

Le Coran appelle-t-il au meurtre des Juifs?

 

Cette question a défrayé l’actualité il y a quelques mois, lors de la parution du Manifeste contre le nouvel antisémitisme, signé par 250 personnalités françaises demandant aux autorités musulmanes de déclarer obsolètes les versets du Coran appelant au meurtre et au châtiment des juifs, des chrétiens et des incroyants. Ce manifeste a suscité de nombreuses réactions hostiles du monde arabo-musulman (3). Sur ce sujet crucial, l’auteur du livre s’est récemment exprimé dans les médias français, affirmant “on ne peut pas dire que le Coran dit de tuer les juifs”.

 

Les musulmans pensent-ils que le Coran leur enjoint de tuer les juifs?

 

Mais la question n’est pas tant, pour paraphraser un islamologue français, de savoir si le Coran dit de tuer les juifs, que de savoir si des musulmans pensent que le Coran leur enjoint de tuer les juifs… (4) A cet égard, il est erroné d’affirmer, comme le fait M. Bar Asher, que “le Nouveau Testament ne se prête pas moins à une lecture ‘antijuive’ que le Coran”. Car comme il le remarque lui-même, la doctrine de l’Eglise concernant les juifs a été révisée de fond en comble par le Concile Vatican II. Il reste donc pour l’islam à mener lui aussi son aggiornamento, pour remplacer, selon les termes de Jules Isaac, l’enseignement du mépris par un enseignement de l’estime...


 

En conclusion de son étude, M. Bar Asher dresse le constat d’un “flot constant de cours et de sermons qui cherchent à rendre actuelles les paroles par lesquelles le Coran critique les juifs et les délégitimise. D’autres voix tentent de se faire entendre au sein du monde musulman ; mais il faut bien constater qu’aujourd’hui elles sont loin d’être dominantes et rencontrent peu d’écho”. Ayant travaillé pour l’institut MEMRI, qui tente de faire écho à ces autres voix, je ne peux, hélas, que confirmer ce constat. Écrit dans un langage simple et accessible, cet ouvrage enrichira les connaissances et la réflexion de tous ceux qui s’interrogent sur le réveil de l’islam contemporain et sur ses conséquences dramatiques.

Pierre Lurçat

 

Meir Bar-Asher, Les juifs dans le Coran. Albin Michel 2019 (Cet article est initialement paru en 2019).

 

(1) Sujet sur lequel l’auteur reproche de manière quelque peu péremptoire et tout à fait déplacée à Bat Ye’or de reprendre dans son livre Le dhimmi le stéréotype du “combattant fanatique brandissant une épée dans une main et le Coran dans l’autre”. Je plaide "coupable" d'avoir moi aussi utilisé cette image parlante, et bien fondée au regard de l'histoire de la conquête musulmane, en intitulant un de mes livres Le Sabre et le Coran. Bat Ye'or a répondu dans ces colonnes aux accusations de M. Bar Asher.

(2) Voir à ce sujet “La Prophétie de la Pierre et de l’Arbre, un hadith antisémite largement utilisé”, http://memri.fr/2018/07/31/un-hadith-antisemite-la-prophetie-de-la-pierre-et-de-larbre-videos-et-rapports-de-memri/

(3) Voir notamment :

http://memri.fr/2018/08/28/le-manifeste-contre-le-nouvel-antisemitismeppelant-a-frapper-dobsolescence-des-versets-du-coran-pronant-la-violence-suscite-la-colere-des-instances-musulmans-et/

(4) La citation exacte d’Olivier Roy est “La question n'est pas : “Que dit vraiment le Coran ?”, mais : “Que disent les musulmans sur ce que dit le Coran ?”  A cet égard, on ne peut séparer le Coran de ses interprètes et des Hadith, lesquels sont parfois encore plus radicaux que le texte coranique lui-même, comme le hadith des arbres et des pierres, qui procède d’un antisémitisme radical et apocalyptique, comme je l’ai montré au sujet de la Charte du Hamas. http://vudejerusalem.over-blog.com/2018/04/1987-2018-le-hamas-un-mouvement-islamiste-apocalyptique-par-pierre-lurcat.html

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L’introuvable profil psychologique ou psychiatrique des terroristes de l’islam, Pierre Lurçat

April 28 2021, 13:26pm

Posted by Pierre Lurçat

 

L’introuvable profil psychologique ou psychiatrique des terroristes de l’islam, Pierre Lurçat

 

La récente décision de la Cour de Cassation en France, tout comment la vague d’attaques anti-juives menées en Israël à l’occasion du Ramadan, remettent à l’ordre du jour le débat ancien sur le soi-disant “profil psychologique” des terroristes islamistes et la tentative récurrente de “psychiatriser” ces assassins, pour mieux effacer ou diluer leur responsabilité - et la nôtre… Je publie ici un extrait de mon livre Pour Allah jusqu’à la mort, Enquête sur les convertis à l’islam radical, dans lequel je résume l’état des recherches sur la question. P.L.

 

 

“Marc Sageman, psychiatre, sociologue et ancien agent de la CIA en Afghanistan, a côtoyé de près les djihadistes et a assisté à l’émergence du noyau d’activistes à l’origine de l’organisation Al-Qaida. Il est l’auteur d’une enquête approndie sur les acteurs du djihad, dans laquelle il démonte les différentes théories à la mode sur le profil psychologique et sociologique des terroristes [1].

 

Son travail est fondé sur un échantillon représentatif d’acteurs du djihad salafiste mondial, constitué de moudjahidine sur lesquels on dispose d’informations suffisamment détaillées, provenant de sources publiques telles que les actes et transcriptions de procès, documents officiels, articles de presse et autres sources disponibles sur Internet. Il a mené une enquête aussi rigoureuse que possible, en remettant en question la fiabilité des informations collectées – notamment celles émanant de journalistes ou d’autres sources qu’il estime n’être pas toujours crédibles. Ses conclusions vont à l’encontre de la plupart des théories en vogue sur le sujet depuis plusieurs décennies.

 

Sageman réfute tout d’abord l’idée largement répandue selon laquelle le terrorisme se nourrirait de « la misère et des inégalités » et constituerait « la seule arme dont disposent les démunis et les sans-pouvoir contre les Etats tout-puissants ». Cette idée reçue, trop souvent répétée dans les médias et dans des ouvrages spécialisés, ne s’applique pas du tout au djihad salafiste mondial, pas plus d’ailleurs qu’aux cas évoqués précédemment (Allemagne et Israël notamment). « Près des trois quarts des moudjahidine salafistes du djihad mondial sont issus des classes supérieure ou moyenne », constate Sageman. Quant à Ben Laden lui-même, il est l’héritier d’une fortune accumulée par son père, fondateur d’une entreprise de travaux publics prospère… Les convertis à l’islam radical dont nous avons retracé les itinéraires ne correspondent pas non plus à l’image d’Epinal du “desperado” issu d’un milieu défavorisé, puisque la plupart sont issus des classes moyennes, quelques-uns de familles ouvrières (en France notamment) tandis que d’autres proviennent de la bourgeoisie libérale (aux Etats-Unis et en Allemagne).

 

Sageman réfute ensuite l’idée du terroriste ignorant et peu éduqué, ce qui en ferait un “candidat idéal au lavage de cerveau”. Dans l’ensemble, constate-t-il, « les moudjahidine salafistes ont reçu une éducation nettement supérieure à celle de leurs parents”. Ce constat rejoint celui fait par de nombreux observateurs concernant les islamistes en général, dont beaucoup ont été formés dans les meilleures universités occidentales. L’historienne Bat Ye’or observe ainsi que les idéologies islamistes « se sont développées – non point dans un milieu obscurantiste et traditionnel – mais chez des intellectuels diplômés des universités américaines et européennes [2] ». Daniel Pipes donne des exemples concrets pour illustrer ce fait souvent méconnu : Hassan Tourabi, leader islamiste soudanais, est diplômé de l’université de Londres et de la Sorbonne. Abbassi Madani, leader du FIS algérien, possède un doctorat en éducation de l’université de Londres. Moussa Abou Marzouk, chef de la branche politique du Hamas, est diplômé de l’université de Louisiane. Quant à Fat’hi Shiqaqi, dirigeant du Jihad islamique palestinien, il déclara dans une interview être un lecteur assidu des grands classiques de la littérature occidentale, de Sophocle et Shakespeare à Dostoïevski, Tchekhov et Sartre [3]...

 

Oussama Ben Laden

 

Enfin, Sageman s’attaque aux explications psychologiques, qui voudraient que les terroristes souffrent de maladie mentale ou de troubles de la personnalité. Cette hypothèse repose sur la croyance répandue, qui fait de tout criminel un psychopathe. Mais elle n’est pas confirmée par les innombrables études qui ont tenté de définir une quelconque pathologie du terroriste. Jerrold Post, chercheur américain, fondateur du Centre de psychologie politique, est parvenu à la conclusion que les études sur la psychologie du terrorisme ne permettaient de déceler aucun caractère pathologique, et il cite plusieurs auteurs qui partagent ce constat. Pour Martha Crenshaw, « la caractéristique la plus remarquable des terroristes est leur normalité [4] ». 

 

Marc Sageman parvient à la même conclusion, après avoir étudié la personnalité d’un échantillon de dix moudjahidine d’Al-Qaida, dont Oussama ben Laden, Ayman Al-Zawahiri, Mohammed Atta ou Zacarias Moussaoui. Il réfute tour à tour les thèses les plus répandues sur la personnalité du terroriste : théories du « narcissisme pathologique », de la paranoïa ou de la « personnalité autoritaire ». Sa conclusion est que toutes les recherches menées depuis plus de trente ans ont conclu à l’inexistence d’un profil psychologique du terroriste. Le plus étonnant en l’occurrence est que des chercheurs continuent, malgré cela, à s’évertuer à trouver des preuves d’une pathologie du terroriste, envers et contre tout, comme si le constat presque unanime des recherches antérieures ne tirait pas à conséquence… Mais cela est un autre sujet.

 


[1] M. Sageman, Understanding Terror Networks, University of Pennsylvania Press, 2004, traduit en français sous le titre Le vrai visage des terroristes, Denoël, 2006.

[2] Bat Ye’or, Juifs et chrétiens sous l’islam, les dhimmis face au défi intégriste, Berg International, 1994, p. 202.

[3] Daniel Pipes, « The Western Mind of Radical Islam », First Things, décembre 1995, traduit en français dans L’islam radical, Cheminements 2008.

[4] Martha Crenshaw, « The causes of Terrorism », Comparative Politics 13 (1981), cité par Jerrold Post, « Terrorist Psycho-Logic », in Walter Reich (éd.), Origins of Terrorism, Cambridge University Press 1990.

Pour Allah jusqu’à la mort est paru en 2006 aux éditions du Rocher.

 

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“Hébreu, Auto-défense, Alyah!” Adresse aux Juifs restant encore en France

April 23 2021, 15:52pm

Posted by Pierre Lurçat

 

 

La décision rendue par la Cour de cassation a suscité de très nombreuses analyses pertinentes, de la part d’observateurs avisés, et pas tous Juifs (Cf l’éditorial courageux de F.O Giesbert) Même le grand rabbin de France, que certains soupçonnaient de tiédeur, et le président du CRIF, qui a retrouvé pour l’occasion un peu du “Hadar” de sa jeunesse dans les rangs du Betar, semblent avoir trouvé les mots justes… Mais cette profusion de mots ne fait que ressortir l’absence flagrante d’actes et de décisions opérationnelles. Les lignes qui suivent prétendent aborder la situation des Juifs de France sous un angle différent, l’angle sioniste et celui de l’action.

 

Trop de réflexion et pas assez d’action

 

Changer la loi française? C’est ce que proposent le président Macron et d’autres, parmi lesquels Robert Badinter, infatigable, qui s’abstient pourtant de toute critique contre la Cour de cassation (1) C’est sans doute utile, mais cela ne fera pas changer l’ennemi, ni la situation objective de la France actuelle (“l’antisémitisme des choses”, comme disait Jabotinsky). Alors c’est à nous, c’est à vous de changer. Cessez enfin de regarder la France avec les yeux de Chimène et d’attendre, comme une femme battue, qu’elle retrouve pour nous un amour qu’elle a depuis longtemps perdu, si tant est que cet amour ait jamais existé… Cessez de croire que la “République” va connaître un sursaut de lucidité et se souvenir de ses enfants Juifs. 

 

 

Prenez acte, une fois pour toutes, du divorce consommé entre la France et les Juifs, que des esprits lucides - comme Shmuel Trigano - avaient déjà annoncé en 1981 (au lendemain de l’attentat de Copernic, attribué à tort à une fantomatique “extrême-droite” (2). Prenez acte, enfin (mieux vaut tard que jamais) du caractère inéluctable du constat, fait il y a plus de 120 ans par un journaliste Juif, assistant à la dégradation du Capitaine Dreyfus. Herzl, le “Visionnaire de l’Etat” avait entrevu, dès cette époque, ce que certains de vous refusent encore d’admettre aujourd'hui : qu’il n’y a aucun avenir pour les Juifs en Europe.

 

Prenez acte du fait que la défense des Juifs ne peut être confiée aux autorités françaises, qui ont d’autres chats à fouetter et qui peinent déjà à défendre les “Français innocents” (selon le lapsus révélateur de Raymond Barre). Car on peut supposer que la décision de la Cour de cassation aurait été identique, si la victime s’était appelée Martine Dupont, et que l’assassin ait été de la même religion que Kobili Traoré (religion dont le nom est devenu le grand tabou de la vie politique française, comme l’a démontré Georges Bensoussan, qui en a personnellement fait l’expérience). Plus encore que l’identité de la victime, c’est celle de l’assassin qui explique son impunité consacrée par la plus haute instance judiciaire française.

 

Votre salut ne viendra d’aucune pétition, d’aucun appel à la “solidarité républicaine”, d’aucune LICRA - irrémédiablement compromise avec les ennemis des Juifs (3) -, d’aucune Amitié judéo-chrétienne ou judéo-musulmane. Votre salut ne viendra que de Sion, et de vous ! C’est pourquoi il faut saluer l’initiative originale et lucide de Me William Goldnadel, qui porte plainte non pas devant la Cour européenne des Droits de l’Homme (a-t-on jamais vu celle-ci défendre les Juifs?) mais devant les tribunaux israéliens. En tant que juriste israélien, je ne suis pas certain que cela sera suivi d’effet, mais il y a là une piste à explorer et à utiliser, désormais, chaque fois qu’un Juif sera persécuté en France, parce que Juif. 

 

Le message politique adressé à la France est limpide: “Si vous ne faites rien pour protéger les Juifs, l’Etat juif le fera”. C’est la même logique qui doit s’appliquer en matière de sécurité quotidienne. De même que, depuis des décennies, la communauté juive organisée a mis en place un cadre de protection supervisé par des responsables en Israël, il est temps de proclamer haut et fort ce que chacun sait et d’assumer ouvertement la tâche de défense des Juifs, avec le même mot d’ordre qu’avaient lancé Simon Doubnov, H.N Bialik et d’autres au lendemain du pogrome de Kichinev : Autodéfense!

 

OJE : Soutenir ceux qui nous défendent

 

Il est temps de soutenir les quelques organisations juives qui assument la mission sacrée de défendre et de protéger les Juifs de France. Au lieu de donner de l’argent à des institutions qui ne font que promouvoir une soi-disant “culture juive” souvent hostile à Israël, ou qui organisent des “galas au profit des organisateurs de galas”, soutenez plutôt le BNVCA, l’OJE, la LDJ… Que ceux qui se consacrent bénévolement à défendre leurs frères Juifs soient aidés et donnés en exemple, au lieu d’être vilipendés ou de susciter des moues dégoûtées de la part des “Juifs de salons” et autres “Juifs professionnels” (ceux qui font profession d’oeuvrer à des causes juives). 

 

Hébreu, Alyah, auto-défense!

 

Mais cela n’est que l’aspect le plus urgent de la situation d’urgence dans laquelle les Juifs de France se sont (trop vite) habitués à vivre depuis deux décennies. L’autre aspect, pas moins important, consiste à préparer l’avenir. L’auteur de ces lignes, qui a fait son alyah il y a près de trente ans, sait bien que les Juifs qui ont choisi de rester en France ne vont pas tous partir du jour au lendemain. Le sionisme bien pensé ne consiste pas à accueillir des Juifs en Israël et à se désintéresser des autres. Une grand-mère juive apeurée, qui m’écrivait il y a quelques jours que son petit-fils était agressé et menacé à Boulogne (pas dans le 93!), répondait, à ma question concernant son avenir, qu’il n’était pas encore prêt  à monter en Israël... 

“Juifs, apprenez l’hébreu!’” Jabotinsky jeune

 

Pour ce jeune Juif et pour des milliers d’autres, il est urgent de relancer l’appel lancé par le Rosh Betar il y a près de cent ans : “Apprenez l’hébreu!” Que chaque jeune Juif de France apprenne l’hébreu pour préparer sa future alyah, même si celle-ci n’est encore qu’un lointain projet. Que toutes les écoles juives de France fassent de l’hébreu une matière obligatoire et fondamentale, non pas pour glaner quelques points au baccalauréat, mais pour préparer activement l’avenir de la jeunesse juive de France en Israël. “Hébreu, Alyah, Auto-défense” : ces trois mots doivent devenir le slogan des Juifs de France et de ceux qui prétendent parler en leur nom. Le temps de la réflexion et des colloques sur l’antisémitisme est passé. Il est temps d’agir.

Pierre Lurçat

 

1. Voir son intervention sur Akadem. R. Badinter, ami de François Mitterrand, l’ami irrepenti de René Bousquet, cherche peut-être ainsi à faire oublier sa responsabilité personnelle dans l’état actuel de la société et de la justice française, étant entré de son vivant au “Panthéon” pour avoir aboli la peine de mort (pour les assassins, par pour leurs victimes...).

2. Voir son livre largement prémonitoire, La République et les Juifs, paru en 1982. 

3. Je renvoie à mon article coécrit avec Ph. Karsenty, dans Causeur.

https://www.causeur.fr/georges-bensoussan-licra-antiracisme-ccif-142476



 

 

Rassemblement ce dimanche 25 avril à 14h sur le parvis des Droits de l’Homme, place du Trocadéro pour protester contre la décision de la Cour de Cassation concernant l’assassinat de Sarah Halimi.

 

Des rassemblements sont prévus dans d'autres villes :

🇫🇷 MARSEILLE - Place de la Préfecture à 14h

🇫🇷 LYON - Rue du Palais de Justice à 16h

🇫🇷 NICE - Place du Palais de Justice à 17h

🇫🇷 STRASBOURG - Parvis Jean Kahn à 14h

🇫🇷 BORDEAUX - Parvis des Droits de l'Homme à 14h

🇫🇷 LILLE - Place de la République à 14h

🇫🇷 DEAUVILLE - Esplanade du Port (face à la gare) à 14h

🇮🇱 TEL AVIV - Ambassade de France à 15h

🇮🇱 JÉRUSALEM - Gan HaAtzmaut à 15h

🇮🇱 EILAT - Hom Rachrach à 15h

🇺🇸 LOS ANGELES - Consulat français à 10h

🇺🇸 NEW YORK - Consulat général de France à 11h

🇺🇸 MIAMI - Solidarity Walk Macy's Aventura Parking Lot à 11h

🇬🇧 LONDRES - Ambassade de France à 13h

🇮🇹 ROME - Piazza Farnese à 15h

 
 
 

 

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Qu’est-ce que l’antisionisme? Pierre Lurçat

December 6 2019, 12:18pm

Posted by Pierre Lurçat

Après l’agression dont a été victime Alain Finkielkraut, en février 2019, le débat sur la nature de l’antisionisme a fait irruption dans les médias français, et jusque dans les couloirs du Parlement, où il a été question de pénaliser l’antisionisme, en en faisant une catégorie de l’antisémitisme…[1] Le président français Emmanuel Macron a lui-même déclaré que “l’antisionisme (était) une des formes modernes de l’antisémitisme…”.

 

Pour mémoire, le samedi 15 février 2019, le philosophe  Alain Finkielkraut était pris à partie par un manifestant en marge d’un cortège des Gilets jaunes, violemment insulté, et traité de "sale sioniste de merde". L’incident a soulevé une vive émotion en France et suscité un large débat.

 

 

La nature même de l’insulte incite à la réflexion : de toute évidence, lorsqu’on traite un intellectuel juif de “sale sioniste”, le mot sioniste tient lieu de mot-codé, dont le signifiant véritable est “juif”. Ainsi, dans la France aujourd’hui, comme dans l’URSS jadis, ou dans certains pays arabes, comme nous le verrons, “sioniste” est devenu pour certains l’équivalent de “juif”.

 

C’est en ce sens qu’on a pu soutenir que l’antisionisme était la forme la plus récente de l’antisémitisme. Mais, au-delà des polémiques et des joutes idéologiques, qu’en est-il vraiment? Qu’est-ce que l’antisionisme? S’agit-il de la dernière mutation de l’antisémitisme? Est-il seulement un discours radical, maniant slogans et insultes, ou bien peut-être une véritable idéologie, qui mérite d’être analysée, étudiée et si besoin réfutée?

 

Qu’y a-t-il de commun entre le manifestant parisien qui traite Alain Finkielkraut de “sale sioniste”, l’intellectuel arabe qui se dit “antisioniste” par conviction nationaliste ou islamiste, ou encore l’intellectuel juif assimilé qui prétend, lui, s’opposer au sionisme, “au nom du judaïsme”?

 

De toute évidence, il y a là des manifestations très diverses - voire totalement disparates - d’un phénomène multiforme, qu’on a peine à ranger sous le même vocable d’antisionisme. La différence entre ses manifestations très variées est-elle une simple différence de degré, ou bien s’agit-il de phénomènes véritablement distincts?

 

Prenons un exemple. Entre les deux énoncés “L’Amérique soutient Israël” et “Les Juifs dirigent l’Amérique”, il y a, de toute évidence, une différence de nature. Le premier énoncé est une affirmation factuelle, apparemment objective, qu’on peut évidemment discuter, mais qui ne contient aucun jugement de valeur apparent. Un premier glissement sémantique s’opère toutefois, lorsqu’on passe de l’énoncé “L’Amérique soutient Israël”, à “L’Amérique soutient toujours Israël”, puis à “Israël est l’instrument de l’impérialisme américain”. Nous sommes là, toutefois, dans une simple amplification du message, qui demeure malgré tout largement similaire.

 

 

Le véritable “saut” conceptuel s’effectue, lorsque l’énoncé précédent, “Israël est l’instrument de l’impérialisme américain” (ou occidental), devient cette-fois “Israël dirige la politique américaine”, ou encore, de manière plus lapidaire et radicale, “Les Juifs dirigent l’Amérique”. Cette fois-ci, le glissement sémantique n’est plus seulement quantitatif, mais qualitatif. On change de registre, et pour ainsi dire de paradigme…

 

L’historien des idées Pierre-André Taguieff définit ce procédé rhétorique, qu’on rencontre souvent dans le discours polémique, comme consistant à élargir “la cible de la stigmatisation”[2].  Il en donne pour exemple le passage de l’énoncé “tous les Juifs sont des criminels”, à l’énoncé “tous les criminels sont des Juifs”. Ce procédé rhétorique est utilisé de manière récurrente dans le discours antisioniste.

 

On en donnera un autre exemple, dans un cadre différent, avec l’affirmation que “tous les Israéliens sont des soldats”. Cette affirmation a servi au cheikh islamiste Youssouf Al-Qardawi, autorité sunnite proche de la mouvance des Frères musulmans, pour justifier les attentats du Hamas contre des civils israéliens. Dans ce cas précis, l’élargissement de la “cible de la stigmatisation”, équivaut à élargir la cible des attentats, c’est-à-dire les victimes permises par le droit islamique. Le discours antisioniste a ainsi des conséquences tout à fait concrètes, puisque la rhétorique de la haine est mise au service de la violence politique et terroriste, qu’elle justifie et qu’elle alimente.

 

Il y a donc bien, pour répondre à notre question préliminaire, une différence de degré entre ces différentes formes d’antisionisme.

 

RETROUVER LA SUITE SUR AKADEM,

 

http://www.akadem.org/sommaire/cours/sciences-politiques-les-mythes-de-l-antisionisme-pierre-lurcat/racines-et-visages-de-l-antisionisme-30-10-2019-115388_4873.php

 

[1] Débat qui a abouti à la résolution du Parlement adoptant la définition de l’antisémitisme de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA).

[2] La Judéophobie des Modernes, p. 261. Odile Jacob 2008.

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Tisha Be'Av : Jeûner, prier, se lamenter... Mais aussi agir en soutenant les Etudiants pour le Mont du Temple!

August 11 2019, 08:29am

Posted by Pierre Lurçat

En ce jour de Tisha Be'Av, alors que le peuple d'Israël est plongé dans le jeûne et l'affliction, le Mont du Temple est fermé aux visiteurs juifs sur ordre du gouvernement juif (!) et envahi par les fidèles d'une autre religion, qui profanent notre lieu le plus saint et se tournent dans leurs prières vers une autre ville lointaine...

Prier et jeûner ne suffira pas à changer cette situation. C'est ce qu'ont bien compris les membres de l'association "Etudiants pour le Mont du Temple", qui sont depuis plusieurs années au premier rang du combat pour préserver le Mont du Temple, y rétablir la souveraineté juive et mettre fin au Hilloul Hashem que constitue la situation actuelle. 

En soutenant leur combat et en répondant à leur appel, vous participerez vous aussi à restituer le Mont du Temple au peuple Juif, première étape vers la Reconstruction du Temple, "très vite et de nos jours", Amen!

Shalom,
Depuis cinq ans, nous, 'les étudiants pour le mont du temple', religieux et non religieux, luttons pour faire changer la situation actuelle sur le Mont du Temple et pour faire valoir nos droits et notre souveraineté à l’endroit le plus sacré du peuple juif.
Vous pouvez nous aider et nous soutenir en faisant un don ( même un petit don sera le bienvenu).
LIEN POUR EFFECTUER UN DON :

 

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לשרה ותום

Lire aussi sur le sujet : 

Yom Yeroushalayim sur le Mont du Temple : entre humiliation et espoir

Israël ne peut pas devenir « l’Etat de tous ses citoyens », un Etat comme les autres qui serait mû uniquement par les ressorts de l’économie et de la politique, et coupé de la source de Sainteté qui est le Mont du Temple (1). Jamais la situation n’a été aussi humiliante pour les Juifs qui montent sur le Har Habayit, le Mont du Temple, et jamais la nécessité de protéger le droit de culte des Juifs sur cet endroit, qui est le plus sacré du judaïsme, n’a été aussi évidente qu’aujourd’hui. Impressions ressenties le Yom Yeroushalayim, 5 juin 2016.

 

Le débat véritable et urgent qui devrait se tenir sur ce sujet crucial n’est pas tant celui de savoir si nous avons le droit – ou plutôt le devoir – de reconstruire le Temple, que celui de savoir ce que pourra devenir le Temple, une fois reconstruit. Redeviendra-t-il le lieu de sacrifices, comme autrefois, selon les mots de la prière (חדש ימנו כקדם), ou bien devrons-nous y instaurer un culte différent, peut-être même entièrement nouveau, qui ne ressemblera ni aux sacrifices d’antan ni aux prières actuelles dans les synagogues, instaurées après la destruction du Second Temple ?

 

1525035_10151756715916682_588206289_n.jpgA cette question immense, nous ne pouvons évidemment pas répondre aujourd’hui, Une chose pourtant est certaine, à mes yeux comme aux tiens : le Temple est le cœur de notre identité nationale et religieuse et la clé de notre possibilité de vivre sur cette terre que le monde entier nous dispute, comme l’avaient bien compris les Pères fondateurs du mouvement sioniste et de l’Etat d’Israël. Ceux qui se bercent de l’illusion qu’on pourrait renoncer au Temple et brader son emplacement, pour calmer les appétits de nos ennemis, sont oublieux des leçons de notre histoire ancienne et récente ; ils sont prêts à sacrifier ce que nous avons de plus sacré contre des promesses illusoires et des traités de paix qui ne valent pas l’encre avec laquelle ils sont écrits.

 

Je ne t’ai pas dit, hier, quand vous êtes redescendus, Tom et toi, du Har Habayit et que nous nous sommes rencontrés devant la synagogue de la Hourva reconstruite, au milieu de la foule en liesse du Yom Yeroushalayim, combien j’étais fier de votre courage et de votre ténacité ! Car il faut bien du courage pour se rendre là-haut, malgré les imprécations hostiles de nos ennemis et les gestes non moins hostiles des policiers (notre police !), qui traitent sans ménagement les Juifs venus faire acte de présence sur ce lieu sacré. Ceux-ci ne viennent pourtant ni par goût de la provocation, ni pour satisfaire un vague sentiment mystique ou religieux, mais comme shli’him, comme représentants de tout notre peuple (même si beaucoup d’entre nous sont encore totalement inconscients de ce que le Temple signifie pour Israël).

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De gauche à droite: Dan Beeri, Yehuda Etsion, Yoram Ginzburg et Neeman (Photo Makor Rishon)

Plus encore que la brutalité des policiers du Yassam, l’unité anti-émeutes, qui bousculent les fidèles juifs, même quand ils sont déjà sortis du périmètre de l’esplanade du Temple – c’est le sentiment d’être étranger sur sa propre terre qui est difficile à supporter. Si les dirigeants de notre Etat avaient une réelle conscience de ce que représente le Temple, alors ils auraient appelé, en ce jour de Yom Yeroushalayim, les Juifs à monter par milliers sur le Har Habayit, au lieu de les en dissuader par tous les moyens… L’amère vérité est que nos dirigeants se comportent eux-mêmes comme des étrangers dans notre capitale réunifiée il y a 49 ans, en laissant le Waqf musulman administrer  le lieu le plus sacré du judaïsme, comme l’avait fait avant eux Moshé Dayan, le vainqueur de la Guerre des Six jours, lorsqu’il avait confié les clés du Mont du Temple à nos ennemis, au lieu de proclamer avec force que nous étions revenus sur le Mont pour y rester et pour exercer notre souveraineté nationale.

 

Nos ennemis ne s’y sont pas trompés, car ils ne respectent pas la faiblesse de ceux qui ne sont pas sûrs de leur bon droit : nos hésitations et nos atermoiements les renforcent dans leur conviction que les Juifs ne sont pas chez eux à Jérusalem, ni dans le reste du pays. C’est d’ailleurs pour cette raison précisément que la Loi juive permet de fouler le sol sacré autour du Temple : pour y manifester notre présence en tant que conquérants et faire savoir à nos ennemis et au monde entier que le peuple Juif est revenu à Sion par la « force du droit » (selon les mots de M. Begin) et en vertu du droit politico-religieux conféré par notre histoire plurimillénaire.

En visite sur le Mont du Temple.JPG

Nous avons reconquis Jérusalem et y sommes retournés en tant qu’occupants légitimes, et non pas comme des usurpateurs. Car le כיבוש n’est pas une insulte, comme voudraient le faire croire les représentants d’une morale et de valeurs étrangères au sein de notre peuple (qui prétendent que « l’occupation corrompt »). Le כיבוש est la seule façon de reconquérir une terre dont nous avons été éloignés à notre corps défendant. Il y a 49 ans (le temps d’un Yovel, d’un jubilé) les soldats de Tsahal et les parachutistes de Motta Gur libéraient Jérusalem des mains de l’occupant jordanien, qui avait transformé en latrines les pierres du Kottel.

 

JERUSALEM DEGALIM.JPG

YOM YEROUSHALAYIM

Aujourd’hui, le Kottel est en partie libéré (même si une partie demeure ensevelie sous terre) et les Juifs du monde entier viennent s’y recueillir et y épancher leur cœur, pensant parfois à tort que c’est l’endroit le plus saint de Jérusalem, alors que la sainteté véritable se trouve au-dessus, sur le Har Habayit… Le plus dur reste encore à faire : libérer le Mont du Temple, pour que Jérusalem soit véritablement libre et devienne enfin la « Maison de prière pour tous les peuples » annoncée par nos prophètes, lorsque la liberté de culte s’y exercera pleinement pour les Juifs, comme elle s’y exerce déjà pour les fidèles des autres religions.

C’est vous, les Etudiants pour le Mont du Temple (סטודנטים למען הר הבית) qui avez, avec d’autres organisations, assumé la tâche noble et difficile d’entamer ce combat. Que Dieu vous bénisse et vous donne la force de réussir ! חזק ואמץ

Pierre Lurçat

(1) J'aborde ce sujet dans mon dernier livre, Israël le rêve inachevé, Editions de Paris 2018.

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Non, Eurabia n'est pas une "théorie du complot"! Franz-Olivier Giesbert

June 25 2019, 10:31am

Posted by Franz Olivier Giesbert

 

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A propos des juifs dans le Coran : Réponse à Meir Bar Asher, par Bat Ye’or

April 12 2019, 14:07pm

Posted by Bat Ye'or

 

Le texte qu’on lira ci-dessous m’a été adressé par Bat Ye’or, suite à ma recension du livre de Meir Bar Asher, Les juifs dans le Coran. Malgré son sujet pointu, il ne s’agit pas d’une querelle d’érudits. En réalité, Bat Ye’or répond ici à une accusation d’islamophobie qui est devenue un enjeu intellectuel et politique de premier plan dans l’Europe et le monde actuels. Ce faisant, elle donne aussi un aperçu passionnant de sa conception de l’histoire et de la “vérité historique”, et de l’actualité de ses travaux sur la dhimmitude. On mesure en la lisant ce qui sépare une intellectuelle libre et engagée, ayant introduit dans le lexique politique contemporain des concepts nouveaux et indispensables à la compréhension de notre monde (dhimmi, Eurabia) et un universitaire enfermé dans sa tour d’ivoire, qui doit nécessairement se soucier de ce qu’on peut et qu’on ne peut pas dire, dans le monde bien étriqué de l’université actuelle.

P. Lurçat

 

Bat Ye’or - (Photo P.Lurçat)

Il est stupéfiant de trouver parfois chez des érudits distingués des généralités dépourvues de sens. Il en est ainsi du livre de Meir M. Bar Asher, Les juifs dans le Coran, par ailleurs fort instructif.  Reprenant une citation de Bernard Lewis, éclairé selon ses thuriféraires, d’une infaillibilité de jugement plus avérée que celle du pape, l’auteur utilise l’image d’un guerrier musulman le sabre dans une main, le Coran dans l’autre, pour dénoncer avant l’heure, les islamophobes. D’un trait de plume, Bar Asher me situe dans cette catégorie. Tout d’abord cette image d’un guerrier musulman qui serait l’emblème du jugement primaire des islamophobes n’est pas de conception antimusulmane. Bien au contraire. Elle provient de cette littérature jihadiste du moyen-âge visant à stimuler les musulmans à s’enrôler dans la guerre sainte contre les mécréants. L’attribuer à une quelconque « islamophobie » juive ou chrétienne qui viendrait salir indûment la belle tapisserie de la tolérance islamique, est pire qu’une négligence, elle est incorrecte.

 

 

Le Sabre et le Coran : logo des Frères musulmans

 

Le deuxième point concerne le concept de vérité dont parle Lewis dans la citation concernée. Il n’y a pas de vérité dans la recherche historique. Il y a les faits et les conjectures susceptibles d’être toujours corrigées. Sur quels arguments se fondent Bar Asher pour décrédibiliser mon travail ? Sur lequel de mes livre ? sur l’interprétation de quels hadiths, de quelle loi, de quel événement historique dont je serais coupable ? La note qu’il m’attribue se réfère à mon livre Le Dhimmi, publié en 1980, mais la référence dans la Bibliographie cite l’édition de 2017. Or les deux ne sont pas pareilles. Laquelle Bar Asher a-t-il lue ?

Mais voyons cela de plus près. N’a-t-il pas lu que j’écrivais en 1980 que le statut des dhimmis avait évolué « selon les situations et les périodes », phrase appelée à un grand avenir car elle est toujours répétée et qu’il écrit aussi ? Tous deux nous attribuons, mais à plus de trente ans de différence, le statut du dhimmi à la littérature juridique post-coranique (BY p.18-19), nous mentionnons l’érudition des juifs d’Arabie de la période de Mahomet constatée par leurs contemporains arabes, l’absence de documents prouvant leur culpabilité dans divers événements les concernant, les sources chrétiennes de certaines lois de la dhimma, auxquelles je consacre tout un chapitre dans mon livre Juifs et Chrétiens sous l’Islam (1994). Les événements se rapportant à la vie de Mahomet, à ses combats contre les tribus païennes et contre les juifs, sont tirés des mêmes sources et ne diffèrent en rien. Donc sur ce plan je ne suis pas parmi les haineux, à moins d’y classer aussi Bar Asher.

Mon chapitre III (Ier partie) sur la protection étrangère n’exprime rien de particulièrement choquant puisque le Professeur Goitein m’en avait félicité, je l’avais d’ailleurs largement développé dans le Dhimmi anglais pour lequel il voulait faire une recension. De plus il n’y a aucune contradiction entre ce que j’écris sur ce sujet en 1980 et ce que Lewis publie lui-même en 1984, un livre très admiré par Bar Asher.    

Dans mon chapitre V nous abordons le même domaine de recherche déjà abondamment commenté par des islamologues chevronnés. Nous affirmons que la dhimma fut une élaboration post-coranique exigée par l’administration d’un immense empire créé par des guerres de conquêtes rassemblant une multitude de peuples indigènes non-musulmans et non-arabes. J’écris aussi que le sort des juifs d’Arabie devint le prototype du statut légal des peuples non-musulmans des empires islamiques comme l’attestent, souvent en préambule, de très nombreux textes juridiques musulmans. Et là aussi nous exprimons les mêmes opinions évidentes. Le contenu de ce chapitre se référant aux sources coraniques de la dhimma, à ses emprunts aux coutumes juridiques des peuples asservis, à sa datation et sa systématisation ne diffèrent en rien de ce que j’ai écrit en 1980 et beaucoup plus détaillé en 1994.

Le dhimmi, édition de 1980

 

Bar Asher me reproche de n’avoir pas étudié chaque lieu et chaque époque. Peut-être n’a-t-il pas lu mon introduction où je décris ma démarche : « Il appartient aux historiens de déterminer les variations de cette condition (dhimmie) selon les époques et les régions. Pour notre part, nous avons seulement indiqué ses différentes facettes : politiques, religieuses, sociales. Au cours de ce travail, le caractère typologique de la condition dhimmi, tant dans sa structure légale que dans son contexte humain, nous a paru dépasser le cadre de l’histoire…(p. 11) »  Autrement dit Bar Asher me reproche de négliger un sujet dont j’annonce en préambule qu’il n’est pas le mien. Il n’est pas le premier à le faire. Il m’accuse aussi d’adopter un stéréotype n’envisageant que la mort ou la conversion pour le non-musulman, l’image du guerrier tenant le sabre et le Coran. Mais tous mes livres examinent le troisième choix donné aux vaincus non-païens du jihad, celui de la dhimmitude. Il y a là une contradiction logique aberrante. C’est même le titre de mon livre : Le Dhimmi, celui qui a choisi une autre voie que la mort ou la conversion.

 

Par ailleurs et dès le début, j’annonce que je n’étudie pas la condition juive exclusivement et je précise : « En effet, l’étude d’une seule minorité, qui serait extraite arbitrairement d’un ensemble, pourrait en déformer le panorama, et cela particulièrement dans l’empire arabo-islamique, constitué d’une mosaïque d’ethnies diverses. » (p.13). J’ai toujours écrit sur le dhimmi – d’où le titre de mon livre – et sur la dhimmitude, c’est-à-dire une condition juridique commune aux juifs et aux chrétiens et un destin collectif juif et chrétien. Cela m’a valu nombres d’anathèmes. Les livres de Bernard Lewis et de Bar Asher sur les juifs ou de Mark Cohen ne traitent pas du même sujet que moi. Nous n’avons pas non plus les mêmes définitions. Ils parlent de groupes religieux minoritaires, j’examine des ethnies majoritaires devenues dans leur propre pays minoritaires par le processus de la dhimmitude et l’application de la charia. Mes contempteurs ne comprennent même pas mon domaine d’études puisqu’ils le récusent tout simplement et démolissent mes ouvrages par une critique inappropriée car nous ne parlons pas des mêmes choses. Ils refusent comme la peste le mot dhimmitude dont ils nient la matière historique alors qu’elle constitue l’essentiel de ma recherche. Elle est précisément cette troisième voie qu’ils appellent tolérance choisie par les vaincus du jihad, pour échapper à la mort, l’esclavage ou l’islamisation.

 

C’est pourquoi Bar Asher déclare que la dhimma a été abolie et n’existe plus, alors que je dirai que la mondialisation du jihad génère les effets de la dhimmitude sur la planète. Car le jihad s’active pour imposer la dhimmitude. La dhimma dont parle Bar Asher sont des recueils de lois inscrites dans des livres. On peut s’arrêter à cette lecture. La dhimmitude c’est un système politico-social de survie induit par ces lois. Aussi, poussant plus loin la réflexion, on constate que ces lois supposées annulées génèrent aujourd’hui la politique de réislamisation nationale d’Erdogan, ses relations avec le résidu chrétien arménien ou grec (statut des propriétés des patriarcats, culte, liberté d’opinion), sa volonté de reconquête des Balkans, son déni des droits d’Israël, ex-province ottomane où la présence juive, surtout à Jérusalem, fut soumise à des restrictions extrêmement sévères. Les effets de la dhimma sont évidents même en Egypte malgré l’esprit d’ouverture et de progrès du général Sissi.  

En Europe la loi du blasphème contre les mécréants impose aux Etats occidentaux des mesures draconiennes et une auto-censure généralisée de leurs populations.  L’obligation pour les juifs de subir le joug de la dhimmitude est à l’origine du déni de son histoire et de la campagne de diffamation planétaire visant à supprimer la souveraineté de l’Etat hébreu et à effacer les noms originaux de ses territoires. Les discriminations religieuses et professionnelles qui frappent les chrétiens dans le monde musulman visent, par les destructions et la terreur, à leur imposer les lois de la dhimmitude qu’ils enfreignent. Les terribles épreuves infligées à Assia Bibi, à sa famille et à sa communauté résultent de ces lois, du préjugé d’impureté qui lui est attribué et du refus d’accepter son témoignage parce que chrétienne. Je reconnais volontiers que depuis longtemps des forces de changement œuvrent dans le monde musulman afin qu’émergent une société islamique moderne, libérée des entraves de la charia. Nous ne pourrons les aider qu’en dénonçant ces formes de dhimmitude modernes présentes dans la mondialisation.

Bat Ye’or

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L’attentat de Barkan et le mythe de la coexistence pacifique, Pierre Lurçat

October 10 2018, 11:41am

Posted by Pierre Lurçat

 

A nouveau cette semaine, Israël s’est réveillé sous le choc d’un horrible attentat. Les journaux se sont remplis de photos poignantes et de titres accrocheurs sur “l’enfant qui grandira sans sa mère”, les médias ont diffusé en boucle les mêmes informations, publié des images et des interviews, frôlant parfois la limite de l’indécence, avec les proches des victimes. Puis, quand les mots se sont fait trop lourds et insupportables, les radios ont diffusé des chansons en hébreu de ce genre bien particulier, réservé au Yom Hazikaron et aux jours d’attentats. Avant de changer de sujet, pour que la “vie continue”, selon l’expression consacrée… Mais pour les familles endeuillées, la vie ne continuera plus jamais comme avant.

 

 

Kim Levengrond et Ziv Hajbi z.l.

 

Pourquoi acceptons-nous cette réalité comme allant de soi ? Sommes-nous condamnés à vivre sous la menace permanente des attaques terroristes et à ne trouver un semblant de vie “normale” qu’entre deux attentats? Est-ce pour cela que nous avons créé un Etat et mis fin aux siècles de l’exil ? Etait-ce pour subir à nouveau des pogromes, comme dans la Russie des tsars ou dans l’Algérie coloniale? Puah Rakovski, militante sioniste et pour les droits des femmes, raconte dans son très beau livre autobiographique, Mémoires d’une révolutionnaire juive, le sentiment de désespoir qui l’envahit après le pogrome de 1921 à Jaffa, qui fit plusieurs dizaines de mort, parmi lesquels l’écrivain Yossef Haïm Brenner.

 

Terriblement désespérée, moralement abattue, je me sentais absolument incapable d’accepter l’idée que je venais de vivre un pogrome en terre d’Israël… J’en avais vu de nombreux dans ma ville natale de Bialystok, et à Varsovie et à Siedlce ; mais un pogrome qui se déroulait ici, en Eretz-Israël? Comment était-ce possible? Il ne pouvait rien arriver de pire! C’était le massacre de nos rêves et de nos espoirs, le massacre de nos années d’efforts et du mouvement sioniste dans son intégralité que ce pogrome”.

 


 

La première nécessité, face au crime antijuif, c’est comme l’a bien compris Puah Rakovski, de rétablir la réalité des mots. Les “émeutes de 1921”, que l’historiographie sioniste désigne pudiquement par l’expression d’”événements de 1921” (tout comme les “événements de 1929”) sont en réalité de véritables pogromes. Cet emploi euphémistique du mot “événements” pour décrire les pogromes de 1921 et de 1929 tient sans doute au fait que ceux-ci ont fait voler en éclats plusieurs mythes de l’histoire du Yishouv - la collectivité juive pré-étatique. Le premier était celui d’un changement radical de la condition juive, et le second celui de la “coexistence” judéo-arabe. (1)

 

Le sentiment de désespoir et de révolte exprimé il y a bientôt un siècle par une femme juive courageuse, qui refuse la fatalité de l’assassinat de Juifs en terre d’Israël, doit nous servir d’inspiration face à la réalité dérangeante à laquelle nous nous sommes trop facilement habitués depuis lors. “Il y a pire qu’une âme perverse”, écrivait Péguy, “c’est une âme habituée”. Il nous est interdit de nous “habituer” à voir des Juifs - femmes, enfants, vieillards, hommes, civils ou militaires - assassinés en terre d’Israël parce qu’ils sont Juifs. Non seulement parce que cela heurte notre sentiment moral immanent, mais aussi et surtout, parce que cela atteint l’image de Dieu en nous, le “Tselem”.

 

Incitation arabe et appels à “sauver Al-Aqsa” pendant les émeutes de 1929

(photo Jerusalem Post)


 

Le terrorisme arabe et la Profanation du Nom

 

Le sentiment de révolte exprimé par Puah Rakovski après les pogromes arabes de 1921 n’était pas seulement celui d’une femme sioniste, qui a consacré sa vie à la construction de notre pays. Il était avant tout celui d’une Juive élevée dans la tradition, saisie d’effroi devant la “Profanation du Nom” (Hilloul ha-Shem) que représentait à ses yeux un pogrome en terre d’Israël. Que dirait-elle aujourd’hui, quand le Yishouv est devenu un Etat moderne et fort, disposant de la “plus puissante armée du Moyen-Orient”, capable d’affronter la menace nucléaire de l’Iran des Ayatollahs, mais souvent incapable de protéger ses citoyens dans leurs maisons et sur leurs lieux de travail?

 

Le mythe de la coexistence pacifique judéo-arabe est le pendant - ou l’envers - d’un autre mythe, tout aussi mensonger et potentiellement destructeur : celui de la séparation. “Eux là-bas et nous ici”, comme affirment les partisans d’un Etat palestinien judenrein. Du point de vue politique et militaire, les deux mythes sont tout aussi dangereux. Nous ne pouvons pas nous “séparer” des Arabes, et chaque retrait unilatéral fondé sur l’idée de séparation, à Gaza comme au Sud-Liban, se traduit par le renforcement de nos pires ennemis (le Hamas dans le premier cas, le Hezbollah dans le second). Nous sommes condamnés à vivre au milieu d’eux, ilôt juif dans un océan arabe.

 

Mais nous ne pouvons pas non plus promouvoir l’idée de coexistence, comme un principe abstrait, en oubliant qui sont nos voisins. C’est sans doute la leçon essentielle, terrible et amère, de l’attentat de Barkan. La zone industrielle de Barkan était certes un modèle, économique et humain, fondé sur l’idée que Juifs et Arabes pouvaient travailler côte à côte, en partageant la même aspiration à gagner leur vie. Ce modèle a fonctionné pendant trente-cinq ans. Jusqu’au jour où un employé arabe palestinien est venu un matin, armé d’un fusil automatique, et a tiré à bout portant sur deux de ses collègues, aux côtés desquels il avait travaillé jusqu’à la veille.

 

Comme l’écrit justement Freddy Eytan, “Comment ne pas être révolté par l’ingratitude mortelle de ces ouvriers qui tuent de sang-froid leurs propres employeurs ? Comment pouvoir gérer l’emploi de dizaines de milliers de Palestiniens dans des entreprises israéliennes en risquant quotidiennement des actes terroristes ? Refuser un travail à un père de famille pourrait peut-être l’inciter à la haine et au désespoir, mais l’embaucher en risquant sa propre vie serait-ce une meilleure solution ?” (2)

 

Cet attentat tragique ressemble à des milliers d’autres attaques commises par des Arabes contre leurs voisins juifs, en Algérie, en Eretz-Israël (avant et après 1948) et même en France, où la plupart des attentats antijuifs des dernières années sont le fait de voisins des victimes. A Barkan, l’attentat horrible qui a coûté la vie à Kim Levengrond et Ziv Hajbi n’a pas seulement tué deux personnes - deux mondes - fauchées au seuil de leur vie adulte, laissant derrière eux des enfants orphelins, des conjoints et des familles éplorées, à jamais meurtries. C’est aussi un mythe politique qui a volé en éclats dans le feu et le sang : celui de la coexistence pacifique.


Pierre Lurçat

 

(1) Sur les pogromes de 1921, 1929 et 1936, voir notamment le bon article (en anglais) de R. Hollander, https://www.camera.org/article/anti-jewish-violence-in-pre-state-palestine-1929-massacres/

(2) Freddy Eytan, « La coexistence avec les Palestiniens et une interview manipulée », Le CAPE de Jérusalem, publié le 8 octobre 2018 : http://jcpa-lecape.org/la-coexistence-avec-les-palestiniens-et-une-interview-manipulee/

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Prochaine formation à l'examen d'agent immobilier à Jérusalem / Tel-Aviv

Formation à l’examen d’agent immobilier israélien

Session décembre 2018 – Tel Aviv 

La prochaine formation à l'examen d'agent immobilier aura lieu du  19 au 26 décembre à Tel-Aviv, en vue de l’examen d’agent immobilier israélien qui se tiendra le 29 janvier 2019. Au terme de la formation et après avoir réussi l’examen, les élèves pourront obtenir la carte professionnelle permettant d’exercer la profession d’agent immobilier (metave’h) en Israël, dans une agence ou à leur compte. * Une formation est également prévue à Jérusalem, me contacter.

J’ai mis en place cette formation depuis 2006 en Israël, et j’ai préparé plusieurs centaines d’Olim francophones (avec un taux de réussite dépassant 75%) à l’examen organisé par le ministère israélien de la Justice, seul habilité à délivrer la carte professionnelle. Important : il n’est pas nécessaire d’être israélien pour travailler comme agent immobilier en Israël !

Niveau d'hébreu exigé

Cet examen est un examen théorique portant sur le droit israélien, qui a lieu 4 fois par an en Israël. Il s’agit d’un QCM (questionnaire à choix multiple), ce qui signifie qu’il n’est pas indispensable de savoir écrire en hébreu. Il n'est pas non plus nécessaire d'avoir un très bon niveau de lecture pour suivre le cours. Un niveau moyen est suffisant, à condition de fournir un travail personnel en plus des cours de préparation.

Pour plus d’informations, n’hésitez pas à me contacter par email pierre.lurcat@gmail.com ou par téléphone au 050 286 5143 ou 06 80 83 26 44  (France).

       

  Pierre Lurçat, avocat au barreau israélien,

spécialiste de la formation aux examens de droit

 

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Lettre ouverte aux donateurs du Mémorial de la Shoah, par Evelyne Tschirhart

September 30 2018, 09:22am

Posted by Evelyne Tschirhart

Le dîner annuel du Mémorial de la Shoah aura lieu le 10 octobre prochain. Il sera l’occasion pour les donateurs de célébrer le Mémorial et d’apporter leur contribution généreuse au travail accompli. Rien de plus normal !

Les donateurs ne sauront sans doute pas – et c’est la raison de cette lettre -, que le discours de présentation du Directeur, M. Jacques Fredj, valorisant toutes les actions du Mémorial, ne mentionnera pas une forfaiture que nous avons déjà dénoncée dans la presse : l’éviction de son bureau le 2 juillet dernier, manu militari, de l’historien Georges Bensoussan dont l’engagement et le travail, depuis plus de 25 ans ont été pionniers grâce à toutes ses activités pédagogiques auprès des établissements scolaires et des professeurs d’histoire ainsi que ses nombreuses productions éditoriales.

La faute de Georges Bensoussan ? Avoir été mis en procès, de façon inique et en contradiction totale avec la liberté d’expression qu’on peut attendre d’une démocratie, par le CCIF, le MRAP, la LICRA, La LDH, SOS Ô Sans Papiers, pour avoir dénoncé au cours de l’émission « Répliques » (octobre 2015) l’enracinement d’un antisémitisme culturel arabomusulman dans de nombreuses familles, en usant d’une métaphore calquée sur les propos d’un sociologue français d’origine algérienne. Par deux fois il fut relaxé. Malgré cela, il n’a reçu aucun soutien de la part du directeur du Mémorial de la Shoah retranché derrière une fausse neutralité.

La faute de Georges Bensoussan ? Avoir décrit depuis seize ans ces réalités, en particulier dès 2002 avec Les Territoires perdus de la République » (nouvelle édition, Fayard/Pluriel, 2015) et Une France Soumise (Albin Michel, 2017) et participé au Nouvel antisémitisme (Albin Michel, 2018), des livres qui dénoncent, faits à l’appui, l’origine de ce mal qui gangrène notre pays : l’islamisme.

Le Mémorial de la Shoah dont la vocation est de lutter contre l’antisémitisme sous toutes ses formes, au nom des Juifs exterminés, se devait de soutenir Georges Bensoussan, figure intellectuelle emblématique de cette Institution, pour son travail exemplaire et courageux.

Lanceur d’alerte, il est une des sentinelles les plus précieuses de notre société.

C’est pour le punir de s’être exprimé dans la presse que Georges Bensoussan, sur ordre personnel du Directeur du Mémorial, fut ensuite chassé de son bureau dans des conditions indignes. Lequel, le poursuivant de sa vindicte, l’exclut du séminaire de formation prévu en octobre 2018 en Israël, au mépris de l’engagement pris par le Président Éric de Rothschild deux mois plus tôt. Poursuivant sur cette lancée, on peut désormais craindre que l’actuel directeur ordonne à ses collaborateurs d’interdire à Georges Bensoussan toute activité au Mémorial.

Ne ratez aucun des articles de Dreuz, inscrivez-vous gratuitement à notre Newsletter.

Par son refus de nommer explicitement la source du nouvel antisémitisme, à savoir l’islamisme, il préfère chanter le « vivre ensemble » et le « pas d’amalgame » en ces temps où l’on assassine des Juifs parce que juifs. Monsieur Fredj s’est conduit ici comme un dhimmi parce qu’il connaît la vérité mais, par soumission et petits arrangements avec la pensée correcte, par lâcheté et par souci de conserver son poste, il s’est débarrassé d’un collaborateur exceptionnel pour s’enfermer dans l’omerta.

Nous ne devons pas cautionner cet abus de pouvoir qui insulte la mémoire des disparus, la communauté juive et la vérité ; il est donc primordial que chacun soit informé de tel agissements, indignes de notre institution.

Voilà pourquoi nous ne participerons pas au dîner de soutien du Mémorial de la Shoah. Parce que la conduite, les manœuvres comme les abus de pouvoir répétés du directeur de l’institution sont en contradiction totale avec l’éthique du Mémorial qui nous est cher.

Evelyne Tschirhart ex-donatrice

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Rencontre avec Bat Ye’or : Un combat pour la vérité, par Pierre Lurçat

September 22 2018, 19:01pm

Posted by Pierre Lurçat

Rencontre avec Bat Ye’or : Un combat pour la vérité, par Pierre Lurçat

Rencontre avec Bat Ye’or : Un combat pour la vérité, par Pierre Lurçat

 

Je connais Bat Ye’or depuis près de 30 ans. Notre première rencontre date de la fin des années 1980, à l’occasion d’une conférence organisée par l’Association France-Israël et son président d’alors, Michel Darmon. Elle était alors au milieu de sa carrière d’historienne et n’avait pas encore atteint la notoriété internationale que lui valu son livre le plus fameux, dont le nom est désormais entré dans le vocabulaire politique contemporain: Eurabia. Je l’ai interviewée à plusieurs reprises sur ses travaux et sur ses différents ouvrages (1). Mais l’entretien qu’elle m’a accordé à l’occasion de la parution de son autobiographie politique, est différent. Bat Ye’or a en effet accepté de parler non seulement des sujets de ses livres, tous passionnants, mais aussi de son parcours intellectuel et personnel et de sa vie aux côtés de David Littman, son mari décédé il y a six ans.


 

Gisèle et David Littmann

(photo : site Les Provinciales)


 

Bat Ye’or nous reçoit dans sa maison sur les rives du lac de Genève, en Suisse, où elle vit depuis plusieurs décennies. Notre entretien porte tout d’abord sur la personnalité et l’action de celui qui a partagé sa vie et ses combats, David Littman. Un récent article de Jean Birnbaum dans le Monde des livres présentait Bat Ye’or de manière caricaturale, en omettant entièrement le nom de son mari. Or, celui-ci a joué un rôle important dans l’oeuvre de Bat Ye’or, comme me le confirme celle-ci.

 

David a été très généreux avec moi. Il disposait de techniques  acquises à l’université. J’étais plus impulsive dans mon écriture. Il contrôlait mes sources. Il ne me laissait pas écrire et publier sans son contrôle… Nous n’avions pas toujours les mêmes opinions. Il lisait mon travail et me procurait des livres, des articles qui m'intéresseraient et que je n'avais pas le temps d'aller chercher”.


 

David Littman (1933-2012)


 

David Littman, intellectuel et aventurier

 

La collaboration entre David et son épouse n’était pas seulement intellectuelle. Leur histoire d’amour, relatée avec pudeur dans l’autobiographie de Bat Ye’or, est aussi une histoire de courage et d’aventure, car Littman n’était pas un historien enfermé dans les bibliothèques et les salles d’archives, c’était un véritable globe-trotter.

 

Nous avons passé trois mois en Asie. David voulait poursuivre des Indes jusqu'en Afghanistan, mais j'étais trop malade et il y a renoncé. Au fil des ans et avec une famille, David a renoncé à son côté aventureux pour vivre avec moi”.

 

P.L. Il a remplacé le goût de l’aventure physique par celui de l’aventure intellectuelle?

 

B.Y. “C’était un homme d’action, plus encore qu’un intellectuel. J’ai toujours eu le remords de ne pas avoir écrit un livre sur l’opération Mural”. Après cette opération - au cours de laquelle David et Bat Ye'or ont organisé le départ clandestin de cinq cent trente enfants juifs du Maroc vers Israël (1), Israël lui a proposé une nouvelle mission à Djerba, mais David, après mûre réflexion, a dû refuser. Nous nous étions engagés bénévolement pour aider les enfants juifs du Maroc, voulant accomplir une mitsva, mais de retour, nous voulions achever nos études.

Controverse avec Bernard Lewis

 

Nous abordons à présent les rapports entre les Littman et Bernard Lewis, le célèbre orientaliste américain, récemment décédé à l’âge de 102 ans. Bat Ye’or porte un regard critique sur l’oeuvre de Lewis, notamment en raison de son attitude à l’égard du génocide arménien (Lewis ayant contesté le génocide arménien, en adoptant peu ou prou la version turque de l’histoire du génocide).

 

"Quand je lisais les livres de Lewis, j’y trouvais dans certains domaines des erreurs et des généralisations, malgré son immense savoir et son érudition”.

 

Bat Ye’or souligne le refus de Lewis du concept générique (dont elle est l’inventrice) de la dhimmitude - c’est-à-dire d’une condition commune à l’ensemble des peuples soumis par le djihad et gouvernés par la chariah. Il avait une opinion très favorable de cette condition.

 

Je lui demande comment elle explique une telle attitude de la part d’un savant mondialement connu.

Il peut y avoir plusieurs raisons. L’amour que l’on porte à la civilisation que l’on étudie. Les intérêts professionnels, la prudence politique. Et surtout le parallèle avec la Shoah, monstruosité sans pareille. Lewis ne s’est intéressé aux minorités religieuses que tardivement, après moi. Il était plutôt un spécialiste de la civilisation ottomane, un turcologue. C’est un autre domaine. Quant à moi, j’avais la chance d’être indépendante. Je comprends les scrupules de ceux qui craignent de perdre leur poste. »  

 

Le propos est incisif, et l’indulgence apparente masque à peine un reproche très dur envers Lewis et beaucoup d’autres chercheurs, qui n’ont pas eu l’audace intellectuelle de Bat Ye’or.

 

Nous parlons maintenant le sujet le plus controversé de ses travaux, celui d’Eurabia, thème de son livre le plus fameux et toujours très actuel.

 

Dans une interview réalisée en 2009, elle définissait ainsi Eurabia : “C'est un nouveau continent qui est en train d'émerger, un continent de culture hybride, arabo-européenne. La culture européenne, dans ses fondements judéo-chrétiens, est en train de s'affaiblir progressivement, et de disparaître pour être remplacée par une nouvelle symbiose, islamo-chrétienne”.

 

Je lui demande si elle voit une évolution à cet égard depuis 2009. “Les gouvernements craignent (aujourd’hui) la rébellion de leurs peuples. Car maintenant, ces populations constatent les résultats de leurs décisions.…Et elles s’opposent à la politique d’Eurabia. Mais on ne peut changer facilement une idéologie et ses structures gouvernementales implantées depuis quatre décennies.

 

Nous évoquons aussi l’actualité d’Eurabia, au sujet du récent procès contre l’historien Georges Bensoussan, victime du “djihad judiciaire” (il vient d’être relaxé par la Cour d’appel de Paris). B.Y. : “Bensoussan était la cible idéale. C’est l’homme et son oeuvre qui furent visés à travers ce procès”.

 

 

Les sources de la dhimmitude

 

Bat Ye’or en vient à parler de la dhimmitude, thème central de ses travaux qui a fait l’objet de son premier livre, Le dhimmi, paru initialement en 1980 (et récemment réédité en France). Dans une précédente interview, elle m’avait expliqué ainsi sa découverte du thème fondamentale de la dhimmitude :

 

Mon projet initial fut d'écrire sur la condition des Juifs des pays arabes. J’en avais rencontré un grand nombre qui avaient été expulsés de leur pays d'origine et je les avais interviewés... On me demanda d’être l’un des membres fondateurs du WOJAC, l'association internationale des Juifs des pays arabes.

 

Nous avions tous vécu la même histoire, de persécutions, de spoliations et d'expulsions... C'est au cours de mes recherches que j'ai découvert la condition du dhimmi, qui a fait l'objet de mon livre Le Dhimmi, paru en 1980. Après sa parution, des chrétiens me contactèrent, et je commençai à m'intéresser à l'islamisation des pays chrétiens, thème auquel j'ai consacré un autre livre.

- Vous avez en fait découvert un pan inexploré de l'histoire mondiale.

- Non… On a beaucoup écrit sur ce sujet jusque dans les années 1960s. Il existait de très bonnes monographies abordant le thème des conquêtes islamiques. Le sujet était traité au niveau historique donnant le récit des faits, des dates intégrés dans les relations internationales et le conflit des intérêts et des ambitions des Puissances. Je me suis placée du point de vue des populations conquises, c'est-à-dire des dhimmis. J’ai été attaquée pour plusieurs raisons. D’abord parce qu’on considérait que je n’avais aucune légitimité pour en parler. Ensuite parce que j'englobais Juifs et chrétiens dans le même concept alors que l’on voulait absolument les séparer afin d’attribuer à Israël la cause des persécutions des chrétiens perpétrées par les musulmans. A partir des années 1970-80s peu osaient parler du Djihad. C'était un terme presque tabou, parce qu'il contredisait le mythe de la coexistence pacifique en terre d'Islam, que j'ai désigné comme le "mythe andalou".

 

La source de la plupart des discriminations de la dhimmitude se trouve dans les lois du statut des juifs et des chrétiens schismatiques selon le droit canon de l’Eglise et du droit byzantin. L’orientaliste Louis Gardet avait noté cette similitude. Cependant même si certaines restrictions sont identiques, leurs justifications théologiques diffèrent dans l’islam et le christianisme et à certains égards le statut du dhimmi est plus sévère que celui du juif dans certains pays chrétiens. Ainsi il ne fut jamais interdit aux juifs européens de sortir chaussés ou de monter à cheval. Le Concile de Latran (1215) a repris la Rouelle de l’islam, qui imposait depuis des siècles déjà des signes distinctifs infamants vestimentaires et autres aux juifs et aux chrétiens. Dans l’islam, les juifs et les chrétiens ont un statut identique.


 

On retrouve aujourd’hui cette communauté de destin dans Eurabia, où le terrorisme (dont les Juifs ont été les premières victimes) se retourne contre les chrétiens, et contre l’Occident en général, tout comme la dhimmitude infligée par l’Eglise s’est retournée contre les chrétiens.

 

 

Réformer l’islam?

 

Pour conclure notre entretien, je lui demande si elle pense qu’un espoir de réformer l’islam existe. “Ce n’est pas à nous d’en décider. Il nous appartient de dire tout cela, de choisir des politiques qui tiennent compte de tout cela… (comme le fait Viktor Orban en Hongrie).

Cela encouragera les musulmans qui sont nombreux à vouloir moderniser l’islam, à agir dans leur pays et au sein de leur peuple.

 

Propos recueillis par Pierre Lurçat (avril 2018)

 

(1) Voir notamment, interview au Jérusalem Post, 2 janvier 2007,  “De la dhimmitude à l’Eurabie”. “Le référendum suisse est une défaite d’Eurabia”, 2 décembre 2009. Interview au sujet de son livre L’Europe et le Califat, novembre 2010. Et plus récemment, “Bat Ye’or répond à ses détracteurs”, février 2018.

 

(2) Sur l’opération Mural, Voir notre interview de David et Gisèle Littman pour Israël Magazine, et l’extrait du film Opération Mural sur le site Danilette.com

 

Bat Ye’or, photo de Pierre Lurçat ©

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