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tisha beav

Une étincelle d’hébreu: du Hourban au Hazon - Entre destruction et vision prophétique

August 11 2024, 14:37pm

Posted by Pierre Lurçat

Une étincelle d’hébreu: du Hourban au Hazon - Entre destruction et vision prophétique

La haftara lue le shabbat précédant Tisha be-Av commence par les mots fameux “Hazon Yeshayahou ben-Amotz”, que la traduction du rabbinat français rend par “Oracle d’Isaïe, fils d’Amos”. Le mot “Hazon” signifie plus généralement “vision” et il a gardé ce sens dans l’hébreu moderne. Quel rapport entre la “vision” prophétique et le “Hourban”, la destruction du Temple que nous allons commémorer cette semaine ?

 

Le rabbin Haïm Navon observe justement, dans sa chronique hebdomadaire publiée dans le journal Makor Rishon, que personne cette année ne se posera la question devenue rituelle de savoir pourquoi nous devons prendre le deuil du Temple et prononcer des Lamentations sur “Jérusalem, assise solitaire”, alors que le nombre d’habitants juifs de Jérusalem n’a jamais été aussi grand depuis que la ville a été fondée… Non, cette année, chaque Juif en Israël et dans le monde comprend intuitivement la signification du “Hourban”, dont nous avons vécu une sorte de répétition en miniature le 7 octobre…

 

Le rabbin Avraham Stav, dans les colonnes du même journal, explique que “nous sommes un peuple qui porte en lui la dimension fondamentale du Hourban, de la destruction”. En quoi cela nous aide-t-il à comprendre les événements dramatiques que nous vivons depuis Simhat Torah ? La réponse que je propose est d’examiner le lien entre le Hourban et le Hazon, entre la destruction du Temple et la vision prophétique.

 

Comme l’avait bien compris David Ben Gourion, premier dirigeant de l’Etat et fondateur de l’armée de défense d’Israël, la sécurité de l’Etat juif ne repose pas seulement sur l’armée. Lecteur assidu de la Bible, il savait bien que c’est en définitive l’esprit qui décide de la destinée des peuples… C’est ainsi qu’il faut comprendre le rôle du “Hazon” – de la vision prophétique – qui animait Ben Gourion et qui fait cruellement défaut aux dirigeants de l’establishment sécuritaire et militaire actuels, responsables de l’échec colossal du 7 octobre.

 

Si l’on cherche à remonter à la racine de la “Conceptsia” animant ceux de nos dirigeants qui ont mené à l’effondrement du 7 octobre – depuis Itshak Rabin à l’époque des accords d’Oslo et jusqu’à Ehoud Barak et Ariel Sharon, responsables des retraits du Sud Liban et de Gaza, qui ont permis au Hamas et au Hezbollah de s’installer aux frontières d’Israël – on constate qu’ils partagent tous le même manque de vision prophétique. Le cas le plus flagrant, pour remonter encore un peu plus loin dans l’histoire contemporaine, est celui de Moshé Dayan, lui aussi valeureux soldat couvert de gloire, qui a rendu les clefs du Mont du Temple au Wakf musulman, après la guerre des Six Jours, en déclarant “Nous n’avons que faire de ce Vatican!”...

 

Si le Hamas a pu mener son attaque meurtrière au nom d’Al-Aqsa et de Jérusalem, c’est aussi parce que nous avions quasiment renoncé à asseoir notre souveraineté sur le Mont du Temple. Or, comme l’avait prédit le poète Uri Zvi Grinberg, animé de la vision prophétique qui faisait défaut à Dayan, “celui qui contrôle le Mont du Temple contrôle le pays”. Ces mots visionnaires restent toujours actuels aujourd’hui, alors que la souveraineté israélienne n’a jamais été aussi menacée depuis 1948. Contrairement à ce que pensent les ‘’Gatekeepers’’ – tellement obnubilés par le ‘’danger du messianisme juif’’ qu’ils ont négligé le danger bien réel du Hamas – le Mont du Temple n’est pas un ‘’baril de poudre’’… Il est la clé de notre souveraineté, et donc de notre sécurité. La sécurité d’Israël, au Nord comme au Sud, passe par le Har Habayit, lieu de notre Temple à reconstruire…

P. Lurçat

 

Le cinquième volume de la Bibliothèque sioniste paraît ces jours-ci aux éditions de l’éléphant.

Une étincelle d’hébreu: du Hourban au Hazon - Entre destruction et vision prophétique

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Tisha beAv à Jérusalem en 2048 - Quand le Temple sera reconstruit…

July 19 2020, 09:02am

Posted by Pierre Lurçat

 

Hélas, comme elle est assise populeuse, 

la cité naguère si solitaire!”

 

(Lamentations d’Ishaï)

 

Tisha BeAv en 2048… Le moment tant attendu sera finalement arrivé. Le Temple reconstruit ! Tout n’aura pas été sans difficulté, comme toujours pour les grandes entreprises humaines. Il y aura bien eu quelques frictions, des “tensions internationales”, quelques ruptures de relations diplomatiques, des menaces d’interventions militaires rapidement étouffées, et même quelques incendies de synagogues, en France et ailleurs (lesquelles avaient été depuis longtemps désaffectées et transformées en musées des communautés juives locales). Mais le vrai problème sera, comme toujours dans notre longue histoire, un problème entre Juifs. 


 

Le Temple reconstruit

 

Il y avait ceux qui voulaient rétablir le service du Temple comme autrefois, avec les Cohanim, la vache rousse et les sacrifices. (“Quelle horreur!”, s'exclamèrent les Juifs libéraux et progressistes, qui ne respectent les sacrifices que lorsqu'ils sont pratiqués par les fidèles d’autres religions). Il y avait ceux qui voulaient transformer le Temple en “Maison de prière pour tous les peuples”, au sens littéral, avec un espace pour nos frères chrétiens, un autre pour nos cousins musulmans, pour les bouddhistes, les shintoïstes, les adorateurs de Greta Thunberg et les adeptes de la religion du réchauffement climatique. Et même un petit espace pour les Juifs orthodoxes, (à condition qu'ils acceptent de ne pas séparer les hommes et les femmes).

 

D'autres encore, se souvenant des écrits du “Visionnaire de l'État”, avaient voulu édifier deux constructions : le Temple juif, et le palais de la Paix. Et il y avait surtout ceux qui - en modernes Protestrabbiner - protesteront contre le Hilloul ha kodesh, la profanation des lieux saints, et prendront le deuil de la reconstruction du Temple qu’ils n’aiment que de loin, tellement il est sacré. Et enfin, il y aura la cohorte des ultimes Juifs de la diaspora, qui auront saisi tout le danger de la reconstruction du Temple pour leur (tout relatif) confort diasporique et pour leur religion de l’exil. Pour ceux-là, on laissera un morceau de mur non crépi, en souvenir de l'époque bénie ou l'on pouvait languir le Temple


 

 La destruction du Temple de Jérusalem », par Nicolas Poussin © The Israel Museum


 

Dans Jérusalem agrandie, qui aura doublé de superficie, il y aura des “restaurants du coeur” aux saveurs des quatre coins de la dispersion, pour les nostalgiques et les rapatriés contre leur gré. Un “musée de la diaspora” virtuel leur permettra de déambuler virtuellement dans les rues de Deauville, de La Goulette et d’ailleurs, en se remémorant les délices de la vie sous la pluie, sous la dhimma ou sous la Croix. Et pour ceux qui ne parviendront toujours pas à se consoler de la fin de l’exil des Juifs, et qui seront dévorés par la nostalgie et par la nostalgie de leur nostalgie, un rite spécial sera instauré par le grand rabbinat, c’est-à-dire par le Sanhedrin, aidé par les meilleurs de nos hommes de lettres.

 

Chaque année depuis 2048, à Tisha BeAv, alors que le reste du peuple célèbrera le Retour de nos jours anciens et fera la fête, à Jérusalem et partout dans le pays (qui s’étendra depuis longtemps sur les deux rives du Jourdain), eux iront s'asseoir par terre, derniers fidèles parmi les fidèles, sur la place des rois d'Israël (qui sera pour l’occasion rebaptisée place Amos Oz), face au Kottel de l’ancienne mairie, lieu de toutes les manifestations de Chalom Archav, jadis. Assis à même le sol, ou sur un vieil exemplaire jauni du journal Ha’aretz - depuis longtemps disparu - pleurant amèrement le temple reconstruit,  la fin du Juif de l’exil, universaliste et humaniste, et de leurs rites anciens tombés en désuétude (les  repas de Yom Kippour, les actes de contrition antisionistes et les pétitions contre l'occupation dans les colonnes du Monde où du New York Times…)


 

Yishaï ben Yossi Sarid, auteur présumé des Lamentations d’Yishaï


 

Ils reciteront les lamentations d’Yishaï (du nom de notre grand écrivain Yishaï ben Yossi Sarid). “Hélas, comme elle est assise populeuse, la cité naguère si solitaire ! Elle, qui ressemblait à une veuve, aujourd’hui si puissante parmi les peuples ; elle qui était tributaire, aujourd’hui souveraine parmi les provinces !” Et ils pleureront amèrement sur la fin de l’exil, au milieu des foules en liesse célébrant Tisha BeAv et le Temple reconstruit… Oui, tout cela aura lieu et sera consigné dans les Chroniques du Retour à Sion. “Si voulez, ce ne sera pas un rêve”.

Pierre Lurçat

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