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progressisme

Yom Kippour 2023, Tel-Aviv : cette religion “progressiste” fanatique qui abhorre le judaïsme

September 27 2023, 08:37am

Posted by Pierre Lurçat

Manifestation progressiste en Israël

Manifestation progressiste en Israël

Le progressisme au nom duquel des Juifs pétris de certitudes ont interdit la prière du Yom Kippour à Tel-Aviv n’est que la dernière en date des idéologies laïques monstrueuses, qui ont fait plus de victimes que toutes les guerres de religion.

 

1.

 

Une image d’Epinal, héritée des Lumières, présente la laïcité comme rejetant l’obscurantisme religieux, au nom de l’humanisme, de la tolérance et de l’amour universel. La réalité, hélas, n’est pas toujours conforme à cette belle image. Dans l’histoire juive, en particulier, nombreux furent ceux qui rejetèrent le “joug des mitsvot” pour accepter un autre joug, tout aussi contraignant, et pour adhérer à de nouvelles “religions” (politiques ou civiles) souvent destructrices et parfois sanguinaires.

 

Ce furent le communisme, dont le nombre des victimes dépasse (en millions) celui du nazisme, ou le maoïsme - qui rivalisa avec ses deux “grands frères” dans l’horreur (voir le beau roman qu’Evelyne Tschirhart a consacré au “Soleil rouge”). Le nazisme, le communisme et le maoïsme – trois idéologies laïques opposées à toute notion de Dieu – ont fait plus de morts au vingtième siècle que toutes les guerres de religion des siècles passés. La dernière en date de ces religions destructrices s’appelle le progressisme, et si elle n’a pas encore fait couler autant de sang que ses aînées, tous les “espoirs” sont à cet égard, hélas, permis, si l’on en juge par la radicalité de son discours et de son idéologie.

 

2.

 

C’est dans ce contexte que s’inscrit la dernière bataille en date du Kulturkampf israélien, celle qui a vu des Juifs laïcs tel-aviviens interdire manu militari un office public de Kol Nidré, place Dizengoff. Il n’est pas anodin que ces “byrionim” aient choisi le Kol Nidré, qui est sans doute la prière qui traduit le mieux l’esprit de tolérance et d’ouverture du judaïsme ; en appelant à “autoriser la prière aux Juifs qui transgressent la loi”. C’est précisément dans cet esprit juif d’ouverture et de tolérance que l’organisation Rosh Yehudi, créée après l’assassinat d’Itshak Rabin dans un but de rapprochement, organise chaque année cet office de Kippour.

 

Mais face aux adeptes de la religion progressiste, aucun esprit de tolérance n’est de mise. Comme l’expliquait hier midi sur Galei Tsahal un journaliste (dont le nom m’échappe), cet incident aura permis de dissiper tout malentendu concernant le soi-disant esprit de “libéralisme” et de “tolérance” de la ville de Tel-Aviv et de ses dirigeants actuels, et notamment de son maire, Ron Huldaï. Leur “tolérance” est du même acabit que celle du grand Voltaire, auteur du slogan “écrasons l’infâme” et lui aussi, ennemi déclaré du judaïsme religieux.

 

3.

 

Cette nouvelle croisade progressiste, déclenchée le soir de Kippour, ne s’inscrit pas seulement dans l’histoire déjà ancienne de l’antagonisme laïcs-religieux en Israël. En réalité, il s’agit de la version locale d’un conflit bien plus vaste, qui oppose le judaïsme – en tant que représentant par excellence des valeurs conservatrices, traditionnelles et religieuses – d’un côté, et la nouvelle religion progressiste de l’autre. C’est un véritable conflit de civilisations, comme celui qui opposa Israël à l’empire séleucide à l’époque de Hannoukah.

 

Il n’est évidemment pas anodin que le prétexte choisi pour allumer l’étincelle de ce dernier round ait été la question de la non-mixité dans l’espace public, qui renvoie à celle, plus vaste, de la séparation des sexes et de la liberté sexuelle, dont la religion progressiste a fait son étendard (aux couleurs de l’arc-en-ciel, ce qui pose évidemment question, quand on se souvient de ce que signifie ce symbole dans la tradition juive). Dans l’esprit des adeptes du progressisme, il est impératif d’occuper l’espace public et d’y imposer leurs “valeurs” (comme lors des manifestations provocatrices à Bné Braq ou de la “Gay Pride” à Jérusalem). Dans ce nouveau conflit idéologique, c'est le judaïsme qui l’emportera, une fois de plus.

P. Lurçat

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La religion progressiste contre la Torah d’Israël (III) Qui sont les “grands-prêtres” de la nouvelle religion progressiste israélienne? Pierre Lurçat

August 9 2023, 13:56pm

Posted by Pierre Lurçat

"Crime Minister" : exemple de slogan de la propagande actuelle

"Crime Minister" : exemple de slogan de la propagande actuelle

 

            Dans le premier volet de cette série d’articles, nous faisions le constat que, dans l’esprit des adeptes de la religion progressiste, il n’y a de place pour le moindre doute. Leur religion leur enjoint de combattre le gouvernement démocratiquement élu d’Israël par tous les moyens, y compris violents… Et nous posions in fine la question de savoir qui sont les nouveaux prêtres de la “religion progressiste” israélienne ? C’est à cette question que nous allons tenter de répondre.

 

Première hypothèse : les écrivains et les intellectuels

 

            Durant les sept premières décennies de l’existence de l’Etat d’Israël (et auparavant déjà), les intellectuels, et les écrivains en particulier, ont rempli un rôle de premier plan dans le débat public. Ils ont incarné, pour le meilleur et parfois pour le pire, le visage de “nouveaux prêtres” de la culture laïque israélienne en devenir et ont marqué de leur empreinte les débats autour des questions cruciales de l’identité, de la politique et de l’avenir d’Israël. Citons, parmi tant d’autres, les noms de Nathan Alterman, d’Amos Oz ou de David Grossman.

 

            Or, de manière flagrante, ces mêmes écrivains sont aujourd’hui largement absents du débat public et ne participent plus aux événements qu’en tant que spectateurs. Le “mythe de l’écrivain engagé”, déjà largement écorné depuis la période des accords d’Oslo, est aujourd’hui remisé aux oubliettes. On en donnera pour illustration le fait que, dans les Haggadot rédigées par les adeptes de la religion progressiste, les écrivains n’occupent qu’une place mineure, aux côtés d’autres figures de proue des mouvements d’opposition.

 

Deuxième hypothèse : les dirigeants politiques et militaires

 

            La présence massive, au sein des manifestations quasi hebdomadaires qui se déroulent depuis huit mois en Israël, des dirigeants de l’opposition et celle de plusieurs anciens chefs d’état-major, pourrait faire croire que ce sont eux qui “tirent les ficelles” et qui animent le débat public. A certains égards, on peut effectivement dire que le “quarteron de généraux” omniprésent dans les manifestations de l’opposition dirige celles-ci. Mais sont-ils pour autant les “prêtres” de la religion progressiste ? On peut en douter.

 

            Leur fonction semble plutôt être celle d’une direction tactique et d’un contrôle idéologique que celle d’une véritable direction spirituelle… A écouter les propos incendiaires d’un Ehoud Barak ou d’un Ehoud Olmert, on a plutôt l’impression que leur rôle est de jeter de l'huile sur le feu, chaque fois que celui-ci semble s’éteindre.

 

Troisième hypothèse : les publicitaires

 

            L'hypothèse que nous formulons ici est que les véritables “prêtres” de la religion progressiste israélienne sont ceux qui élaborent les slogans des manifestations et les innombrables instruments visuels, graphiques ou autres, qui tiennent lieu de discours et de “rituels”, pour les manifestants adeptes de la religion progressiste. Ce sont eux en effet qui parviennent à “nourrir” les grandes messes hebdomadaires qui se déroulent rue Kaplan à Tel-Aviv, devant la résidence du Président à Jérusalem et ailleurs dans le pays…

 

            Le rôle crucial rempli par des agences de publicité dans la campagne de propagande anti-gouvernementale actuelle s’explique par un constat qui a été fait depuis plusieurs décennies, aux Etats-Unis et ailleurs : celui du lien étroit entre publicité, propagande et politique. Comme l’observe la psychologue Liliane Lurçat dans son étude de la manipulation, il n’y a “pas de différence entre les démarches utilisées en persuasion politique et en persuasion publicitaire, elles sont sensiblement les mêmes[1]. C’est précisément ces méthodes de persuasion politico-publicitaire auxquelles nous assistons en Israël et qui permettent de comprendre l’engouement d’un vaste public pour des slogans simplistes, véhiculant des opinions tranchées et souvent extrémistes.

 

Ce que montre le mouvement de protestation anti-gouvernemental, dirigé par un petit groupe d’hommes politiques et d’anciens chefs militaires aux ressources financières considérables et nourri de slogans simplistes et mensongers, c’est que les techniques de la persuasion politique, utilisées à mauvais escient, mettent en danger la pérennité d’un gouvernement démocratiquement élu. Dans cette lutte d’influence pour convaincre l’opinion, les publicitaires sont bien devenus les “grands-prêtres” de cette grande messe progressiste qui se déroule semaine après semaine dans les rues et sur les places d’Israël.

Pierre Lurçat

Mon livre Quelle démocratie pour Israël ? est publié aux éditions l’éléphant, disponible sur B.o.D, Amazon, à la librairie du Temple à Paris, à la librairie française de Tel-Aviv et auprès de l’éditeur (editionslelephant@gmail.com)

 

[1] L. Lurçat, La manipulation des enfants par la télévision et l’ordinateur, F.X de Guibert 2008.

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La religion progressiste contre la Torah d’Israël (II) : Démocratie politique ou « religion démocratique » ?

June 14 2023, 06:04am

Posted by Pierre Lurçat

"Gay Pride" à  Tel-Aviv : "le petit homme avec son identité et son choix sexuel changeant"

"Gay Pride" à Tel-Aviv : "le petit homme avec son identité et son choix sexuel changeant"

 

Le voyageur qui arrive à Tel Aviv par le train et descend à la station Ha-Shalom est accueilli par un immense panneau qui orne la façade du Beit Ha-Itonout, portant ce slogan : « La démocratie est plus grande que la politique ». Pour l'observateur nourri de philosophie politique classique, ce slogan peut sembler paradoxal. La démocratie est en effet considérée traditionnellement comme une catégorie de la pensée politique et comme une forme particulière de régime politique. Mais ces deux affirmations axiomatiques ont été remises en cause ces dernières années par de nouveaux axiomes politiques, qui ont fini par s'imposer dans une large partie du public occidental. C'est dans ce contexte nouveau qu'il convient de prendre au sérieux et d’analyser le slogan affiché à Tel-Aviv.

 

Si la démocratie est « plus grande que la politique », c'est de toute évidence parce qu'elle ne désigne plus une catégorie politique, mais bien quelque chose d'autre. La démocratie est devenue une catégorie qui échappe au politique, ou qui le transcende. Pour comprendre cette réalité nouvelle, il suffit de voir les dizaines de milliers de manifestants qui scandent « Demokratia ! » dans les rues d'Israël, à la manière d'un mantra. Oui, il y a bien quelque chose de religieux dans la manière dont ils scandent le mot démocratie et dont ils perçoivent ce concept ancien, qui revêt aujourd'hui un sens nouveau. Quel est-il ?

 

Afin de mieux l'appréhender, nous partirons de cette observation éclairante de Pierre Manent, qui faisait remarquer que l'attrait exercé par le gouvernement des juges tient au fait que ceux-ci « prétendent de plus en plus parler immédiatement au nom de l'humanité[1] » C'est précisément ce qui distingue la nouvelle notion de démocratie de son acception classique. Dans cette dernière, la démocratie reposait largement sur l'idée de représentation, en vertu de laquelle le peuple délègue son pouvoir… Cette délégation constitue l'essence même du régime démocratique, qui est comme disait Churchill, « le pire des régimes politiques, à l'exception de tous les autres ». Or c'est précisément cette notion essentielle qui est remise en cause dans la religion de la démocratie qui se fait jour actuellement.

 

Si la démocratie semble, dans sa nouvelle acception, « plus grande que la politique », c'est aussi parce qu'elle parle presque exclusivement de « droits » et de libertés, là où la politique parle aussi de devoirs civiques.et d'obligations citoyennes. La religion démocratique, qui célèbre les droits de l'individu et ses identités multiples et « fluides », se moque de la représentation politique et de ses contraintes, dont elle ne comprend plus la nécessité. Elle exalte, comme le faisait remarquer Shmuel Trigano, non plus « le citoyen et le sujet de droit, l’Homme avec un grand H » mais « le petit homme avec son identité, son sexe et son choix sexuel changeant »[2].

 

A l'ère de l'individu roi, la souveraineté populaire est une idée considérée comme obsolète et comme appartenant à un passé révolu. Le désaveu pour la démocratie traditionnelle apparaît donc comme tout à fait compatible avec l'exaltation d'une « démocratie » largement abstraite et déconnectée des problèmes réels de l'État et de la société. Peu m'importe les problèmes de mon voisin ou ceux de mon pays, pourvu que je puisse exprimer mes sentiments et mon identité sans entrave… « Jouir sans entrave », fameux slogan de mai 68, est bien devenu l'idéal des adeptes de la nouvelle religion progressiste et démocratique, comme cela apparaît au grand jour pendant le « mois de la fierté » qui s’est ouvert la semaine passée à Tel-Aviv. La religion de la « démocratie » est aussi, nous le constatons jour après jour, un culte du moi, de l'identité sexuelle arborée comme un étendard et de l'égoïsme individuel.

 

De même, dans la nouvelle religion progressiste et « démocratique », il n'y a plus de place pour le débat authentique ou pour la confrontation des idées et des opinions. Chacun se bat pour faire triompher sa propre vision du monde, comme sur les réseaux sociaux, en effaçant les avis qui déplaisent ou qui fâchent. La vieille démocratie, avec son parlement, ses débats et son alternance de coalitions élues par le peuple, est donc logiquement synonyme de passéisme ou de réaction. Qui se soucie encore de la majorité, quand sont exaltés constamment les seuls droits des minorités et ceux de l’individu ? (À suivre…)

P. Lurçat

 

NB. Mon dernier livre, Quelle démocratie pour Israël?, est disponible sur Internet et à la librairie française de Tel-Aviv.

 

 

[1] P. Manent, Cours familier de philosophie politique, Fayard 2001, p. 310.

[2] S. Trigano, « Démocratie ou théocratie judiciaire ? », Menora.info 16.3.23.

La religion progressiste contre la Torah d’Israël (II) : Démocratie politique ou « religion démocratique » ?

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La religion progressiste contre la Torah d’Israël (I)

June 4 2023, 13:08pm

Posted by Pierre Lurçat

La religion progressiste contre la Torah d’Israël (I)

 

Comme l’écrivait récemment Ariel Shenbal dans les colonnes de Makor Rishon, les manifestants qui défilent en Israël contre le gouvernement et contre les ‘Harédim sont pour la plupart des Juifs ‘hilonim (laïques), qui ont rejeté le “joug de la Torah et des mitsvot”. Il n’est pas anodin qu’un des slogans qu’on retrouve dans les manifestations et sur les autocollants soit “Hofshi beArtsenou” (libre dans notre pays), deux mots tirés de l’hymne national d’Israël mais détournés de leur sens original. La Tikva parle en effet d’être “un peuple libre sur sa terre, la terre de Sion et de Jérusalem”, la liberté étant synonyme d’indépendance et non pas de rejet de la Torah.

 

Mais ces manifestants, observe Shenbal, ont en fait rejeté la Torah d’Israël pour adopter une nouvelle religion, celle du progressisme. “Il s’avère que cette nouvelle religion ressemble à toutes les autres”, poursuit-il. “Elle a ses rabbins (et même ses rabbanit), ses rituels et même ses punitions pour ceux qui prétendent quitter ses rangs”. L’observation est juste et elle rejoint le constat fait il y a déjà plus d’un siècle par un écrivain russe, qui remarquait que les Juifs communistes se comportaient avec un zèle religieux.

 

Si l’on développe la comparaison établie par Ariel Shenbal, on constate en effet que les manifestations à Tel-Aviv et ailleurs ont bien un caractère quasi-religieux, qu’on peut déceler notamment dans le caractère rituel des rendez-vous instaurés chaque samedi soir, boulevard Kaplan à Tel-Aviv ou près de la résidence du président à Jérusalem, rendez-vous auxquels les manifestants se rendent, portant leur drapeau et leurs pancartes, de manière régulière et quasi-religieuse, comme s’il s’agissait d’un commandement divin.

 

Parmi les autres rituels développés autour des manifestations, mentionnons les cris de “Boucha !” (Honte !) ou de “Demokratia !”, scandés et répétés avec une ferveur qui confine parfois à l’extase. Les rites “expiatoires” consistant à scander les noms d’hommes politiques particulièrement honnis, comme ceux de Yariv Levin ou de Simha Rothman, comme s’il s’agissait non seulement de les vouer aux gémonies, mais de les “maudire” au nom de la religion progressiste.

 

Cette religion progressiste a aussi ses “livres religieux”. J’ai pu ainsi consulter deux “Haggadot” rédigées à l’occasion de Pessah, comportant un florilège de textes écrits par des écrivains, des militants et des dirigeants politiques. Ce qui caractérise ces Haggadot, si l’on les compare aux “Haggadot” israéliennes classiques utilisées jadis dans les kibboutz, est le caractère à la fois “laïc” de leur inspiration et le zèle quasi-religieux qui les anime.

 

Mais ce ne sont là que les aspects les plus anodins – et inoffensifs – de cette religion progressiste. Comme toutes les religions, elle a aussi ses courants plus radicaux et sectaires. Ceux-ci prennent la forme, dans les manifestations anti-gouvernementales des derniers mois, de protestations plus extrêmes, dirigées contre les membres du gouvernement, leurs familles et leurs partisans, ou contre l’ensemble du public juif orthodoxe (comme ce couple agressé dans sa voiture).

 

Un exemple récent nous a été donné ce shabbat par l’agression du député Simha Rothman à New York par un groupe de manifestants israélo-américains, qui l’ont harcelé dans la rue, alors qu’il se promenait avec son épouse. Quand l’organisatrice de la manifestation a été interrogée à la radio israélienne pour expliquer la motivation de son agression, elle a dit tout simplement que c’était un “devoir de s’opposer à ceux qui transforment Israël en dictature”... Elle a même été jusqu’à porter plainte contre le député Rothman, accusé de s’être défendu contre ses agresseurs (plainte qui a été classée par la police de New-York).

 

Dans l’esprit des adeptes de la religion progressiste, il n’y a de place pour le moindre doute. Leur religion leur enjoint de combattre le gouvernement démocratiquement élu d’Israël par tous les moyens, y compris violents… Dans la suite de cet article, nous nous tenterons de comprendre qui sont les “prêtres” de cette religion progressiste en Israël. (à suivre)

P. Lurçat

 

 

NB Je donnerai une conférence sur mon dernier livre lundi 5 juin 2023 à l’espace francophone d’Ashdod à 19h00.

La religion progressiste contre la Torah d’Israël (I)

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La guerre des Juifs au cœur de l’idéologie du camp “progressiste” en Israël

December 9 2021, 10:04am

Posted by Pierre Lurçat

L’Altalena en flammes au large de Tel-Aviv

L’Altalena en flammes au large de Tel-Aviv

Lorsque Yair Lapid et Naftali Bennett ont formé leur gouvernement en juin dernier, de nombreux commentateurs se sont interrogés sur le caractère hétéroclite de leur coalition, qui réunissait des transfuges du sionisme religieux (que certains médias français s’obstinent à qualifier – contre toute évidence – de représentants de “l’extrême-droite”), des partis centristes, les lambeaux du parti travailliste et un parti arabe islamiste. S’agissait-il d’un gouvernement “d’union nationale”, du retour de la gauche post-sioniste, ou tout simplement de l’assemblage contre-nature de tous les membres du camp “Rak lo-Bibi” (“Tout sauf-Bibi”) ?

 

La réponse à cette question a été donnée quelques semaines plus tard : ce gouvernement représente en fait l’arrivée au pouvoir en Israël du courant “progressiste”, déjà incarné aux Etats-Unis par la frange la plus radicale du parti démocrate, au pouvoir depuis la victoire de Joe Biden. Mais ce qualificatif de “progressiste” est, comme beaucoup d’autres adjectifs du vocabulaire politique, trompeur. Car derrière le slogan du “progrès” et de la défense des droits de toutes les minorités, qu’on a déjà vus à l’œuvre dans de nombreux domaines (1), se dissimule tant bien que mal une idéologie radicale.

 

C’est au nom de cette idéologie que le ministre de la Défense a convoqué la semaine dernière une réunion au plus haut niveau de tous les chefs des organes de sécurité israéliens, pour lutter contre… les exactions commises par les habitants juifs de Judée-Samarie. Oui, moins de six mois après les sanglantes émeutes déclenchées par des pogromistes arabes qui ont incendié des synagogues et des biens juifs dans toutes les villes mixtes d’Israël, et alors qu’une nouvelle vague d’attentats frappe au cœur de Jérusalem, le ministre Gantz a trouvé le véritable “ennemi” à abattre. Ce sont les “Juifs des collines”, ces quelques dizaines de jeunes gens habitant dans des localités, souvent construites sur les lieux d’attentats anti-israéliens, qui sont apparemment, aux yeux de Gantz et des autres responsables sécuritaires, le danger le plus grave pour la sécurité intérieure d’Israël.

 

Cette décision très médiatisée et soutenue par une large fraction de l’establishment culturel et politique en dit long sur l’agenda politique du nouveau gouvernement. Moins d’un mois après la déclaration de six ONG liées au FPLP comme “organisations terroristes”, justifiée et appuyée sur des éléments de preuve incontestables, la décision du ministre Gantz n’est pas seulement une manœuvre tactique, destinée à rassurer l’aile gauche de sa coalition. Il s’agit, plus fondamentalement, de “resserrer les rangs”’ idéologiques du camp “tout sauf Bibi”, en désignant une fois de plus à la vindicte populaire un ennemi intérieur.

 

Il ne s’agit plus cette fois de l’ancien Premier ministre, envers lequel l’hostilité sans limite des médias n’a pas faibli depuis son éviction de la rue Balfour, mais du noyau idéologique des habitants juifs en Judée-Samarie. Cette désignation d’un “bouc émissaire” à l’intérieur même d’Israël s’inscrit dans la droite ligne de nombreux événements du même acabit, depuis l’époque des accords d’Oslo, par lesquels Rabin et Pérès entendaient sacrifier les Juifs au-delà de la “ligne verte” sur l’autel d’une paix illusoire avec les ennemis – véritables – de l’OLP, intronisée en “partenaire de paix”. Mais cette politique du “bouc émissaire” remonte plus loin encore dans l’histoire moderne d’Israël.

 

On la trouve déjà à l’œuvre à l’époque du Yishouv, quand le Mapaï prédominant utilisait son emprise sur l’économie – au moyen de la toute puissante Histadrout – pour exclure du marché du travail les jeunes membres du Betar, dont le chef idéologique, Vladimir Jabotinsky, était qualifié de “fasciste” et d’ennemi du peuple. On la retrouve pendant les années de plomb de la lutte pour l’Indépendance, quand la Haganah et le Palmah s’alliaient aux forces de police britanniques pour chasser manu militari et parfois torturer et assassiner des jeunes membres du Lehi et de l’Etsel, eux aussi proclamés “ennemis du peuple”, au nom du même parti-pris idéologique, qui préfère s’allier à l’ennemi extérieur pour “nettoyer” le pays de certains de ses adversaires idéologiques…

 

Manifestation anti-Nétanyahou (photo Israel National News)

Manifestation anti-Nétanyahou (photo Israel National News)

On la retrouve aussi quand le Premier ministre David Ben Gourion ordonnait au chef du Palmah, Itshak Rabin, de bombarder l’Altalena, bateau affrété par l’Irgoun à bord duquel des militants de l’Irgoun, parfois rescapés de la Shoah, transportaient une précieuse cargaison d’armes destinées à équiper la petite armée juive, face aux ennemis arabes plus nombreux et mieux armés. Cet épisode est crucial pour comprendre l’ADN idéologique d’une partie de la gauche israélienne, hier comme aujourd’hui. Non seulement Ben Gourion (2) ordonna de couler l’Altalena, en arguant d’un prétendu risque de sédition de la part de son adversaire politique, Menahem Begin. Pire encore : il qualifia le canon qui avait bombardé l’Altalena – faisant plusieurs morts parmi ses passagers – de “canon sacré” (3).

 

Cette sacralisation de la violence fratricide et de la guerre civile se poursuit jusqu’à nos jours. La volonté du gouvernement “progressiste” Bennett-Lapid-Raam de désigner un ennemi idéologique au sein du peuple Juif s’inscrit dans la droite filiation de l’Altalena et du “canon sacré” de David Ben Gourion. Elle montre qu’aux yeux du camp “progressiste” et d’une partie de la gauche israélienne, l’impératif politique demeure, envers et contre tout, celui de la démonisation et de la lutte à outrance contre l’adversaire politique, désigné comme bouc émissaire et comme “ennemi intérieur”, au lieu de s’allier à lui pour lutter contre les ennemis extérieurs au peuple Juif.

Pierre Lurçat

Article paru initialement sur le site Menora.info,

https://www.menora.info/la-guerre-des-juifs-au-coeur-de-lideologie-du-camp-progressiste-en-israel/

 

Notes

1. Dont le combat très médiatisé des “Femmes du Kottel” n’est qu’un exemple parmi tant d’autres.

2. Ben Gourion avait pourtant rencontré Jabotinsky à Londres et conclu un accord avec lui, pour lequel il fut désavoué par son propre camp, épisode relaté dans une pièce de théâtre écrite par A.B. Yehoshua.

3. Le journaliste Shlomo Nakdimon rapporte que lorsque le commandant adjoint de l’armée de l’air se mit en quête de volontaires pour bombarder le navire en haute-mer, trois pilotes non-juifs refusèrent l’ordre de mission, l’un deux déclarant “Je n’ai pas perdu quatre camarades et volé 10 000 miles pour bombarder des Juifs”. Un autre soldat, Yosef Aksen, vétéran de l’Armée rouge, déclara être prêt à subir la mort pour insubordination, plutôt que de tirer sur des Juifs.

Article paru sur le site Menora.info

https://www.menora.info/la-guerre-des-juifs-au-coeur-de-lideologie-du-camp-progressiste-en-israel/

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