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pacifisme

Pourquoi le 7 octobre ? Ces “Gatekeepers” qui ont ouvert la porte à l’ennemi (I), Pierre Lurçat

January 26 2024, 07:06am

Posted by Pierre Lurçat

Ami Ayalon (au centre)

Ami Ayalon (au centre)

 

Comment les “Gatekeepers”, ces gardiens de la sécurité d’Israël et ces grands soldats, se sont-ils mués en promoteurs de slogans pacifistes aussi simplistes, et presque puérils, que “c’est avec ses ennemis qu’on fait la paix” ? Et quelle est leur responsabilité dans l’échec colossal du 7 octobre ? Premier volet.

 

Le 24 janvier, alors qu’Israël pleurait et enterrait les morts du terrible accident militaire de la veille, deux Israéliens publiaient chacun une tribune dans le quotidien Le Monde, connu pour son hostilité endémique envers l’Etat juif. Le premier, Elie Barnavi, expliquait pourquoi, après s’être opposé pendant les 100 premiers jours de la guerre à un “cessez-le-feu immédiat”, il avait fini par rejoindre le camp des défaitistes, qui affirment que “la guerre s’enlise” et qu’Israël ne peut pas gagner face au Hamas. Le second, Ami Ayalon, va encore plus loin dans le défaitisme : il explique tout simplement que la victoire est impossible et qu’Israël doit “repenser le concept d’ennemi”.

 

Ami Ayalon n’est pas simplement un intellectuel comme Barnavi. Ancien commandant de la Marine, il a été le patron du Shin-Beth (service de sécurité intérieure) entre 1996 et 2000. En 2012, il a participé activement au documentaire de Dror Moreh, The Gatekeepers (“Les gardiens”), dans lequel plusieurs anciens dirigeants du Shin-Beth évoquaient leurs problèmes de conscience et donnaient leur point de vue sur le conflit israélo-arabe. Ce film, tout comme la récente interview d’Ayalon dans Le Monde, permettent de comprendre l’univers conceptuel d’une large partie de l’establishment sécuritaire israélien depuis au moins trois décennies. On y découvre ce que pensent ceux qui – plus que tout autre secteur de la vie publique en Israël – portent la responsabilité de l’échec colossal du 7 octobre.

 

A ce titre, il faut écouter et lire ce que dit Ayalon. Il incarne un visage de l’Israël laïc, de gauche et pacifiste, dont l’influence sur les décisions essentielles pour le pays est inversement proportionnelle à son poids électoral (Ami Ayalon a été membre du Parti travailliste, aujourd’hui moribond). On y découvre surtout les valeurs et le mode de pensée de ces anciennes élites qui continuent, en grande partie, à modeler la politique d’Israël. Ayalon, soldat d’élite qui a pris part à toutes les guerres d’Israël entre 1967 et la première Intifada, a commandé la prestigieuse “Shayetet”, unité d’élite de la marine. A cet égard, on peut le comparer à Ehoud Barak, Ariel Sharon, Yitshak Rabin, ou bien d’autres grands soldats qui ont “tourné casaque”, pour devenir des promoteurs de “plans de paix” tous aussi foireux les uns que les autres, des accords d’Oslo aux retraits de Gaza et du Sud-Liban qui ont installé le Hamas et le Hezbollah aux portes d’Israël.

 

Des grands soldats devenus pacifistes

 

Comment ces “Gatekeepers”, ces gardiens de la sécurité d’Israël et ces grands soldats se sont-ils mués en promoteurs de slogans pacifistes – aussi simplistes et presque puérils – que “C’est avec ses ennemis qu’on fait la paix” ? Ayalon apporte des éléments de réponse à cette question cruciale, qui interroge l’histoire récente d’Israël mais aussi son avenir. Quand le journaliste lui demande si le retrait d’une partie des troupes israéliennes de Gaza signifie un tournant dans la guerre, il lui répond : “Je crois que cette question va bien au-delà des détails de cette campagne militaire. Au fond, quelle est la situation ? Notre problème réside dans la tension entre la terreur et les droits de l’homme. Toutes les démocraties libérales sont confrontées à un conflit entre violence terroriste et droits fondamentaux”.

 

Cette réponse qui peut sembler anodine met en évidence un aspect crucial du débat intérieur israélien et de la vision du monde de cet establishment sécuritaire et militaire, dont Ayalon est la parfaite incarnation : leur incapacité de penser Israël autrement que dans le cadre conceptuel de l’Occident et de la démocratie libérale, qu’ils voudraient que l’Etat juif incarne. Ce point essentiel permet à la fois de comprendre leur attitude envers les ennemis d’Israël (“Nous renonçons donc aux droits d’une minorité dans l’idée que nous allons combattre le terrorisme. Et nous ne comprenons pas qu’un jour, sans doute, nous allons nous féliciter d’avoir tué des bad guys, mais que nous aurons perdu notre identité”) et leur vision de ce qu’est et de ce que doit être Israël.

 

En décrivant le conflit entre Israël et ses ennemis selon le modèle réducteur de l’affrontement entre les démocraties et le terrorisme, l’ancien patron du Shin-Beth montre qu’il n’a pas compris une dimension importante du conflit, qui est apparue le 7 octobre dans sa criante évidence. Le Hamas, contrairement à Al-Qaïda, n’a pas seulement voulu tuer des Juifs et porter un coup symbolique à Israël (comme les terroristes du 11 septembre). Il a voulu (et réussi de manière partielle et momentanée) envahir le territoire israélien pour le conquérir.

 

Cette dimension territoriale propre à l’islam est, paradoxalement, un aspect crucial de ce qui échappe aux “Gatekeepers” devenus pacifistes, comme à l’ensemble du “camp de la paix” israélien. Ceux qui prétendaient échanger “les territoires contre la paix” s’avèrent ainsi les promoteurs d’une vision totalement inadéquate du conflit, dont leur “impensé” occulte bien des aspects essentiels. Dans la suite de cet article, nous verrons comment cet impensé concerne également l’identité juive de l’Etat d’Israël. (à suivre…)

Pierre Lurçat

 

Retrouvez mes dernières conférences et interviews sur ma chaîne YouTube.

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Pour en finir avec le pacifisme juif (I) : Le mensonge du « camp de la paix »

November 30 2023, 15:17pm

Posted by Pierre Lurçat

Pour en finir avec le pacifisme juif (I) : Le mensonge du « camp de la paix »

 

En 1929, au lendemain des pogromes qui ensanglantèrent le Yishouv juif en Eretz-Israël, Jabotinsky écrivait ces lignes toujours actuelles : « J’ai rencontré des dizaines de fois nos pacifistes, et à chaque rencontre je leur demande : comment se fait-il que vous ne prêchiez vos conceptions que parmi les Juifs ? Allez donc chez les Arabes, et allez savoir chez eux à quelles conditions ils accepteraient de faire la paix »[1]. Ce défaut des pacifistes juifs qui prêchent leurs compatriotes, dénoncé par Jabotinsky en 1929, est resté présent en Israël depuis 100 ans. Premier volet d’une série d’articles sur le pacifisme juif.

 

Le pacifisme aveugle, il y a cent ans comme aujourd’hui, menace la pérennité de l’existence d’un Etat juif souverain, au milieu d’un environnement encore largement hostile. Aujourd’hui comme hier, la paix repose sur la préparation à d’éventuels conflits, selon l’adage latin toujours actuel (« Si vis pacem, para bellum »), ou selon les mots de Jabotinsky : « le seul moyen de parvenir à un accord [de paix] est d’ériger un mur de fer ». Dans une émission récente, Alain Finkielkraut affirmait avoir toujours soutenu le « camp de la paix » israélien.

 

Comme beaucoup d’autres observateurs, en Israël et en dehors, il a rappelé que les victimes juives des kibboutz avoisinants de Gaza étaient tous des Israéliens de gauche, pour la plupart « partisans de la paix » et dont certains militaient activement en faveur des habitants de Gaza, qu’ils aidaient à se rendre en Israël pour y subir des traitements médicaux. Aux yeux de Finkielkraut, comme d’autres, le fait que les victimes du Hamas étaient pacifistes en faisait apparemment des « bons Israéliens » (« les kibboutz, c’est pas Itamar Ben Gvir ou Smotrich », expliquait-il sur LCI). Comme si les crimes du Hamas auraient été moins abjects si leurs victimes avaient été des électeurs du parti sioniste religieux et pas du défunt Meretz…

 

Le « camp de la paix », héritage du communisme

 

« Camp de la paix” ? L’expression ferait sourire, si elle ne rappelait de sinistres souvenirs. Elle remonte – rappel historique pour les nouvelles générations nées après l’effondrement du Mur de Berlin – à l’Union soviétique et à ses satellites. Le « Mouvement de la paix » était dans l’après-guerre (pendant la guerre froide dont on a oublié aujourd’hui la signification) la courroie de transmission du PCUS et du communisme stalinien au sein des pays occidentaux et de leur intelligentsia, qui était déjà à l’époque le ventre mou de l’Occident. L’expression est donc un héritage empoisonné du communisme stalinien et elle est tout aussi mensongère à l’égard d’Israël aujourd’hui, qu’elle l’était concernant l’Occident alors.

 

            Le mensonge du « camp de la paix » consiste principalement à faire croire à l’opinion internationale qu’il y aurait en Israël des bons pacifistes d’un côté et des opposants à la paix de l’autre. En réalité, comme le rappelait Jabotinsky il y a cent ans, en répondant aux pacifistes de son temps, « La paix avec les Arabes est certes nécessaire, et il est vain de mener une campagne de propagande à cet effet parmi les Juifs. Nous aspirons tous, sans aucune exception, à la paix ». Toutefois, comme il l’écrivait dans son fameux article « Le mur de fer »,  la question d’un règlement pacifique du conflit dépend exclusivement de l’attitude arabe. Propos qui demeurent d’une brûlante actualité jusqu’à ce jour. (à suivre…)

P. Lurçat

 

NB Mon nouveau livre, Face à l’opacité du monde, est disponible sur Amazon, B.O.D et dans les bonnes librairies. Je l’ai évoqué au micro d’Antoine Mercier sur sa nouvelle chaîne Mosaïque.

 

 

[1] Publié sous le titre “La paix” dans Rassviet, 3 novembre 1929, Paris. Repris en français dans le recueil Le Mur de fer, éditions l’éléphant 2022.

Pour en finir avec le pacifisme juif (I) : Le mensonge du « camp de la paix »

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Pourquoi nous combattons : Face aux nazis palestiniens, quel rôle pour les cinéastes israéliens ?

November 1 2023, 12:17pm

Posted by Pierre Lurçat

Pourquoi nous combattons :  Face aux nazis palestiniens, quel rôle pour les cinéastes israéliens ?

 

Il est temps que les cinéastes israéliens, au lieu de se complaire dans l’auto-flagellation et le défaitisme, s’engagent eux aussi pour défendre notre pays contre le nazisme arabe, tout comme s’engagèrent les meilleurs cinéastes d’Hollywood entre 1940 et 1945. P.L

 

Alors que les combats s’intensifient et qu’Israël pleure la mort de onze de ses soldats, je voudrais évoquer un autre front : celui des artistes et du cinéma en particulier. Les médias ont diffusé hier cette information scandaleuse : la déclaration faite par Ahed Tamimi, djihadiste palestinienne que les médias qualifient régulièrement de militante ou d’activiste. Voici ce qu’elle a écrit sur Instagram : “Nous vous égorgerons et boirons votre sang”, ajoutant pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté : “Vous direz que ce que Hitler vous a fait était une plaisanterie”.

 

Mais ce qui fait scandale à mes yeux, dans les propos de Tamimi, ce n’est pas la brutalité de ses mots et de ses intentions, qui sont bien conformes à la tradition d’hyperbole verbale et d’exactions sanglantes dont s’honore le monde arabo-musulman depuis les débuts de l’islam. Non, ce qui fait scandale, c’est que cette même Tamimi était il y a peu encensée par certains artistes israéliens, comme Yonatan Geffen, récemment disparu, qui l’avait comparée à Anne Frank (!) et à Hannah Senesh, ou comme le cinéaste Nadav Lapid, qui a intitulé un de ses films “Le genou d’Ahed”, subtile allusion à un film d’Eric Rohmer.

 

Le problème que révèlent ces propos scandaleux est à la fois moral et politique. Sur le plan moral, cela illustre l’abjection de ces artistes qui prennent fait et cause pour l’ennemi et qui ne reculent devant aucune compromission intellectuelle (dans le cas de Nadav Lapid, cela s’appelle un “cinéaste de festivals”, dont la production vise uniquement à obtenir des prix. De fait, un de ses films a été primé à Berlin). En France, pendant la guerre, on appelait ces artistes des collabos.

 

Comme l’écrivait récemment le critique cinéma du journal Makor Rishon, il est temps que les cinéastes israéliens se réveillent de leur torpeur et qu’ils s’engagent eux aussi pour la défense d’Israël. Nous voulons voir des films qui traiteront le sujet de la guerre non plus sous un angle ironique ou défaitiste (ou pacifiste, ce qui revient au même), mais sous un angle valorisant et patriotique. Nous voulons voir des cinéastes israéliens qui, comme le grand Franck Capra pendant la Deuxième Guerre mondiale, expliqueront au monde entier “Pourquoi nous combattons” (titre d’un film de Capra). Oui, les cinéastes doivent eux aussi participer au combat d’Israël pour sa survie !

P. Lurçat

(Article repris de mon blog cinema-israelien.over-blog.com - Blog exclusivement consacré au cinéma israélien! )

Pourquoi nous combattons :  Face aux nazis palestiniens, quel rôle pour les cinéastes israéliens ?

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L'assassinat de Rabin et le faux messianisme de la paix, Pierre Lurçat

November 4 2018, 09:21am

Posted by Pierre Lurçat

"la trahison des clercs d'israël",osloLe soir fatidique du samedi 4 novembre 1995, des millions d’Israéliens ont entendu la voix grave d’Eytan Haber, directeur du cabinet de Rabin, déclarant dramatiquement à la radio : « Memshelet Israël modia be-tadema…» (« Le gouvernement israélien annonce avec stupéfaction…»). Le pays traversait alors des semaines d’angoisse et de colère, marquées par des attentats presque quotidiens et par le sentiment, partagé par de nombreux Israéliens, que le gouvernement d’Itshak Rabin et de Shimon Pérès était insensible aux victimes juives, civils innocents qui étaient comme sacrifiés sur l’autel de la « paix », devenue une sorte de Moloch exigeant chaque semaine son tribut sanglant.

 

Cette période est déjà lointaine, et un narratif bien différent s’est imposé dans les médias français et internationaux et aussi, dans une certaine mesure, en Israël même, en vertu duquel on entend présenter les accords d’Oslo comme une occasion manquée pour la paix au Moyen-Orient, qui aurait été perdue lorsque les balles de l’assassin de Rabin ont « tué le processus de paix ». Ce narratif est mensonger parce que le processus d’Oslo n’est pas mort à Tel Aviv. Non seulement il s’est poursuivi après l’assassinat de Rabin, mais il a même perduré bien au-delà, aucun Premier ministre, y compris Benjamin Nétanyahou, n’ayant eu le courage de dire une fois pour toutes qu’Oslo était mort et que les accords cent fois violés par la partie palestinienne étaient nuls et abrogés.

 

Le souci de vérité et d’exactitude oblige toutefois à reconnaître que le « processus de paix » - avec son cortège de morts, de mensonges et la réécriture concomitante de l’histoire en adoptant le point de vue palestinien, pour mieux faire accepter l’intronisation d’Arafat, puis de Mahmoud Abbas en « chefs d’État » – n’est pas né à Oslo. Yossi Beilin a certes été l’architecte des accords d’Oslo, avec son mentor Shimon Pérès et quelques autres, qui ont manipulé l’opinion publique israélienne, en faisant fi de l’opposition interne au parti travailliste et de la volonté du Premier ministre Rabin lui-même, demeuré jusqu’à son dernier souffle hostile aux conceptions de son rival historique.

 

 

Mais le socle idéologique et psychologique sur lequel reposent les accords n’est pas apparu du jour au lendemain, comme la création ex nihilo d’une poignée d’universitaires et d’idéologues coupés des réalités du Moyen-Orient. En vérité, force est de reconnaître que le faux messianisme de la paix qui a triomphé à Oslo était déjà en germe dans la société israélienne et dans l’esprit de ses dirigeants depuis longtemps, et notamment depuis la guerre de Kippour. Les choix fatidiques de 1993 sont en grande partie la suite logique des événements dramatiques de l’automne 1973, et c’est le traumatisme de Kippour qui a mené à celui d’Oslo et à ses suites.

"la trahison des clercs d'israël",oslo

 

Le premier à avoir compris, dans le camp arabe, la transformation qu’avait subie l’État d’Israël au lendemain de la « guerre d’octobre » fut Anouar Al-Sadate. Un certain discours le présente aujourd’hui, à l’instar de Rabin, comme un « faucon devenu colombe ». Mais ce raccourci journalistique est faux et trompeur, pour l’un comme pour l’autre. Il faut relire le dernier discours de Rabin à la Knesset pour comprendre qu’il n’a jamais renié son passé ; et il faut relire le discours de Sadate à Jérusalem , pour comprendre qu’il est lui aussi resté fidèle à ses engagements et à sa vision, conforme à la doctrine politique de l’Égypte établie depuis la Révolution des officiers libres en 1952. Le plus farouche ennemi d’Israël, admirateur d’Hitler dans sa jeunesse , ne s’est pas transformé du jour au lendemain en ami des Juifs : il a tout simplement compris que la meilleure façon de vaincre Israël était de se servir de la paix comme d’un cheval de Troie pour affaiblir et diviser l’opinion israélienne, et pour obtenir par la négociation ce que les armées arabes n’avaient pu remporter sur les champs de bataille.

 

 (Extrait de mon livre La trahison des clercs d'Israël, La Maison d'Edition)

 

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