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La contestation de l’État juif par les élites israéliennes, par Pierre Lurçat

August 26 2018, 13:11pm

Posted by Pierre Lurçat

Yom Yeroushalayim (photo P. Lurçat)

Yom Yeroushalayim (photo P. Lurçat)



 

La polémique actuelle autour de l’adoption par la Knesset de la Loi fondamentale “Israël État-nation du peuple juif” ne peut être comprise sans la replacer dans le contexte de l’intervention grandissante de la Cour suprême dans la vie publique au cours des trois dernières décennies, et de la contestation du caractère juif de l’État par les membres des élites israéliennes post-sionistes. Le présent article, extrait de mon nouveau livre (Israël, le rêve inachevé, à paraître aux Editions de Paris / Max Chaleil), expose le contexte historique de cette controverse.

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La récente polémique déclenchée par le vote à la Knesset de la Loi fondamentale définissant Israël comme “l’État-nation du peuple Juif” est une conséquence directe de l’affaiblissement de la notion d’État juif par la Cour suprême. Cette notion était en effet inscrite dans la Déclaration d’indépendance de l’État d’Israël de 1948, qui mentionnait explicitement le droit naturel du peuple juif d’être une nation comme les autres nations et de devenir maître de son destin dans son propre État souverain”. L’idée que le nouvel État d’Israël était l’État-nation du peuple Juif était considérée comme une évidence incontestable par ses fondateurs, et elle a été acceptée par la communauté des nations, lors du vote de l’Assemblée générale des Nations unies du 29 novembre 1947.


 

Comment cette évidence a-t-elle été progressivement remise en question, au point que l’adoption par le parlement israélien de la Loi fondamentale sur l’État juif est aujourd’hui largement dénoncée comme “polémique” ou anti-démocratique ? La réponse à cette question est étroitement liée à l’interventionnisme judiciaire de la Cour suprême, depuis le début des années 1990. C’est en effet cette dernière qui a ébranlé le large consensus qui existait en Israël en 1948, lors de la proclamation d’Indépendance, signée par des représentants de tous les partis, d’un bord à l’autre de l’échiquier politique. En faisant du caractère juif de l’État un sujet polémique et en opposant “État juif” et “État démocratique” - deux réalités qui avaient coexisté sans problème majeur pendant quatre décennies - la Cour suprême a ouvert la boîte de Pandore.


 

Proclamation de l'Etat d'Israël :

la Loi sur l'Etat-nation est conforme à la Déclaration d'Indépendance de 1948

 

 

Dans l’esprit des pères fondateurs du sionisme politique et des premiers dirigeants de l’État d’Israël - au premier rang desquels David Ben Gourion - le caractère juif de l’État n’était en effet nullement contradictoire avec son caractère démocratique. C’est dans cet esprit qu’il a élaboré le fragile équilibre sur lequel ont reposé l’État et ses institutions après 1948. Ben Gourion a fait preuve à cet égard d’une volonté de compromis inhabituelle, qu’il justifie ainsi dans ses écrits : “Sauver la nation et préserver son indépendance et sa sécurité prime sur tout idéal religieux ou antireligieux. Il est nécessaire, dans cette période où nous posons les fondations de l’État, que des hommes obéissant à des préoccupations et à des principes différents travaillent ensemble… Nous devons tous faire montre d’un sage esprit de compromis sur tous les problèmes économiques, religieux, politiques et constitutionnels qui peuvent supporter d’être différés”(1).


 

En totale contradiction avec cet esprit de compromis, qui a permis aux différentes composantes de la nation israélienne de coexister pendant les premières décennies de l’État, le juge Aharon Barak a adopté une démarche partisane et défendu des positions radicales sur le sujet crucial de l’identité de l’État d’Israël. Sous couvert de concilier les valeurs juives et démocratiques de l’État d’Israël, Barak a en effet mené un véritable combat contre tout particularisme juif de l’État. Au nom d’une conception bien particulière des “valeurs universelles” (“les valeurs de l’État d’Israël en tant qu’État juif sont les valeurs universelles communes aux membres d’une société démocratique” (2)), la Cour suprême a pris toute une série de décisions marquantes, dont le point commun était de réduire à néant le caractère juif et sioniste de l’État.

 

 

Aharon Barak : un “fondamentalisme juridique”

Ces décisions ont tout d’abord concerné principalement des questions religieuses, comme les conversions non orthodoxes (effectuées par les mouvements juifs réformés et « conservative »), ou bien le respect du shabbat sur la voie publique. Sur toutes ces questions, le juge Barak a fait preuve d’un esprit antireligieux militant, qui a suscité, en réaction, d’immenses manifestations contre la Cour suprême, organisées par le public juif orthodoxe au milieu des années 1990. Mais il s’est avéré par la suite que la doctrine Barak n’était pas dirigée uniquement contre le judaïsme orthodoxe, mais tout autant contre les valeurs fondamentales du sionisme politique.

 

La décision la plus marquante à cet égard a été celle de la Cour suprême dans l’affaire Kaadan. Il s’agissait d’une famille arabe qui avait voulu acheter une parcelle de terrain dans le village juif de Katzir, créé par l’Agence juive sur des terres domaniales appartenant à l’État. Dans cette affaire, le juge Barak a pris le contre-pied de la politique traditionnelle d’implantation juive en Israël, qui remonte aux débuts du sionisme, bien avant la création de l’État. L’arrêt de la Cour suprême, rédigé par Barak, affirmait ainsi que « l’État n’est pas en droit d’allouer des terres domaniales à l’Agence juive en vue d’y construire un village sur une base discriminatoire entre Juifs et Arabes ». En d’autres termes, la Cour suprême prétendait disqualifier toute l’entreprise de peuplement juif menée par l’Agence juive depuis les débuts du sionisme politique, au nom de sa conception de l’égalité.

 

C’est dans ce contexte de remise en cause progressive des fondements du sionisme par la Cour suprême - et plus largement, par une partie des élites israéliennes dont elle est représentative - qu’il faut comprendre la récente polémique autour de la Loi fondamentale sur l’État-nation. En réalité, celle-ci n’ajoute rien de nouveau à la Déclaration d’Indépendance. L’opposition virulente qu’elle a suscité s’explique surtout par l’effritement progressif du consensus sioniste, mis à mal par l’assaut de l’idéologie post-moderne et post-sioniste qui a triomphé à l’époque des accords d’Oslo, au début des années 1990. Cette période a été marquée par une véritable “révolution culturelle” (3) - concomitante à la “révolution constitutionnelle” que nous avons décrite plus haut - qui a vu les notions fondamentales du sionisme politique remises en cause par une large partie des élites intellectuelles de l’État d’Israël, dans le monde universitaire, celui de l’art et de la culture, les médias, etc.

 

Un de ceux qui a le mieux exprimé cette révolution culturelle a été l’écrivain David Grossman, qui écrivait dans un article publié en septembre 1993, intitulé “Imaginons la paix” (4) : “Ce qui est demandé aujourd’hui aux Juifs vivant en Israël, ce n’est pas seulement de renoncer à des territoires géographiques. Nous devons aussi réaliser un “redéploiement” - voire un retrait total - de régions totales de notre âme… Comme la “pureté des armes”... Comme être un “peuple spécial”... Renoncer au pouvoir en tant que valeur. A l’armée elle-même en tant que valeur…” Ce que nous dit Grossman - et ce qu’ont exprimé à l’époque des dizaines d’autres intellectuels partageant la même idéologie - c’est qu’il était prêt à renoncer à tous les éléments essentiels de l’ethos sioniste (ou “régions de notre âme”), pour transformer l’État juif en État de tous ses citoyens, c’est-à-dire en État occidental dans lequel les Juifs n’auraient plus aucune prérogative nationale.

 

“Renoncer aux territoires de notre âme” - David Grossman

 

C’est au nom de la même idéologie radicale que d’autres intellectuels ont prétendu abroger la Loi du Retour, fondement de l’immigration juive en Israël et pilier de l’existence nationale dans l’esprit de David Ben Gourion, son principal artisan, qui la considérait comme “la quintessence de notre État”. Mais la révolution culturelle entreprise à l’époque des accords d’Oslo a échoué. Elle a doublement échoué : une première fois, dans le feu et le sang du terrorisme palestinien, qui a anéanti les espoirs chimériques de mettre fin au conflit par des concessions territoriales. Et une seconde fois, lorsque les Israéliens ont rejeté par les urnes, à une large majorité, l’idéologie post-sioniste qui avait brièvement triomphé lors de la révolution culturelle menée par les opposants de l’État juif.

 

Les citoyens israéliens ont en effet exprimé, à de nombreuses reprises, leur attachement aux valeurs fondamentales du sionisme politique et à la notion d’État juif, décriée par une partie des élites intellectuelles. Le “retrait total des régions de notre âme” promu par David Grossman n’a pas eu lieu, parce que les Israéliens ont refusé, dans leur immense majorité, cette entreprise d’auto-liquidation nationale. Ils ont signifié qu’ils étaient attachés à la Loi du Retour et aux notions de ‘pureté des armes’ et de ‘peuple spécial’ tournées en ridicule par Grossman, et que leur âme juive vibrait encore. Ils ont signifié leur attachement indéfectible aux valeurs juives traditionnelles, à l’armée d’Israël (où le taux d’engagement dans les unités combattantes n’a pas faibli, malgré l’idéologie pacifiste) et à “l’espoir vieux de deux mille ans d’être un peuple libre sur sa terre”, selon les mots de l’hymne national.

Pierre Lurçat

Notes

(1) David Ben Gourion, in Hazon ve-Derekh, cité par Avraham Avi-Hai, Ben Gourion bâtisseur d’État, p. 120.

(2)  A. Barak, “The constitutional Revolution : Protected Human Rights”, Mishpat Umimshal, cité dans La trahison des clercs d’Israël, La Maison d'Edition 2016 p. 131.

(3) J’emprunte cette idée et d’autres au livre très riche de Yoram Hazony, L’État juif. Sionisme, post-sionisme et destins d’Israël, éditions de l’éclat 2007.

(4)  Cité par Y. Hazony, op. cit. p.113.

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Nouveau dessin antisémite de Willem : le stéréotype du Juif sanguinaire remis au goût du jour

August 9 2018, 16:40pm

Posted by Pierre Lurçat

Nouveau dessin antisémite de Willem :  le stéréotype du Juif sanguinaire remis au goût du jour

 

Les historiens des futures générations devront s’interroger sur le rôle des médias dans le renouveau de l’antisémitisme en France depuis le début des années 2000. Un historien du temps présent, Pierre-André Taguieff, a justement parlé de “l’antisémitisme de plume” à propos des écrivains et universitaires qui ont mis leur plume au service de l’antisémitisme sous le régime de Vichy. Mais comment qualifier ceux qui publient, encore aujourd'hui, des caricatures aux thématiques antisémites évidentes, 70 ans après la Shoah? Que penser d’un dessinateur comme Willem, qui revient régulièrement sur la thématique antisémite du Juif sanguinaire et du Juif assassin, dans les colonnes du quotidien français à grand tirage Libération? Nous donnons ici au lecteur les pièces et lui  laissons le soin de répondre à cette question.

 

Pierre Lurçat

 

Le dernier dessin antisémite de Willem

 

Commentaire du journaliste français Clément Weil Raynal (sur Twitter) : “Tous les poncifs de l'antisémitisme ranci dans ce dessin de Willem publié par Libé . Le juif orthodoxe (ce n'est pas un soldat, pourtant) rendu coupable de la mort des enfants palestiniens. Remise au goût du jour de la bonne vieille accusation de crime rituel”.


 

Un précédent en 2017, avec l’analyse du site InfoEquitable

 

Le caricaturiste Willem y montre la colombe de la paix tenue dans les crocs d’un molosse au visage de Donald Trump, pour la plus grande joie de son maître… Benyamin Netanyahu. En arrière-plan, on aperçoit les victimes de cette scène, dont tout le monde comprend bien qu’il s’agit des Palestiniens. Ces derniers expriment leur mécontentement à leur manière… en lançant des pierres.

 

Le Juif qui manipule les politiciens des autres nations, un vieux stéréotype antisémite

La relation chien-maître renvoie à un thème bien connu de l’antisémitisme : le Juif maléfique et maître du monde, surpuissant, qui tire les ficelles et manipule tout. Accusation suprême, il détruit la paix (comme si le terrorisme palestinien et les lointains lanceurs de pierres du dessin n’y avaient aucune responsabilité…).

Représenter Netanyahu et Trump ligués contre le reste du monde renvoie même directement au  « complot américano-sioniste », qui n’est que la version modernisée du « complot juif mondial » popularisé par les Protocoles des Sages de Sion. Le philosophe et historien Pierre-André Taguieff a mené une étude approfondie de ce phénomène.


SUITE SUR http://infoequitable.org/dans-liberation-un-dessin-aux-forts-relents-antisemites/

Deux précédents de 2001 -  Lire l'analyse de M. Macina sur

http://www.debriefing.org/18567.html


 (Dessin de Willem dans Libé) "Viande kasher qui rapporte gros et ne coûte pas cher"
          7 février 2001            Dessin de Soupaut, Au Pilori, 27 septembre 1940

 

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Israël “Etat d’apartheid”? Contre-vérités et propagande mensongère autour de la Loi “Israël Etat-nation du peuple Juif”, par Pierre Lurçat, avocat

August 6 2018, 16:20pm

Posted by Pierre Lurçat

Israël “Etat d’apartheid”? Contre-vérités et propagande mensongère autour de la Loi “Israël Etat-nation du peuple Juif”, par Pierre Lurçat, avocat

Israël “Etat d’apartheid”? Contre-vérités et propagande mensongère autour de la Loi “Israël Etat-nation du peuple Juif”, par Pierre Lurçat, avocat

 

“Tes destructeurs et les auteurs de ta ruine sortiront de toi”.

Isaïe 49, 17

 

Depuis le vote par la Knesset de la Loi fondamentale “Israël Etat-nation du peuple Juif”, les opposants à la loi en Israël, relayés par certains médias internationaux hostiles à Israël, propagent de nombreuses contre-vérités à son sujet, par ignorance ou par malveillance. Le présent article vise à rétablir certaines vérités fondamentales sur ce sujet important.

 

Une “loi controversée”, partisane et “contraire aux principes fondateurs de l’Etat d’Israël?”

 

Loi controversée” : par cette expression, les médias entendent discréditer le contenu de la loi avant même de l’avoir exposé. En réalité, cette loi fondamentale a été adoptée par une majorité absolue de 62 députés de la Knesset contre 55. (A titre de comparaison, la “Loi fondamentale sur la dignité et la liberté humaine” avait été adoptée en 1992 à une majorité de 32 voix contre 21). A noter : le principal artisan de la Loi, Avi Dichter, était au moment où il a entamé le travail législatif, il y a huit ans, membre du parti centriste Kadima, aux côtés de Tsippi Livni, qui mène aujourd’hui la campagne de l’opposition contre la Loi, ce qui montre bien qu’il ne s’agit pas d’un texte partisan ou “d’extrême-droite”...

 

Une loi qui bouleverse le statu-quo, et transforme Israël en Etat-nation du peuple Juif?

 

Selon certains de ses opposants, cette loi serait contraire aux “fondements d’un Etat juif et démocratique” (selon les termes de la pétition signée par plusieurs centaines d’intellectuels israéliens, qui ne l’ont apparemment pas bien lue). En réalité, la Loi fondamentale s’inscrit dans la suite logique de la Déclaration d’indépendance de 1948, dont elle reprend les éléments essentiels. Elle ne “transforme” pas Israël en Etat-nation du peuple Juif, ce qu’il a toujours été conformément aux principes du sionisme politique et à la volonté de ses pères fondateurs. La loi se contente, plus modestement, de réaffirmer le caractère juif de l’Etat et le droit à l’autodétermination du peuple Juif dans le cadre d’un Etat-nation, deux notions essentielles qui étaient largement considérées comme acquises depuis 1948 et faisaient depuis toujours partie du consensus à l’intérieur d’Israël.

 

Une loi contraire à la Déclaration d’indépendance de 1948?

 

C’est sans doute la contre-vérité la plus flagrante. Non seulement la Loi fondamentale n’est pas contraire à la Déclaration d’Indépendance, mais elle vient en réalité réaffirmer les principes essentiels de cette dernière. Pourquoi? Parce que le consensus exprimé dans la Déclaration d’indépendance de 1948 a été largement érodé au cours des dernières années, et notamment depuis que la Cour suprême a entrepris de porter atteinte au caractère juif de l’Etat d’Israël, depuis le début des années 1990, en prétendant remplacer l’Etat juif par un “Etat de tous ses citoyens”, selon la volonté affichée de son président, le juge Aharon Barak (1).

 

 

David Grossman, emporté par l’excès et l’emphase

 

Une loi excluant les minorités non juives de la pleine citoyenneté = une loi d’apartheid?

 

Cette accusation est la plus dangereuse de toutes, car elle accrédite la notion d’un “Etat d’apartheid” utilisée depuis des décennies par les ennemis d’Israël, notion à laquelle des intellectuels israéliens renommés apportent aujourd’hui leur caution morale. C’est ainsi que l’écrivain David Grossman écrit, dans les colonnes de Ha’aretz (repris et traduit intégralement par Libération), que “le Premier ministre d’Israël s’est déterminé à ne pas mettre fin à l’occupation et à la situation d’apartheid dans les Territoires occupés, mais, au contraire, à les intensifier et à les transférer de ces territoires au cœur de l’Etat d’Israël”. Ce faisant, il commet une double erreur. Erreur historique et politique tout d’abord, car il n’y a pas, et il n’y a jamais eu de situation d’apartheid en Israël, ni à l’intérieur de la “ligne verte”, ni dans les territoires de Judée-Samarie (2).

 

Erreur morale ensuite, parce qu’en accusant le gouvernement de vouloir instaurer un régime d’apartheid à l’intérieur d’Israël, Grossman n’efface pas seulement la frontière physique entre le “petit Israël” d’avant 1967 et les territoires bibliques de Judée et de Samarie. Il abolit aussi et surtout la mince frontière rhétoriquequi séparait encore, jusqu’à hier, la gauche sioniste de l’extrême-gauche antisioniste. En considérant désormais que la “réalité d’apartheid” - qu’il avait auparavant cru déceler dans les “territoires occupés” - menace l’ensemble de l’Etat d’Israël, David Grossman laisse sa pensée dériver, emporté par l’excès et l’emphase, au point de rejoindre dans son discours les contempteurs les plus radicaux du sionisme. Sa dénonciation de “l’apartheid” est désormais reprise par les médias du monde entier, et pas seulement par ceux qui ont fait de la détestation d’Israël leur marque de fabrique.

 

La dérive de la gauche israélienne

 

Entraînés par le courant de leur détestation envers B. Nétanyahou, les intellectuels de la gauche israélienne sont en train de franchir allègrement toutes les lignes rouges et de détruire les derniers éléments restés encore intacts du consensus national, déjà largement effrité par les accords d’Oslo et par le retrait de Gaza. Cette fuite en avant de la gauche israélienne se traduit notamment par son jeu dangereux à l’égard de la minorité druze, dont elle incite certains éléments radicaux (qui sont loin de représenter l’ensemble du public druze), en risquant de mettre à mal l’alliance scellée dans le sang des soldats de Tsahal, établie depuis 70 ans entre druzes et Juifs en Israël.

 

 

L’alliance scellée dans le sang entre Juifs et druzes


 

Comme l’écrit dans les colonnes d’Israel Hayom l’éditorialiste Amnon Lord, observateur attentif de la vie politique israélienne, et notamment de la gauche dont il est lui-même issu, “un grand écrivain israélien (3) a affirmé autrefois que “l’histoire juive tout entière nous montre que l’élite juive a toujours été en danger de faillite morale, alors que le petit peuple (N.d.T. “Am’ha” en hébreu) a constitué la colonne vertébrale du peuple Juif. Il en a été ainsi à l’époque du Premier et du Deuxième Temple, et aussi à la veille de la Shoah. L’élite a toujours été encline à l’auto-destruction. L’identité juive a été préservée par le petit peuple”. Et Amnon Lord conclut: “La Loi sur l’Etat-nation a été conçue pour le petit peuple. L’Etat juif a été fondé pour que des brutes - intellectuelles et physiques - ne viennent plus menacer les Juifs”. Ou pour dire les choses en d’autres termes, ceux du prophète Isaïe que nous avons lus samedi dernier dans la Haftara, “Tes destructeurs et les auteurs de ta ruine sortiront de toi”.

 

Pierre Lurçat

 

Notes

1. Je renvoie à ce sujet à mon article “Comment la gauche israélienne est devenue une minorité tyrannique”, Vu de Jérusalem, 5 février 2018.

2. Dans un discours prononcé à l’occasion du Jour des soldats tombés en Israël, David Grossman avait déjà dénoncé la “réalité d’apartheid dans les territoires occupés” (thème devenu son cheval de bataille depuis son livre Le vent jaune paru en 1988).

3. J’invite mes lecteurs perspicaces à trouver le nom de cet écrivain, qui n’est pas mentionné par Amnon Lord, et à me soumettre leurs suggestions à pierre.lurcat@gmail.com

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Prochaine formation à l'examen d'agent immobilier à Jérusalem / Tel-Aviv

Formation à l’examen d’agent immobilier israélien

Session août-septembre 2018 – Tel Aviv 

La prochaine formation à l'examen d'agent immobilier aura lieu du 28 août au 5 septembre à Tel-Aviv, en vue de l’examen d’agent immobilier israélien qui se tiendra le 23 octobre 2018. Au terme de la formation et après avoir réussi l’examen, les élèves pourront obtenir la carte professionnelle permettant d’exercer la profession d’agent immobilier (metave’h) en Israël, dans une agence ou à leur compte. * Une formation est également prévue à Jérusalem, me contacter.

J’ai mis en place cette formation depuis 2006 en Israël, et j’ai préparé plusieurs centaines d’Olim francophones (avec un taux de réussite dépassant 75%) à l’examen organisé par le ministère israélien de la Justice, seul habilité à délivrer la carte professionnelle. Important : il n’est pas nécessaire d’être israélien pour travailler comme agent immobilier en Israël !

Niveau d'hébreu exigé

Cet examen est un examen théorique portant sur le droit israélien, qui a lieu 4 fois par an en Israël. Il s’agit d’un QCM (questionnaire à choix multiple), ce qui signifie qu’il n’est pas indispensable de savoir écrire en hébreu. Il n'est pas non plus nécessaire d'avoir un très bon niveau de lecture pour suivre le cours. Un niveau moyen est suffisant, à condition de fournir un travail personnel en plus des cours de préparation.

Pour plus d’informations, n’hésitez pas à me contacter par email pierre.lurcat@gmail.com ou par téléphone au 050 286 5143 ou 06 80 83 26 44  (France).

 

Pierre Lurçat, avocat au barreau israélien, spécialiste de la formation aux examens de droit

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L’ancien ministre koweïtien Sami Al-Nesf fustige la stratégie palestinienne du siècle dernier : les Arabes ont perdu les guerres et doivent en payer le prix

August 3 2018, 07:58am

Posted by MEMRI

L’ancien ministre koweïtien Sami Al-Nesf fustige la stratégie palestinienne du siècle dernier : les Arabes ont perdu les guerres et doivent en payer le prix

Sami Abdullatif Al-Nesf, ancien ministre koweïtien de l'Information, a déclaré que tout au long de l'histoire, la cause palestinienne a souffert à cause des extrémistes. « Les terres sont récupérées par la paix, pas par la guerre », a-t-il affirmé. Il a critiqué le Grand Mufti de Jérusalem, Hajj Amin Al-Husseini, pour avoir contrecarré le plan de partage, exhorté les Palestiniens à partir, en réaction démesurée à Deir Yassin et maintenu les Palestiniens dans des camps de réfugiés. Al-Nesf, pilote et ancien président et directeur général de Kuwait Airways, a déclaré : « Tant que nous ne nous tournerons pas vers le genre de pensée raisonnable qui nous fait défaut depuis un siècle, nous continuerons à accuser les voix de la raison d'être des traîtres, des criminels et des collaborateurs, pour emprunter la voie de l'extrémisme, qui débouche toujours sur une catastrophe. »

Et d’ajouter : « La question du déplacement [de personnes] est une chose courante » et « nous avons choisi de faire la guerre et l’avons perdue, ainsi, logiquement, nous devrions en payer le prix ». L'interview avec Al-Nesf a été diffusée sur la chaîne web koweïtienne Diwan Al-Mulla le 11 juillet 2018. Extraits :

 

Sami Abdullatif Al-Nesf : A travers l’histoire, personne n’a autant nui à la cause palestinienne que les groupes qui rivalisent dans leur degré d’extrémisme. Peu de gens savent qu'en 1937, la Commission royale Peel britannique avait conclu qu'il devrait y avoir deux Etats, solution dont on pleure aujourd’hui la perte. La commission Peel a octroyé aux Palestiniens 90 % de la terre – 25 000 kilomètres carrés – tandis que les juifs ont reçu un mini-Etat de 2 500 kilomètres carrés, dans des zones qui étaient juives à travers l'histoire, aux alentours de Tel-Aviv. [...]

 

Les slogans bruyants et vides du mufti Amin Al-Husseini ont contrecarré le plan des deux Etats. Al-Husseini s'est enfui chez Hitler, en misant sur le mauvais cheval. Ce que j'essaie de montrer, c'est qu'historiquement parlant, la cause palestinienne a perdu du temps, et une fois de plus à cause des extrémistes, non à cause des modérés.

Journaliste : A cause des braillards extrémistes...

Sami Abdullatif Al-Nesf : Israël n'a jamais bénéficié des modérés, mais des gens qui crient : « L’Accord du siècle ? Non à la paix ! » Une autre chose dont j'ai été témoin personnellement, contrairement à beaucoup d'autres qui parlent de la cause palestinienne, sont les changements sur le terrain. Aujourd'hui, quand vous allez à Jérusalem et en Cisjordanie, vous voyez que tout a changé. Le nombre de colons a atteint un million, et ils ne partiront jamais. Il n’y a plus des structures préfabriquées, comme au début. Aujourd’hui tout est en béton. Aucune colline n'est laissée vacante. Ainsi, à moins que nous ne nous tournions vers le genre de pensée raisonnable qui nous fait défaut depuis un siècle, nous continuerons d’accuser les voix de la raison d'être des traîtres, des criminels et des collaborateurs, pour emprunter la voie de l'extrémisme, qui débouche toujours sur une catastrophe. [...]

[Les juifs ont dit] que tout Etat vaut mieux que pas d'Etat du tout. Ils ont dit qu'accepter [le plan] valait mieux que le rejeter, dans l'espoir que l'autre camp le rejetterait. Ainsi, la partie juive a accepté ses 10 %...

Journaliste : Alors que les Arabes ont refusé...

Sami Abdullatif Al-Nesf : Où est allé [Al-Husseini] ? Il s'est enfui chez Hitler... A ce jour, la cause palestinienne paie le prix des photos de lui avec Hitler. [...]

Premièrement, [Al-Husseini] a rejeté le plan de partition de 1948, par lequel [les Palestiniens] auraient gagné...

Journaliste : Il comprenait la Cisjordanie et l'ensemble de...

Sami Abdullatif Al-Nesf : Deuxièmement, il a exhorté les Palestiniens à partir, en exagérant ce qui s'est passé à Deir Yassin et ailleurs. Pour votre information, des massacres ont eu lieu des deux côtés. Il l’a exagéré, en raison de sa théorie selon laquelle les Palestiniens devaient partir pour faciliter l'intervention des armées arabes. En outre, il pensait que les Palestiniens pourraient recevoir des armes à l'étranger. Eh bien, ils sont partis et ne sont jamais revenus. Le plus grand crime d’Al-Husseini a été son insistance pour maintenir les Palestiniens dans des camps de réfugiés. Quand les Arméniens ont émigré, ils ne sont pas allés dans des camps de réfugiés. Quand les Kurdes ont émigré, ils ne sont pas allés dans des camps de réfugiés. [...]

Cet homme, avec son extrémisme, a nui à la cause palestinienne. Il a dit : Pour éviter de perdre la cause palestinienne, maintenons les Palestiniens dans des camps de réfugiés au Liban, en Jordanie et partout ailleurs. Ils ont été placés dans des camps de réfugiés, et jusqu’à ce jour, ils en paient le prix. Je dis à nos frères palestiniens : Les propos radicaux sont-ils tout ce qui vous intéresse ? Voulez-vous vraiment que votre cause soit perdue ?

Journaliste : Les slogans sont-ils tout ce qui les intéresse ?

Sami Abdullatif Al-Nesf : Tout à fait. Les slogans. Laissez-moi vous raconter ce que Mahmoud Abbas m'a dit, et ce que j'ai dit à Khaled Mashaal à Damas, et à Ismail Haniya à trois reprises, alors que nous dînions chez lui à Gaza. Abbas a déclaré : « La cause est sur le point d'être perdue. Trouvons une solution avec Israël, afin de conserver au moins ce qui reste de la terre. » Chaque fois que les extrémistes provoquent une guerre, de nouvelles terres sont perdues, et chaque fois que la paix est signée, la terre est récupérée. Le Sinaï n'a pas été récupéré par la guerre. Il a été perdu deux fois en temps de guerre et a été regagné par la paix. C’est par la paix que la Jordanie a repris la terre qu'elle avait perdue dans la guerre de 1967. Les terres sont récupérées par la paix, non par la guerre. [...]

[Le Hamas a dit à Abbas] qu'ils voulaient un gouvernement d'unité. Très bien, a-t-il dit. La différence entre nous est que vous ne reconnaissez pas Israël. Exact, ont-ils dit. Nous voulons libérer la Palestine du fleuve à la mer. Il leur a demandé : Avec quelles armes allez-vous le faire ? [Abbas] dit : Depuis que nous avons été expulsés des terres de 1967 à cause de l'extrémisme arabe - en Syrie, en Égypte et ailleurs - nous sommes devenus complètement dépendants d'Israël. Il a dit : Si nous donnons des postes ministériels  au Hamas, où est-ce qu’un ministre de l'Agriculture [du Hamas] obtiendra-t-il de l'eau ? L'eau vient d'Israël. Disons que vous êtes le ministre des Finances. La monnaie qui a cours à Gaza et en Cisjordanie est le shekel. Si vous voulez de l’argent, vous l’obtenez d’Israël. L'électricité à Gaza et de Cisjordanie provient aussi d'Israël.

Journaliste : Le pétrole provient d'Israël...

Sami Abdullatif Al-Nesf : La nourriture, l'eau, tout... [...] En 1917, tout comme il y avait des extrémistes, il y avait également des gens sages et raisonnables. L’un d’entre eux était [l'homme politique libanais] Shakib Arslan. Il a dit : Lorsque j'ai visité les colonies [juives], j’ai compris qu’elles étaient comme une locomotive moderne, qui pourrait nous sortir de notre ignorance, de notre pauvreté, etc. Ces gens étaient des Européens, venus cultiver la terre des colonies, a-t-il dit. Il y avait des Palestiniens qui ont dit la même chose. Certains Palestiniens ont dit : [Les juifs] sont ici depuis 1700-1800 et à travers l'histoire. Les Israélites et la Terre d'Israël sont mentionnés dans le Coran. Où était-ce ? En Afrique ? Non, c'est la même terre. Trouvons un terrain d’entente, ont dit ces gens. Al-Husseini, Arafat, Ahmad Shukeiri et tous ceux qui ont brandi la bannière de l'extrémisme ont nui à la cause palestinienne et à la cause des Arabes. [...]

Les Palestiniens aujourd'hui, avec leur extrémisme rhétorique... Ce ne sont pas seulement les Palestiniens, mais nous, les Arabes en général. Nous constituons le meilleur type d’ennemi du monde : des terroristes malfaisants et méchants, qui sont faibles. Eh bien, vous ne pouvez pas avoir les deux. Le Hamas, avec tous ses slogans, devrait nous montrer les avions et les tanks qui reflètent sa capacité à faire ce qu'il dit. Il n’en a aucun. Certains disent : ô pour les jours de Saladin... Les [croisés] européens ne sont pas venus en colons. Ils ont été incités par le mensonge selon lequel les Arabes les opprimaient. Ils n’ont fait qu’entrer et sortir. C’était une affaire triviale pour eux... Même Jérusalem - après sa libération par Saladin, son frère, Al-Adil I, a essayé de la rendre aux croisés, mais ils n’en voulaient pas. Ils ont dit qu'ils ne voulaient que les villes côtières. Il en va de même avec tout le problème des colonies... Les Blancs d'Afrique du Sud sont toujours là-bas. Ils ne sont pas partis [...]

La question du déplacement [de personnes] est une chose courante. Nous avons prétendu que [1948] était la première fois que cela se produisait, mais ce n'est pas vrai, que cela nous plaise ou non. En outre, il est important de comprendre - et c’est une chose avérée à travers l’histoire -  que si vous perdez une guerre, vous en payez le prix. Nous sommes les seuls à refuser de payer le prix, alors que nous avons perdu la guerre de 1948. Nous avons perdu les guerres de 1956 et 1967, mais nous refusons de payer le prix. Ça ne marche pas comme ça. Nous avons choisi de déclencher la guerre et avons perdu, donc logiquement, nous devrions en payer le prix. Une autre chose s’est avérée à travers l'histoire. Si je fais un marché pour vous acheter cette table pour 10 dinars, cette offre est valable seulement maintenant. Si vous acceptez le prix de 10 dinars, l'accord entre en vigueur maintenant. Mais sinon, je ne peux pas revenir un an ou deux plus tard, après qu’il s'avère que la table vaut une fortune – disons 1 000 dinars - et vous dire : Abou Ahmad, vous vous souvenez de notre marché de l’année dernière ? L'offre était de 10 dinars, mais aucun accord n'a été signé. Si les Palestiniens avaient accepté l'une de ces transactions du passé, la balle aurait été dans le camp israélien maintenant. [...]

Jérusalem était sous l’occupation des croisés pendant 200 ans, mais il n'y avait pas une seule fatwa interdisant de visiter la ville.

Journaliste : Exact.

Sami Abdullatif Al-Nesf : L'Egypte était sous occupation depuis 1882, mais personne n'a dit que vous ne pouviez pas visiter l'Egypte ou Al-Azhar. Toute l'Afrique du Nord était sous occupation, mais il n'y avait pas une seule fatwa interdisant les visites à la Grande Mosquée de Kairouan... Laissez-moi vous donner un exemple encore meilleur : La Mecque. Le prophète Mohammed s’y est rendu en pèlerinage lorsqu’elle était encore gouvernée par les infidèles. Il n'a pas dit qu'il ne pouvait pas y aller parce qu'elle était occupée par les infidèles. Il y a eu des gens qui nous ont trompés et nous ont dit de ne pas visiter [la Palestine], et qui ont remis la Cisjordanie, Jérusalem, et les Palestiniens aux [Israéliens].


SOURCE

http://memri.fr/2018/08/02/lancien-ministre-koweitien-sami-al-nesf-fustige-la-strategie-palestinienne-du-siecle-dernier-les-arabes-ont-perdu-les-guerres-et-doivent-en-payer-le-prix/

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François d’Orcival : «L’État d’Israël ne sera pas binational!»

July 30 2018, 08:58am

François d’Orcival : «L’État d’Israël ne sera pas binational!»

Je reproduis ici l'excellent éditorial de François d'Orcival, paru dans le Figaro. P.L.

 

François d'Orcival : «L'État d'Israël ne sera pas binational!»

CHRONIQUE – L’unité de l’«État-nation du peuple juif» est désormais gravée dans sa Constitution. Ainsi en a décidé la Knesset à une large majorité.

Même l’Etat hébreu éprouve le besoin de réaffirmer son identité. Depuis sa création, en 1948, cela allait de soi: Israël était l’«Etat-nation du peuple juif», sa langue officielle l’hébreu, sa capitale Jérusalem. Maintenant, ce sera inscrit dans le marbre de sa Constitution, et pas plus révisable que la forme républicaine du gouvernement dans nos institutions. Le vote a été acquis la semaine dernière au Parlement israélien par 62 voix contre 55, sur 120, ce qui est une large majorité, compte tenu de la dispersion des groupes à la Knesset (en raison de la représentation proportionnelle) et du vote hostile des 13 députés arabes. La discussion a donné lieu à des commentaires délirants, du genre: c’est la fin de la démocratie, l’avènement de l’apartheid, etc.

L’État d’Israël n’est pas devenu une théocratie ; ses citoyens, juifs et non juifs, conservent les mêmes droits, la même citoyenneté

L’État d’Israël n’est pas devenu une théocratie ; ses citoyens, juifs et non juifs, conservent les mêmes droits, la même citoyenneté. Pourquoi donc la majorité de Benyamin Netanyahou a-t-elle voulu cette loi constitutionnelle? Pour préserver l’avenir. La gauche israélienne, longtemps triomphante, est désormais très minoritaire (elle ne représente plus que le tiers de la Knesset) et ne peut espérer son retour que par un changement de majorité – avec le renfort des voix arabes. D’où son projet d’un «État pour tous les citoyens», face à celui de la droite et du centre, l’État-nation du peuple juif. En Israël comme en Europe, l’opposition entre identité et multiculturalisme est aussi frontale. Opposition politique ici inséparable de l’évolution démographique.

Au lendemain de sa création, l’État d’Israël comptait près de 90 % de Juifs ; aujourd’hui, ceux-ci sont 75 %, contre 20 % d’Arabes (18 % musulmans, 2 % chrétiens), et demain? Les Arabes palestiniens répétaient aux Israéliens: nous vous submergerons grâce au ventre de nos femmes…

Il y a quinze ans en effet, le taux de fécondité des musulmanes atteignait les 4,6 enfants par femme – c’était un tiers de plus que les Israéliennes juives! Or depuis, ce taux de fécondité a fortement baissé tandis que celui des femmes juives n’a cessé d’augmenter (il est proche de 3,2, à comparer avec le taux français de l’ordre de 2). Que mesure un taux de fécondité? Le besoin de perpétuation et la foi en l’avenir d’un peuple. Les Israéliens ne veulent pas d’un État «binational», c’est ce qu’ils viennent de proclamer dans leur Constitution

http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2018/07/27/31002-20180727ARTFIG00067-francois-d-orcival-l-etat-d-israel-ne-sera-pas-binational.php

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Atta Farhat : “la Loi sur Israël-Etat nation du peuple Juif est nécessaire et juste”

July 29 2018, 06:57am

Posted by Pierre Lurçat

Atta Farhat : “la Loi sur Israël-Etat nation du peuple Juif est nécessaire et juste”

 

Le président du Conseil sioniste druze, Atta Farhat, déclare : “La Loi fondamentale Israël-Etat nation du peuple juif traite du statut des différentes communautés et pas des droits des personnes. Cette loi vient parachever la définition de l’identité de l’Etat d’Israël, et elle s’ajoute à un ensemble de lois fondamentales sur la liberté professionnelle et la dignité humaine. Israël, Etat-nation du peuple Juif, ce n’est pas nouveau, cela figurait déjà dans la Déclaration Balfour, dans la résolution sur le partage de la Palestine des Nations Unies (de 1947) et dans la Déclaration d’Indépendance. Cette loi ne contient aucun élément nouveau”.

 

“En tant que druze, je préfère vivre dans un Etat juif, plutôt que comme protégé de la Oumma musulmane. La loi sur Israël Etat-nation stipule que les droits nationaux en Israël n’appartiennent qu’aux Juifs… Elle ne dit pas que l’Etat n’appartient qu’au peuple Juif. Cette loi vise à freiner les aspirations nationales des Arabes, qui veulent créer ici un Etat musulman ou binational”.

 

 

Pourquoi les druzes protestent-ils contre cette loi?

 

“Certaines personnes qui sont désespérées tentent de faire porter la responsabilité de leurs problèmes au gouvernement… La gauche israélienne, encouragée et soutenue par le New Israel Fund, a trouvé un secteur [de la population] par le biais duquel elle peut attaquer le gouvernement de droite. C’est encore plus confortable pour eux de s’en prendre au gouvernement en utilisant les druzes, qui servent dans l’armée et sont loyaux envers l’Etat. L’incitation qu’ils ont menée en utilisant les Arabes n’a pas réussi, alors ils tentent d’inciter les druzes…”

 

 

Tsippi Livni avec un dirigeant druze

 

“C’est l’hypocrisie de la gauche. Je n’ai jamais vu un groupe de gens prêts à rejeter leurs propre identité et à porter atteinte à leur Etat uniquement pour obtenir un bénéfice politique, comme le fait la gauche [israélienne]. Ils sont prêts à tout, même au détriment de l’Etat d’Israël, du sionisme et du judaïsme”.

 

“Nous bénéficions ici de l’indépendance en tant que communauté, et sous un gouvernement musulman cela n’aurait jamais pu arriver. Les druzes qui vivent ici ne comprennent pas quelle est l’alternative… On incite la population druze en se servant des députés druzes, qui sont financés par le New Israel Fund.

 

Atta Farhat conclut : “Cette loi [sur Israël Etat-nation du peuple Juif] est nécessaire et juste, et même si ma vie est menacée, il est bon de mourir pour sa patrie [N.d.T. Il cite les mots fameux attribués à Yossef Trumpeldor] et je continuerai de porter son drapeau. Ceux qui s’opposent à la Loi se trompent. Les députés druzes font à présent le travail des Arabes, qui sont la cinquième colonne de l’Etat d’Israël, au lieu de faire leur travail et de représenter les habitants druzes pour résoudre les problèmes du secteur”.

 

Makor Rishon, 27.7.2018. Traduction P.Lurçat

 

 

Atta Farhat

 

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Comprendre le débat autour de la Loi fondamentale sur l’Etat-nation, par Pierre Lurçat

July 22 2018, 10:06am

Posted by Pierre Lurçat

Comprendre le débat autour de la Loi fondamentale sur l’Etat-nation, par Pierre Lurçat

Pour comprendre les tenants et les aboutissants du débat actuel sur la nouvelle “Loi fondamentale - Israël Etat-nation du peuple Juif”, il est essentiel de s’arrêter tout d’abord sur ses aspects juridiques et constitutionnels, avant d’envisager l’aspect politique de ce débat. Cette loi s’inscrit en effet dans la droite ligne de plusieurs autres textes fondamentaux, sur lesquels l’Etat d’Israël fonde son existence juridique en droit international. L’idée d’un “Etat-nation pour le peuple Juif” n’est pas une invention récente, motivée par d’étroites considérations politiciennes, comme voudraient le faire croire les opposants à la loi. Cette notion est un des fondements du sionisme politique et de l’existence de l’Etat d’Israël.

 

D’emblée, le mouvement sioniste a en effet revendiqué la création d’un foyer national, ou d’un Etat (la formule exacte ayant varié au fil du temps) pour le peuple Juif. Cette revendication a reçu un début de consécration avec la Déclaration Balfour en 1917, puis avec le mandat sur la Palestine, avant même la création de l’Etat d’Israël et le vote historique des Nations unies le 29 novembre 1947.

 

 

La déclaration Balfour


 

Comme le rappelle la Déclaration d’indépendance de l’Etat d’Israël, “En 1897, inspiré par la vision de l'État juif qu'avait eue Theodor Herzl, le premier congrès sioniste proclama le droit du peuple juif à la renaissance nationale dans son propre pays. Ce droit fut reconnu par la déclaration Balfour du 2 novembre 1917 et réaffirmé par le mandat de la Société des Nations qui accordait une reconnaissance internationale formelle des liens du peuple juif avec la terre d'Israël, ainsi que de son droit d'y reconstituer son foyer national…

 

Le 29 novembre 1947, l'Assemblée générale des Nations Unies adopta une résolution prévoyant la création d'un État juif indépendant dans le pays d'Israël et invita les habitants du pays à prendre les mesures nécessaires pour appliquer ce plan. La reconnaissance par les Nations Unies du droit du peuple juif à établir son État indépendant ne saurait être révoquée. C'est de plus, le droit naturel du peuple juif d'être une nation comme les autres nations et de devenir maître de son destin dans son propre État souverain”. (C’est nous qui soulignons).

 

La notion d’un Etat-nation pour le peuple Juif n’est donc nullement une invention du gouvernement actuel, motivée par des considérations politiques : elle a été réclamée par le mouvement sioniste depuis 1897, acceptée par le concert des nations en 1917 et en 1947 et consacrée par la proclamation de cet Etat le 14 mai 1948. Elle est juridiquement fondée, selon les termes de la Déclaration d’indépendance, tant sur le droit historique et naturel que sur le droit international.

 

 

La Déclaration d’Indépendance d’Israël


 

Pourquoi une Loi fondamentale sur l’Etat-nation du peuple Juif?

 

Dans ces circonstances, demandera-t-on, pourquoi était-il nécessaire de réaffirmer une réalité juridique et politique qui existe déjà, avec la sanction du droit international ? La réponse est double. Sur le plan international tout d’abord, la légitimité de l’Etat d’Israël a été remise en cause à de nombreuses reprises depuis 1947, au sein de l’ONU et des autres instances internationales. Rappelons la sinistre résolution “Sionisme = racisme” de 1975, de triste mémoire, et les multiples autres résolutions du même acabit, votées par l’Assemblée générale des Nations unies et par d’autres forums internationaux, comme l’UNESCO. Ces résolutions n’ont certes pas atteint la légitimité de l’Etat juif sur le plan du droit international, mais elles ont fragilisé son statut politique. Mais c’est aussi et surtout sur le plan interne à l’Etat d’Israël que la notion même d’Etat juif a été érodée au cours des dernières décennies.

 

C’est en effet la Cour suprême, instance judiciaire suprême de l’Etat d’Israël, qui s’est employée depuis le début des années 1990 et notamment depuis 1992 (date de la “Révolution constitutionnelle” initiée par le juge Aharon Barak), à porter atteinte au caractère juif de l’Etat d’Israël, pour le transformer en “Etat de tous ses citoyens”, au nom d’une conception partisane et radicale de l’égalité des droits de la minorité arabe. C’est ainsi que le consensus sioniste sur lequel reposait le fragile équilibre politique et social, à l’intérieur de la société israélienne a été remis en cause, au nom de cette idéologie d’inspiration post-sioniste et post-moderne.

 

Contrairement à une conception largement répandue, en effet, la nouvelle Loi ne vient pas bouleverser un équilibre existant, mais rétablir le statu quo ante : elle vient réaffirmer la notion d’Etat juif, contestée et fragilisée par ses adversaires au sein même de la société israélienne. C’est là que réside toute l’importance de cette Loi fondamentale sur Israël Etat-nation du peuple Juif. En vérité, comme nous le montrerons dans la suite de cet article, cette loi ne fait que réaffirmer, en grande partie, des principes qui figuraient déjà en toutes lettres dans la Déclaration d’indépendance de 1948. Mais cette réaffirmation est un acte juridique qui revêt une grande importance, à la fois symbolique et concrète.

 

Réaffirmer les principes de la Déclaration d’Indépendance

 

Dès lors que le consensus national autour des valeurs fondamentales du sionisme, exprimées dans la Déclaration d’indépendance, a été érodé et contesté de manière grandissante au cours des 25 dernières années, au point que de larges parties des élites médiatiques, juridiques ou universitaires israéliennes ne croient plus à ces valeurs, il importait que la Knesset réaffirme de manière forte ces valeurs essentielles, sans lesquelles l’existence d’Israël en tant qu’Etat juif est menacée. A quoi bon, en effet, réclamer de nos ennemis arabes qu’ils reconnaissent notre existence en tant qu’Etat juif, si cette même reconnaissance est contestée à l’intérieur même de l’Etat d’Israël et de la société juive?


La nécessité d’une réaffirmation des principes de la Déclaration d’indépendance par la Knesset est devenue une nécessité impérieuse, qui permettra à la majorité silencieuse de retrouver confiance en ses élus et en ses institutions. Face à la Cour suprême, qui s’est érigée ces dernières années en “pouvoir suprême” anti-démocratique, par un véritable putsch judiciaire, la Knesset se devait de reprendre la place qui lui revient dans le débat public : celle de représentant du peuple et de la vox populi. C’est la signification du vote de la Loi fondamentale sur Israël, Etat-nation du peuple juif. Elle vient redire, de la manière la plus solennelle et la plus incontestable, ce que chaque Juif sioniste, israélien ou non, ressent intimement dans son for intérieur : le peuple d’Israël est souverain sur sa terre.

 

Pierre Lurçat

 

NB Dans la suite de cet article, nous examinerons le statut juridique de la Loi fondamentale et montrerons comment elle réaffirme pratiquement les principes essentiels de la Déclaration d’indépendance.

 

Mon interview sur Radio Qualita au sujet de la Loi fondamentale "Israël Etat-nation"

https://www.youtube.com/watch?v=pH14MqX_0J8

 



 

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Reportage à la frontière de Gaza, avec les nouveaux gardiens d’Israël, par Pierre Lurçat

July 3 2018, 09:00am

Posted by Pierre Lurçat

Reportage à la frontière de Gaza, avec les nouveaux gardiens d’Israël, par Pierre Lurçat

 

“Il ne s’endort ni ne sommeille, le Gardien d’Israël” (Tehillim)

לג'ודית

 

J’ai quitté Jérusalem très tôt ce matin, avant 6 heures, pour être au point de rendez-vous à 9h30. La responsable du recrutement du “Shomer ha-hadash” (le “Nouveau gardien”) m’a donné rendez-vous au lieu dit du Ets ha-Boded ( “L’arbre solitaire”), promontoire d’où l’on a une vue sans pareil sur tout le nord de la bande de Gaza. Qui sont ces “nouveaux gardiens”? Ce ne sont pas des soldats d’une unité spéciale, comme celles qui se battent aujourd’hui contre le terrorisme des cerfs-volants incendiaires ou hier, contre celui des tunnels du Hamas. Non, les “nouveaux gardiens” sont les membres d’une organisation d’un genre bien particulier, qui a été créée il y a une dizaine d’années pour protéger les agriculteurs du nord d’Israël contre les vols de bétail.

 

Emblême du Chomer Ha-hadash


 

Quel rapport avec les événements actuels à Gaza? Avant de répondre à cette question, un petit rappel historique est nécessaire. Le Chomer est une des premières organisations juives d’auto-défense créée en Eretz-Israël en 1907. Ses membres se déplaçaient à cheval et étaient vêtus comme des bédouins.

 

 

Les chomrim appartiennent à l’histoire de renouveau du militarisme juif en Eretz-Israël, et constituent un jalon important dans la préhistoire de Tsahal. J’ajoute, pour la petite histoire, que mon grand-père en a fait partie, quelques années après son alyah, au lendemain de la Première Guerre mondiale.


 

Mon grand-père, Yossef Kurtz, en costume de Chomer

 

C’est dans un esprit similaire à celui des Chomrim de l’époque qu’une poignée de jeunes Israéliens ont créé le Chomer Ha-hadash en 2007. Pour protéger les agriculteurs de Galilée face à la recrudescence des vols de bétail et de matériel agricole, contre lesquels la police était largement impuissante, et retrouver l’esprit “halout’s” (pionnier) qui animait les premiers Chomrim. Je suis entré en contact avec eux après avoir lu un reportage dans Israel Hayom, et j’ai décidé de me rendre sur place, à la frontière de Gaza.

 

Ashkélon. Je monte dans le train en direction du Sud. Le wagon est à moitié vide. Quelques soldats endormis (pour récupérer un peu de sommeil en “posant la tête” selon l’expression d’argot consacrée). Il n’y a rien de l’atmosphère de tension qui caractérise le pays dans les périodes d’avant-guerre. Le terrorisme des incendies est une forme de guerre à basse intensité, et c’est sans doute une des raisons pour lesquelles Israël n’a pas su lui donner, pour le moment, la réponse appropriée. En attendant, ce sont les civils autour de Gaza qui en souffrent le plus, et ce sont d’autres civils, venus de tout le pays, qui ont décidé de se mobiliser pour aider à prévenir et éteindre le feu ennemi qui dévore les champs autour de Gaza.

 

Sdérot. La dernière fois que je me suis rendu à Sdérot, la ville la plus au sud d’Israël sur la côte méditerranéenne, c’était juste avant la “Hitnatkout” (le retrait de Gaza), lors des immenses manifestations qui ont presque réussi à empêcher cette décision catastrophique, dont Israël continue de payer le prix stratégique jusqu’à ce jour. Le terrorisme incendiaire n’est certes pas né hier (car il est aussi ancien que le conflit israélo-arabe). Mais c’est le retrait de Gaza, sur la décision du gouvernement d’Ariel Sharon, qui a installé le Hamas au pouvoir, on ne le rappellera jamais assez. Beaucoup d’esprits sagaces avaient à l’époque mis en garde contre cette décision funeste, mais comme l’avait expliqué un jour Max Nordau à Jabotinsky, “Israël n’apprend pas par l’expérience, il n’apprend que par les catastrophes”.


 

Max Nordau (1849-1923).

 

Nir-Am. Je suis accueilli par Maayan, responsable du Chomer Ha-hadash, sur le parking de la station d’essence du kibboutz Nir-Am. Elle est volontaire depuis 5 ans, et passe plusieurs nuits par semaine à faire des gardes, tout en travaillant la journée. Elle boîte légèrement, après s’être blessée en plongeant dans une source, sport favori de beaucoup de jeunes de son âge. Elle s’exprime avec simplicité, sans la moindre trace de pathos ou de grandiloquence, et moi je pense en l’écoutant, ‘quelle belle jeunesse nous avons…’ Menahem, l’autre volontaire qui doit partager la garde avec moi, nous rejoint et nous montons ensemble vers le promontoire de “l’arbre solitaire’. C’est un endroit très connu de la région, lieu de visite touristique d’où on jouit d’une vue extraordinaire sur tous les alentours, jusqu’à Ashkélon et aux faubourgs d’Ashdod au nord.

 

Mais quand la situation se réchauffe à la frontière de Gaza, c’est surtout un point d’observation stratégique. Notre mission est très simple : surveiller la moindre trace de fumée ou de feu, et prévenir immédiatement les responsables du Chomer Ha-hadash et les pompiers (ainsi que l’armée). Tout est apparemment calme dans notre secteur. Durant notre garde de 5 heures, nous n'entendrons que quelques détonations lointaines et n’apercevrons qu’une vague colonne de fumée à l’horizon. Ce calme apparent n’est pourtant qu’illusoire. Plus au Sud, où d’autres volontaires du Chomer Ha-hadash sont postés, des débuts d’incendie sont repérés et traités à temps.

 

Résultat de recherche d'images pour "‫ניר עם שריפות‬‎" Incendies de champs autour du kibboutz Nir Am

 

Menahem est un jeune retraité, qui était chercheur au ministère de l’Agriculture, spécialiste de l’eau. Il connaît bien la région, pour voir sillonné les kibboutz des environs dans le cadre de son travail. Volontaire du Chomer Ha-hadash depuis plusieurs années, il m’explique comment l’organisation, très modeste à ses débuts, s’est développée au point de devenir un acteur important de la lutte contre les vols et le vandalisme en zone agricole, qui travaille en collaboration étroite avec plusieurs organismes officiels, dont la police, le ministère de l’Agriculture et le KKL.

 

Notre conversation est interrompue par la visite d’un groupe bruyant de visiteurs : une vingtaine d’hommes, parlant moitié hébreu moitié arabe. Les plus jeunes ont l’air d’être des soldats d’une unité d’élite, tandis que les plus âgés ressemblent à des retraités de l’armée. Le chef du groupe parle de la situation à Gaza et à la frontière, avec beaucoup de détails, sans se soucier trop de notre présence (on nous a seulement demandé de ne pas les photographier). Ce sont apparemment, me dis-je en les écoutant, des membres d’une unité spéciale qui connaît bien la région, y compris de l’autre côté de la frontière. Un instant, j’ai l’impression d’être dans un nouvel épisode de la fameuse série Fauda.

 


 

Menahem me raconte ses voyages professionnels en Europe, aux Etats-Unis et au Japon. Il est légitimement fier du savoir-faire accumulé par Israël en l’espace de quelques décennies. Je lui parle de l’époque où les pionniers de l’agriculture en Eretz-Israël allaient faire leurs études d’agronomie en Europe (et en France notamment, à l’université de Nancy et de Toulouse, où étudia la poétesse Rahel). Aujourd’hui, Israël vend son savoir-faire en matière agricole (et d’irrigation notamment) dans le monde entier. Menahem connaît très bien le sujet. Il me parle aussi des Chinois qui se sont mis à l’étude du Talmud, convaincus que c’est là que réside le secret de la réussite israélienne… Le secret de notre peuple ? Je ne m’aventurerai pas à donner d’explication. D’autres l’ont fait mieux que moi. Parmi eux, le prophète Bilaam, évoqué dans la parasha que nous avons lue samedi dernier. « Oui, je le découvre, ce peuple, il vit solitaire, il ne se confondra point avec les nations. » (Nombres 23:9).

 

Notre garde s’est achevée sans incident particulier et j’ai repris la route de Jérusalem. En arrivant en fin d’après-midi, j’entends à la radio que plusieurs incendies ont éclaté à la frontière de Gaza et qu’ils ont été maîtrisés. Je pense aux jeunes membres du Chomer Ha-hadash et aux volontaires, jeunes et moins jeunes, venus des quatre coins de notre petit et grand pays pour protéger les champs autour de Gaza.

P. Lurçat

NB Vous pouvez aider le Chomer Ha-hadash par vos dons. https://eng.hashomer.org.il/

 

Mon nouveau livre, Israël le rêve inachevé, paraîtra à la rentrée aux éditions de Paris.

 

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Demophrénia, de Paul Eidelberg : Israël et la maladie de la démocratie, par Pierre Lurçat

June 28 2018, 05:49am

Posted by Pierre Lurçat

Demophrénia, de Paul Eidelberg : Israël et la maladie de la démocratie, par Pierre Lurçat

 

Demophrénia : Israël et la maladie de la démocratie, par Pierre Lurçat


 

Lorsque l’une des “plus puissantes armées du monde” se retrouve quasiment impuissante, face à quelques dizaines de terroristes armés de cerfs-volants et de ballons incendiaires, chacun peut comprendre que le problème fondamental auquel Israël est confronté aujourd’hui n’est pas militaire, mais avant tout moral. Il s’agit essentiellement d’un problème de perception de soi et d’aveuglement volontaire. On peut le définir dans les termes suivants : Israël ne sait pas comment triompher du Hamas, parce qu’il est dépourvu de la conviction intime, tant morale que politique, que la victoire est possible et nécessaire. Un livre de Paul Eidelberg, paru il y a plus de 20 ans, peut nous aider à comprendre pourquoi.

 

Il est regrettable que le nom de son auteur soit quasiment inconnu du public francophone. Ce spécialiste de philosophie politique, qui a enseigné à l’université Bar Ilan, est en effet un des plus fins observateurs critiques de la vie politique israélienne. Il a grandi aux Etats-Unis, où il a été l’élève de Leo Strauss. Dans un livre autobiographique, il relate comment il a découvert, après son alyah en 1976, à quel point l’université israélienne était perméable aux conceptions occidentales et notamment au relativisme moral, et comment Israël était ainsi amené à douter de la justesse de sa cause face à ses ennemis.

 

La thèse centrale de son livre Demophrenia est que le système démocratique souffre d’une maladie congénitale, qui consiste à traiter comme égales des choses qui ne le sont pas, ou plus précisément à “appliquer les principes démocratiques  d’égalité et de liberté à des conflits idéologiques, dans lesquels une de ces parties rejette ces mêmes principes”. En d’autres termes, et pour dire les choses plus simplement, Eidelberg analyse et critique l’attitude des pays démocratiques, confrontés à des ennemis qui ne le sont pas, qui s'obstinent à les traiter comme s'ils leur étaient semblables.

 

Les exemples sont nombreux dans l’histoire du vingtième siècle, mais c’est le cas d’Israël qui a intéressé le plus Eidelberg. Pourquoi l’Etat juif est-il incapable de vaincre ses ennemis, alors même qu’il jouit d’une supériorité militaire et morale ? Qu’est-ce qui empêche Israël de transformer ses victoires militaires en victoires politiques? Cette question récurrente depuis 1967 a pris une acuité brûlante à l’époque des accords d’Oslo. Les analyses de Paul Eidelberg s’appuient non seulement sur la philosophie politique, qu’il a étudiée à la meilleure école, celle de Leo Strauss, mais aussi sur les sources juives qu’il a reçues de son maître aux Etats-Unis, le rav Chaim Zimmerman.


 

Leo Strauss et Rabbi Chaim Zimmerman

 

La politique des “territoires contre la paix” mise en pratique par les gouvernements israéliens de droite comme de gauche n’était pas seulement, rappelle Eidelberg, une victoire de la ruse arabe et soviétique. Elle était avant tout la conséquence d’un “défaut fondamental de la mentalité démocratique des élites politiques et intellectuelles d’Israël”. Demophrenia est une tentative brillante pour tenter d’analyser et de comprendre ce défaut fondamental. (J’ajoute que je me suis moi-même intéressé à cette question cruciale, et ai tenté d’y apporter des éléments de réponse dans mon livre La trahison des clercs d’Israël, paru en 2016 et écrit avant de connaître les travaux de Paul Eidelberg).

 

Le slogan “les territoires contre la paix”, qui est devenu un leitmotive de la politique israélienne depuis Camp David (rappelons que c’est un gouvernement de droite qui a mis en oeuvre cette politique pour la première fois), repose sur une vision fondamentalement erronée des rapports entre Israël et le monde arabo-musulman. Elle comporte en effet, explique Eidelberg, un mépris et une totale méconnaissance de la culture musulmane et arabe, dans laquelle la notion même de paix (au sens occidental d’une situation durable et idéale) n’existe pas ! *

 

Les “territoires contre la paix” : de Camp David à Oslo


 

Dans des pages éclairantes de son livre, Paul Eidelberg explique ainsi comment l’Occident a cru qu’il était possible de résoudre le conflit israélo-arabe, en lui appliquant les concepts de civilité, de primauté de l’individu sur le groupe et de liberté d’expression - notions inhérentes à la démocratie et essentielles pour notre civilisation, qui n’ont pas d’équivalents dans le monde musulman aujourd’hui. “L’humilité et la mentalité cherchant à s’évader du réel (escapist mentality) des dirigeants sionistes et leur incapacité à répondre de manière appropriée à l’hostilité arabo-islamique est typique de l’humanisme laïque. On pourrait même qualifier cette mentalité de ‘christianisme sécularisé’, car elle prône l’effacement de soi et la bienveillance envers ceux qui vous haïssent”. C’est précisément cette mentalité et cette attitude de fuite du réel qu’il explique par le concept de demophrénie. “Les personnes atteintes de demophrénie ont tendance à s’identifier à leurs ennemis et à céder à toutes leurs demandes”.

 

Analysant l’attitude de plusieurs gouvernements israéliens depuis 1948 face à l’hostilité arabe, Paul Eidelberg écrit encore : “le gouvernement d’Israël est paralysé par des contradictions exacerbées. Il tente d’échapper à l’anarchie en recourant à la logique de la symétrie [entre Israël et ses ennemis]. Mais la réalité, celle de l’islam, se refuse à conclure la paix avec ce gouvernement demophrénique. Les actes occasionnels d’auto-affirmation de ce dernier apparaissent comme des flashes “d’assymétrisation”, dans un monde plongé dans une ‘unité symétrique’. Isolé dans un océan d’hostilité arabe, Israël s’extasie sur son image au sein du monde démocratique. L’ironie atteint des proportions bibliques : du fait que le gouvernement demophrénique d’Israël ne peut pas fonder sa politique envers les Arabes sur la vérité, il est constamment la victime de mensonges. Aspirant à l’acceptation des nations, Israël est condamné sans relâche par les Nations unies”.

 

Incendie à la frontière de Gaza


 

Ces lignes écrites il y a plus de vingt ans ans n’ont rien perdu de leur actualité. Les récents événements à la frontière de Gaza illustrent parfaitement le concept de demophrénie créé par Eidelberg pour décrire l’attitude du gouvernement israélien (qu’il s’agisse de celui d’Itshak Rabin à l’époque, ou de B. Nétanyahou aujourd’hui). Face à des ennemis voués à sa destruction, Israël continue, aujourd’hui comme hier, de tergiverser et d’hésiter entre inaction et auto-défense, entre l’attentisme et la riposte, entre la volonté illusoire de plaire aux nations et la nécessité impérieuse de contre-attaquer et de vaincre ses ennemis.

 

Pierre Lurçat

 

*  Voir sur ce sujet, en français, les analyses classiques de B. Lewis, Le langage politique de l’islam, d’Emmanuel Sivan, Mythes politiques arabes, et bien entendu les travaux pionniers de Bat Ye’or.

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Chanter la Hatikva dans les universités est vital pour Israël, Daniel Gordis

June 21 2018, 13:30pm

Posted by Daniel Gordis

Chanter la Hatikva dans les universités est vital pour Israël, Daniel Gordis

 

Daniel Gordis, vice-président et chercheur à la Faculté Shalem de Jérusalem, note avec inquiétude que certaines universités israéliennes ont renoncé à chanter la Hatikva, l’hymne national israélien. Pour lui, "l'ouverture intellectuelle ne doit pas conduire à l'abaissement de soi. Prendre soin des Arabes ne doit pas se faire au détriment de l’engagement à reconstruire le peuple juif dans sa patrie ancestrale". 


« Année après année, une université israélienne annonce que l'une de ses facultés ne chantera pas la Hatikva. Cette année, c’est l’université de Tel Aviv qui a fait cette annonce. L'an dernier, c'était l'Université hébraïque de Jérusalem, et quelques années plus tôt, l'Université de Haïfa. La raison invoquée, sans surprise, était que les professeurs des facultés de sciences humaines ne voulaient pas mettre les diplômés arabes ou leurs familles dans une situation… inconfortable. C’est un argument dangereux. Les Arabes israéliens savent bien qu'ils vivent dans un État juif. Et malgré toute la complexité qu'implique pour unArabe de vivre dans un État expressément juif, personne ne doit être surprisque l'hymne national soit chanté lors d'une cérémonie de remise des diplômesdans une université publique. Lorsque Dorit Beinisch a démissionné de la Cour suprême en 2012, les juges se sont réunis, et à l'issue d'une soirée émouvante au cours de laquelle elle a évoqué la mort de ses grands-parents pendant laShoah, ils ont chanté la Hatikva.
L'un des juges présents était Salim Joubran, un Arabe israélien. Les caméras de l'événement l'ont montré se tenant debout, respectueusement, mais ne chantant pas. Comme on pouvait s'y attendre dans la société israélienne, certains dirigeants de droite vilipendèrent Joubran, mais la plupart des Israéliens eurent de la sympathie pour lui et de l’admiration pour la dignité avec laquelle il se comporta. Après tout, de nombreux Israéliens se demandaient pourquoi un Arabe israélien (chrétien maronite) chanterait un hymne qui commence par : "Tant que le coeur intérieur, une âme juive aspire" et continue "Notre espoir n'est pas encore perdu, d’être une nation libre dans le pays de Sion... » Même les autres juges, y compris les conservateurs, prirent la défense de Joubran. "Les citoyens arabes ne devraient pas être tenus de chanter des mots qui ne parlent pas à leurs coeurs et ne reflètent pas leurs racines", déclara le juge Elyakim Rubinstein.
Les étudiants arabes diplômés des universités financées par l'Etat pourraient donc suivre le modèle de Joubran, et s'ils veulent demander (de façon légitime) à Israël d'être plus attentifs à ses minorités, ils seraient bien mieux avisés de rester silencieux pendant la Hatikva, que de se joindre au chant d'Arik Einstein "Vous et moi changerons le monde" (que la faculté des sciences humaines de l'Université de Tel Aviv a choisi de chanter au lieu de Hatikva) où ils ne furent pas du tout remarqués.

Le fait de ne pas chanter la Hatikva lors d’une cérémonie universitaire nationale prend ses racines dans un phénomène plus ancien que l'Etat lui-même. Judah Magnes, qui fut le premier recteur de l'Université hébraïque et, plus tard, président de cette université, futl'un des leaders du mouvement Brit Shalom, un mouvement qui s'opposa largement à la création d'un Etat juif. Pourtant, l’idée d’un Etat binational (comme l'histoire des juifs en Afrique du Nord le dira plus tard) fut un pétard mouillé. Comment une minorité juive aurait-elle vécu dans un tel Etat ? Certains décideurs sionistes trouvèrent l'idée si absurde qu'ils ne crurentjamais que Magnes et ses collègues avaient réellement l'intention de créer un État binational. Au contraire, déclara Berl Katznelson, parmi les géants intellectuels du sionisme ouvrier, l'idée d'un Etat binational n'était autre qu'un subterfuge. Brit Shalom, pensait-il, cherchait vraiment la création d'un Etat arabe. Que l’interprétation de Katznelson soit correcte ou non, elle indique à quel point Magnes était loin du courant principal, ce qui explique le fait que Magnes ait servi pendant de nombreuses années à la direction de l'Université hébraïque.
Plus étonnant encore que le fait que les facultés des sciences humaines aient décidé de ne pas chanter la Hatikva, c'est la nonchalance relative des Israéliens qui ont appris cette nouvelle. Peut-être considèrent-ils que les universitaires ne sont pas à prendre au sérieux, qu’ils sont une classe intellectuelle complètement déconnectée du peuple. Peut-être. Mais la nonchalance est dangereuse, car elle permet de légitimer la délégitimation de l'idée fondatrice d'Israël, la création d'un État qui serait spécifiquement dédié à l'épanouissement d'un peuple, le peuple juif.
Regarder Israël à travers un objectif américain, jeffersonien, c'est voir un pays étrange. Mais c'est justement cela. Israël n'a jamais été destiné à être une démocratie libérale créée à partir du moule américain. C'est une démocratieethnique, quelque chose d'entièrement différent. Les premiers mots de la Déclaration d'Indépendance que Jefferson écrivit furent "Quand, au coursdes événements humains", tandis que la déclaration d'Israël commence par"En terre d'Israël, le peuple juif est né". Tout le reste n’est que commentaire.

Alors oui, il sera toujours difficile d'être un Arabe dans un Etat juif, cela oblige à la fois les Arabes et les Juifs à avoir une pensée créative nuancée. Abandonner l'hymne, c'est admettre qu'on ne peut plus défendre l'idée de ce qu'est ce pays. Abandonner la Hatikva, c'est oublier volontairement le désir de liberté qui a propulsé le sionisme, à l’origine de la création de notre Etat. Abandonner l'hymne, ce n'est pas être inclusif, mais détruire l'idée même pour laquelle Israël existe. Une fois que cette idée aura disparu, pour quel motif resterions-nous ici ? Quand les institutions israéliennes d'enseignement supérieur expriment un malaise apparent avec l'idée d'un Etat juif que notre hymne incarne, ce n'est pas un vague écho, mais une menace pour la pérennité de l’ethos national et la survie du pays. "Mais que pouvons-nous faire ?" répondent les administrateurs des universités. La faculté a voté et la haute administration dit qu'elle n'a aucun contrôle sur ces décisions facultaires. C'est peut-être vrai, mais leur réponse révèle un aveuglement conscient face à ce que les politologues appellent le «soft power».

 

La réponse, au moins pour certains d'entre nous, fut de créer une institution d'enseignement supérieur intellectuellement ouverte, politiquement diversifiée et, sans réserve, sioniste. Lorsque nous avons lancé la faculté Shalem il y a cinq ans, nous avions parié que si les étudiants les plus brillants d'Israël se réunissaient pour lire ensemble Homère et Platon, Aristote et Maïmonide, les journaux fédéralistes et les grands penseurs sionistes, nouspourrions aider à créer la génération des futurs dirigeants israéliens qui ne prendraient pas refuge derrière des slogans sionistes fatigués, mais qui pourraient s'engager dans un discours continu sur la liberté et l'appartenance, le particularisme tempéré par l'universalisme, la fierté nationale jamais en contradiction avec la sensibilité morale.
 

L'ouverture intellectuelle ne doit pas conduire à l'abaissement de soi. Prendre soin des Arabes ne doit pas se faire au détriment d'un engagement à réinventer et reconstruire le peuple juif dans sa patrie ancestrale. C'est pourquoi, le 28 juin, lorsque nos élèves et leurs familles se rassembleront pour les exercices de début de Shalem, nous chanterons la Hatikva avec fierté en assumant toute la complexité que cela représente.

Son livre le plus récent est « Israel: A Concise History of a Nation Reborn ».

 

          Source Thetimesofisrael

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