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Olivier Ypsilantis - Mon intérêt pour les choses juives – 4/5

August 19 2021, 10:53am

Posted by Olivier Ypsilantis

Olivier Ypsilantis - Mon intérêt pour les choses juives – 4/5

Pierre Lurçat : Vous avez visité Israël plusieurs fois et séjourné dans des bases de Tsahal en tant que volontaire de Sar-El. Votre intérêt pour la cause juive n’est pas purement livresque et intellectuel. Qu’est-ce qui vous attire en Israël ?

 

Olivier Ypsilantis : Je me suis toujours rendu en Israël pour y faire quelque chose, et je m’y rendrai toujours avec la même intention. Israël n’est pas pour moi un pays de tourisme. Je n’y viens pas simplement pour marcher sur les pas de Jésus ou pour visiter le tombeau de Rachel ; et je respecte infiniment Jésus et Rachel. Je pourrais me contenter de faire du tourisme aux Seychelles ou à Bali, mais je n’ai pas de temps à perdre et aller promener ma personne sous les cocotiers le long d’une plage ne me convient qu’un jour et encore.

En Israël, la présence juive m’intéresse plus que les autres. Je m’intéresse bien sûr aux autres présences dans cet espace plus disputé que n’importe quel espace au monde et où tout est tellement imbriqué. Mais j’insiste, en Israël la présence juive m’intéresse plus que toutes les autres. A ce propos, peu savent (ou ne veulent pas savoir) que la présence juive sur cette terre a été continue, plus ou moins marquée (au plus bas durant la période chrétienne), mais continue. L’exil n’a pas vidé Israël de ses Juifs, avec une période d’environ deux mille ans d’absence totale puis un retour soudain après la Shoah. Cette image fausse où la propagande et l’ignorance se donnent la main doit être détruite. Presque personne n’a entendu parler du Yichouv, de ce proto-État qui a précédé et annoncé l’État d’Israël. Presque personne ne connaît l’histoire des Juifs de Safed et de Tibériade. Presque personne ne connaît la fabuleuse histoire de Doña Gracia (Gracia Nasi), marrane d’origine espagnole née à Lisbonne au début du XVIe siècle. Et ainsi de suite.

Et en Israël, c’est surtout l’Israël d’aujourd’hui que j’aime, Israël bien vivant, un pays très ancien mais qui n’a pourtant que quelques décennies. J’aime Jérusalem mais je préfère Tel Aviv. Cette préférence ne s’appuie en rien sur une opposition laïcité/religion. J’ai exposé (trop brièvement il est vrai) mon immense intérêt pour le judaïsme. Ma préférence prend appui sur autre chose. Tel Aviv est une ville infiniment émouvante. C’est une ville exclusivement juive, née du sable, de rien, de presque rien. Certes, il y avait cette ville antique, Jaffa, contre laquelle Tel Aviv a pris appui pour se développer vers le nord, jusqu’au fleuve Yarkon et au-delà, mais cette ville est bien née de presque rien. Il faut visiter le musée du peintre Reuven Rubin, à Tel Aviv, pour apprécier la naissance et la croissance de cette ville.

 

Les débuts de Tel Aviv par Reuven Rubin

 

Il y a longtemps, et avant même d’entreprendre mes études, que le Bauhaus me passionne. Le Bauhaus est le phénomène artistique le plus important dans l’Europe du XXe siècle, et je pèse mes mots. Le Bauhaus en architecture a pensé comme personne l’union de la fonctionnalité et la beauté par les seules proportions. Les Juifs de ces années, en Israël, n’avaient pas de temps et d’argent pour les fioritures. J’ai rendu compte sur ce blog d’une passionnante lecture, un must me semble-t-il sur le sujet : « Tel Aviv, naissance d’une ville 1909-1936 » (chez Albin Michel, dans la collection Présences du judaïsme). Cette ville est pleine de constructions directement issues de l’enseignement du Bauhaus. Tel Aviv a d’abord été une ville ashkénaze, conçue et édifiée par des Juifs allemands.

Je me souviens de mon plaisir à me promener dans le quartier de Montefiore et dans certains quartiers limitrophes. Des souvenirs d’Athènes ne cessaient de me revenir. Athènes ! Athènes est elle aussi une ville orientale, de la Méditerranée orientale, comme Tel Aviv. Il faut avoir marché longuement dans le quartier de Monastiraki (Μοναστηράκι) à Athènes et de Montefiore à Tel Aviv pour être saisi par une même ambiance.

Mais j’en reviens à votre question. J’ai très vite éprouvé que mon intérêt pour Israël et la cause juive ne pouvaient s’en tenir à une connaissance livresque. J’ai toujours voulu appréhender Israël en y voyageant et, une fois encore, pour y faire un peu de tourisme mais pas que du tourisme. Dans mes jeunes années, soient les années 1980, j’ai travaillé dans des kibboutz, non parce que c’était à la mode mais par sionisme. Il me semble que je suis né sioniste, que je suis tombé dans une potion magique de sionisme. Il est vrai que le père d’Astérix était juif et ses aventures sont aussi juives que celles que rapporte la Bible.

J’ai donc travaillé dans des kibboutz, un sur le Golan, très Likoud, l’autre sur la Ligne verte, un kibboutz du Nahal (l’histoire du Nahal est passionnante). Dans ce deuxième kibboutz, après le travail, je me rendais tous les jours dans les villages arabes des environs afin de mieux connaître le pays. Je ne vais pas rentrer dans le détail de ces rencontres, fort riches, mais, simplement, travaillant avec des Juifs, je trouvais tout naturel d’aller parler avec les Arabes qui vivaient à de l’autre côté de l’enceinte. Je me souviens d’être parti en excursion avec trois Arabes dans les collines environnantes. L’un d’eux rêvait de venir en France, et savez-vous pourquoi ? Pour visiter les châteaux de la Loire ! Il me raconta l’histoire de plusieurs de ces châteaux et me décrivit leur architecture ; je l’écoutais bouche bée. Mais c’est du kibboutz sur le Golan que je garde les souvenirs les plus forts. La vie y était rude mais une fois encore je me voyais dans le désert des Tartares. Il faisait froid. Au loin, les monts de Syrie étaient enneigés. Nous étions en 1982, peu après Sabra et Chatila. Un Juif de France, un Alsacien, m’avait accueilli en parka, fusil d’assaut en bandoulière. Il fulminait contre son pays et ses médias qui envoyaient toute la merde sur Israël. Je lui expliquai que si j’étais ici, en Israël, dans ce kibboutz, c’est aussi parce que je ne prêtais aucune valeur à ces médias, que je flairais le mensonge. La nuit, mon lit de camp tremblait parfois. Des chasseurs- bombardiers frappaient là-bas, du côté du proche Liban. Le ciel s’illuminait par à-coups. J’étais un peu inquiet mais, une fois encore, je savais que j’étais là où je devais être. J’ai toujours eu cette certitude en Israël, dans les kibboutz et plus encore au Sar-El.

Je ne sais ce qui m’attire en Israël. Peut-être suis-je victime des Sages de Sion ou d’un philtre d’amour, je ne sais. Plus sérieusement. Pour moi Israël c’est d’abord sa population, toutes ces femmes et tous ces hommes que j’ai rencontrés dans les kibboutz puis à Tsahal. J’ai par ailleurs beaucoup circulé dans ce pays, du Golan au Néguev. Ce qui m’attire en Israël ? Il me faudrait un livre pour répondre à cette question. Vous savez, il circule tellement d’idées fausses au sujet de ce pays. Israël est probablement le pays dont on parle le plus en Europe, et trop souvent avec un mélange de prétention et d’ignorance, deux « qualités » qui se tiennent par la main. Il n’y aucun rapport entre l’information mainstream au sujet de ce pays et la réalité de ce pays qui ne peut s’appréhender qu’en y voyageant et en y travaillant, en y voyageant de préférence hors de tout voyage organisé. Le travail de connaissance par les livres, les documents et Internet (l’ordure y traîne mais on trouve aussi d’excellentes choses dans cette grande bibliothèque virtuelle) est important, très important, mais Israël est aussi un pays qu’il faut parcourir et où il est bon d’avoir une activité afin de mieux comprendre ce pays très particulier et très complexe. Je préfère me faire dorer la pilule ailleurs qu’en Israël. Il y a trop à faire là-bas, trop à apprendre, tant de personnes à rencontrer, à interroger, à écouter, et pas uniquement des Juifs. 20 % de la population d’Israël est arabe, des Chrétiens et des Musulmans, et je passe sur d’autres minorités non-juives mais ayant la nationalité israélienne. Israël est un pays formidablement divers et pour deux raisons : premièrement, celle que je viens d’énoncer (il n’y pas que des Juifs en Israël) ; deuxièmement, le monde juif en Israël est au moins aussi divers et donc aussi riche que le monde juif en diaspora – et cette richesse se trouve concentrée dans un petit pays. Je rappelle qu’Israël est à peine plus grand que deux-trois départements français.

Sur les bases de Tsahal, j’ai travaillé avec des Juifs et des non-Juifs venus de (presque) partout. Certains Juifs étaient nés dans le pays (les Sabras), d’autres y avaient émigré et de ce fait n’avaient pas le même niveau d’hébreu, l’hébreu n’étant pas leur langue maternelle. J’ai travaillé avec des Bédouins dans un parc de Merkava II (chaleur suffocante), dans un hangar (chaleur non moins suffocante) pour y détruire des masses de documents avec des Béta Israël. A cette occasion, j’ai appris qu’il fallait éviter de les désigner par Falacha (qu’ils jugent péjoratif). J’ai fait équipe avec un Juif de Bombay, un officier druze, un Juif roumain. J’ai beaucoup sympathisé avec ce dernier. Il m’apprenait des mots d’hébreu, je lui apprenais des mots d’espagnol et de portugais. Je me souviens qu’il avait particulièrement apprécié les mots « amapola », « mariposa » et « borboleta » qu’il s’amusait à répéter. Un soir, j’ai longuement conversé avec un Juif originaire d’Istanbul. J’en garde un souvenir très ému car il s’exprimait en ladino et moi en espagnol, en castillan pour être plus précis. Il n’avait pas étudié le castillan, je n’avais pas étudié le ladino mais nous nous sommes compris et sans jamais nous efforcer. Pour faire simple, le ladino est à l’espagnol ce que le yiddish est à l’allemand. Mais je force probablement la note : il me semble que le ladino est plus proche de l’espagnol que le yiddish ne l’est de l’allemand. A ce propos, il y a peu, j’ai trouvé sur Internet un article en ladino, sur eSefarad, un article intitulé « Muestra lingua : Leon Pinsker por Edmond Cohen » dans lequel j’ai eu le plaisir de lire : « Un syerto Olivier Ypsilantis, en el sityo zakhor on line, a eskrito sovre el livro de Pinsker un artikolo interesante sovre el kual yo lavori. Asigun Ypsilantis, i yo so de akodro kon el, este teksto es “uno de los mas ermozos del syonismo” ». La fréquence de la lettre k saute à la vue car elle est très rare en espagnol.

C’est ce qui m’intéresse le plus en Israël, cette unité dans cette diversité. Lorsque j’étais en Israël, dans les années 1980, la population différait grandement de celle d’aujourd’hui, notamment avec l’arrivée de ces très nombreux Juifs russes et ukrainiens, depuis les années 1990, suite à l’effondrement de l’Union soviétique et son empire. Il est connu qu’un assez grand nombre d’entre eux (un tiers environ) ne sont pas vraiment juifs mais qu’importe : ils le sont devenus et comptent parmi les défenseurs les plus déterminés d’Israël à ce qu’on m’a dit.

Les Juifs constituent un peuple, en aucun cas une race. Et je me moque de savoir si un tel descend d’Abraham, d’une tribu d’Israël qui ne soit pas l’une des dix tribus perdues ou de convertis (avec notamment cette histoire de Khazars qui a été plus ou moins arrangée par Arthur Koestler (voir « La Treizième tribu ») puis par Shlomo Sand pour étayer ses mensonges. Les Juifs forment un peuple et non une race ; un peuple, soit une entité plus ample et, dirais-je, plus consistante qu’une race.

J’aime par ailleurs les paysages d’Israël. Certains d’entre eux pourraient être espagnols. A ce propos, les techniques agricoles les plus avancées au monde (à commencer par l’irrigation) sont espagnoles et israéliennes. L’Espagne a longtemps été une terre privilégiée pour les Juifs et leur expulsion de la péninsule (n’oublions pas le Portugal) a été une catastrophe majeure pour le monde juif.

 (à suivre)

Olivier Ypsilantis

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La Houtspa sans limite de la Cour suprême israélienne

July 15 2021, 10:48am

Posted by Pierre Lurçat

La Cour suprême d’Israël a dernièrement pris deux décisions très remarquées sur deux dossiers importants et lourds de conséquences. Le premier, la Loi “Israël - Etat-nation du peuple Juif”, a fait l’objet d’une décision de 10 juges sur 11 (l’avis minoritaire étant celui du Juge arabe chrétien Georges Kara), qui a rejeté les pourvois formés contre cette Loi fondamentale par des associations antisionistes, soutenues par l’Union européenne notamment.

 

Dans la deuxième décision, emblématique elle aussi, la Cour suprême a fait droit au recours des associations LGBT en se prononçant en faveur de la GPA pour les couples homosexuels, plaçant ainsi Israël en pointe des pays qui autorisent cette pratique controversée (qui est interdite en France). J’ai évoqué ces deux décisions au micro de Daniel Haïk de Studio Qualita.

 

 

Le point commun entre ces deux décisions, apparemment contradictoires, est que la Cour suprême s’érige dans les deux cas en arbitre ultime - et pour ainsi dire exclusif - du débat public et politique sur des sujets cruciaux, qui touchent aux valeurs et aux normes fondamentales de l’Etat et de la société israélienne, valeurs sur lesquelles il n’existe aucun consensus.

 

En l’absence de tout consensus - et en l’absence même d’une Constitution qui l’autoriserait à mener un “contrôle de constitutionnalité” - la Cour suprême s’est ainsi arrogée, avec une arrogance inégalée dans aucun autre pays - le droit d’invalider des lois de la Knesset (y compris des Lois fondamentales), sans aucun mandat légal pour le faire (comme le reconnaît dans son avis un des juges ayant participé à la décision sur la Loi Israël Etat-nation, David Mintz).

 

L’actuelle présidente de la Cour Suprême, Esther Hayut:

Une “houtspa” sans limite

 

Poursuivant sur la lancée du Juge Aharon Barak (1), instigateur de la “Révolution constitutionnelle” dans les années 1990 et partisan d’un activisme judiciaire sans limite, la présidente Esther Hayout entend ainsi préserver le pouvoir exorbitant que s’est arrogée la Cour suprême et développer la politique arrogante par laquelle celle-ci s’est transformée en premier pouvoir, au mépris de la Knesset, du gouvernement et des principes fondamentaux de toute démocratie authentique.

P. Lurçat

 

(1) Sur le juge Barak et sa “Révolution constitutionnelle”, je renvoie le lecteur aux articles suivants: “Aharon Barak et la religion du droit”. (partie I) et “Le fondamentalisme juridique au coeur du débat politique israélien” (Partie II), ainsi qu’à mon intervention au Colloque de Dialogia “Où va la démocratie israélienne?”, devant faire l’objet d’une publication dans le prochain numéro de la revue Pardès.

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VIENT DE PARAÎTRE - Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain

EN LIBRAIRIE - Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain

Éditions l’éléphant - Jérusalem 2021. En vente dans les librairies françaises d’Israël et sur Amazon. Les demandes de service de presse doivent être adressées à pierre.lurcat@gmail.com

 
 

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Pourquoi les médias ‘mentent comme ils respirent’ à propos d’Israël : La construction de l’événement dans le discours anti-israélien et antisioniste

June 29 2021, 12:43pm

Posted by Pierre Lurçat

 

Dans l’extrait qui suit de mon livre Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain, qui vient de paraître, j’analyse la distinction faite par Éric Marty à propos du récit de Sabra et Chatila par Jean Genet,  entre le fait et l’événement. Cette distinction est essentielle pour notre compréhension du discours et des mythes antisionistes.

 

Grâce à Genet, nous avons compris… ce qu’était un événement, nous avons compris qu’un événement était tout le contraire d’un fait, nous avons compris que pour qu’un événement soit, il suppose de porter en lui une dimension métaphysique - il doit, comme phénomène, toucher à l’essence de ce qu’il représente

Eric Marty

 

Tout le contraire d’un fait” - cette définition de l’événement s’applique parfaitement au récit médiatique du conflit israélo-arabe, dans lequel les faits sont constamment déformés, mutilés, obscurcis ou escamotés. Mais il ne s’agit pas tant d’une volonté délibérée de tromper (qui existe parfois), que d’une conséquence presque inévitable de la posture médiatique. En effet, comme l’écrit Marty à un autre endroit, “la déformation, la désinformation sont pratiquement totales, aussi naturelles aux médias... que le fait de respirer”. 

 

Si les médias, selon Eric Marty, “mentent comme ils respirent” à propos d’Israël, ce n’est pas, bien entendu, parce que les journalistes seraient des menteurs invétérés, mais plus prosaïquement, parce qu’ils ne se préoccupent guère des faits. lls cherchent - ou plutôt ils créent - des événements, c’est-à-dire des faits qui rentrent dans leur grille de lecture. Tout fait qui n’entre pas dans leur grille de lecture, qui ne lui correspond pas, ou qui la contredit, est évacué, éliminé, ou encore transformé et travesti pour lui correspondre. 

 

Les médias “mentent comme ils respirent” : Photo InfoEquitable

 

Ainsi, dans l’exemple de l’assassinat délibéré de la petite Shalevet Pass - le fait de cet assassinat était éliminé, pour faire place à l’événement que constituait, aux yeux du journal Le Monde ou de l’Associated Press, les “obsèques de la haine” ou les “appels à la vengeance” des Juifs de Hébron. L’événement, comme dit Marty de manière saisissante, est “le contraire d’un fait”. Dans les faits, un sniper palestinien tue un bébé juif israélien. Mais ce fait, apparemment limpide dans sa cruauté et sa barbarie, donne lieu pour les médias à la création d’un événement contraire, qui est le prétendu appel à la haine des Israéliens. 

 

Bien entendu, on pourrait offrir une lecture moins radicale du travail médiatique, en expliquant que les médias choisissent et sélectionnent les “faits”. Selon cette autre lecture, l’événement serait simplement un fait choisi et privilégié par les médias, et non plus le contraire d’un fait. Ainsi, entre le fait de l’assassinat du bébé juif, et le fait des appels à la vengeance, ils donneraient la préférence au second, qui cadre mieux avec leur grille de lecture. Mais une telle description est bien en-deça de la réalité, comme le montre l’analyse d’Eric Marty à propos de Sabra et Chatila. 

 

Dans la relation médiatique de cet événement, il ne s’agit plus seulement de choisir et de sélectionner certains faits, mais aussi et surtout d’ériger certains faits en événements, ou plutôt de créer des événements qui n’ont qu’un rapport lointain - le plus souvent d’inversion et de négation - avec les faits. Ainsi, le fait de l’assassinat de Palestiniens par des phalangistes chrétiens devient l’événement mythique dans lequel Ariel Sharon, Tsahal, Israël, voire “les Juifs” sont les coupables de ces assassinats. L’événement Sabra et Chatila, selon cette analyse, est bien le contraire des faits qui s’y sont déroulés. Mais notre nouvelle définition de l’événement médiatique est incomplète : il comporte en effet également une dimension supplémentaire, métaphysique. 

 

Cette “dimension métaphysique” de l’événement est particulièrement saisissante dans le cas de Sabra et Chatila, où le massacre de centaines de Palestiniens par des phalangistes chrétiens est devenu un acte d’accusation contre les Juifs. En effet, poursuit Marty, “Sabra et Chatila dit peu de choses des souffrances et de l’horreur que vécurent ses victimes”, parce qu’il “est intégralement noué à la question juive, en tant qu’elle est le lieu auquel sont nouées l’angoisse du Bien et l’angoisse du Mal. Sabra et Chatila en ce sens est un événement métaphysique, auquel le scénario du bouc émissaire confère une sorte d’universalisme spectaculaire qui ne peut que fasciner la planète.

 

Pour comprendre plus précisément cette dimension métaphysique de “l’événement Sabra et Chatila”, Eric Marty nous invite à lire ce qu’il appelle la “phrase primordiale et majeure” de Jean Genet, tirée de son livre Un captif amoureux : “Si elle ne se fût battue contre le peuple qui me paraissait le plus ténébreux, celui dont l’origine se voulait à l’Origine, qui proclamait avoir été et vouloir demeurer l’Origine… la révolution palestinienne m’eût-elle, avec tant de force, attiré?” Cette phrase, effectivement, est capitale, parce qu’elle donne la clé de compréhension non seulement de l’engagement de Jean Genet, qui se livre avec sincérité et lucidité, mais aussi de celui de très nombreux autres militants antisionistes. En ce sens, on a pu dire que la “chance” des Palestiniens était d’avoir pour adversaires les Juifs.

 

Jean Genet en visite dans un camp palestinien à Amman

 

C’est à la lueur de cette affirmation capitale de Genet, qu’on comprend aussi la dimension métaphysique et mythique de Sabra et Chatila, et au-delà de cet événement, du conflit israélo-arabe dans sa totalité. L’événement Sabra et Chatila - comme la Nakba que nous avons abordée plus haut, comme l’événement Deir Yassin sur lequel nous allons revenir et comme tant d’autres événements du même acabit - ne sont en effet que les maillons d’une même chaîne ininterrompue, qui remonte à la nuit des temps (c’est précisément la définition du mythe, qui renvoie toujours aux origines). C’est toujours le même spectacle qui est rejoué indéfiniment, et chaque partie est toujours assignée au même rôle : le Juif est toujours assigné à son rôle d’assassin (assassin du Christ pour les chrétiens, assassin des prophètes pour les musulmans, assassin des Palestiniens pour le téléspectateur contemporain).

Pierre Lurçat

 

Extrait de mon livre Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain, qui vient de paraître (éditions de l’éléphant, Jérusalem, disponible sur Amazon).

 

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Du « crime rituel » aux « crimes de guerre » : une explication historique

June 23 2021, 09:48am

Posted by Pierre Lurçat

Du « crime rituel » aux « crimes de guerre » : une explication historique

Pourquoi Israël est-il sans cesse vilipendé et accusé de « crimes de guerre » à Gaza, alors même qu’il fait tout pour éviter les victimes civiles palestiniennes ou pour réduire leur nombre, face à un ennemi qui fait tout, de son côté, pour les multiplier ? Pour comprendre ce paradoxe, un détour par l’histoire de l’antisémitisme de l’Antiquité à nos jours est nécessaire.  Extrait de mon nouveau livre, Les mythes fondateurs de l'antisionisme contemporain, qui paraît ces jours-ci.

Bernard Lazare, auteur d’un ouvrage devenu classique sur l’antisémitisme1, s’est interrogé sur la perpétuation à son époque (celle de l’Affaire Dreyfus) de l’accusation de crime rituel. Son interrogation portait plus précisément sur le paradoxe de cette accusation visant les Juifs, connus pour ne pas consommer de sang et pour avoir « horreur du sang ». Comment les Juifs, opposés aux sacrifices humains, ont-ils pu malgré cela être accusés de crimes rituels ? La réponse paradoxale à cette question est que ce n’est pas malgré, mais bien en raison de leur opposition aux sacrifices – que le judaïsme a été le premier à rejeter dans le monde antique – que les Juifs ont été vilipendés et accusés de crimes rituels. Comme l’explique Pierre-André Taguieff2:

« Tout se passe comme si l’opposition du judaïsme aux sacrifices humains, et en particulier aux sacrifices d’enfants, loin de calmer les passions antijuives, les avait exacerbées. Poliakov a formulé l’hypothèse selon laquelle la haine antijuive proviendrait du scandale provoqué par l’opposition du judaïsme aux sacrifices d’enfants. C’est précisément le respect de la vie humaine qui, chez les Juifs, ferait scandale, comme l’atteste ce passage de Tacite :
‘’Ils ont un grand soin de l’accroissement de la population. Ils regardent comme un crime de tuer un seul des enfants qui naissent ; ils croient immortelles les âmes de ceux qui meurent dans les combats ou les supplices ; de là leur amour d’engendrer et leur mépris de la mort’’ ».

La réponse donnée par Poliakov, qui a consacré sa vie à l’étude de l’antisémitisme à toutes les époques, consiste donc à dire, en s’appuyant sur une réflexion de l’historien romain Tacite, que c’est précisément le respect des Juifs pour la vie humaine qui fait scandale. Nous avons sans doute là une des clés de la compréhension de ce paradoxe : pourquoi Israël est-il sans cesse vilipendé et accusé de « crimes de guerre » à Gaza, alors même qu’il fait tout pour éviter les victimes civiles palestiniennes ou pour réduire leur nombre, face à un ennemi qui fait tout, de son côté, pour les multiplier ?

 

Léon Poliakov au procès Barbie, Lyon 1987

Le « scandale » du respect des Juifs pour la vie humaine

Si nous transposons l’explication très éclairante de Poliakov à l’antisionisme contemporain, nous pouvons proposer l’hypothèse suivante. Plus Israël fait preuve de retenue face aux terroristes du Hamas, plus il se montre soucieux de la vie humaine (allant souvent jusqu’à mettre en danger ses propres soldats, pour épargner la vie de civils dans le camp ennemi), plus le scandale du respect juif pour la vie éclate au grand jour. Rappelons ici la déclaration saisissante, faite à de nombreuses reprises par des dirigeants et membres du Hamas et d’autres mouvements islamistes contemporains :

« Nous aimons la mort plus que vous (les Juifs) aimez la vie !3 »

Selon ce discours, l’amour des Juifs pour la vie est perçu comme le signe incontestable de leur faiblesse, mais aussi comme un symptôme de leur morale scandaleuse.

Ce qui fait scandale chez les Juifs, c’est donc leur amour pour la vie et leur valorisation permanente de la vie (affirmée dans le verset du Deutéronome : « Et tu choisiras la vie ». Face à une culture mortifère comme celle des mouvements islamistes, qui valorisent la mort et la sanctifient, l’affirmation de la vie par Israël est perçue comme incongrue et révoltante. Cette opposition frontale entre deux conceptions radicalement opposées de la vie (et de la mort) permet aussi de comprendre le soutien paradoxal dont bénéficient en Occident les ennemis d’Israël.

Le paradoxe réside ici dans le fait, peu souvent remarqué, que le discours anti-israélien ou antisioniste continue d’accuser Israël, même lorsqu’il fait le bien (par exemple, lorsqu’il approvisionne en médicaments les habitants de Gaza), ou encore qu’il désigne Israël comme le Mal, tout en lui reconnaissant sa qualité de Bien. Comme l’écrit Éric Marty,

« si Sabra et Chatila fait scandale, c’est qu’il s’agit d’un crime qui a quelque chose à voir avec le Bien »,

précisant :

« Qu’est-ce qu’un crime qui a à voir avec le Bien ? C’est le crime qu’on impute au bouc émissaire…4 »[.

C’est sans doute une des raisons pour lesquelles la position morale israélienne est très souvent inopérante, face aux populations arabes soumises à la main de fer du Hamas à Gaza, ou de l’Autorité palestinienne en Judée-Samarie. Ce n’est pas parce qu’Israël approvisionne les habitants de Gaza en électricité ou en denrées alimentaires, ou qu’il laisse entrer l’argent du Qatar à Gaza, que les habitants de la bande de Gaza (ou les médias occidentaux) lui voueront une quelconque reconnaissance. Une telle conséquence impliquerait en effet au préalable que les deux parties partagent les mêmes critères moraux, et plus précisément, la même conception du Bien et du Mal, ce qui est loin d’être le cas. PL

Pierre Lurçat, MABATIM.INFO

(Extrait de mon livre Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain aux éditions l’éléphant, Jérusalem 2021)


1 Lazare, Bernard, L’antisémitisme, son histoire et ses causes, Chailley, Paris 1894.
2 P.A. Taguieff, « Un exemple d’inversion victimaire : l’accusation de meurtre rituel et ses formes dérivées »,https://journals.openedition.org/aad/3500#bodyftn11
3 Voir par exemple, « Des Brigades Izz ad-Din al-Qassam aux soldats sionistes : Les Brigades Al-Qassam aiment la mort plus que vous aimez la vie », Palestinian Media Watch, Rapport spécial n°5 sur l’opération Pilier de Défense, 20 novembre 2012, https://palwatch.org/page/4286
4 Bref séjour à Jérusalem, Gallimard p. 167.

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“Humains, trop humains…” : Face à la cruauté du Hamas, l’humanité d’Israël est-elle justifiée? Pierre Lurçat

May 28 2021, 10:52am

Posted by Pierre Lurçat

 

Une fillette de la famille du chef du Hamas subit une greffe à l’hôpital Ichilov de Tel-Aviv”. Cette information a fait la “Une” de l’actualité en Israël. Les médias français et occidentaux, eux, l’ont passée à la trappe. Ils préfèrent titrer, comme Le Monde, “Le survivant d’une famille décimée à Gaza, saisit la Cour pénale internationale”, en faisant passer Israël et le peuple Juif pour des assassins, conformément à l’imagerie antisémite séculaire. Mais mon propos n’est pas ici de déplorer une fois de plus les mensonges des médias occidentaux (1). La question qui me préoccupe est celle - plus fondamentale, voire cruciale - de notre propre vérité. Qui sommes-nous, ou plutôt qui voulons-nous être? Un modèle de moralité et d’angélisme dans un monde barbare? 

 

La guerre s'arrête à Gaza | Le Devoir

Le Monde : l’imagerie antisémite séculaire

 

Est-ce que la vocation de “Lumière des nations” que nous assignent nos Prophètes consiste à soigner les proches de nos pires ennemis, ceux qui gardent en otages nos soldats - morts ou vivants - pour obtenir des concessions de notre part, en attendant de lancer un nouvel assaut meurtrier contre nos civils ? Ou peut-être sommes-nous victimes d’une terrible illusion, d’une erreur de perspective à laquelle nous ont habitués des centaines d’années d’existence galoutique, loin des préoccupations de la vie nationale, durant lesquelles nous avons désappris le sens véritable des injonctions bibliques et talmudiques? 

 

Plus encore qu’elle ne nous apprend sur la désinformation et le mensonge permanent des médias occidentaux concernant Israël, la décision de soigner la nièce d’Ismaïl Hanieyh à l’hôpital Ichilov doit nous faire réfléchir sur la psychologie de nos ennemis et la nôtre, et sur l’asymétrie fondamentale du conflit qui nous oppose à nos voisins. Elle nous invite surtout à comprendre ce que signifie véritablement la vocation morale d’Israël. Loin de vouloir faire l’éloge d’Israël, en démontrant une fois de plus combien nous sommes humains et nos ennemis inhumains, je prétends affirmer ici que notre humanité débordante est un défaut et une faille dans notre cuirasse, que nos ennemis savent exploiter pour nous affaiblir. Et elle n’est même pas conforme à notre Tradition authentique...

 

Un présupposé d’humanité mensonger

Car cette décision repose sur un présupposé d’humanité, qui est totalement faux ! Elle fait l’hypothèse que nos ennemis sont des hommes comme nous et qu’en leur montrant un visage d’hommes, nous les inciterons à dévoiler eux aussi leur humanité. Or c’est, hélas, le contraire qui est vrai… Plus nous sommes enclins à faire preuve d’humanité avec eux, plus ils se jouent de nous et se montrent cruels. Cette vérité éternelle avait déjà été énoncée par nos Sages dans le Talmud : « Celui qui a pitié des méchants, finit par se montrer cruel envers les justes… » Le peuple israélien a éprouvé dans sa chair la réalité tragique de cet adage, lorsque le gouvernement Sharon, voulant mettre fin à la « cruelle occupation  de Gaza », a fait preuve de l’inhumanité la plus flagrante envers les Justes qui peuplaient les yichouvim du Goush Katif. 

 

La synagogue détruite de Névé Dekalim : une inhumanité flagrante

 

La parasha de Ki Tetsé commence par le verset : “Lorsque tu iras en guerre contre tes ennemis, que l'Éternel, ton Dieu, les livrera en ton pouvoir, et que tu leur feras des prisonniers”, au sujet duquel Rachi commente : “Il s’agit d’une guerre facultative, car dans les guerres pour Eretz-Israël il ne saurait être question de faire des prisonniers”. Si nous pensons que les mots de Rachi font encore sens aujourd’hui, alors nous ne pouvons faire l’économie de nous interroger sur le sens de ce commentaire, si terrible puisse-t-il paraître à la conscience juive actuelle, façonnée par l’idée occidentale d’origine chrétienne, de la dichotomie entre droit et morale, entre pouvoir séculier et religion. 

 

Comment agir face à des loups sauvages?

Dans un article très éclairant écrit après la Deuxième Guerre du Liban, dans la défunte revue francophone Forum-Israël, le rav Oury Cherki abordait la question de “l’éthique juive de la guerre”, et citait une réponse du rav A.I . Hacohen Kook au rav Zaïdel, qui lui avait demandé pourquoi la tradition juive impose des guerres si violentes et parfois si cruelles (2). Le rav Kook répondit : “Pour ce qui est des guerres, il était impossible à une époque où nos voisins étaient des loups sauvages, que seul Israël ne fasse pas la guerre, car alors, les nations se seraient liguées pour nous exterminer. Bien au contraire, c’était une chose indispensable. Il fallait terroriser les barbares, en employant également des moyens cruels, tout en gardant l’espoir d’amener l’humanité à ce qu’elle devrait être. Mais il ne faut pas avancer le temps, et se croire à l’époque messianique quand on n’y est pas”. 

Cette réponse énonce plusieurs vérités très actuelles sur l’attitude qu’Israël devrait adopter face au Hamas.  Premièrement, face à un ennemi barbare, on se doit d’être cruel. En d’autres termes, il faut “terroriser les terroristes”. (Et qu’on ne vienne pas nous dire que les civils de Gaza sont “innocents”. Car comme l’explique le Rav Cherki, la distinction entre des soldats “coupables” et des civils “innocents” repose sur un syllogisme erroné). Enfin, l’espoir de faire progresser l’humanité vers des normes morales plus élevées n’est pas aboli, mais il concerne les temps messianiques, qui ne sont pas encore là.

Rav Kook : “Il fallait terroriser les barbares”

Nos ennemis ne changeront pas. C’est donc à nous de changer ! Cessons de nous comporter en modèles d’humanisme, en agneaux dans un monde de loups. Devenons une fois pour toutes, comme l’exigeait Jabotinsky, une ‘race fière et cruelle’. Alors que le Hamas se prépare déjà au prochain round contre Israël, l’heure n’est pas aux marques d’humanité envers le Hamas, ses dirigeants et leurs familles, mais au renforcement de notre capacité de résistance et de contre-offensive. La victoire contre le Hamas n’est pas seulement une question militaire et stratégique, elle est aussi - et avant tout - une question morale. Car c’est sur le plan des normes morales que réside notre principale faiblesse. L’heure est à ‘terroriser les barbares’, selon l’injonction du Rav Kook. L’heure est au réarmement moral d’Israël et du peuple Juif face à leurs ennemis.

Pierre I. Lurçat

Je donnerai une conférence sur "L'Etat juif selon Jabotinsky", JEUDI 3 JUIN à 19h00 (heure de Paris) dans le cadre de l'O.S.M.

(1) Voir https://infoequitable.org/ sur les mensonges des médias français.

(2) Epitres du rav Kook, Igrot Re’ia, vol. 1 p. 100, cité par O. Cherki, art. cit. C’est moi qui souligne. Je renvoie également sur ce sujet aux chapitres de mon livre La trahison des clercs d’Israël (La Maison d’édition 2016) consacrés au droit juif de la guerre.

 

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Penser la guerre de Gaza (I) :  sortir de l'illusion technologique et retrouver les valeurs de Tsahal, Pierre Lurçat

May 23 2021, 07:37am

Posted by Pierre Lurçat

 

Le dernier round des hostilités à Gaza s’est terminé comme les précédents, en queue de poisson. La “victoire” tactique et ponctuelle de l’élimination de plusieurs chefs du Hamas et du Djihad islamique est largement effacée et rendue dérisoire par la défaite stratégique à long terme, que constitue la transformation de la moitié du territoire d’Israël et de sa population en vaste champ de bataille, offert aux missiles tirés de Gaza, sans riposte effective, sinon la protection du Dôme d’acier. Dans cette série d’articles, nous voudrions esquisser une réflexion approfondie pour penser la guerre à Gaza, en la resituant dans le contexte de l’évolution de la doctrine militaire israélienne et des valeurs qui la sous-tendent.

 

Dans leur livre sur la guerre d’Indépendance, publié en 1960 (1), Jon et David Kimhi ont cette remarque éclairante, au sujet de l’issue de la guerre de 1948. “A bien des égards, les combats eux-mêmes n’ont joué qu’un rôle secondaire dans la guerre de Palestine. Ce qui a été le plus important, c’est l’affrontement des volontés”. Cette phrase semble faire écho à un verset bien connu du prophète Zachariah : “Ni par la force, ni par la puissance, mais bien par mon esprit”. Pendant des décennies, les dirigeants de l’armée et de l’Etat d’Israël avaient bien conscience que le principal élément de la force de Tsahal, face à des ennemis plus nombreux et souvent mieux armés, était l’esprit combatif, la motivation et la conscience de ses soldats qu’ils étaient obligés de vaincre. “Eyn brera!”


 

Le drapeau israélien hissé à Eilat

 

Paradoxalement, cette force intérieure a décru, au fur et à mesure que se développait la puissance technologique de Tsahal (2). Nous sommes arrivés aujourd’hui à un stade où les prouesses technologiques pallient difficilement l'effritement de la volonté de vaincre, et ne sont parfois plus un élément de la force de Tsahal, mais bien plutôt un élément de sa faiblesse… Un des premiers à avoir compris ce paradoxe est un chercheur du Centre d’études moyen-orientales de l’université d’Ariel, Eyal Levin, dont les travaux portent sur la “résilience nationale” (‘hossen léoumi) : “Le système Dôme d’acier n’exprime pas notre résilience nationale, mais au contraire notre faiblesse”, disait-il en substance, au lendemain de l’opération “Colonne de nuée” (Amoud Anan) de novembre 2012. Ce constat de faiblesse est toujours aussi valable, neuf ans plus tard, après d’innombrables rounds d’hostilités à la frontière de Gaza.

 

Le système de défense antimissiles “Kippat Barzel”, comme nous l’écrivions dans ces colonnes (3), ressemble à un immense parapluie troué, qui constitue une arme défensive très insuffisante et comporte des effets pervers, en dispensant Tsahal d’une contre-attaque authentique, comme l’a montré l’amère expérience des dernières années. Plus la prouesse technologique qu’il constitue est réussie (empêcher les missiles de l’ennemi d’atteindre le sol israélien), plus son effet pervers s’accroît : priver Israël d’une indispensable offensive préventive, pour interdire à l’ennemi d’essayer même de l’attaquer. A cet égard, Kippat Barzel est en réalité la négation du Kir Habarzel - la muraille d’acier - concept développé par Jabotinsky dans son fameux article de 1923, qui est au fondement de la doctrine stratégique de Tsahal (4). 

 

La muraille d’acier signifie en effet qu’il faut dissuader l’ennemi de nous attaquer, et pas seulement se défendre contre ses attaques incessantes. Selon cette conception,  la paix et la sécurité ne viendront pas en élaborant des systèmes de défense de plus en plus perfectionnés, pour intercepter les missiles du Hamas, du Hezbollah et de l’Iran. Elles ne viendront qu’en ripostant avec toute la force nécessaire et en attaquant les ennemis qui nous menacent, portant la guerre sur leur territoire - comme l’a fait Tsahal lors des guerres victorieuses de 1948, 1956, 1967 et 1973, jusqu’à ce qu’ils demandent grâce et renoncent à leurs intentions belliqueuses.

 

Une défaite morale et psychologique


Mais il faut aller plus loin encore. La réussite technologique (toute relative) de Kippat Barzel n’est pas seulement une défaite sur le plan militaire et psychologique, en empêchant Tsahal de riposter et en portant ainsi un coup fatal à notre capacité de dissuasion. Elle incarne aussi l’inversion et l’oubli des valeurs sur lesquelles reposait jadis la force de Tsahal. Un des exemples les plus frappants de cet oubli des valeurs fondatrices de l’armée de Défense d’Israël nous est donné par le cas tragique du soldat Hadar Goldin, capturé et tué par le Hamas le dernier jour de l’opération Tsouk Eytan à Gaza, et dont la dépouille est toujours détenue par le Hamas, sept ans plus tard.

 

Hadar Goldin z.l.

 

Comme l’a déclaré le père de Hadar, le Dr Simha Goldin, en août 2019 : “Hadar a été abandonné à trois reprises par la lâcheté de nos dirigeants. La première fois, sur le champ de bataille, lorsqu’ils ont empêché son officier de pénétrer dans l’hôpital du Hamas où il était apparemment détenu et blessé. La deuxième fois, à la fin de l’opération Tsouk Eytan, lorsque les dirigeants israéliens ont négocié (un cessez-le-feu) au Caire avec le Hamas, sans exiger la restitution des deux soldats Oron Shaul et Hadar Goldin. Et la troisième fois, pendant les cinq dernières années…” Simha Goldin a aussi déclaré, lors du congrès annuel du mouvement Im Tirtsu, que pour la première fois dans l’histoire de Tsahal, un soldat avait été déclaré “tombé au combat” en pleine guerre, alors qu’il était disparu et que son sort n’était pas encore connu avec certitude. 

 

Ce précédent dangereux a été fixé en contradiction avec la tradition remontant aux débuts de Tsahal, de ne jamais abandonner un soldat sur le champ de bataille et de ne pas le considérer comme mort, tant que sa dépouille n’avait pas été récupérée. L’exemple tragique de Hadar Goldin devrait susciter un vaste mouvement de réflexion et une prise de conscience au sein de la population israélienne, et surtout de sa jeunesse, dont la motivation pour servir dans les rangs de Tsahal n’a pas faibli. Car ce sont les valeurs fondatrices de Tsahal qui ont permis, jusqu’à ce jour, que des jeunes Israéliens s’engagent dans les rangs des unités combattantes. Si l’esprit de fraternité combattante (Reout) - immortalisé par les paroles du Chir HaReout, rédigé par Haïm Gouri durant la guerre d’Indépendance - devait s’estomper, comment pourra-t-on demain appeler des jeunes soldats à risquer leur vie pour leur pays? 

 

Simha Goldin devant le Lion de Tel Haï

 

Hadar Goldin portait un nom plein de signification. “Hadar” signifie “splendeur” et il fait référence au Chir Betar, l’hymne du mouvement de jeunesse sioniste créé par Zeev Jabotinsky, qui fut aussi le fondateur de la Légion juive, ancêtre de Tsahal. Puissent les mots du Chir Betar inspirer les dirigeants qui se considèrent comme les héritiers de Jabotinsky. “Hébreu, dans la misère même tu es Prince, Dans la lumière ou l’obscurité. Souviens toi de cette couronne”. Qu’ils se souviennent, eux aussi, du Keter. Qu’ils se souviennent du Hadar et du Tagar. Et qu’ils n’oublient pas non plus les paroles du Chir HaReout, rédigé par Haïm Gouri, de “l’amour consacré dans le sang” des soldats tombés dans les guerres d’Israël.

Pierre Lurçat

 

NB Je commente la fin de l'opération "Gardiens des murailles" au micro de Daniel Haïk sur Radio Qualita

https://www.youtube.com/watch?v=qlBysShmoYE&t=7s

 

Dans la suite de cet article, nous verrons comment la guerre asymétrique contre Gaza a fait perdre de vue la notion de guerre juste et quelles en sont les conséquences.

(1) La première guerre d’Israël, Arthaud 1969.

(2) Sur l’évolution de l’ethos de Tsahal et de la société israélienne en général, voir Oz Almog, Farewell to Srulik - Changing Values Among the Israeli Elite (Zmora Bitan and Haifa University Press, 2004).

(3) http://vudejerusalem.over-blog.com/2018/11/israel-gaza-accepter-la-pax-islamica-du-hamas-par-pierre-lurcat.html?fbclid=IwAR3BG1p7wyMDw5sdwIW_YODWeVPCCzVbVP1f0sdXKLpMSXYDkeRAopTARAU

(4) Sur la “muraille d’acier” et l’héritage politique et militaire de Jabotinsky, je renvoie à ma postface à son autobiographie, que j’ai eu le plaisir de traduire en français.


 

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Bombardement de l’immeuble abritant l’Associated Press : Comment les médias sont devenus des acteurs de la guerre contre Israël

May 20 2021, 08:33am

Posted by Pierre Lurcat

 

A la mémoire de Haim Azses,

pionner de la Hasbara en Israël

 

Cela fait belle lurette que la profession de journaliste n’a plus grand chose à voir avec celle d’Albert Londres ou de Joseph Kessel, et ressemble plus à un obscur travail de gratte-papier copiant et collant des “Tweets”, et allant parfois chercher une référence historique - pour combler ses lacunes en culture générale - sur Wikipédia, cette encyclopédie des pauvres. Hélas, la destruction de l’enseignement public en France ne date pas d’hier et nos journalistes sont pour la plupart fraîchement émoulus des “écoles de journalisme”, ces tristes établissements où sont formatés ceux qui sont censés nous “dire l’actualité”, modernes Pythies.

 

Mais le sujet qui nous occupe ici n’est pas la baisse du niveau intellectuel des journalistes, sujet qui mériterait à lui seul une enquête (journalistique?) en bonne et due forme, mais la disparition de leurs critères moraux et professionnels (qu’ils désignent par le terme pompeux de “déontologie”). En effet, ceux qui se targuent de donner des notes de moralité au reste de la planète et qui sont imbus de l’idée que la Liberté de la presse et de l’information serait la Valeur suprême, devant laquelle doivent s’effacer toutes les autres, ne sont pas toujours des parangons de vertu. L’exemple suivant permettra d’illustrer notre affirmation.

 

Depuis samedi dernier, les médias français (et étrangers) se sont émus de la frappe par l’armée d’Israël du bâtiment abritant les locaux de l’Associated Press et d’Al-Jazira à Gaza ville. “La destruction des bureaux d’Al-Jazira et de ceux d’autres médias dans la tour Jala à Gaza est une violation flagrante des droits humains et est considérée internationalement comme un crime de guerre”, dénonce Moustapha Souag, directeur général du groupe qatari (pays qui s’y connaît en la matière), cité sans aucun commentaire par le quotidien Le Monde.  Or, en réalité, la présence d’opérationnels et de services de renseignement militaire du Hamas est un “secret de Polichinelle”, largement connu des médias du monde entier (1). 

 

Si les médias le savent, c’est parce qu’ils ont abandonné depuis bien longtemps leur rôle d’observateurs “neutres” (l’ont-ils jamais été?) pour devenir des acteurs du conflit israélo-arabe, comme l’a bien décrit l’ancien journaliste de l’AP, Matti Friedman :  « La presse occidentale est devenue moins un observateur de ce conflit qu’un acteur de celui-ci, un rôle qui a des conséquences sur les millions de personnes qui tentent de comprendre l’actualité, y compris les décideurs qui dépendent des récits journalistiques pour comprendre une région où ils cherchent constamment à intervenir de manière productive » (2).

 

Légitime défense : le bâtiment de l’AP à Gaza s’effondrant comme un château de cartes


 

Des journalistes servant de “boucliers humains” au Hamas

Ce qui devrait faire scandale, aux yeux des médias des pays démocratiques, c’est justement le fait que des journalistes acceptent de travailler dans le même immeuble que des terroristes du Hamas, auxquels ils servent de “bouclier humain”. Mais en réalité, cela fait longtemps que les journalistes occidentaux qui couvrent le “conflit” israélo-arabe ont accepté de se plier aux diktats du Hamas, de l’AP et des autres mouvements terroristes palestiniens, dont ils relaient avec complaisance le narratif mensonger au détriment d’Israël. Bien entendu, si vous interrogez un de ces journalistes, il vous expliquera doctement qu’il n’a pas le choix, et que le “devoir d’informer” oblige à accepter les conditions du Hamas à Gaza, ou celles de l’AP en Judée-Samarie (“Cisjordanie” dans le lexique autorisé).

 

Comme l’écrit Liliane Messika, “Une vidéo circule sur la Toile, celle d’un journaliste libanais, installé avec des confrères sur un toit d’où ils ont une vue imprenable sur l’immeuble du Renseignement du Hamas (ainsi que d’Al Jazzera et Associated Press), situé à une cinquantaine de mètres et qui va être détruit par Tsahal (Twitter). Cette vidéo a été signalée par la MENA, dont le journaliste a été impressionné par le calme des journalistes installés là, qui ne portent ni casque ni gilet pare-balles et qui ont, manifestement, eu tout le temps nécessaire pour préparer leurs objectifs… Les journalistes qui couvrent les conflits, ailleurs dans le monde, risquent leur vie. Pas ceux-là. Ils font confiance à la technologie de Tsahal et savent qu’ils ne risquent rien, car les Israéliens préfèrent avorter une opération que tuer un civil”.

Voilà bien l’hypocrisie de nos donneurs de leçons au monde entier : ils profitent de la protection de l’armée israélienne pour envoyer en toute tranquillité leurs dépêches mensongères sur les soi-disant “crimes de guerre” israéliens ! Ils se reposent à la piscine de l’American Colony, au coeur de Jérusalem (pardon, Jérusalem-Est) après avoir couvert les dernières émeutes arabes en “Palestine”, préférant le luxe démodé de ce palace à celui des hôtels miteux de Ramallah. Je me souviens d’un de ces plumitifs, G. Malbrunot, qui venait dans les cafés de Jérusalem chercher ses “proies” parmi les jeunes Israéliennes innocentes, il y a une vingtaine d’années, avant de retourner faire son vilain travail de correspondant d’un journal français. Ils soutiennent sans retenue les ennemis jurés d'Israël, et ils viennent pleurnicher quand Tsahal riposte, en détruisant une cible mixte abritant des soldats du Hamas d'une part, et leurs alliés de l'Associated Press d'autre part...

Une conscience morale aussi développée que celle d’un batracien: Charles Enderlin

RECTIFICATIF Bien entendu, ce portrait ne prétend pas décrire TOUS les journalistes français ou étrangers, car il existe des exceptions. Je connais des journalistes honnêtes, qui font leur travail avec conscience professionnelle et s’efforcent de le faire bien. Je connais aussi des journalistes courageux, qui couvrent des zones de guerre plus périlleuses que la ville de Gaza. Mais il faut reconnaître que, pour la majorité des correspondants français, formatés aux dépêches de l’AFP et à la vulgate anti-israélienne qu’ils entendent depuis leur enfance, il n’est pas possible d’envisager une autre façon de penser. Rappelons-nous du fake de Charles Enderlin et de France 2, accusant Tsahal de “crime rituel” à Netsarim, reportage qui a fait couler le sang de dizaines de civils israéliens innocents. 

 

Et rappelons-nous des pétitions organisées pour soutenir le journaliste accusé de faux, pétitions signées par le gratin de la profession de France et de Navarre. M. Enderlin, qui s’est payé le luxe d’intenter des procès pour “diffamation” (3) a continué de couler des jours paisibles à Jérusalem, bien après avoir commis son faux. Pensez-vous que l’image terrible des réservistes de Tsahal déchiquetés vivants par une meute palestinienne l’ait empêché de dormir? Je ne crois pas. Aux dernières nouvelles, Enderlin vient de publier ses mémoires et il vient d’accuser Israël de “manipuler les médias” à Gaza (4)... Ceux qui font profession d’incarner la “conscience de l’humanité” ont parfois une conscience morale très peu développée, sans doute du niveau d’un batracien. Mais peut-être suis-je trop sévère pour les batraciens. 

Pierre Lurçat

NB Article paru initialement sur https://mabatim.info/

1. Sur la collaboration entre l’Associated Press et divers régimes autoritaires de l’Allemagne nazie au Hamas, voir : https://www.tabletmag.com/sections/news/articles/ap-collaboration-nazis-reporting-news

2. https://www.causeur.fr/israel-musele-la-presse-a-gaza-retour-sur-une-fake-news-200866?utm_source=Envoi+Newsletter&utm_campaign=31b159d8b3-Newsletter_4_fevrier_COPY_01&utm_medium=email&utm_term=0_6ea50029f3-31b159d8b3-57602921

3. Y compris un procès contre moi, que j’ai gagné.

4. "Manipuler la presse, ce n’est pas bien, souligne Charles Enderlin, qui rappelle que l’immeuble abritant AP et Al-Jazeera hébergeait aussi "des points de diffusion d’images sortant de Gaza". Résultat, à Gaza, "il reste Reuters et l’Agence France-Presse (AFP), qui ont beaucoup de mal à fonctionner parce qu’en raison des pannes d’électricité, il y a très peu d’Internet et très peu de téléphone".

https://www.rtbf.be/info/monde/detail_charles-enderlin-depuis-des-mois-les-journalistes-internationaux-avaient-beaucoup-de-mal-a-se-rendre-dans-gaza?id=10762713

 

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Israël-Iran : la guerre à venir et l’héritage de Donald Trump, Pierre Lurçat

January 17 2021, 14:20pm

Posted by Pierre Lurçat

 

 

La récente information, largement relayée par les médias israéliens et étrangers, concernant les nouveaux plans de Tsahal pour contrer le programme nucléaire iranien, montre que l’armée israélienne est déjà entrée dans l’ère Biden. En la matière, la fin de l’ère Trump et l’arrivée de l’administration Biden a une signification très claire : Israël doit se préparer à la guerre. Non pas seulement la guerre qui se déroule déjà depuis longtemps, en Syrie, en Iran même et dans le cyberespace, entre Tsahal d’un côté, l’Iran et ses alliés de l’autre. Mais la guerre aux frontières - voire au coeur même du territoire israélien. Le chef d’état-major israélien Kochavi et les autres dirigeants israéliens savent parfaitement ce que signifie l’entrée en fonctions d’une administration qui a déjà annoncé son intention de “négocier” avec l’Iran son retour dans le cadre du JCPOA : cela signifie que le danger iranien sera encore plus menaçant que jamais.

 

La vie internationale n’est pas un concours de maintien pour jeunes filles : 

parade militaire àTéhéran



 

Il n’y a pas loin du Capitole à la roche tarpéienne”; jamais l’adage latin n’aura eu une signification plus évidente que pour le président sortant Donald Trump. Il est particulièrement édifiant de lire, dans les colonnes du journal israélien Makor Rishon, l’analyse de trois éminents Juifs américains républicains, dressant le bilan de l’ère Trump. Un “massacre américain”, un “désastre”... : Bret Stephens, Dov Zackheim et William Kristol ne tarissent pas de superlatifs pour décrire la catastrophe que représente selon eux le mandat de Donald Trump. Le plus étonnant est de constater que le discours de ces représentants du camp républicain au sein du judaïsme américain ne diffère pas fondamentalement de celui de leurs collègues démocrates (au point que Kristol - dont le père était un intellectuel phare du courant néoconservateur américain - a même appelé à voter Biden aux dernières élections).



Quel que soit le jugement que l’on porte sur le bilan intérieur américain des quatre années Trump, il ne doit pas occulter le fait - largement passé sous silence ou minimisé par ces analystes, pourtant considérés comme de fervents partisans d’Israël - que la présidence Trump a été marquée par un rapprochement jamais vu auparavant dans les relations entre Israël et son allié américain. L’héritage de Donald Trump ne se mesure pas seulement dans le domaine diplomatique et symbolique - dans lequel il a effectivement été le président le plus pro-israélien depuis Harry Truman, qui avait voté en faveur de la proclamation d’Israël aux Nations Unies. L’héritage de Trump, c’est avant tout le soutien concret, total et inconditionnel à Israël dans sa guerre existentielle contre un Iran voué à sa destruction. 



 

 Le monde a besoin de dirigeants sachant comment mener la guerre

 

La personnalité (de Trump) compte plus à mes yeux que sa politique”. Ce jugement formulé par un commentateur juif républicain exprime un sentiment partagé par beaucoup de ses coreligonnaires, aux Etats-Unis et ailleurs. Mais en vérité, ce n’est pas seulement un atavisme juif, car à l’ère des médias sociaux, les hommes politiques sont jugés bien plus pour leur apparence et pour leur manière de s’exprimer que pour leur politique. Dans le cas de Donald Trump, de toute évidence, son franc-parler, son mépris affiché des conventions et son goût de la provocation ne l’ont pas servi, ni aux yeux de ses adversaires, ni même de ses partisans. Mais quand il est question de la guerre Israël-Iran, ce n’est plus de bonnes manières qu’il s’agit, mais de vie ou de mort. 

 

Aussi il y a quelque chose de pusillanime dans l’attitude de ceux - y compris en Israël - qui préfèrent voir à la Maison Blanche un président qui “sait se tenir” et tenir sa langue, qu’un président qui sait comment se comporter avec les dirigeants de Téhéran. Face aux ennemis d’Israël, le monde a besoin de dirigeants sachant comment mener la guerre, et pas de dirigeants qui savent plaire aux médias, ou disserter sur l’art ou la littérature. La vie internationale n’est pas un concours de cuture générale ou de maintien pour jeunes filles bien nées. Comme le disait Woody Allen, “Même quand l’agneau et le loup coexisteront, je préfèrerai être le loup”. Dans un monde où les loups n’ont pas encore déposé les armes, Israël doit non seulement se comporter en conséquence, mais doit aussi pouvoir compter sur des alliés qui savent aussi comment affronter les loups de Téhéran, Damas ou ailleurs. Israël n’a pas fini de regretter la présidence Trump.

Pierre Lurçat

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J’ai le grand plaisir d’annoncer la parution de deux livres en hommage à ma mère, Liliane Lurçat (1928-2019), qui paraissent simultanément ces jours-ci. Le premier, intitulé “Un parapluie pour monter jusqu’au ciel”, est un livre de souvenirs inédit dans lequel elle relate sa jeunesse, depuis sa naissance à Jérusalem, au Paris d’avant la guerre et à l’internement à Drancy et à Vittel. Comme elle l’a expliqué ailleurs : “Ma formation de psychologue a deux sources, l’école de la vie pendant l’Occupation allemande, et plus tard, l’attention affectueuse d’un maître…” C’est le récit de cette “école de la vie” qui est ici présenté au lecteur, école souvent rude et parfois cruelle, mais riche d’enseignements.

 

 

 

 

L’histoire de cette jeune femme qui a eu seize ans à Drancy en 1943, et dont la guerre a occupé une large partie de sa jeunesse, est édifiante. Elle est un modèle de courage, d’obstination et de foi en l’avenir. Dans son récit, on voit poindre les qualités d'observation des autres et de pénétration psychologique qu'elle a plus tard déployées dans sa vie professionnelle, en tant que chercheur au CNRS.

 

Le second livre, intitulé “Vis et Ris!”, est un livre d‘hommage dans lequel je décris la personne que j’ai connue et ce que je lui dois. A la fois témoignage personnel et réflexion sur la transmission et l’identité juive, il tente de répondre à la question du contenu de la Yiddishkeit que j’ai reçue en héritage. Ce livre est, plus encore qu’un livre de souvenirs et un chant d’amour, un chant d’espérance.

 

 

Dans les moments d’allégresse ou de peine, aux heures où la joie m’envahit ou, au contraire, quand le découragement me gagne, je revois ton visage plein de grâce et de sagesse, ma mère, et j’entends ta voix qui continue de me parler, comme tu l’as fait depuis les premiers instants de ma naissance et jusqu’aux derniers souffles de ta vie. Je t’entends aussi chanter, par-delà l’éternité, les refrains qui ont bercé mon enfance et qui continuent de m’accompagner. Et j’entends ces deux mots qui résument à mes yeux tout ce que tu m’as légué, cette philosophie de la vie forgée dans l’épreuve et dans le rire, sagesse ancestrale exprimée dans la langue de nos ancêtres Juifs d’Europe centrale, qui figurent en titre de ce livre : “Leib un lach!”.

Pierre Lurçat

 

 

 

Les deux livres sont disponible sur Amazon, en format Kindle ou broché. En Israël, ils peuvent être commandés auprès de l’auteur. pierre.lurcat@gmail.com  

Les demandes de service de presse sont les bienvenues .pierre.lurcat@gmail.com 


 

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“Les Shtisel sur mon balcon” : La culture israélienne et le monde juif ‘harédi, Pierre Lurçat

January 7 2021, 14:24pm

Posted by Pierre Lurcat

 

La troisième saison de “Shtisel” n’a pas déçu les attentes des spectateurs israéliens : elle est aussi riche, émouvante et drôle que les deux précédentes. Mais au-delà des qualités intrinsèques qui expliquent en grande partie son succès, il y a sans doute une autre raison, moins évidente, qui permet de comprendre pourquoi des dizaines de millions de personnes, en Israël et dans le monde, suivent avec intérêt l’histoire de cette famille d’un quartier juif orthodoxe de Jérusalem. Pendant des décennies, en effet, la culture israélienne a regardé le monde ‘harédi avec un regard ambivalent, empreint de curiosité à laquelle se mêlait une dose variable, mais toujours présente, de mépris et d’aliénation. 

 

 

Paradoxalement, l’attitude des “premiers Israéliens” - partageant pour beaucoup d’entre eux les valeurs du sionisme laïc et anti-religieux - envers leurs frères juifs orthodoxes était sans doute plus proche que celle des Israéliens aujourd’hui. Après tout, pour la majorité des Juifs venus d’Europe centrale et orientale, le monde ‘harédi était celui de leur enfance. Les sionistes russes notamment, avaient souvent grandi dans le Shtetl et été éduqués au ‘héder, parfois à la yeshiva, et leur rejet de l’orthodoxie juive s’accompagnait d’une connaissance intime de ses codes culturels et de ses règles. Cela transparaît bien dans le beau livre de souvenirs de l’ancien président d’Israël, Zalman Shazar (Rubashov), Etoiles du matin (2), comme chez d’autres écrivains israéliens (comme S.J. Agnon, pour n’en citer qu’un). 


Quand Shazar évoque la bibliothèque de son père - qui avait grandi dans un foyer hassidique Habad - les “melamdim” (enseignants) de sa ville natale, ou les prédicateurs qui venaient le jour de Kippour à la synagogue, il parle de lui. La sympathie qui transparaît à travers chaque ligne du livre n’exprime pas seulement la nostalgie d’un monde disparu, elle est aussi celle de l’auteur pour une partie de son être intime. A de nombreux égards, Zalman Shazar, qui avait quitté la tradition pour devenir un militant sioniste socialiste dans sa jeunesse, avait gardé, jusqu’à son dernier jour, l’âme d’un Hassid (2). Cela est vrai aussi, à un degré variable, de la plupart des écrivains et des dirigeants sionistes laïcs de la génération de Shazar. Le monde juif traditionnel d’Europe - et même celui des yeshivot pour certains d’entre eux - leur était familier, même s’ils en avaient rejeté le mode de vie, et cela explique en partie l’attitude conciliante de David Ben Gourion envers les Juifs ‘harédim lors du débat sur l’éducation publique ou sur l’exemption de service militaire dans les années 1950. 



 

Le président Shazar et le Rabbi de Loubavitch



 

L’attitude de l’establishment politique et culturel israélien a bien évolué depuis lors. L’écart grandissant qui s’est creusé au fil des décennies entre la population juive ultra-orthodoxe et le reste des Israéliens tient non seulement à la différence des modes de vie (3) mais aussi, et surtout, à la manière négative (et souvent hostile) dont les Juifs ‘harédim sont décrits dans les grands médias, mais aussi dans la production culturelle israélienne. Trop d’artistes, de cinéastes ou de journalistes israéliens prennent encore un malin plaisir à décrire le judaïsme orthodoxe et ses symboles comme s’il s’agissait d’une autre planète, avec une attitude faite d’ignorance et d’hostilité, qui confine parfois à la fameuse “haine de soi juive” analysée par Theodor Lessing il y a près d’un siècle (4).

 

Tournage de la saison 3 sur mon balcon à Jérusalem

 

“Shtisel” rompt avec cette attitude et retrouve la proximité envers le judaïsme de la Torah de la génération de 1948. Les histoires qu’il raconte sont certes universelles, mais elles sont aussi propres au monde ‘harédi. Les personnages sont décrits sans aucune condescendance, non pas comme des êtres exotiques vivant selon des normes bizarres mais comme vous et moi. “Shtisel” réussit à nous faire vivre au milieu d’un monde qui nous paraissait étranger et à le rendre proche et sympathique au spectateur, israélien ou non, Juif ou non. Cette série nous apprend plus sur le judaïsme ‘harédi que bien des livres savants. Rien que pour cela, Shtisel mérite amplement le succès qu’il connaît. 

P. Lurçat

 

NB Mon nouveau livre, “Vis et Ris”, vient de paraître et est disponible en France sur Amazon, et en Israël en commande auprès de l’auteur : pierre.lurcat@gmail.com

“Une petite lumière chasse beaucoup d’obscurité”. Cet adage des Juifs hassidim de Habad me semblait alors, pendant les longues journées que je passai au chevet de ma mère, résumer parfaitement le secret de sa vie et de ses multiples combats, personnels, professionnels et intellectuels. Elle était née à Jérusalem, avait grandi et vécu à Paris, où elle avait passé toute son existence adulte. Elle s’était battue pour ses idées, pour son statut de chercheur indépendant au CNRS et pour le droit de mener ses recherches en solitaire, loin des foules, des modes, des idéologies et des crédits de recherche. “Hors des sentiers battus”, selon l’expression qu’elle affectionnait particulièrement. Elle avait lutté, farouche et ombrageuse, contre ses patrons de labo - ces “mandarins” de la psychologie contre lesquels elle avait défendu becs et ongles, aux côtés de son mari, une autre idée de la recherche scientifique, plus exigeante et plus austère. Elle avait lutté contre les gardiens de Drancy, contre les dirigeants du Parti, qui n’appréciaient guère son esprit rebelle et la soupçonnaient d’accointances “sionistes“ ; son frère n’était-il pas lieutenant-colonel de l’armée israélienne, comme elle l’avait déclaré sur un questionnaire officiel du Mouvement de la Paix, à Prague , en pleine période des procès antijuifs, avec une témérité qui frôlait l’inconscience? Elle s’était toute sa vie battue contre les partis, les institutions et les idéologies, restant jusqu’à son dernier jour un esprit libre et rebelle. Oui, ma mère avait gardé, toute sa vie durant, quelque chose d’étranger et d’insaisissable qui faisait d’elle une personne inclassable, fière et rétive”.

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(1) Dont une traduction partielle - et talentueuse, due à Guy Deutsch - est parue en 1966 en français, aux éditions Albin Michel.

(2) Voir sur ce sujet l’évocation par Shazar de son grand-père dans son livre Etoiles du matin, et aussi sur le site https://www.loubavitch.fr/bibliotheque/recit-hassidiques/1584-zalman-shazar-et-les-quatre-mouvements

(3) Laquelle s’est pourtant amoindrie ces dernières années, avec l’entrée massive des femmes orthodoxes dans le monde du travail et la création d’unités ‘harédi au sein de Tsahal.

(4) Théodore Lessing, La haine de soi. Le refus d'être juif, Berg International 2001.

 

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Comprendre la Loi fondamentale sur l’Etat-nation (II): la question de l’égalité des droits, par Pierre Lurçat, avocat

December 22 2020, 16:17pm

Posted by Pierre Lurçat

Comprendre la Loi fondamentale sur l’Etat-nation (II): la question de l’égalité des droits, par Pierre Lurçat, avocat

Alors que la Cour suprême, dans ce qui constitue la deuxième phase de la Révolution constitutionnelle entamée dans les années 1990 et sa transformation en premier pouvoir en Israël, prétend examiner la "légalité" de la Loi fondamentale sur Israël Etat-nation, il importe de bien comprendre la signification véritable de cette loi. Analyse.

 

Dans la première partie de cet article, nous avons vu que la Loi fondamentale sur l’Etat-nation s’inscrivait dans le droit fil des textes fondant la légitimité de l’Etat d’Israël selon le droit  international, et notamment de la Déclaration Balfour de 1917 et de la Résolution 181 des Nations Unies de 1947. Nous voudrions à présent nous attarder sur la question controversée de l’égalité et sur les arguments de ceux qui affirment que cette loi porte atteinte à l’égalité des citoyens non-juifs de l’Etat d’Israël.

 

Première affirmation : l’égalité des droits mentionnée dans la Déclaration d’Indépendance a été délibérément omise dans la Loi fondamentale, qui abolit ainsi la notion d’égalité.

 

Cette affirmation, entendue très souvent au cours des dernières semaines, exprime une incompréhension fondamentale du système juridique israélien et de la structure de l’édifice législatif, en Israël et dans les pays démocratiques en général. Elle repose en effet sur l’idée erronée qu’une nouvelle loi aurait automatiquement pour effet d’abroger les lois précédentes. Il n’en est pas du tout ainsi ! Non seulement la Loi fondamentale n’a pas pour effet d’abroger les lois antérieures - mais elle vient en réalité les compléter (1).

 

Pour analyser la place de la Loi fondamentale sur l’Etat-nation au sein de l’édifice juridique et constitutionnel israélien, je propose de recourir à l’image du puzzle. Chaque loi fondamentale vient en effet s’insérer dans un ensemble plus vaste dont elle constitue un élément. La complémentarité de chacun des éléments de ce puzzle tient à la fois à des raisons procédurales (le législateur israélien ayant décidé de recourir au système de l’élaboration d’une Constitution par étapes, en s’inspirant notamment du modèle allemand d’après 1949), et à des raisons de fond (2).

 

Sur le fond en effet, la Loi fondamentale sur l’Etat-nation vient s’insérer de manière logique dans l’édifice constitutionnel, aux côtés des deux éléments déjà édifiés depuis 1948. Le premier élément était celui des Lois fondamentales décrivant le fonctionnement des institutions (Knesset, Président de l’Etat, etc.). Le second était celui des droits de l’homme, qui sont énoncés dans les deux lois fondamentales de 1992. Le troisième élément, qui faisait défaut jusqu’alors, était celui du caractère juif de l’Etat, ou si l’on préfère de la “carte d’identité” de l’Etat d’Israël.

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La carte d'identité de l'Etat (photo : la Knesset)

 

 

Dernier point, qu’il n’est pas inutile de rappeler : la Déclaration d’Indépendance affirme certes que tous les citoyens d’Israël bénéficient de droits égaux, sans distinction d’origine. Mais elle mentionne également le droit au Retour, qu’elle réserve exclusivement aux Juifs et à leurs descendants, ce qui montre bien qu’elle n’est pas motivée uniquement par un souci d’égalité.

 

Deuxième affirmation : la Loi fondamentale sur l’Etat-nation vient consacrer une inégalité de fait entre citoyens juifs et non juifs.

 

Cette affirmation procède là encore d’une vision erronée de la réalité, tant politique que juridique, de l’Etat d’Israël. En réalité, il n’existe pas d’inégalité, de jure ou de facto, entre les citoyens de l’Etat d’Israël. Ceux-ci bénéficient en effet des mêmes droits politiques et sociaux, quelle que soit leur appartenance religieuse ou ethnique, conformément aux termes de la Déclaration d’Indépendance de 1948. Ceux qui dénoncent une prétendue inégalité contestent en réalité la nature même de l’Etat d’Israël en tant qu’Etat-nation du peuple juif, comme on l’a bien vu lors de la manifestation organisée samedi dernier à Tel-Aviv, au cours de laquelle les manifestants arabes israéliens ont brandi des drapeaux palestiniens !


 


Manifestation contre la Loi sur l’Etat nation à Tel-Aviv

 

Pour illustrer l’inanité de cette affirmation, prenons l’exemple le plus marquant, celui de la langue. Selon les opposants à la Loi fondamentale, celle-ci aurait rabaissé le statut de l’arabe, auparavant langue officielle à égalité avec l’hébreu, pour en faire une langue de second rang. Cette affirmation contient plusieurs contre-vérités. Tout d’abord, l’arabe n’a jamais été la langue officielle de l’Etat d’Israël. Il a en réalité bénéficié d’un statut de langue officielle avant 1948, pendant la période du Mandat britannique, mais ce statut a été abrogé de facto quand l'Etat d’Israël naissant a choisi l’hébreu comme langue officielle. Israël n’est pas, et n’a jamais été depuis 1948 un Etat binational, ou un Etat pratiquant le bilinguisme, contrairement à d’autres Etats.

 

Le statut spécial dont bénéficie la langue arabe en Israël est à la fois l’héritage de la période mandataire et la conséquence de l’interventionnisme de la Cour suprême en faveur des minorités arabes en Israël. Ainsi, un arrêt de 1999 a obligé les municipalités des villes abritant une minorité arabe à utiliser cette langue sur tous les panneaux de circulation dans leur ressort juridictionnel (Bagats 4112/99). La Loi fondamentale ne remet pas en cause le statut spécial acquis par la langue arabe au sein de l’Etat d’Israël : celui-ci est en effet confirmé à l’article 4 (b) et (c) - ce dernier précisant que la Loi ne porte atteinte à aucun droit acquis avant son entrée en vigueur.

 

En réalité, comme l’explique le professeur Martin Sherman, ceux qui s’opposent à la loi au nom de l’égalité des droits confondent deux catégories de droits bien différentes. D’une part, les droits civiques et libertés publiques, qui sont garantis en Israël à tous les citoyens sans distinction d’origine ethnique ou religieuse, depuis la Déclaration d’Indépendance et sous le contrôle tatillon de la Cour suprême, championne de l’égalité. D’autre part, les droits nationaux revendiqués à titre collectif, qui sont réservés au seul peuple Juif, au nom de son droit à l’autodétermination. Sur ce dernier point, aucun compromis n’est possible, sauf à transformer Israël en Etat binational.

Pierre Lurçat

 

(1) Cela est d’autant plus vrai, s’agissant d’une Loi fondamentale, c’est-à-dire d’une loi ayant une valeur supérieure aux lois “normales”, et selon certains avis quasi-constitutionnelle. Si on accepte l’hypothèse (soutenue par une partie des auteurs et juristes israéliens) que les Lois fondamentales sont des éléments de la Constitution en voie de création de l’Etat d’Israël, on comprend d’autant mieux comment la Loi fondamentale sur l’Etat-nation vient compléter les Lois fondamentales précédentes, et notamment la Loi sur la liberté et la dignité humaine de 1992

(2) Sur les notions de Loi fondamentale et de Constitution par étapes, je renvoie au chapitre 13 de mon livre La trahison des clercs d’Israël, La Maison d’édition 2016.

Mon intervention au récent colloque organisé par Dialogia, “Où va la démocratie ?” est en ligne sur Akadem, https://akadem.org/conferences/colloque/politique/dialogia-democratie/dialogia-ou-va-la-democratie-/45247.php.

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