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islam

A la racine de la “Conceptsia” (III): Pourquoi les meilleurs islamologues israéliens sont-ils des Juifs pratiquants ?

June 3 2024, 10:41am

Posted by Pierre Lurçat

 A la racine de la “Conceptsia” (III):  Pourquoi les meilleurs islamologues israéliens sont-ils des Juifs  pratiquants ?

 

 

La plupart des islamologues, en Israël comme en Occident, ne peuvent s’empêcher de croire que les musulmans – y compris les plus radicaux – partagent avec nous certaines valeurs fondamentales, comme l’amour de la vie et le respect de l’autre. Ils sont incapables de penser le hiatus incommensurable qui nous sépare des tenants de l’islam militant, leur amour de la mort proclamé soir et matin et leur mépris de la vie humaine. Cet impensé est une des causes de la surprise tragique du 7 octobre. Troisième volet de notre série d’articles sur les orientalistes qui n’ont rien compris au Hamas.

 

A la racine de la “Conceptsia” : Ces orientalistes israéliens qui n'ont rien compris au Hamas - VudeJerusalem.over-blog.com

A la racine de la “Conceptsia” (II) : Ces orientalistes israéliens qui n'ont rien compris à l'islam - VudeJerusalem.over-blog.com

 

Dans les 2 premiers volets de cet article, nous nous sommes interrogés sur ces orientalistes israéliens, au sein de l’armée et de l’université, qui n’avaient rien compris au Hamas avant le 7 octobre, et qui persistent – pour certains d’entre eux – dans l’erreur depuis lors. Nous voudrions évoquer à présent ceux qui avaient compris ce qu’était le Hamas, et dont la voix n’a pas été entendue.

 

Un ami, professeur d’études arabes et hébraïques à la Sorbonne, m’a récemment raconté comment sa candidature à l’université de Tel-Aviv avait été rejetée, au profit d’une candidate non-juive allemande, militante LGBT et dont les opinions étaient supposées plus conformes à la doxa. Au-delà de l’anecdote, cela dit quelque chose du biais politique dont souffrent la plupart des universités israéliennes. Or les conséquences de ce biais vont bien au-delà de l’université, et elles ont quelque chose à voir avec le 7 octobre. Quel est en effet le point commun entre les spécialistes de l’islam que sont Ephraim Errera, Paul Fenton, Eliezer Cherki ou Tsvi Yehezkeli?

 

Ce sont tous des Juifs pratiquants. C’est sans doute une des raisons qui les ont empêchés de succomber aux sirènes du politiquement correct concernant l’islam et leur ont permis d’aborder leur sujet d’étude avec un état d’esprit différent des tenants de la “Conceptsia” que nous avons évoqués précédemment. En effet, comme nous l’avons expliqué, c’est la dimension religieuse – et plus encore, la dimension eschatologique et apocalyptique – de l’islam contemporain[1] qui a échappé aux orientalistes mainstream israéliens, tant dans l’université que dans les Renseignements militaires. Pourquoi?

 

Pour une raison à la fois très simple et profonde. La plupart des islamologues, en Israël comme en Occident, ne peuvent s’empêcher de croire que les musulmans – y compris les plus radicaux – partagent avec nous certaines valeurs fondamentales, comme l’amour de la vie et le respect de l’autre. Ils sont incapables de penser le hiatus incommensurable qui nous sépare des tenants de l’islam militant, leur amour de la mort proclamé soir et matin et leur mépris de la vie humaine. Cet impensé est une des causes de la surprise tragique du 7 octobre.

 

Celui qui a le mieux expliqué cet aspect fondamental du conflit entre l’islam, l’Occident et Israël est un politologue français, Pierre Manent. Dans son lumineux Cours de philosophie politique, il explique ainsi que l’Occident contemporain est intimement persuadé que la guerre n’a pas de raison d’être, idée qui est devenue “un bien commun de la plupart des écoles philosophiques et des partis politiques”. Pour le comprendre, il faut relire un philosophe libéral du 19e siècle, Benjamin Constant, qui écrivait en 1814:

Nous sommes arrivés à l’époque du commerce, époque qui doit nécessairement remplacer celle de la guerre”.

 

En quoi cette citation d’un auteur vieille de deux siècles éclaire-t-elle notre réalité dramatique actuelle ? Parce que, explique Pierre Manent, “son présupposé est aussi le nôtre” et que “sa psychologie est la nôtre. Nous pensons que le désir du bien-être et du confort est plus raisonnable, plus naturel, plus humain que le souci de l’honneur et le désir de vaincre”. Or c’est précisément ce présupposé et cette psychologie qui sont au cœur de la Conceptsia, que nous nous efforçons de décrypter ici.

 

La majorité des Israéliens, de leurs dirigeants civils et militaires, ont ainsi été persuadés que les chefs du Hamas avaient eux aussi le “désir du bien-être et du confort”, pour eux et pour leur peuple, et que les valises d’argent du Qatar suffiraient à calmer leur ardeur guerrière… Hélas ! Ce présupposé a volé en éclats le 7 octobre, dans le chaos et l’horreur de la guerre terrible lancée par le Hamas, pour qui “le souci de l’honneur et le désir de vaincre” sont bien plus importants que toutes autres considérations pratiques ou matérielles.

 

Pour être capable de comprendre cette donnée fondamentale du conflit qui oppose le peuple qui sanctifie la vie à celui qui sanctifie la mort, il faut donc faire abstraction de trois siècles de pensée rationaliste et d’idéologie des droits de l’homme. Il faut être capable de se mettre à la place d’êtres humains dont les valeurs suprêmes sont, pour citer Manent, “le souci de l’honneur et le désir de vaincre”, et dont la conception même de la victoire n’a rien à avoir avec la nôtre. En deux mots ; il faut être capable d’appréhender un mode de pensée et une culture qui n’ont rien à voir avec les nôtres, ce que la “crème” des orientalistes ont visiblement été incapables de faire avant le 7 octobre.

P. Lurçat

 

[1] Je renvoie à mon article concernant le Hamas, publié initialement en 2009, Le Hamas, un mouvement islamiste apocalyptique - Le CAPE (jcpa-lecape.org)

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A la racine de la “Conceptsia” (II) : Ces orientalistes israéliens qui n'ont rien compris à l'islam

May 16 2024, 13:05pm

Posted by Pierre Lurçat

A la racine de la “Conceptsia” (II) :  Ces orientalistes israéliens qui n'ont rien compris à l'islam

Dans la première partie de cet article, nous nous interrogions sur ce spécialiste du Hamas qui prétendait – après le 7 octobre ! – que “les membres du Hamas sont des êtres humains comme nous”. Pour tenter de comprendre plus précisément encore son attitude et de savoir quelle a été l’erreur de ces orientalistes qui n’ont rien compris au Hamas, nous voudrions décrire leur erreur fondamentale, celle qui est à la base de tout l’édifice idéologique et intellectuel qui sous-tend la “Conceptsia”, la fameuse doctrine erronée qui a mené au 7 octobre.

 

Une enquête passionnante du journaliste Yaniv Kobovitz, récemment publiée dans Ha’aretz, cherche à comprendre comment les Renseignements militaires ont échoué à déchiffrer les intentions du Hamas avant le 7 octobre. Une des conclusions de cette longue enquête est que les dirigeants du département d’Aman (les Renseignements militaires) chargé du front Sud et de Gaza ne se préoccupaient plus, depuis 2021, de surveiller les faits et gestes des dirigeants du Hamas, étant entièrement obnubilés par les capacités strictement militaires du mouvement islamiste et par ses capacités de tirs de roquettes notamment.

 

Au-delà de cette explication très concrète, le fait est que les experts militaires ont – dans leur grande majorité – échoué à décrypter les intentions de l’ennemi à Gaza, en se focalisant sur des aspects purement techniques et opérationnels, au lieu de voir l’ensemble du tableau… Dans ce tableau général qu’ils ont négligé, un élément essentiel a particulièrement fait défaut : celui de l’idéologie et des croyances religieuses du Hamas. Paradoxalement ; c’est en effet la dimension religieuse du Hamas qui a largement échappé aux orientalistes experts du mouvement au sein de Tsahal.

 

Le soi-disant “pragmatisme” du Hamas : une illusion mortelle

 

Lorsqu’on relit aujourd’hui le livre consacré au Hamas par Avraham Sella, ancien analyste des Renseignements militaires, on est étonné (et accablé) de trouver à maintes reprises les adjectifs “pragmatique” ou “réaliste” pour décrire l’attitude des dirigeants du mouvement islamiste palestinien. Tout se passe comme si cet expert – qui n'est évidemment pas le seul dans ce cas – avait projeté sur les dirigeants du Hamas sa propre vision du monde et ses propres valeurs (rationalité, pragmatisme, poursuite d'intérêts économiques, etc.), au lieu de chercher à pénétrer dans la tête du Hamas.

 

Cette erreur capitale est très répandue. Elle repose sur une attitude commune à chacun de nous. Confrontés à d'autres hommes qui ne partagent pas notre culture, nous avons tendance à croire qu'ils ont néanmoins en commun avec nous certaines valeurs fondamentales, comme le respect de la vie ou l'amour de la paix. S'agissant du Hamas et de l'islam, cette croyance est totalement erronée. Ce n'est pas seulement que les terroristes de la Nou’hba et leurs chefs n'ont aucun respect pour la vie des civils israéliens, y compris les femmes et les enfants, mais ils n'en ont pas plus pour la vie de leurs propres concitoyens à Gaza…

 

C'est précisément cet écart culturel et moral incommensurable entre les valeurs de l'Occident et celles de l'islam qui rend difficile, voire quasiment impossible, toute négociation avec le Hamas sur les otages détenus à Gaza. Et c'est l'incapacité de ces experts à appréhender la culture de l'ennemi qui a rendu possible la surprise du 7 octobre, alors que “l'inscription était sur le mur”... Le refus d'aborder l'islam pour ce qu'il est, à savoir une culture mortifère et rétrograde, a empêché ces experts de faire leur travail et de donner à Israël les moyens d'anticiper l'attaque meurtrière du 7 octobre.

 

Comme l’explique le Dr. Michael Milstein, ancien des Renseignements militaires qui est un des voix discordantes dans la communauté des “orientalistes” israéliens, “celui qui se demande pourquoi le Hamas a déclenché l’attaque du 7 octobre et mis ainsi en péril son propre pouvoir démontre qu’il n’a rien compris au Hamas, qui est un mouvement religieux messianiste”. Dans la suite de cet article, nous tenterons de comprendre pourquoi c’est précisément cette dimension religieuse et messianiste du Hamas qui a échappé aux experts israéliens. (à suivre…)

Pierre Lurçat

 

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Ramadan : la question occultée - L’islam, la violence et le sacré, Pierre Lurçat

March 6 2024, 08:42am

Posted by Pierre Lurçat

7 octobre : une violence intrinsèque à l'islam

7 octobre : une violence intrinsèque à l'islam

L’observateur attentif de l’actualité, en France, en Israël ou ailleurs, n’aura pas manqué de constater que le mois du Ramadan, mois le plus sacré du calendrier musulman, est aussi celui marqué chaque année par une vague de violences. Ce “secret” est évidemment bien gardé par les médias et les hommes politiques occidentaux, qui préfèrent s’afficher lors de repas de l’Iftar et faire des déclarations d’amitié et de “dialogue interreligieux”. Mais ce n’est pas sur la question de cette attitude – marquée par l’hypocrisie ou par la condescendance – que je voudrais m’interroger ici. Une question plus essentielle encore est en effet de savoir comment s’explique ce lien entre violence et sacré. Est-il intrinsèque à l’islam et peut-il dans ce cas être modifié ?

 

La première réponse possible est qu’il ne s’agit pas de l’islam tout entier, mais d’une branche bien particulière de l’islam – à savoir, l’islam politique des Frères musulmans, dont sont issues les principaux mouvements islamistes (du Hamas à Al-Qaïda), comme je l’ai montré dans mon livre Le sabre et le Coran. Effectivement, la plupart des attentats terroristes à notre époque émanent de mouvements radicaux qui partagent tous une vision particulière de l’islam, dans laquelle le Djihad a été érigé en “sixième pilier”’ de l’islam. Quoique juste, cette réponse est loin d’épuiser le sujet. Elle risque au contraire d’obscurcir la question.

 

Violence de l’islam ou violence dans l’islam ?

 

En réalité, le problème de la violence dans l’islam est intrinsèquement lié à l’islam en tant que religion, en tant que culture et en tant que civilisation : on doit ainsi parler de la violence de l’islam et pas seulement de la violence dans l’islam. A cet égard, l’islamisme (ou l’islam politique) n’est pas, comme l’avait cru l’écrivain tunisien Abdelwahab Meddeb, une “maladie de l’islam”, mais bien son expression la plus authentique qui soit. Israël l’a encore appris à ses dépens le 7 octobre dernier… Le Hamas, comme je l’ai écrit depuis lors, parle le langage de l’islam et c’est la raison principale de son succès au sein de la population de Gaza et ailleurs.

 

Une autre réponse est donnée par Marie-Thérèse Urvoy dans un livre récent. Le Coran lui-même, explique-t-elle, est marqué par une “ambiguïté initiale” et par une “tension interne entre visée spirituelle et ambition d’emprise sur le monde”. La vie même du Prophète permet de comprendre cette dualité. En effet, dans sa période mecquoise, celui-ci est persécuté et se considère comme victime, ce qui l’amène à prêcher la patience et le pardon des offenses. Plus tard, devenu un chef de guerre victorieux, il appelle au djihad physique contre les mécréants, proclamés ennemis de l’islam. L’orientation guerrière du texte coranique apparaît ainsi dans la fameuse Sourate 9, qui appelle au “combat dans le Sentier de Dieu”, expression promise à un brillant (et sanglant) avenir.

 

La troisième réponse tient à ce que René Girard appelait dans son livre La violence et le sacré le “désir mimétique”, qui engendrait la violence dans les sociétés primitives. A de nombreux égards, l’islam n’a pas réussi à dépasser cette étape de l’histoire commune aux grandes religions, et reste jusqu’à ce jour empêtré dans une vision binaire du monde, où la violence demeure la clé d’appréhension et de résolution des conflits. Comment l’islam, auquel la notion même d'histoire est largement étrangère, pourra-t-il évoluer et faire son aggiornamento ? La réponse appartient aux musulmans eux-mêmes. Quant à l’Occident, il devrait soutenir toutes les forces progressistes et réformistes authentiques au sein du monde musulman, au lieu de chercher des alliances contre nature avec les Frères musulmans et leurs épigones.

Pierre Lurçat

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Comprendre le langage de l’ennemi (II) : le Hamas parle-t-il au nom de l’islam ?

November 8 2023, 10:18am

Comprendre le langage de l’ennemi (II) : le Hamas parle-t-il au nom de l’islam ?

Une pétition signée par une poignée d’intellectuels musulmans de langue française déplore que le slogan « Not in my name » n’ait pas suffisamment retenti lorsque la barbarie a frappé Israël. Leur texte est courageux et révélateur : aux yeux de la majorité des musulmans, en France et ailleurs, la barbarie du Hamas n’est pas condamnable. Ce constat terrible, qu’on préfère souvent passer pudiquement sous silence (à l’instar du rabbin Haïm Korsia), a des explications multiples, tant sociopolitiques que culturelles. Mais la première explication tient au fait très simple que les exactions du Hamas s’inscrivent dans une longue tradition, que l’islam n’a jamais été capable de répudier : la tradition du djihad.

 

Comme l’explique l’historienne Bat Ye’or dans une récente interview, « l’agression du Hamas contre l’Etat d’Israël et ses civils » est « un acte s’inscrivant dans la tradition juridique djihadiste, son éthique, sa stratégie et ses tactiques. L’histoire des conquêtes islamiques sur trois continents regorge de tels récits ». Ce constat d’une historienne qui a consacré sa vie à l’étude du djihad et de son pendant, la dhimmitude, est tellement aveuglant qu’on préfère généralement s’en détourner, pour se persuader qu’il existe une autre « version » de l’islam, qu’on dénomme tantôt « islam quiétiste », « islam spirituel » ou « islam des lumières ». Mais cela relève malheureusement de l’auto-intoxication, car cet autre islam n’existe le plus souvent que dans l’imagination des Occidentaux.

 

Si la barbarie du Hamas (similaire à celle de l’Etat islamique et des autres mouvements djihadistes contemporains) n’est pas condamnée par les représentants officiels de l’islam, en France et dans le monde, c’est pour la raison à la fois simple et profonde, que cette barbarie ne constitue pas un « écart », une transgression ou une violation des principes de l’islam. Elle constitue tout au plus l’application la plus rigoriste et la plus sanguinaire des principes du djihad, tels qu’ils ont été codifiés et appliqués pendant des siècles de conquête musulmane.

 

C’est ce qui rend le combat contre le Hamas si difficile : les terroristes du Hamas se fondent en effet dans la population de Gaza comme un « poisson dans l’eau », pour reprendre l’image du président Mao Zedong. Ils sont chez eux à Gaza, et leurs exactions sont acceptées comme conformes à la culture ambiante. Les civils de Gaza qui ont pris part aux viols, aux tueries et aux actes barbares commis le 7 octobre dans les kibboutz frontaliers de Gaza n’étaient pas entraînés, ou appelés en renfort par le Hamas : ils se sont joints spontanément à la « razzia » contre l’ennemi juif.

 

Le Hamas parle le langage de l’islam

 

Le Hamas n’est pas seulement au pouvoir à Gaza depuis le retrait désastreux orchestré par Ariel Sharon en 2005, il est également présent en Judée-Samarie. Mais sa présence ne repose pas seulement sur la domination politique et sur la terreur qu’il exerce régulièrement contre ses opposants. Elle s’appuie également sur la porosité entre son discours et les thématiques de l’islam traditionnel. Le Hamas parle le langage de l’islam, celui que tous les musulmans pratiquants dans le monde entier connaissent et dans lequel ils ont grandi.

 

Nous en donnerons un seul exemple : celui du Hadith de la pierre et de l’arbre. Ce hadith (dire attribué au prophète) est cité à l’article 7 de la Charte du Hamas. « L’Heure ne viendra pas avant que les Musulmans ne combattent les Juifs et les tuent ; jusqu’à ce que les Juifs se cachent derrière des rochers et des arbres, et ceux-ci appelleront : O Musulman, il y a un Juif qui se cache derrière moi, viens et tue-le ! »

 

Ce hadith a été récemment invoqué par l’imam de Beaucaire, petite ville du département du Gard, dans le sud de la France. Lorsque l’imam a été inculpé et poursuivi devant le tribunal correctionnel, il a déclaré pour sa défense : « C’est le récit de ce qui va se passer à la fin des temps ». Cette réponse exprime en toute simplicité ce que pensent des millions de musulmans à travers le monde. Elle signifie que la guerre contre le Hamas n’est pas seulement une guerre contre le terrorisme, ou contre un territoire (Gaza) : elle est aussi, comme l’ont bien compris les amis d’Israël dans le monde, une guerre de civilisation. C’est ce qui la rend difficile et longue. Mais « le peuple éternel n’a pas peur d’un long chemin ». Jusqu’à la victoire ! Ad hanitsahon!

P. Lurçat

 

Comprendre le langage de l’ennemi (I) : Les Juifs et Israël dans la vision du monde de l’islam et du Hamas, Pierre Lurçat - VudeJerusalem.over-blog.com

 

 

Éditions L’éléphant

Paris-Jérusalem, le 7/11/2023

 

COMMUNIQUÉ:

PARUTION DU LIVRE “FACE A L’OPACITÉ DU MONDE”

 

L’attaque meurtrière du Hamas le 7 octobre est le résultat de la combinaison  entre l’archaïque et le numérique, entre une idéologie barbare et une technologie moderne (celle qui a permis de tromper les renseignements militaires israéliens). Or, cette combinaison n’est pas un élément isolé; elle décrit très bien la réalité de notre monde au XXIe siècle, où le développement technologique se déploie de manière concomitante avec un abêtissement généralisé et une incapacité de distinguer entre le vrai et le faux, entre le bien et le mal.

 

Ce n’est pas seulement le rêve illusoire de la «paix maintenant » qui a volé en éclats le 7 octobre, mais aussi, sans doute, celui d’une certaine intelligibilité du monde. L’ère de la surinformation qui est la nôtre est aussi celle d’une opacité grandissante des événements, face à la multiplicité des interprétations et des opinions individuelles, érigées en vérités. Comment comprendre l’attitude de ces étudiants juifs américains manifestant contre la riposte israélienne à Gaza, sur les campus des universités les plus prestigieuses et, plus généralement, de tous ceux qui établissent une équivalence morale entre les victimes des exactions du Hamas et les victimes civiles à Gaza? Comment expliquer que des gens intelligents croient à des idées folles?

 

Contrairement à la promesse mensongère de plus grande accessibilité du monde, sur laquelle repose toute l’industrie des nouveaux médias, le monde n’a jamais été aussi opaque et insaisissable qu’il ne l’est devenu aujourd’hui. C’est précisément parce que nous sommes submergés d’informations que nous ne savons plus qui croire, entre les médias traditionnels et leurs concurrents numériques, entre la multitude d'opinions et d'analyses qu'aucun critère ne permet de différencier, dans l’océan d’Internet dont aucune balise ne permet de déchiffrer la cartographie invisible.

 

L’auteur

Né à Princeton, Pierre Lurçat a grandi à Paris et vit à Jérusalem. Il a publié plusieurs essais, parmi lesquels des Préceptes tirés de la sagesse juive (Presses du Chatelet), Israël, le rêve inachevé (éditions de Paris), et Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain. Il a fondé en 2021 la Bibliothèque sioniste.



 

Les demandes de service de presse (papier ou numérique) doivent être adressées à editionslelephant@gmail.com

 

www.editions-elephant.com

Comprendre le langage de l’ennemi (II) : le Hamas parle-t-il au nom de l’islam ?

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Lettre ouverte au président français Emmanuel Macron : "Ceux qui glorifient le nom du Hamas en France..."

October 23 2023, 10:15am

Posted by Pierre Lurçat

 

Ceux qui glorifient les ennemis d’Israël, et qui attaquent les symboles et le nom même d’Israël, s’en prennent inéluctablement, en fin de compte, au nom de la France et au nom de l’Homme”. Cette lettre a été rédigée et publiée initialement après la décapitation de Samuel Paty, il y a exactement 3 ans. Je la republie aujourd’hui alors que le président Macron s’apprête à venir en Israël, et alors que des milliers de manifestants défendent le Hamas dans les rues de Paris et de France. P.L

Il aura donc fallu attendre qu’un enseignant français soit décapité à la sortie de son lycée, dans un crime dont la description évoque celle d’assassinats commis au Pakistan ou dans l’Etat islamique, pour que vous vous décidiez à dissoudre le “Collectif Cheikh Yassine”… Il aura fallu attendre que l’horreur de l’islam radical le plus barbare frappe la France, encore une fois, pour que vous finissiez par comprendre qu’on ne peut pas impunément glorifier le nom d’un assassin d’Israéliens, hommes, femmes, enfants - eux aussi tués dans des attentats tout aussi horribles, déchiquetés dans des autobus ou à la terrasse de cafés - par les assassins du Hamas, qu’il était jusqu’hier encore permis de soutenir sur le sol français.

 

Parmi les nombreuses erreurs commises par votre pays, que d’autres que moi ont analysées ces derniers jours (notamment Georges Bensoussan et Valérie Toranian), je voudrais en souligner ici une qui n’a pas encore, à ma connaissance, été mentionnée. Je veux parler de l’erreur de croire que la haine d’Israël est sans conséquence et sans danger pour la France. Cette erreur est à la fois politique, stratégique et morale. Erreur stratégique, car comment avez-vous pu penser que ceux qui brandissent le drapeau du Hamas en France le faisaient uniquement au nom de leur haine d’Israël, et que celle-ci ne pouvait pas, le moment venu, se retourner contre la France elle-même?



 

Ceux qui glorifient le Hamas en France...

 

Comme l’écrit justement Valérie Toranian, la décapitation de Samuel Paty est la preuve qu’entre les militants de l’islam politique, la radicalisation et le terrorisme, il existe une chaîne de continuité”. J’ai moi aussi souligné cette continuité, dans un livre publié il y a déjà 15 ans, en observant que la lutte contre le terrorisme islamique exigeait aussi de combattre l’islam politique. J’avais alors pris pour exemple le CBSP, organe officiel de collecte d’argent pour le Hamas en France, qui continue jusqu’à ce jour de récolter des fonds pour le Hamas en toute impunité. Cette impunité offerte aux soutiens du Hamas en France est également une erreur politique, car elle place de facto la France dans le camp des ennemis d’Israël. 

 

Comment pouvez-vous prétendre vous inspirer d’Israël pour lutter contre le terrorisme islamique, tout en permettant que soient glorifiés sur le sol français les assassinats terroristes commis sur le sol israélien? Cela fait déjà longtemps que les amis d’Israël en France - et pas seulement au sein de la communauté juive - ont pointé du doigt cette contradiction intolérable. Si la France veut tirer les leçons de la décapitation de Samuel Paty, elle doit non seulement dissoudre le “Collectif Cheikh Yassine”, directement impliqué dans cet assassinat, mais interdire aussi tous les groupuscules et associations qui participent de la même glorification  du Hamas en France, comme la CAPJPO-Europalestine et d’autres. 

 



 

Ceux qui brandissent les drapeaux du Hamas et du Hezbollah dans les rues de France ne sont pas seulement les ennemis d’Israël et du peuple Juif, mais aussi les ennemis de la France. Il ne s’agit pas là d’une affirmation rhétorique ou politique, mais d’une loi d’airain de l’histoire, que vous ne pouvez plus ignorer aujourd’hui. La tolérance dont ont trop longtemps bénéficié les soutiens du Hamas est aussi et surtout une erreur et une faute morale. On ne peut en effet autoriser les partisans du Cheikh Yassine à afficher leur haine des Juifs sur le sol français en toute impunité, sans conséquence pour la France. 

 

Car à travers la personne de Samuel Paty, ce sont certes les valeurs de la France laïque et républicaine qui ont été décapitées, mais c’est aussi une certaine idée de l’humanité de l’homme. Ceux qui glorifient les ennemis d’Israël, et qui attaquent les symboles et le nom même d’Israël, s’en prennent inéluctablement, en fin de compte, au nom de la France et au nom de l’Homme. Comme l’avait écrit le pasteur allemand Martin Niemöller, “Quand ils sont venus chercher les juifs, je n'ai rien dit car je n'étais pas juif... Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n'ai rien dit car je n'étais pas syndicaliste. Et quand ils sont venus me chercher, il n'existait plus personne qui aurait voulu ou pu protester...” Aujourd’hui, Monsieur le Président, ce ne sont plus les Juifs qu’ils viennent chercher, c’est vous.

 

Pierre Lurçat, Jérusalem

 

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Comprendre le langage de l’ennemi (I) : Les Juifs et Israël dans la vision du monde de l’islam et du Hamas, Pierre Lurçat

October 20 2023, 07:56am

Posted by Pierre Lurçat

Comprendre le langage de l’ennemi (I) :   Les Juifs et Israël dans la vision du monde de l’islam et du Hamas, Pierre Lurçat

NB J'analyse l'idéologie du Hamas au micro d'Ilana Ferhadian sur Radio J.

Les juifs sont très présents dans le Coran, qui les qualifie tantôt de Banu-Isra’il (Enfants d’Israël, expression calquée de l’hébreu), al-yahûd (juifs) ou encore ahl al-kitab (peuple du Livre). Cette dernière expression est ambivalente, explique Meir Bar-Asher, car le peuple du Livre est parfois qualifié dans la tradition musulmane « d’âne chargé de livres », c’est-à-dire un peuple porteur d’un héritage dont il n’est pas digne. Cette qualification renvoie à l’accusation récurrente envers les juifs, selon laquelle ils auraient « falsifié » les textes sacrés dont ils étaient dépositaires.

 

Dans le lexique politique de l’islamisme contemporain et dans celui du Hamas, il est utile de le préciser, c’est l’appellation al-yahud qui prédomine de manière quasiment exclusive. Le combat du Hamas ne vise pas les « enfants d’Israël » ou le « peuple du Livre », mais bien les Juifs, le mouvement islamiste ayant totalement occulté l’identité israélienne dans son vocabulaire. Ce combat contre les juifs est central, essentiel et ne peut se terminer que par la victoire de l'islam. Cela ressort à la fois de l’actualité la plus brûlante et de l’analyse de la Charte du Hamas, encore trop méconnue et souvent interprétée à tort.

 

Le préambule de la Charte du Hamas affirme pourtant de manière claire la centralité du « combat contre les Juifs »[2], qui doit être mené « jusqu’à ce que [les] ennemis soient vaincus et que la victoire d’Allah soit établie ». Un des passages clés de la Charte du Hamas, qui éclaire la vision du monde du mouvement islamiste palestinien, est le Hadith cité dans l’article 7 : « L’Heure ne viendra pas avant que les Musulmans ne combattent les Juifs et les tuent ; jusqu’à ce que les Juifs se cachent derrière des rochers et des arbres, et ceux-ci appelleront : O Musulman, il y a un Juif qui se cache derrière moi, viens et tue-le ! »

 

Ce Hadith, cité sur d’innombrables sites Internet musulmans, signifie que le « combat contre les juifs » constitue pour le Hamas un impératif non seulement politique, mais eschatologique[1]. L’affrontement avec les Juifs n’est pas seulement le moyen de récupérer la terre de Palestine, qui constitue un Waqf musulman inaliénable, mais il est la condition sine qua non à la venue de la Fin des temps. Les observateurs non-musulmans, souvent ignorants de la vision du monde islamiste en général, et de ses croyances eschatologiques en particulier, sont enclins à croire que l’islamisme n’est qu’un extrémisme de façade, et qu’il suffit qu’il soit confronté au pouvoir pour qu’il devienne plus « réaliste » et pragmatique...  C’est précisément cette erreur de conception qui a permis la situation dans laquelle Israël vit depuis bientôt deux décennies et le terrible piège dans lequel Israël est tombé le samedi 7 octobre.

 

La vision apocalyptique de l’affrontement ultime avec Israël du Hamas exclut toute possibilité de coexistence ou de modération, et elle est identique à celle des mouvements djihadistes les plus radicaux. Loin d’être un épiphénomène, l’antisémitisme du Hamas constitue le cœur de sa doctrine politico-religieuse. Au vu de ce qui précède, la guerre dans laquelle Israël est aujourd’hui plongé ne peut avoir qu’un seul objectif : l’annihilation totale du Hamas, de ses infrastructures civiles et militaires et de ses dirigeants.

P. Lurçat

 

Cet article est paru originalement dans une version écourtée sur le site du CAPE.

Comprendre le langage de l’ennemi (I) :   Les Juifs et Israël dans la vision du monde de l’islam et du Hamas, Pierre Lurçat

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Le Hamas, un mouvement islamiste apocalyptique, par Pierre Lurçat

October 8 2023, 14:16pm

Posted by Pierre Lurçat

Le Hamas, un mouvement islamiste apocalyptique, par Pierre Lurçat
 

Trente-cinq ans après sa création, le Hamas palestinien demeure très mal connu en Occident. Alors qu’il est évoqué presque quotidiennement par les médias, il fait l’objet d’un nombre très réduit d’ouvrages sérieux et demeure un sujet mystérieux pour le public occidental.

Le présent article aborde un aspect essentiel et peu souvent étudié du mouvement islamiste palestinien.

 

Résumé : Le Hamas est un mouvement islamiste radical, dont l’idéologie exprime une vision du monde marquée par les thèmes de l’eschatologie musulmane, dans lesquels les Juifs occupent une place centrale. Sa vision apocalyptique de l’affrontement ultime avec Israël exclut toute possibilité de coexistence ou de modération, et elle est identique à celle des mouvements djihadistes les plus radicaux.

L’erreur la plus répandue lorsque l’on parle des mouvements islamistes contemporains, et notamment du Hamas, consiste à les envisager à l’aide des concepts et des manières de penser propres à l’Occident. La plupart des analyses occidentales du phénomène islamiste ont souvent tendance à sous-estimer, voire à occulter un aspect fondamental, que l’on retrouve dans toutes les différentes mouvances et organisations islamistes : celui des croyances religieuses musulmanes, et plus précisément de l’eschatologie musulmane.

C’est ainsi qu’un islamologue français réputé, auteur d’ouvrages importants sur l’islamisme contemporain, peut expliquer la révolution islamique iranienne de 1979 par "l’alliance de la bourgeoisie pieuse et de la jeunesse urbaine pauvre ", et que de nombreux journalistes continuent à décrire les auteurs - palestiniens et autres - des attentats-suicides comme des "désespérés" et des laissés pour compte, alors même que toutes les recherches entreprises sur le sujet démontrent que cette grille de lecture sociologique ou marxisante ne correspond pas à la réalité.

En Israël aussi, de nombreux observateurs sous-estiment la dimension eschatologique de l'idéologie du Hamas, et les dirigeants (civils et militaires) israéliens partagent pour la plupart d'entre eux l'idée erronée selon laquelle on pourrait "discuter" ou "négocier" avec le Hamas de manière policée et rationnelle...

Il est impossible de comprendre les succès remportés par le Hamas et la persistance de l’islamisme - dont de nombreux observateurs occidentaux annoncent régulièrement l’essoufflement ou même la prochaine disparition - si l’on fait abstraction des croyances des acteurs des mouvements islamistes ou si l’on en diminue l’importance, en les considérant comme des balivernes moyenâgeuses dénuées de signification concrète.

Il faut écouter ce que disent les islamistes et accorder du poids à leur discours, si l’on veut tenter de comprendre leurs motivations et leurs stratégies. Il est significatif à cet égard de constater que les médias occidentaux, qui parlent régulièrement des événements du Proche-Orient et de la rivalité entre le Hamas et le Fatah, ne mentionnent presque jamais la Charte du mouvement islamiste.

Que veut le Hamas?

Une analyse courante du mouvement islamiste palestinien consiste à en faire un clone du Fatah, dont il ne différerait que par l’habillage religieux donné à son combat contre Israël. Selon cette conception, répandue dans les chancelleries occidentales, il suffirait d’attendre patiemment pour que le Hamas modère ses ambitions et accepte d’entrer dans le jeu des négociations afin de parvenir à une coexistence avec Israël.

Le préambule de la Charte du Hamas affirme pourtant de manière claire la centralité du "combat contre les Juifs", qui doit être mené "jusqu’à ce que [les] ennemis soient vaincus et que la victoire d’Allah soit établie". Pour saisir la conception de l’islam qui est celle du Hamas, il faut accepter de mettre de côté l’idée occidentale de la religion, conçue comme une sphère bien délimitée de l’existence. L’histoire de l’Occident chrétien est en effet celle d’une relégation toujours plus poussée de la part du religieux dans l’existence. C’est pourquoi il est difficile pour un occidental de se représenter la manière dont un Musulman non occidentalisé peut concevoir l’islam.

L’eschatologie, au coeur du conflit entre l’islam et l’Occident

Un des aspects essentiels - et méconnus - de l’islamisme contemporain est celui des croyances eschatologiques. La dimension eschatologique de l’islam a souvent été minimisée, parfois pour des raisons polémiques, le christianisme se présentant comme la seule religion tournée vers l’au-delà, en rejetant l’islam dans le domaine des seules préoccupations terrestres.

Cette dimension oubliée est fondamentale dans la résurgence actuelle d’un islam conquérant, car elle traverse tous les clivages du monde musulman - entre sunnisme et chiisme, entre islam traditionnel et islamisme contemporain - et permet de comprendre de très nombreux aspects du réveil de l’islam.

Comme l’explique un historien français, "l’eschatologie représente un des traits fondamentaux de la religion musulmane. L’imminence de la fin des temps et du Jugement dernier est l’un des thèmes coraniques les plus anciens et les plus constants, qui parcourt l’ensemble du texte sacré de l’islam". Mohammed étant le dernier prophète (le "sceau de la prophétie"), sa venue inaugure la dernière période de l’histoire universelle, c’est-à-dire la période eschatologique.

Dans son recueil de Hadith intitulé "Les grands signes de la fin du monde depuis la mission du prophète jusqu’au retour de Jésus", Abdallah al-Hajjaj cite une parole du prophète, affirmant en levant sa main que sa mission et l’Heure dernière étaient rapprochées comme son majeur de son index. Cette croyance à l’imminence de la fin des temps est un aspect fondamental du réveil de l’islam dans le monde actuel, sous ses formes pacifiques et guerrières.

L’islam chiite est parfois présenté comme étant le seul à accorder une importance aux considérations eschatologiques. Il est vrai que le thème du retour de l’Imam caché, élément central des croyances de l’islam chiite, se prête facilement aux interprétations eschatologiques. Depuis la révolution islamique iranienne, en 1979, les aspirations eschatologiques occupent le devant de la scène au sein du monde musulman chiite. La croyance en l’imminence du Jugement dernier permet d’expliquer tant les comportements suicidaires, qui se sont multipliés depuis les années 1980, lors de la guerre Iran-Irak, que l’attitude actuelle des dirigeants iraniens.

La dimension eschatologique du mouvement islamiste sunnite

Mais l’eschatologie est tout autant présente dans l’islam sunnite, et elle joue un rôle central dans le développement des mouvements islamistes sunnites. Toutes les composantes de la mouvance islamiste contemporaine, depuis les Frères musulmans jusqu’au Hamas et à la nébuleuse Al-Qaida, partagent en effet l’espoir de voir le Califat islamique reconstitué et considèrent le "renouveau de l’islam" comme le signe manifeste de la véracité des prophéties concernant la victoire finale de l’islam et sa propagation dans le monde entier.

On peut citer à titre d’exemple cette fatwa du cheikh Qaradawi, idéologue important du mouvement islamiste et organisateur de l’islam européen  :

On posa au prophète Mahomet la question suivante : ’Quelle ville sera conquise en premier, Constantinople ou Romiyya?’ Il répondit : ’La ville d’Héraklès sera conquise en premier’, c’est-à-dire Constantinople... Romiyya est aujourd’hui la ville appelée ’Rome’, capitale italienne. La ville d’Héraklès fut conquise en 1453 par Mohammed Ben Morad, jeune Ottoman de 23 ans connu sous le nom de Mohammed le Conquérant. L’autre ville, Romiyya, reste à conquérir, et nous espérons et croyons qu’elle le sera.

Cela signifie que l’islam retournera en Europe en conquérant et en vainqueur, après en avoir été expulsé deux fois : une fois d’Andalousie, au Sud, l’autre fois à l’Est, après qu’il eut frappé aux portes d’Athènes… Il est facile bien entendu d’écarter du revers de la main cette prophétie relative à la conquête de Rome, en la considérant comme n’étant pas plus digne de foi que celles de Nostradamus. Mais cela serait une grave erreur d’appréciation. L’essentiel n’est pas en effet d’apporter foi aux prophéties de Mohammed, rapportées dans les Hadith, mais de prendre conscience de l’importance que les Musulmans eux-mêmes leur accordent.

Ce sont en effet les croyances des acteurs des mouvements islamistes qui permettent de comprendre leurs motivations et leurs aspirations : l’organisation des Frères musulmans est ainsi persuadée - depuis sa création en 1928 - qu’elle incarne le renouveau de l’islam, et que son rôle est de faire flotter l’étendard de l’islam sur les cinq continents. Présenter les Frères musulmans comme l’incarnation d’un "islamisme modéré" revient donc à faire mentir les convictions les plus ancrées de leurs membres...

La Charte du Hamas, un document à forte connotation apocalyptique

La même erreur de perspective se retrouve dans l’analyse des objectifs du Hamas, que l’on présente régulièrement comme étant en voie de "modération" et sur le point de reconnaître le droit à l’existence d’Israël. Un des passages clés de la Charte du Hamas, qui éclaire la vision du monde du mouvement islamiste palestinien, est le Hadith cité dans l’article 7 :

L’Heure ne viendra pas avant que les Musulmans ne combattent les Juifs et les tuent ; jusqu’à ce que les Juifs se cachent derrière des rochers et des arbres, et ceux-ci appelleront : O Musulman, il y a un Juif qui se cache derrière moi, viens et tue-le !

Ce Hadith, cité sur d’innombrables sites Internet musulmans, signifie que le "combat contre les juifs" constitue pour le Hamas un impératif non seulement politique, mais eschatologique. L’affrontement avec les Juifs n’est pas seulement le moyen de récupérer la terre de Palestine, qui constitue un Waqf musulman inaliénable, mais il est la condition sine qua non à la venue de la Fin des temps.

Les observateurs occidentaux, souvent ignorants de la vision du monde islamiste en général, et de leurs croyances eschatologiques en particulier, sont enclins à croire que l’islamisme n’est qu’un extrémisme de façade, et qu’il suffit qu’il soit confronté au pouvoir pour qu’il devienne plus "réaliste" et pragmatique... Un exemple récent de cette erreur d’appréciation nous a été fourni par l’interprétation abusive donnée d’une interview du chef du bureau politique du Hamas, Khaled Mashal. Il aura suffi que le dirigeant du Hamas prononce quelques mots soigneusement calculés, dans une interview à l’agence Reuters , pour que les médias du monde entier se mettent à en tirer des conclusions hâtives et abusives, sur la "reconnaissance d’Israël par le Hamas".

Une analyse succincte de l’idéologie et des principes qui guident l’action du mouvement islamiste palestinien montre cependant qu’il ne saurait être question pour le Hamas de reconnaître le droit d’Israël sur la terre comprise entre la Méditerranée et le Jourdain, ni de renoncer à la lutte armée. Au-delà des discours destinés aux oreilles occidentales - toujours à l’affût de signes d’une "évolution" et d’un "assouplissement" du Hamas – celui-ci reste fidèle à sa raison d’être et à son idéologie, qui est exprimée dans sa Charte.

Un antisémitisme apocalyptique et rédempteur

Le Hamas demeure un mouvement islamiste radical, dont l’idéologie exprime une vision du monde marquée par les thèmes de l’eschatologie musulmane, dans lesquels les Juifs occupent une place centrale. Sa vision apocalyptique de l’affrontement ultime avec Israël exclut toute possibilité de coexistence ou de modération, et elle est identique à celle des mouvements djihadistes les plus radicaux.

Loin d’être un épiphénomène, l’antisémitisme du Hamas constitue le coeur de sa doctrine politico-religieuse. La haine des Juifs exprimée dans la Charte du Hamas et véhiculée dans les discours de ses dirigeants n’est pas un simple antijudaïsme religieux ou un antisémitisme importé d’origine européenne : il s’agit d’un antisémitisme apocalyptique et rédempteur, pour reprendre la qualification de Pierre-André Taguieff qui compare la judéophobie islamiste radicale - pour laquelle « le monde musulman ne peut être sauvé que par l’extermination des Juifs » - à l’antisémitisme raciste hitlérien.

Il est troublant de voir que l’Occident, loin de condamner le discours apocalyptique du Hamas, l’encourage, comme le faisait remarquer le professeur Richard Landes. Cette attitude s’explique sans doute par le fait que la conviction exprimée par les dirigeants du Hamas, de la disparition prochaine d’Israël, est partagée par certains diplomates et dirigeants européens.

Pierre Lurçat

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Rencontre avec Bat Ye’or : oui, l’islam peut être réformé

July 23 2023, 13:25pm

Posted by Pierre Lurçat

Bat Ye'or (photo P. Lurçat/Israel Magazine)

Bat Ye'or (photo P. Lurçat/Israel Magazine)

(extraits de l'interview publiée dans Israël Magazine)

 

Je connais Bat Ye’or depuis plus de trente-cinq ans, mais chaque rencontre avec elle est une occasion d’apprendre et de s’émerveiller. A l’âge de quatre-vingt-dix ans, elle reste aussi vive d’esprit que lors de notre premier entretien. Sa visite à Jérusalem est motivée par la parution en hébreu du livre consacré à l’opération Mural (à laquelle j’avais consacré un article dans Israël Magazine). Une cérémonie s’est tenue à cette occasion à l’université Bar Ilan...

P.L. Pensez-vous que l’islam peut être réformé ? L’espoir est-il plutôt de voir des musulmans quitter l’islam, ou alors celui d’une véritable réforme théologique de l’islam ?

B.Y. Beaucoup de musulmans voudraient une réforme islamique. Mais il faudrait que les grandes autorités de l’islam acceptent de réviser les concepts de djihad et de dhimmitude.

P.L Certains disent que l’islam ne peut pas changer…

B.Y. Ce n’est pas vrai. Il est tout à fait possible que l’islam change, d’abord parce qu’il existe deux Corans, le Coran de Médine et le Coran de la Mecque, qui sont très différents (les versets dits “médinois” sont plus belliqueux que ceux dits “mecquois”, P.L). Et il y a aussi les hadith, dont beaucoup ont été supprimés, car de nombreux intellectuels musulmans considèrent qu’ils ne sont pas authentiques. On peut aussi travailler sur les débuts de l’islam et favoriser des attitudes politiques plus conformes à la modernité, comme l’ont fait le christianisme, le judaïsme et toutes les grandes religions, tout en conservant le meilleur des valeurs religieuses.

P.L. Cela veut dire que vous restez optimiste ?

B.Y. Oui… Il y a beaucoup de musulmans qui sont favorables au changement. Mais c’est à eux qu’il appartient de réaliser ce changement. Nous ne pouvons pas le faire à leur place. Si nous en Occident, comprenons les défis que pose l’islam et adoptons une attitude plus adaptée, notamment en freinant l’immigration de populations dont la religion incite à la haine de la population d’accueil, et en menant une politique adaptée aux réalités de l’islam. Cela implique de cesser de vivre dans le déni perpétuel et le mensonge de la “tolérance” musulmane… L’Europe vit dans le déni. J’ai moi-même été enfermée dans un purgatoire pour avoir parlé de ce sujet et avoir publié des livres qui l’abordent.

Nous nous quittons sur ces paroles pleines de lucidité et d’espoir. Merci, Bat Ye’or, pour vos livres, pour combat et pour votre courage !

Retrouvez l'intégralité de l'entretien dans le dernier numéro d'Israël Magazine

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Trois réflexions sur la situation en France vue d'Israël, Pierre Lurçat

July 3 2023, 16:45pm

Posted by Pierre Lurçat

Trois réflexions sur la situation en France vue d'Israël, Pierre Lurçat

1.

Vue d'Israël, la situation en France aujourd'hui semble à la fois stupéfiante, révoltante et tristement familière. Ce qui est stupéfiant, c'est de voir comment un pays ancien peut se déliter à vue d'œil et renoncer à sa propre souveraineté et à sa propre survie… Quels sont les mécanismes profonds qui, au-delà des causes politiques et sociales immédiates, peuvent conduire un vieux pays à une telle situation ? Nous savons certes que les civilisations sont mortelles… L'histoire nous enseigne que les grandes invasions et les changements démographiques majeurs sont précédées d'évolutions plus lentes, qui affectent la volonté d'une nation de vivre et d'assurer son avenir. Quand un peuple n'est plus désireux de perpétuer sa propre identité et quand sa natalité chute, il est mûr pour se laisser envahir.

 

Pour l'observateur vivant en Israël, pays confronté depuis sa renaissance à l'islam radical, il est attristant de voir que la France s'entête à ne pas comprendre ce qui nous semble évident. L'immigration incontrôlée de populations largement inassimilables et souvent hostiles à la France, à ses traditions et à son histoire, a conduit inexorablement à la situation actuelle. Cela fait plusieurs décennies que des analystes lucides, historiens ou écrivains (de Jean Raspail à Houellebecq et de Max Gallo à Bat Ye'or), mettent en garde contre le risque de guerre civile et d'émeutes, telles que celles auxquelles nous assistons aujourd'hui.

 

2.

Le plus stupéfiant est sans doute de voir que les leçons de l'histoire et de l'actualité ne sont pas tirées et que les élites françaises continuent, dans leur grande majorité, à soutenir l'immigration qui est en train de détruire leur pays… C'est sans doute sur ce dernier point que la comparaison avec Israël est la plus instructive. Ici aussi, nous sommes confrontés à des foyers de population irrédentiste, animés par l'islam radical. Ici aussi, l'ennemi intérieur est soutenu par une fraction de la classe politique et des élites, animées par une idéologie progressiste suicidaire. Mais la comparaison tourne court lorsque survient la confrontation violente.

 

Israël est en effet suffisamment fort et l'esprit national suffisamment vivace pour nous permettre de contre-attaquer et de nous défendre, comme nous le faisons aujourd'hui à Djenine, même si tout est loin d'être parfait à cet égard aussi, comme en atteste le fait que les habitants de Judée-Samarie soient trop souvent abandonnés à leur sort et contraints de se défendre par eux-mêmes contre les attaques incessantes de leurs voisins arabes, Tsahal se contentant d’intervenir partiellement et après coup…

 

3.

J'ajouterai une réflexion personnelle, en tant qu'Israëlien venu de France il y a trente ans. A la tristesse de voir la France s'enfoncer lentement et renoncer à se défendre, se mêlent la fierté de faire partie d'un peuple et d'un pays qui savent encore se défendre contre ses ennemis et la conviction que l'exemple d'Israël peut renforcer et vivifier l'esprit de résistance des Français. Mais je sais aussi que la maladie mortelle qui atteint la France - celle du masochisme, de l’auto-accusation et de l'identification avec ses propres ennemis - existe aussi en Israël et au sein du peuple juif.

 

Dans une certaine mesure aussi, qu'on ne doit pas exagérer mais qu'on ne peut ignorer, certains intellectuels et hommes politiques juifs français ont apporté leur pierre au courant destructeur, qui a conduit la France là où elle se trouve aujourd'hui. En soutenant l'immigration incontrôlée et en défendant l'idéologie progressiste, parfois au nom d'une morale dévoyée et d'une vision déformée du judaïsme, ils ont contribué au déclin de la France. On aimerait les entendre faire aujourd'hui leur mea culpa. J'adresse aux citoyens français patriotes qui voient aujourd'hui flamber leurs villes et leurs quartiers mon salut fraternel et mes vœux de courage et de résistance. 

P. Lurçat

* Mon interview de Bat Ye’or paraît ces jours-ci dans la dernière livraison d’Israël Magazine.

Bat Ye'or (photo P. Lurçat/Israël Magazine)

Bat Ye'or (photo P. Lurçat/Israël Magazine)

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Israël et le Mont du Temple : une double erreur politique et psychologique

January 3 2023, 11:44am

Posted by Pierre Lurçat

 

A l’occasion de la montée “surprise” du ministre Ben Gvir sur le Mont du Temple ce matin que j'ai évoquée au micro de Daniel Haïk sur Studio Qualita, je publie ici un extrait de mon livre Israël, le rêve inachevé portant sur ce sujet crucial.

50 ans après la libération et la réunification de la ville par les parachutistes de Tsahal en juin 1967, le cri de Motta Gur, “Har habayit bé-yadénou” (le Mont est entre nos mains) reste encore lettre morte.

Au-delà des raisons historiques et politiques qui ont engendré la situation actuelle sur le lieu le plus sacré du judaïsme, celle-ci résulte aussi d’un présupposé psychologique, largement erroné, qui est emblématique de l’attitude d’Israël envers l’islam.

L’erreur de Moshé Dayan et de ses successeurs

En remettant les clés du Mont du Temple au Waqf jordanien, Moshé Dayan pensait éviter un conflit ouvert avec le monde musulman et désamorcer le “baril de poudre” que représentait à ses yeux ce lieu sacré.

Moshé Dayan sur le Mont du Temple, juin 1967

Moshé Dayan sur le Mont du Temple, juin 1967

Cette conception est demeurée inchangée jusqu’à ce jour, et elle est partagée grosso modo par tous les dirigeants israéliens qui se sont succédé depuis 50 ans.

Or cette conception des rapports entre Israël et le monde musulman est fausse, car elle repose sur un présupposé erroné, qu’on pourrait résumer ainsi : si nous renonçons à asseoir notre souveraineté pleine et entière sur le Mont du Temple, les musulmans comprendront que nos intentions sont pacifiques et nous laisseront tranquilles.

C’est un présupposé similaire qui est à la base de la (fausse) conception selon laquelle Israël pourrait parvenir à la paix avec les Arabes en leur “restituant” des territoires (“les territoires contre la paix”).

Or, l’expérience des 30 dernières années montre que c’est précisément le contraire qui s’est produit. Le monde arabe et musulman n’a pas exprimé sa reconnaissance à Israël pour sa générosité (retraits du Sinaï, du Sud-Liban, de larges parties de la Cisjordanie et de Gaza) et pour la liberté de culte dont jouissent les fidèles musulmans sur le Mont du Temple.

Bien au contraire, il a fait de la question de Jérusalem et des Lieux saints un point de discorde et un prétexte pour enflammer régulièrement la rue arabe, le slogan mensonger des Frères musulmans “Al-Aqsa est en danger” étant devenu un leitmotiv de la politique palestinienne* et un prétexte employé par de nombreux dirigeants arabes pour détourner la colère de leurs peuples des problèmes internes et la diriger contre Israël.

La haine que nourrissent de nombreux musulmans à l’encontre d’Israël et des Juifs n’est en effet pas nourrie, comme on l’entend souvent dire, par leur soi-disant humiliation, mais tout autant et plus encore par celle qu’ils infligent aux Juifs, qui alimente leur complexe de supériorité envers les “Infidèles”.

Le Coran est lui-même traversé par cette relation ambivalente de l’islam envers les non-musulmans**. D’un côté, ils sont les représentants des religions qui persistent dans l’erreur, en refusant le message de Mahomet, et qu’il convient donc de rabaisser, pour les punir de leur obstination ; de l’autre, ils sont ceux qui “complotent contre l’islam” depuis ses débuts, et dont il faut se méfier.

Ils sont à la fois méprisables et redoutables. Les musulmans sont certes “la meilleure communauté qu’on ait fait surgir pour les hommes” (Coran 3-110), mais ce sentiment de supériorité (qui n’a rien à voir avec l’idée juive d’élection, entendue comme un supplément de responsabilité), s’accompagne toujours d’une peur maladive des infidèles et des sombres desseins qu’ils sont supposés nourrir envers l’islam.

Dans ce contexte, l’attitude d’Israël sur le Mont du Temple est une double erreur, psychologique et politique.

Psychologiquement, elle renforce les musulmans dans leur complexe de supériorité, en les confortant dans l’idée que l’islam est destiné à dominer les autres religions et que ces dernières ne peuvent exercer leur culte qu’avec l’autorisation et sous le contrôle des musulmans, c’est-à-dire en étant des “dhimmis”.

Politiquement, elle confirme le sentiment paranoïaque de menace existentielle que l’islam croit déceler dans toute manifestation d’indépendance et de liberté de ces mêmes dhimmis à l’intérieur du monde musulman.

Paradoxalement, la souveraineté juive à Jérusalem est perçue comme une menace pour l’islam précisément de par son caractère incomplet et partiel : les Juifs sont d’autant plus considérés comme des intrus sur le Mont du Temple, qu’ils n’y sont pas présents à demeure et qu’ils y viennent toujours sous bonne escorte, comme des envahisseurs potentiels.

L’alternative à cette situation inextricable et mortifère consisterait, comme l’avait bien vu l’écrivain et poète Ouri Zvi Greenberg, à asseoir notre souveraineté entière et sans partage sur le Mont du Temple, car “celui qui contrôle le Mont contrôle le pays”.

Ce faisant, Israël signifierait au monde musulman que sa présence sur sa terre est permanente et non pas provisoire, et que les Juifs revenus sur leur terre ne sont pas des “croisés”, destinés à être chassés à plus ou moins longue échéance : ils sont les maîtres et les souverains à Jérusalem, comme à Hébron et ailleurs, et ils sont là pour y rester.

Une telle attitude pourrait libérer les musulmans de leur complexe d’infériorité-supériorité en leur signifiant que Jérusalem est hors de portée pour leurs aspirations de faire renaître un hypothétique Califat et que leur seul choix est d’accepter la coexistence pacifique avec un Israël fort et souverain.

Pierre Lurçat

* Voir « Al Aqsa en danger ! » : une calomnie nazie palestinienne, par Pierre Lurçat

** Sur cet aspect, essentiel, du conflit entre Israël et l’islam, je renvoie notamment au livre d’Anne-Marie Delcambre, La schizophrénie de l’islam (Desclée de Brouwer 2006).

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