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Les trois erreurs d'Israël face au Hamas et au Djihad islamique à Gaza, Pierre Lurçat

May 17 2023, 08:06am

Posted by Pierre Lurçat

Les trois erreurs d'Israël face au Hamas et au Djihad islamique à Gaza, Pierre Lurçat

J'étais hier au micro de Richard Darmon sur Studio Qualita pour évoquer les "trois erreurs d'Israël face à Gaza". Réécouter ici :

https://youtu.be/5SuHoFqXTqA

 

 

 

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Quelle solution pour rétablir le calme entre Israël et Gaza?  Pierre Lurçat

November 12 2019, 16:11pm

Posted by Pierre Lurçat

Quelle solution pour rétablir le calme entre Israël et Gaza?  Pierre Lurçat

 

 

"Le Juif n'apprend pas par des raisonnements rationnels : il apprend par les catastrophes. Il n'achètera pas un parapluie simplement parce que des nuages s'amoncellent à l'horizon : il attendra d'être trempé et d'être atteint de pneumonie..."

Max Nordau (1)

 

Comme l’écrivait Yoav Shorek il y a quelques semaines (2), “lorsqu’un idiot jette une pierre au fonds du puits, plusieurs sages ne suffisent pas à la retirer”. La métaphore est parlante : le puits, c’est Gaza et la pierre c’est le Hamas, arrivé au pouvoir à la suite du retrait israélien - la “Hitnatkout” - dont Israël ne finit pas de payer les conséquences désastreuses. Si l’histoire nous a pourtant appris une chose, depuis 1948, c’est qu’il n’est pas possible de laisser la souveraineté à une quelconque entité autre qu’Israël, entre la Mer et le Jourdain. Toutes les tentatives faites en ce sens - dans un cadre bilatéral (accords d’Oslo), multilatéral (résolution de l’ONU sur l’internationalisation de Jérusalem) ou unilatéral (retrait de la bande de Gaza) - se sont soldées par un cuisant échec.

 

La synagogue de Névé Dekalim, détruite après le retrait de Gaza

 

Je me souviens avoir assisté au spectacle terrible des cercueils des habitants morts au Goush Katif, sortis de leurs tombes et portés en procession dans les rues de Jérusalem – car même les morts avaient été expulsés ! – une des images les plus effroyables qu’il m’a été donné de voir en 25 ans de vie en Israël. Yoav Shorek évoque à ce sujet une autre image terrible, celle de l’incendie des synagogues du Goush Katif le 12 septembre 2005. “Cet événement symbolique”, écrit Shorek, “a conclu le processus de Hitnatkout (retrait) de Gaza et est resté gravé dans la mémoire collective. Treize ans plus tard, les localités voisines de la bande de Gaza vivent toujours dans l’incertitude sécuritaire quotidienne, et dans une guerre d’usure dont on ne voit pas l’issue”.

 

Ceux qui considéraient qu’il s’agit du prix à payer pour ne plus assumer la souveraineté (ou le simple contrôle militaire) à Gaza ont été lourdement démentis par les faits. Car non seulement le retrait de Gaza n’a pas amélioré, comme l’avait promis son génial architecte, la sécurité intérieure d’Israël et son image sur la scène internationale, mais les deux se sont dégradées depuis, au point que le Hamas est devenu - après l’Iran et le Hezbollah au Nord - la deuxième menace stratégique pour Israël. Le tir de missiles ce matin sur Beer-Sheva et le Goush Dan n’est qu’une douloureuse piqûre de rappel à  cet égard.

 

La maison de Beer-Sheva détruite par un missile tiré de Gaza (photo Eliyahu Hershkovitz)

 

“A l’heure des missiles, les territoires n’ont pas d’importance” (Shimon Pérès)

 

Comme je l’écrivais en 2011, l’affirmation saugrenue faite par Shimon Pérès, en pleine euphorie des accords d’Oslo, a montré depuis lors son caractère illusoire et trompeur. Les territoires sont devenus plus essentiels que jamais à l’heure des missiles, comme le savent bien les habitants de Sdérot, de Beer-Sheva et d’Ashdod (liste partielle...), placés sous le feu des missiles du Hamas par le retrait de la bande de Gaza…”(3). Non seulement le retrait de Gaza s’est avéré (comme l’avaient prédit de nombreux observateurs à l’époque) stratégiquement erroné, mais il a surtout constitué une erreur sur le plan psychologique. Les habitants de Gaza - et le Hamas en premier lieu - ont en effet interprété ce retrait (comme tous les autres retraits israéliens, du Sud-Liban et de Judée-Samarie) comme un signe de faiblesse.

 

La faiblesse, disait Charles Krauthammer, fin observateur politique, est toujours un facteur négatif sur la scène internationale. Cela est d’autant plus vrai dans notre région, face à des ennemis habités par un complexe d’infériorité-supériorité, qui interprètent toute marque de faiblesse comme la confirmation de leur volonté destructrice. Cela est vrai à Gaza, où le “généreux” retrait israélien a été récompensé par la destruction humiliante de nos synagogues, et par une pluie de missiles incessante depuis lors. Cela est vrai aussi en Judée-Samarie et à Jérusalem, où la faiblesse israélienne, notamment sur le Mont du Temple, est interprétée par le monde musulman comme une preuve supplémentaire que les juifs sont des intrus à Jérusalem et qu’ils n’y ont aucun droit(4).

 

“Quand les Juifs pourront de nouveau réciter le Hallel au Goush Katif…”

 

Ceux qui pensent pouvoir régler le problème de Gaza par des opérations militaires limitées à des bombardements aériens se bercent d’illusions. “Les solutions provisoires”, écrit encore Shorek, “ne modifieront pas l’équation à Gaza, équation créée par le retrait, qui ne sera modifiée que lorsqu’Israël osera changer les règles du jeu et reviendra à Gaza pour y neutraliser la bombe. Pour nettoyer la bande de Gaza des armes et des infrastructures militaires et pour en refaire un lieu de vie, en offrant à ses habitants des perspectives d’avenir… Le prix inévitable du retrait est celui-ci : Tsahal devra retourner à Gaza et la reconquérir”.

 

Je n’ai rien à ajouter à ces lignes, sinon que le retour au calme à Gaza ne se fera que le jour où la synagogue de Névé Dekalim sera reconstruite, et que les prières juives retentiront de nouveau entre ses murs. Ce jour-là, qui n’est sans doute pas aussi lointain qu’il n’y paraît aujourd’hui, ce ne sont plus les appels au djihad et à la guerre qu’on entendra à Gaza, mais les mots du Hallel et ceux du prophète Jérémie : “Tes enfants reviendront dans leur territoire”.

Pierre Lurçat

NB Article publié initialement en novembre 2018

Notes

(1) Cité dans Histoire de ma vie, Les Provinciales 2011.

(2) “Treize années de conflagration”, Hashiloach numéro 11, septembre 2018.

(3) Article repris dans mon livre La trahison des clercs d’Israël, La Maison d’édition 2016, page 156.

(4) Sur ce sujet essentiel, je renvoie à au dernier chapitre de mon nouveau livre, Israël le rêve inachevé, à paraître en novembre aux éditions de Paris.

 

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Medinat Israël ou Mal’hout Israël? La guerre de Gaza et les choix identitaires d’Israël, par Pierre Lurçat

May 5 2019, 16:34pm

Posted by Pierre Lurçat

La situation dramatique dans laquelle les occupants actuels de la bande de Gaza entraînent régulièrement l’Etat d’Israël, depuis le jour funeste où l’armée et la police israéliennes, transformées en bras destructeurs d’un pouvoir corrompu et aveugle, ont expulsé les pionniers du Goush Katif, nous oblige à réfléchir sur le sens des événements que nous vivons aujourd’hui. Il n’est pas anodin que ce nouveau round d’affrontements (ou plutôt, cette nouvelle attaque suivie d’une riposte) survienne précisément entre Yom haShoah et Yom Ha’atsmaout, dans cette semaine chargée de symboles et lourde de significations de “beyn ha-Tsefirot” : entre la sonnerie de Yom haShoah et celle de Yom ha-Zikaron.

 

Comme le dit un récent adage, “Nous avons deux journées du souvenir des morts en Israël : une qui nous rappelle le prix à payer pour avoir un Etat, et l’autre pour nous rappeler le prix à payer pour ne pas en avoir”. Ces deux journées sont, évidemment, la Journée du Souvenir des soldats (Yom Hazikaron) et le Jour de la Shoah (Yom HaShoah). Mais le lien qui unit ces deux journées n’est pas seulement chronologique : il s’agit en réalité d’une relation de causalité, ou plutôt d’un choix ontologique entre deux modalités d’être pour le peuple Juif. Ce choix peut être formulé ainsi : soit assumer le prix de l’existence étatique, soit redevenir le peuple victime des pogromes et de la Shoah.

 

Maison de Beer-Sheva détruite par un missile tiré de Gaza (photo Eliyahu Hershkovitz)

 

Les théoriciens du sionisme et les pères fondateurs de l’Etat juif avaient bien compris qu’il n’existait pas d’autre alternative. C’est la raison pour laquelle plusieurs d’entre eux - Theodor Herzl, Max Nordau et Zeev Jabotinsky - avaient eu la prescience de la Shoah. Ils avaient en effet pressenti que celle-ci n’était pas un accident de l’histoire ou un événement monstrueux et absurde, mais l’aboutissement logique de l’existence galoutique. Et ils en avaient tiré la conséquence ultime : à savoir, la nécessité impérieuse de retrouver notre indépendance nationale. Or, cette leçon de l’histoire juive, évidente à l’époque, est en train de d’estomper dans la confusion morale et intellectuelle de notre époque.

 

Comme l’écrivait ce shabbat Ran Baratz, dans les colonnes de Makor Rishon, non seulement cette leçon cruciale de la Shoah est aujourd’hui oubliée, mais elle est remplacée par une leçon inverse et scandaleuse. Aux yeux d’une frange non négligeable des élites culturelles et politiques actuelles, la “leçon” de la Shoah est en effet qu’Israël devrait appliquer des normes morales plus élevées que les autres nations face à des ennemis barbares et inhumains, sous peine de voir Tsahal devenir pareil à la Wehrmacht… C’est bien cette équation que nous voyons actuellement appliquée, dans les commentaires des grands médias israéliens et jusque dans le “code éthique” de Tsahal (1).

 

La synagogue de Névé Dekalim, détruite après le retrait de Gaza

 

Comme l’écrivait Yoav Shorek il y a quelques mois (2), “lorsqu’un idiot jette une pierre au fonds du puits, plusieurs sages ne suffisent pas à la retirer”. La métaphore est parlante : le puits, c’est Gaza et la pierre, c’est le Hamas, arrivé au pouvoir à la suite du retrait israélien - la “Hitnatkout” - dont Israël ne finit pas de payer les conséquences désastreuses. Si l’histoire nous a pourtant appris une chose, depuis 1948, c’est qu’il n’est pas possible de laisser la souveraineté à une quelconque entité autre qu’Israël, entre la Mer et le Jourdain. Toutes les tentatives faites en ce sens - dans un cadre bilatéral (accords d’Oslo), multilatéral (résolution de l’ONU sur l’internationalisation de Jérusalem) ou unilatéral (retrait de la bande de Gaza) - se sont soldées par un cuisant échec.

 

Je me souviens avoir assisté au spectacle terrible des cercueils des habitants morts au Goush Katif, sortis de leurs tombes et portés en procession dans les rues de Jérusalem – même les morts avaient été expulsés ! – une des images les plus effroyables qu’il m’a été donné de voir en 25 ans de vie en Israël. Yoav Shorek évoque une autre image terrible, l’incendie des synagogues du Goush Katif le 12 septembre 2005. “Cet événement symbolique”, écrit Shorek, “a conclu le processus de Hitnatkout (retrait) de Gaza et est resté gravé dans la mémoire collective. Treize ans plus tard, les localités voisines de la bande de Gaza vivent toujours dans l’incertitude sécuritaire quotidienne, et dans une guerre d’usure dont on ne voit pas l’issue”.

 

Ceux qui pensent encore pouvoir régler le problème de Gaza par des opérations militaires limitées à des bombardements aériens se bercent d’illusions. “Les solutions provisoires”, écrit encore Shorek, “ne modifieront pas l’équation à Gaza, équation créée par le retrait, qui ne sera modifiée que lorsqu’Israël osera changer les règles du jeu et reviendra à Gaza pour y neutraliser la bombe. Pour nettoyer la bande de Gaza des armes et des infrastructures militaires et pour en refaire un lieu de vie, en offrant à ses habitants des perspectives d’avenir… Le prix inévitable du retrait est celui-ci : Tsahal devra retourner à Gaza et la reconquérir”.

 

Assumer notre identité et notre vocation

 

Mais en définitive, le choix que la situation à Gaza impose à Israël n’est pas seulement un choix politique ou tactique à court terme. Il s’agit d’un choix stratégique, moral et identitaire à long-terme. La situation d’Israël face à ses ennemis nous oblige - comme à chaque fois qu’Israël a été confronté à ses ennemis au cours de sa longue histoire - à assumer notre identité véritable et notre vocation. Le critique littéraire Morde’haï Shalev, dans un article écrit en 1952 - pour le dixième anniversaire de la mort de Yair Stern, le légendaire dirigeant du Lehi - évoquait le fondement de l’action politique de Stern, dont le poète Uri Zvi Greenberg avait donné une expression littéraire. Ce fondement c’est Mal’hout Israël, la Royauté d’Israël.


 

 

De ce point de vue, la “situation sécuritaire” à Gaza, pour reprendre le langage réducteur des médias israéliens, n’est que le reflet de la situation politique et identitaire dans laquelle l’Etat d’Israël s’est enfermé au cours de 71 années d’existence nationale. La clé de la sécurité d’Israël ne repose pas seulement dans des prouesses militaires ou technologiques, comme le montre bien l’illusion mortelle de Kipat Barzel, mais dans le choix profond d’assumer notre identité. Comme l’écrivait Shalev, “les concepts politiques” du sionisme traduisent les “besoins rationnels” d’indépendance et d’autonomie politique du peuple juif (leçon de la Shoah). Mais cette leçon, aussi importante qu'elle soit, ne suffit pas à exprimer l’objectif en vue duquel ces besoins doivent être utilisés. La Royauté d’Israël (Malhout Israel) en tant que concept politique n’est pas un "ensemble de besoins, mais la fin ultime en vue de laquelle l’Etat d’Israël a été créé". De ce point de vue, l’Indépendance n’est que la première étape du sionisme, étape indispensable et non encore pleinement réalisée sur la voie de la Royauté.

Pierre Lurçat

 

(1) Sur ce sujet, je renvoie à mon livre La trahison des clercs, La Maison d’Edition 2016

(2) “Treize années de conflagration”, Hashiloach numéro 11, septembre 2018.

(3) Cet article est repris dans un livre important qui vient d’être publié en Israël, Gonvim et ha-Bsora, aux éditions Dvir.

 

_______________________________________________________________________

https://ax.polytechnique.org/group/x-israel/55/calendar/conference-jabotinsky-et-son-heritage-dans-l-histoire-d-israel/2019/05/23/516

 

Le Groupe X-Israël vous invite à participer à une conférence de :

 

Pierre LURÇAT, avocat et essayiste,

sur "Jabotinsky et son héritage dans l'histoire d'Israël".

 

 le jeudi 23 mai 2019 à 18h30

à la Maison des X (12 rue de Poitiers, Paris 7è)

 

La conférence sera suivi d'un apéritif amical.  L'auteur dédicacera ses deux derniers livres (http://bit.ly/lurcat2016 et http://bit.ly/lurcat2018).

 

Tarif pour les membres cotisants à l'AX : 10 €

Tarif pour les non-cotisants à l'AX : 15 €

 

Inscription obligatoire d’ici le lundi 20 mai 2019.

 

Bien amicalement.

 

Olivier Herz (1979), président de X-Israël

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Reportage à la frontière de Gaza, avec les nouveaux gardiens d’Israël, par Pierre Lurçat

July 3 2018, 09:00am

Posted by Pierre Lurçat

Reportage à la frontière de Gaza, avec les nouveaux gardiens d’Israël, par Pierre Lurçat

 

“Il ne s’endort ni ne sommeille, le Gardien d’Israël” (Tehillim)

לג'ודית

 

J’ai quitté Jérusalem très tôt ce matin, avant 6 heures, pour être au point de rendez-vous à 9h30. La responsable du recrutement du “Shomer ha-hadash” (le “Nouveau gardien”) m’a donné rendez-vous au lieu dit du Ets ha-Boded ( “L’arbre solitaire”), promontoire d’où l’on a une vue sans pareil sur tout le nord de la bande de Gaza. Qui sont ces “nouveaux gardiens”? Ce ne sont pas des soldats d’une unité spéciale, comme celles qui se battent aujourd’hui contre le terrorisme des cerfs-volants incendiaires ou hier, contre celui des tunnels du Hamas. Non, les “nouveaux gardiens” sont les membres d’une organisation d’un genre bien particulier, qui a été créée il y a une dizaine d’années pour protéger les agriculteurs du nord d’Israël contre les vols de bétail.

 

Emblême du Chomer Ha-hadash


 

Quel rapport avec les événements actuels à Gaza? Avant de répondre à cette question, un petit rappel historique est nécessaire. Le Chomer est une des premières organisations juives d’auto-défense créée en Eretz-Israël en 1907. Ses membres se déplaçaient à cheval et étaient vêtus comme des bédouins.

 

 

Les chomrim appartiennent à l’histoire de renouveau du militarisme juif en Eretz-Israël, et constituent un jalon important dans la préhistoire de Tsahal. J’ajoute, pour la petite histoire, que mon grand-père en a fait partie, quelques années après son alyah, au lendemain de la Première Guerre mondiale.


 

Mon grand-père, Yossef Kurtz, en costume de Chomer

 

C’est dans un esprit similaire à celui des Chomrim de l’époque qu’une poignée de jeunes Israéliens ont créé le Chomer Ha-hadash en 2007. Pour protéger les agriculteurs de Galilée face à la recrudescence des vols de bétail et de matériel agricole, contre lesquels la police était largement impuissante, et retrouver l’esprit “halout’s” (pionnier) qui animait les premiers Chomrim. Je suis entré en contact avec eux après avoir lu un reportage dans Israel Hayom, et j’ai décidé de me rendre sur place, à la frontière de Gaza.

 

Ashkélon. Je monte dans le train en direction du Sud. Le wagon est à moitié vide. Quelques soldats endormis (pour récupérer un peu de sommeil en “posant la tête” selon l’expression d’argot consacrée). Il n’y a rien de l’atmosphère de tension qui caractérise le pays dans les périodes d’avant-guerre. Le terrorisme des incendies est une forme de guerre à basse intensité, et c’est sans doute une des raisons pour lesquelles Israël n’a pas su lui donner, pour le moment, la réponse appropriée. En attendant, ce sont les civils autour de Gaza qui en souffrent le plus, et ce sont d’autres civils, venus de tout le pays, qui ont décidé de se mobiliser pour aider à prévenir et éteindre le feu ennemi qui dévore les champs autour de Gaza.

 

Sdérot. La dernière fois que je me suis rendu à Sdérot, la ville la plus au sud d’Israël sur la côte méditerranéenne, c’était juste avant la “Hitnatkout” (le retrait de Gaza), lors des immenses manifestations qui ont presque réussi à empêcher cette décision catastrophique, dont Israël continue de payer le prix stratégique jusqu’à ce jour. Le terrorisme incendiaire n’est certes pas né hier (car il est aussi ancien que le conflit israélo-arabe). Mais c’est le retrait de Gaza, sur la décision du gouvernement d’Ariel Sharon, qui a installé le Hamas au pouvoir, on ne le rappellera jamais assez. Beaucoup d’esprits sagaces avaient à l’époque mis en garde contre cette décision funeste, mais comme l’avait expliqué un jour Max Nordau à Jabotinsky, “Israël n’apprend pas par l’expérience, il n’apprend que par les catastrophes”.


 

Max Nordau (1849-1923).

 

Nir-Am. Je suis accueilli par Maayan, responsable du Chomer Ha-hadash, sur le parking de la station d’essence du kibboutz Nir-Am. Elle est volontaire depuis 5 ans, et passe plusieurs nuits par semaine à faire des gardes, tout en travaillant la journée. Elle boîte légèrement, après s’être blessée en plongeant dans une source, sport favori de beaucoup de jeunes de son âge. Elle s’exprime avec simplicité, sans la moindre trace de pathos ou de grandiloquence, et moi je pense en l’écoutant, ‘quelle belle jeunesse nous avons…’ Menahem, l’autre volontaire qui doit partager la garde avec moi, nous rejoint et nous montons ensemble vers le promontoire de “l’arbre solitaire’. C’est un endroit très connu de la région, lieu de visite touristique d’où on jouit d’une vue extraordinaire sur tous les alentours, jusqu’à Ashkélon et aux faubourgs d’Ashdod au nord.

 

Mais quand la situation se réchauffe à la frontière de Gaza, c’est surtout un point d’observation stratégique. Notre mission est très simple : surveiller la moindre trace de fumée ou de feu, et prévenir immédiatement les responsables du Chomer Ha-hadash et les pompiers (ainsi que l’armée). Tout est apparemment calme dans notre secteur. Durant notre garde de 5 heures, nous n'entendrons que quelques détonations lointaines et n’apercevrons qu’une vague colonne de fumée à l’horizon. Ce calme apparent n’est pourtant qu’illusoire. Plus au Sud, où d’autres volontaires du Chomer Ha-hadash sont postés, des débuts d’incendie sont repérés et traités à temps.

 

Résultat de recherche d'images pour "‫ניר עם שריפות‬‎" Incendies de champs autour du kibboutz Nir Am

 

Menahem est un jeune retraité, qui était chercheur au ministère de l’Agriculture, spécialiste de l’eau. Il connaît bien la région, pour voir sillonné les kibboutz des environs dans le cadre de son travail. Volontaire du Chomer Ha-hadash depuis plusieurs années, il m’explique comment l’organisation, très modeste à ses débuts, s’est développée au point de devenir un acteur important de la lutte contre les vols et le vandalisme en zone agricole, qui travaille en collaboration étroite avec plusieurs organismes officiels, dont la police, le ministère de l’Agriculture et le KKL.

 

Notre conversation est interrompue par la visite d’un groupe bruyant de visiteurs : une vingtaine d’hommes, parlant moitié hébreu moitié arabe. Les plus jeunes ont l’air d’être des soldats d’une unité d’élite, tandis que les plus âgés ressemblent à des retraités de l’armée. Le chef du groupe parle de la situation à Gaza et à la frontière, avec beaucoup de détails, sans se soucier trop de notre présence (on nous a seulement demandé de ne pas les photographier). Ce sont apparemment, me dis-je en les écoutant, des membres d’une unité spéciale qui connaît bien la région, y compris de l’autre côté de la frontière. Un instant, j’ai l’impression d’être dans un nouvel épisode de la fameuse série Fauda.

 


 

Menahem me raconte ses voyages professionnels en Europe, aux Etats-Unis et au Japon. Il est légitimement fier du savoir-faire accumulé par Israël en l’espace de quelques décennies. Je lui parle de l’époque où les pionniers de l’agriculture en Eretz-Israël allaient faire leurs études d’agronomie en Europe (et en France notamment, à l’université de Nancy et de Toulouse, où étudia la poétesse Rahel). Aujourd’hui, Israël vend son savoir-faire en matière agricole (et d’irrigation notamment) dans le monde entier. Menahem connaît très bien le sujet. Il me parle aussi des Chinois qui se sont mis à l’étude du Talmud, convaincus que c’est là que réside le secret de la réussite israélienne… Le secret de notre peuple ? Je ne m’aventurerai pas à donner d’explication. D’autres l’ont fait mieux que moi. Parmi eux, le prophète Bilaam, évoqué dans la parasha que nous avons lue samedi dernier. « Oui, je le découvre, ce peuple, il vit solitaire, il ne se confondra point avec les nations. » (Nombres 23:9).

 

Notre garde s’est achevée sans incident particulier et j’ai repris la route de Jérusalem. En arrivant en fin d’après-midi, j’entends à la radio que plusieurs incendies ont éclaté à la frontière de Gaza et qu’ils ont été maîtrisés. Je pense aux jeunes membres du Chomer Ha-hadash et aux volontaires, jeunes et moins jeunes, venus des quatre coins de notre petit et grand pays pour protéger les champs autour de Gaza.

P. Lurçat

NB Vous pouvez aider le Chomer Ha-hadash par vos dons. https://eng.hashomer.org.il/

 

Mon nouveau livre, Israël le rêve inachevé, paraîtra à la rentrée aux éditions de Paris.

 

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10 vérités sur Gaza que vous ne lirez pas (ou presque) dans la presse française, par Pierre Lurçat

May 17 2018, 16:15pm

Posted by Pierre Lurçat

Soldats des Brigades Izz Adin Al Qassam

Soldats des Brigades Izz Adin Al Qassam

10 vérités sur Gaza que vous ne lirez pas (ou presque) dans la presse française, par Pierre Lurçat

 

1. Les récents événements à la frontière avec Gaza : il ne s’agit pas d’une lutte pacifique mais d’une lutte armée, comme vient de le reconnaître le dirigeant du Hamas, Mahmoud Al-Zahhar dans une interview sur Al-Jazira (traduite par MEMRI)[1].

 

2. Israël n’a pas commis un “massacre” ou un “bain de sang” (titre du journal Le Monde), mais a riposté aux attaques du Hamas sur sa frontière, conformément au droit international qui autorise tout Etat à défendre et protéger ses frontières, si besoin est par la force.

 

3. Les victimes du côté palestinien ne sont pas des “civils sans défense” mais pour la plupart des militants et combattants du Hamas[2], organisation terroriste islamiste mue par une idéologie djihadiste radicale, guère différente de celle des autres mouvements islamistes radicaux qui commettent des attentats sur le sol français.

 

4. L’objectif du Hamas n’est pas de résister à une agression israélienne ou de s’opposer au “blocus” ou à l’occupation (qui n’existent plus à Gaza depuis 2006), mais bien d’attaquer militairement Israël, quitte à sacrifier leurs civils et leurs combattants, chair à canon du djihad[3].

 

5. La “crise humanitaire” régulièrement dénoncée par les médias et dirigeants occidentaux n’existe qu’en raison du cynisme brutal des dirigeants du Hamas, qui attaquent régulièrement le point de passage de Keren Shalom utilisé par Israël pour envoyer des vivres et des médicaments à Gaza.

 

 

 

6. Le Hamas n’a pas pour objectif de créer un Etat palestinien vivant en paix aux côtés d’Israël, mais de détruire l’Etat juif existant pour le remplacer par un nouvel Etat arabe islamiste s’étendant sur toute la Palestine, du Jourdain à la mer (conformément à l’article 11 de sa Charte qui précise que la Palestine est un waqf, c’est-à-dire une terre musulmane inaliénable).

 

7. La “solution politique” réclamée par les dirigeants français pour mettre fin au conflit est rejetée systématiquement par le Hamas, pour la simple et bonne raison que cette notion n’existe pas dans leur lexique politique et dans leur conception du monde.

 

8. La guerre est en effet conçue par le Hamas comme l’état naturel et normal du monde, et la paix n’est jamais qu’une situation provisoire, selon les règles du droit musulman de la guerre et conformément au modèle de la hudna (trêve) [4]. Cette conception est évidemment totalement opposée à celle qui prévaut aujourd’hui en Occident.

 

 

9. Plus précisément, le Hamas considère la guerre contre Israël et contre les Juifs comme un impératif non seulement politique, mais eschatologique, c’est-à-dire lié à sa vision de la Fin des Temps. Celle-ci est exposée à l’article 7 de la Charte du Hamas, qui cite un Hadith bien connu à ce sujet, "Le Prophète, que la prière et la paix soient sur Lui, a dit : Le Temps ne viendra pas avant que les Musulmans ne combattent les Juifs et les tuent ; jusqu'à ce que les Juifs se cachent derrière des rochers et des arbres, et ceux-ci appelleront : O Musulman, il y a un Juif qui se cache derrière moi, viens et tue-le!"

 

10. L’antisémitisme du Hamas n’est donc pas un aspect accessoire, mais bien un élément fondamental de son discours et sa conception du monde. L’invocation par la Charte du Hamas de l’impératif de la “guerre contre les juifs” rappelle les conceptions hitlériennes de l'affrontement quasi-métaphysique entre l'Allemagne et les Juifs. Je renvoie à ce sujet à mon article “Le Hamas, un mouvement islamiste apocalyptique”.

 

 

Pierre Lurçat

 

 

 

[3] Voir à ce sujet les déclarations d’un conseiller de Mahmoud Abbas, qui accuse le Hamas de jouer avec la vie des civils de Gaza.

[4] Voir à ce sujet l’analyse détaillée de Raymond Ibrahim. https://www.meforum.org/articles/2010/la-taqiyya-et-les-regles-de-la-guerre-islamique

 

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PROCHAINE FORMATION À L'EXAMEN D'AGENT IMMOBILIER À TEL-AVIV EN JUIN 2018

Formation à l’examen d’agent immobilier israélien

Session juin 2018 Tel-Aviv 

 

La prochaine formation à l'examen d'agent immobilier aura lieu du 12 au 19 juin 2018 à Tel-Aviv, en vue de l’examen d’agent immobilier israélien qui se tiendra le 23 juillet 2018. Au terme de la formation et après avoir réussi l’examen, vous pourrez obtenir la carte professionnelle permettant d’exercer la profession d’agent immobilier (metave’h) en Israël, dans une agence ou à votre compte.

J’ai mis en place cette formation depuis 2006 en Israël, et j’ai préparé plusieurs centaines d’Olim francophones (avec un taux de réussite dépassant 75%) à l’examen organisé par le ministère israélien de la Justice, seul habilité à délivrer la carte professionnelle. Important : il n’est pas nécessaire d’être israélien pour travailler comme agent immobilier en Israël !

Niveau d'hébreu exigé

Cet examen est un examen théorique portant sur le droit israélien, qui a lieu 4 fois par an en Israël. Il s’agit d’un QCM (questionnaire à choix multiple), ce qui signifie qu’il n’est pas indispensable de savoir écrire en hébreu.

Les cours auront lieu pendant une semaine à Tel-Aviv (dans le quartier de Ramat Israël).

Pour plus d’informations, n’hésitez pas à me contacter par email pierre.lurcat@gmail.com ou par téléphone au 06 80 83 26 44  (France) ou 050 286 51 43 (Israël).

 

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Israël - Gaza : accepter la “pax islamica” du Hamas? par Pierre Lurçat

May 7 2019, 09:17am

Posted by Pierre Lurçat

Israël - Gaza :  accepter la “pax islamica” du Hamas? par Pierre Lurçat

 

La question la plus préoccupante que soulèvent les événements des dernières semaines (1) à la frontière de Gaza - au-delà même des capacités offensives grandissantes du Hamas, qui se sont manifestées lors du dernier round d’affrontements, trop vite avorté - est celle de savoir si le gouvernement de Binyamin Nétanyahou n’est pas tombé dans le piège du Hamas, consistant à vouloir monnayer une paix illusoire en “achetant” la tranquillité, selon le modèle de la “pax islamica” et du statut de la dhimma.

 

1 - Cessez-le-feu ou guerre unilatérale ?

 

Selon ce modèle, Israël aurait “payé” un cessez-le-feu temporaire, en renonçant une fois de plus à mener l’opération militaire qu’il ne cesse de repousser depuis des mois, et en laissant de nouveau entrer à Gaza des matières premières et l’argent du Qatar, dans ce qui ressemble de plus en plus à une forme de chantage, conforme à la conception musulmane des relations avec les dhimmis, c’est-à-dire avec les protégés de l’islam.

Incendies à la frontière de Gaza

Une guerre unilatérale

 

Ce que les médias, en Israël et ailleurs, qualifient hâtivement de cessez-le-feu est en réalité une situation de guerre intolérable, dans laquelle le Hamas attaque les villes et les civils israéliens et incendie les champs avoisinants de la frontière de manière incessante depuis des mois. C’est une guerre unilatérale, dans laquelle l’ennemi nous attaque sans cesse, tandis que nous faisons semblant que tout va bien et que la vie continue normalement (“business as usual”).

 

Les habitants du sud d’Israël ont eu raison de protester, depuis plusieurs semaines, contre cette situation inacceptable, et aussi contre le comble de l’absurde : à savoir l’approvisionnement quasiment ininterrompu (à de rares exceptions) de Gaza en électricité, en carburant et en autres denrées de première nécessité, alors même que les attaques incendiaires et autres se poursuivent contre Israël.

Quelle solution pour rétablir le calme entre Israël et Gaza?  Pierre Lurçat

2 - Approvisionner Gaza ou acheter un semblant de tranquillité?

 

Cette situation absurde est une insulte au bon sens que rien ne saurait justifier. Aucun impératif, moral ou juridique, ne nous oblige en effet à approvisionner nos ennemis, pendant qu’ils nous attaquent. Il y a là une perversion de la morale, en vertu de laquelle Israël laisse le Hamas bombarder et incendier les localités avoisinantes de Gaza, tout en veillant au bien-être des habitants de Gaza.

 

J’ai décrit, dans mon livre La trahison des clercs d’Israël, les racines intellectuelles de cette morale dévoyée, qui veut que nous appliquions des normes supérieures à celles de toutes les nations civilisées, à l’endroit d’ennemis qui, eux, ne respectent aucune des normes les plus élémentaires, y compris envers leurs propres citoyens. Il est grand temps de repenser entièrement les normes éthiques de Tsahal, pour lui insuffler une morale juive authentique.

 

3 - Kippat Barzel ou Kir Habarzel ?

 

Le système de défense antimissiles “Kippat Barzel” développé par Tsahal depuis quelques années représente certes une prouesse technologique.  Mais il représente aussi une défaite, sur le plan militaire et psychologique. Comme l’a reconnu cette semaine une journaliste de Galei Tsahal, la radio de l’armée, ce système a en effet, en fin de compte - au-delà de sa réussite partielle pour intercepter les roquettes tirées depuis Gaza - la conséquence néfaste de nous empêcher de riposter, et de porter ainsi atteinte à notre capacité de dissuasion. Intercepter des roquettes avant leur point de chute est certes appréciable, mais une dissuasion véritable exigerait de mettre l’ennemi hors d’état de les lancer.

Résultat de recherche d'images pour "jabotinsky"

A cet égard, Kippat Barzel ressemble à un immense parapluie troué, qui constitue une arme défensive très insuffisante et comporte des effets pervers, en nous dispensant d’une contre-attaque indispensable, comme l’a montré l’amère expérience des dernières années. Kippat Barzel est en réalité la négation du Kir Habarzel - la muraille d’acier - concept développé par Jabotinsky dans son fameux article de 1923, qui est au fondement de la doctrine stratégique de Tsahal. Ce dernier signifie en effet qu’il faut dissuader l’ennemi de nous attaquer, et pas seulement se défendre contre ses attaques incessantes.

 

Selon cette conception,  la paix et la sécurité ne viendront pas en élaborant des systèmes de défense de plus en plus perfectionnés pour intercepter les missiles du Hamas, du Hezbollah et de l’Iran, en faisant comme si Israël était un territoire neutre, placé sous la protection d’un immense parapluie de verre. Elles ne viendront qu’en ripostant avec toute la force nécessaire et en attaquant les ennemis qui nous menacent, portant la guerre sur leur territoire - comme l’a fait Tsahal lors des guerres victorieuses de 1956, 1967 et 1973, jusqu’à ce qu’ils demandent grâce et renoncent à leurs intentions belliqueuses.

Pierre Lurçat.

(1) article publié initialement en novembre 2018.

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“Dôme d’acier” ou “Mur de fer”? Force et faiblesse d’Israël face à Gaza, Pierre Lurçat

August 7 2022, 07:52am

Posted by Pierre Lurçat

“Dôme d’acier” ou “Mur de fer”?  Force et faiblesse d’Israël face à Gaza, Pierre Lurçat

NB J'évoque le bilan de l'opération "Shahar" à Gaza au micro de Daniel Haik sur Studio Qualita.

Le nouveau round militaire entre Israël et Gaza, survenant à la veille de Tisha beAv, pose à nouveau la question lancinante de la doctrine stratégique israélienne face aux groupes islamistes soutenus par l’Iran. Au-delà des prouesses technologiques de “Kippat ha-barzel”, les tirs incessants venus de Gaza interrogent la validité du nouveau modèle instauré par Tsahal après la destruction du Goush Katif et, au-delà encore, celle de l’éthos défensif de l’armée israélienne. Dans les lignes suivants, extraites du livre Le mur de fer qui paraît ces jours-ci *, je montre en quoi Kippat Barzel est la négation du concept de Kir ha-Barzel développé par Jabotinsky il y a tout juste cent ans. P.L.

 

Le « Mur de fer » est devenu depuis un siècle un concept fondamental du lexique politique israélien. Peut-on dire pour autant que ce concept a été adopté dans les faits, c’est-à-dire dans la politique et dans la stratégie israélienne ? A cet égard, la réalité est plus contrastée. Si la doctrine de la dissuasion de Tsahal peut être globalement considérée comme l’application du « Mur de fer », la politique de défense israélienne n’est pas toujours conforme aux idées développées il y a cent ans par Jabotinsky. Ainsi, pour prendre un exemple récent, le système de défense « Kippat barzel » (« dôme d’acier ») mis en place par Tsahal autour de la bande de Gaza peut difficilement être considéré comme l’application du « Kir ha-Barzel » (« Mur de fer »), en dépit de la similarité des deux expressions.

            Le « dôme d’acier », malgré toute sa perfection technologique, ne vise en effet pas à assurer une quelconque dissuasion pour Israël, face aux tirs de roquette incessants venant de Gaza, mais plutôt à protéger les civils israéliens, sans aucunement empêcher les groupes terroristes palestiniens de poursuivre leurs attaques. De ce fait, il illustre le paradoxe d’une armée toujours plus intelligente, mais de moins en moins audacieuse. Comme le savent bien les dirigeants de l’armée israélienne, seule une offensive terrestre au cœur de la bande de Gaza permettrait de démanteler les lanceurs de missiles, voire de mettre fin au pouvoir du Hamas, installé depuis le retrait de l’armée israélienne en 2006. Or, la protection toute relative offerte par le dispositif du « dôme d’acier » empêche en fait Tsahal de mener une telle offensive, en la dissuadant d’adopter une logique militaire plus coûteuse en vies humaines. La dissuasion s’exerce donc envers Israël et non envers ses ennemis.

 

            Le « dôme d’acier » n’est donc aucunement l’application de la doctrine du « Mur de fer » élaborée par Jabotinsky il y a près de cent ans : il en est la négation. Cet exemple ne signifie toutefois pas que le « Mur de fer » aurait été totalement oublié, mais que cette notion est appliquée de manière variable, selon les circonstances et les différents fronts. Israël fait ainsi preuve depuis plusieurs années d’une audace impressionnante face à l’Iran, multipliant les opérations et les éliminations ciblées en territoire ennemi, tandis que sur le front de Gaza, Tsahal se montre beaucoup plus timorée, restant sur la défensive la plupart du temps. Cette disparité montre que l’éthos défensif – qui remonte aux débuts de Tsahal et avant encore, à l’époque du Yishouv – s’avère insuffisant, face à des ennemis farouchement déterminés.

 

Toute l’histoire de la stratégie de défense d’Israël, depuis la Haganah et les premiers efforts d’auto-défense à l’époque de Jabotinsky et jusqu’à nos jours, est marquée par une oscillation permanente entre deux pôles opposés : celui de l’éthos purement défensif, largement prédominant d’une part, et celui d’un éthos offensif, celui de l’unité 101 dans les années 1950 et de la « Sayeret Matkal » (unité d’élite de l’état-major), d’autre part. De toute évidence, c’est cet esprit offensif qui a permis à Tsahal de connaître ses victoires les plus éclatantes, celle de juin 1967 ou celle de l’opération Entebbe, pour ne citer que deux exemples. Malgré cela, l’armée israélienne demeure attachée à l’éthos purement défensif, pour des raisons complexes liées à son histoire et à ses valeurs fondatrices. La doctrine du « Mur de fer » demeure ainsi d’actualité, un siècle après avoir été formulée par Jabotinsky.

 

Les récents événements violents survenus en mai 2021 dans les villes mixtes d’Israël, et la persistance d’une opposition radicale à l’existence de l’Etat hébreu dans la région – malgré les avancées remarquables des accords Abraham – montrent que la dissuasion demeure une nécessité impérieuse, tant sur le front intérieur que sur les différents fronts extérieurs. L’aspiration à la paix qui caractérise le peuple Juif et l’Etat d’Israël ne doit pas éluder cette nécessité. Le pacifisme aveugle, il y cent ans comme aujourd’hui, menace la pérennité de l’existence d’un Etat juif souverain, au milieu d’un environnement encore largement hostile. Aujourd’hui comme hier, la paix repose sur la préparation à d’éventuels conflits, selon l’adage latin toujours actuel (« Si vis pacem, para bellum »), ou selon les mots de Jabotinsky : « le seul moyen de parvenir à un accord [de paix] est d’ériger un mur de fer ».

 

Pierre Lurçat

* J'ai le grand plaisir d'annoncer la parution prochaine du nouveau tome de la Bibliothèque sioniste, Le mur de fer, Les Arabes et nous de Vladimir Jabotinsky. Il paraîtra officiellement à la rentrée de septembre mais est déjà disponible sur Amazon en prévente promotionnelle.

“Dôme d’acier” ou “Mur de fer”?  Force et faiblesse d’Israël face à Gaza, Pierre Lurçat

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Tsahal applique-t-elle trop bien le droit de la guerre face au Hamas ? Pierre Lurçat

June 17 2018, 07:47am

Posted by Pierre Lurçat

 Tsahal applique-t-elle trop bien le droit de la guerre face au Hamas ? Pierre Lurçat

Le paradoxe de la guerre imposée à Israël par le Hamas à Gaza est que c'est Tsahal qui cherche constamment à minimiser le nombre de victimes palestiniennes, alors que le Hamas cherche cyniquement à les maximiser. Malgré cela, c'est Israël qui est accusé, à tort, de violations du droit international. En réalité pourtant, Israël se conduit souvent d'une manière excessivement éthique et morale, face à des ennemis inhumains, et perd de vue l'objectif premier de toute armée : protéger ses citoyens et leurs biens.

 

Une enquête de l’hebdomadaire américain Weekly Standard met en lumière les pratiques véritables de l’armée israélienne à Gaza, bien loin des accusations propagées par des ONG israéliennes radicales et relayées par la presse française. En mai 2015, le journal Le Monde avait ainsi consacré sa « Une » et plusieurs pages intérieures à ce qu’il qualifiait de « dérive morale de l’armée israélienne ». Cet article n’était pas isolé, mais faisait partie d’une véritable offensive médiatique contre l’armée israélienne dans les médias français, à l’occasion de la publication d’accusations de « crimes de guerre » émanant de l’association israélienne « Breaking the Silence ». Un expert allemand en droit de la guerre, le professeur Wolff Heintschel von Heinegg, affirme pourtant que Tsahal, en s’efforçant à tout prix de minimiser le nombre de victimes civiles dans le camp adverse, crée un « précédent déraisonnable pour les autres pays démocratiques » en fixant des normes éthiques impossibles à respecter. Qui dit vrai, le quotidien du soir français, ou l’expert allemand ?

De l’affaire Al-Dura à la guerre de Gaza

 

En 2008, l’historien américain Richard Landes avait analysé l’affaire Al-Dura comme une version moderne de l’accusation de crime rituel portée contre les Juifs. En réalité, comme l’avaient déjà montré avant lui d’autres observateurs avertis du conflit israélo-arabe, cela fait des décennies que l’attirail des stéréotypes antijuifs les plus anciens a été remis au goût du jour pour démoniser Israël et en faire une version moderne de Shylock . Les méthodes de la propagande arabe et palestinienne contre Israël ont en effet souvent été empruntées aux deux écoles les plus performantes en la matière : Berlin et Moscou. L’historien de l’antisémitisme Léon Poliakov l’avait montré jadis, dans un petit livre très éclairant écrit fiévreusement, au lendemain de la première guerre du Liban de 1982 . Un des ressorts de cette propagande est le procédé de l’inversion, consistant à accuser l’ennemi de ses propres tares.

 

 

Dans la guerre que le Hamas a imposée à Israël, on assiste ainsi à une inversion constante, l’État juif étant accusé de tuer délibérément des civils, alors qu’il cherche par tous les moyens à minimiser le nombre des victimes à Gaza, notamment en prévenant à l’avance les habitants des immeubles bombardés, tandis que le Hamas cherche ouvertement à multiplier leur nombre, au mépris de la vie de ses concitoyens, transformés en boucliers humains. Comme l’a écrit le colonel britannique Richard Kemp, ancien commandant des forces armées britanniques en Afghanistan, « l’armée israélienne a développé des mesures extrêmement sophistiquées pour minimiser les victimes civiles au cours de ses attaques contre des cibles militaires légitimes ». Le Hamas, de son côté, a fait de l’utilisation des boucliers humains un « élément central de sa stratégie », et « la totalité des victimes civiles palestiniennes dans ce conflit [à Gaza] résultent de l’agression terroriste menée depuis Gaza contre Israël  ».


 

Un avocat derrière chaque soldat ?

 

La récente enquête du Weekly Standard a ainsi montré comment Tsahal avait soumis les décisions opérationnelles de ses officiers sur le terrain à l’approbation – en temps réel – d’avocats spécialistes du droit de la guerre, ces derniers devant valider chaque cible potentielle au regard du risque de faire des victimes civiles chez l’ennemi. Cette procédure, inédite dans les conflits opposant des pays démocratiques à des régimes totalitaires et à des organisations terroristes djihadistes, devait permettre, dans l’esprit des dirigeants israéliens, de réduire les critiques contre Tsahal sur la scène internationale et dans l’arène médiatique. Le résultat n’a pas été très convaincant, à l’aune des répercussions du conflit à Gaza de l’été 2014 et de ses retombées dans la presse française et internationale.

 

Mais le plus étonnant, dans la passionnante enquête de Willy Stern publié dans le Weekly Standard, n’est sans doute pas là. Il ressort en effet de son reportage que l’armée israélienne a essuyé les critiques de plusieurs spécialistes du droit international, en raison de la trop grande attention portée au nombre de victimes civiles à Gaza et des précautions inouïes prises pour le diminuer. En d’autres termes, Tsahal en ferait trop, ce qui risque selon ces experts de créer des nouvelles normes impossibles à respecter pour les pays occidentaux en guerre contre la menace terroriste islamiste…


 

Un précédent déraisonnable

 

Le professeur de droit allemand von Heinegg, expert en droit militaire à l’université européenne de Viadrina à Frankfurt, s’est ainsi plaint devant un parterre d’officiers israéliens que Tsahal créait un « précédent déraisonnable pour les autres pays démocratiques confrontés à des guerres asymétriques contre des acteurs non étatiques brutaux, qui violent le droit international ». Le comble de l’absurde est ainsi atteint : Israël cherche à minimiser à tout prix le nombre des victimes palestiniennes (y compris au prix de la vie de ses propres soldats, exposés inutilement à des risques accrus en affrontant le Hamas sur le terrain, au lieu de mener des attaques aériennes comme le font les autres armées occidentales dans des situations similaires), tandis que le Hamas cherche à le maximiser. Lors des combats meurtriers à Sadjaya, au nord de Gaza, les autorités militaires israéliennes avaient averti à l’avance leurs ennemis de l’entrée de Tsahal dans le village, pour permettre aux civils de l’évacuer.

 

Or, aucune règle du droit international des conflits armés n’oblige un pays à prendre de telles précautions pour minimiser les pertes civiles de l’ennemi, en mettant en danger ses propres soldats. Malgré cela, Israël est critiqué par les pays occidentaux, qui lui reprochent tantôt de commettre des « crimes de guerre » et tantôt d’en faire trop pour respecter les normes du droit de la guerre. Au lieu d’enseigner aux Occidentaux comment combattre le terrorisme (on se souvient du titre d’un livre écrit il y a plusieurs décennies par Benjamin Nétanyahou, alors ambassadeur d’Israël aux Nations Unies : Terrorism, How the West Can Win ), Israël donne au monde entier des leçons d’hyper-moralisme et de judiciarisation de la guerre poussée à l’extrême, les officiers étant désormais soumis aux décisions des avocats en pleine guerre.

 

Une des leçons de l’enquête du Weekly Standard, qui ne fait qu’effleurer ce sujet capital et lourd de conséquences, est que le regard que le monde porte sur Israël ne dépend pas tant des actions de Tsahal sur le terrain, que de la conscience que les soldats et les dirigeants israéliens ont d’agir de manière morale et juste. Plus les dirigeants israéliens doutent de la justesse de leur cause, plus ils portent le flanc aux critiques les plus injustifiées, comme ce fut le cas lors des dernières guerres à Gaza contre le Hamas. A l’inverse, plus Israël affiche sa certitude de combattre pour sa survie en tant que collectivité nationale et pour défendre la vie de ses citoyens, plus le monde le comprendra.

 

(Extrait de mon livre La trahison des clercs d'Israël, La Maison d'édition 2016).

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Bombardement de l’immeuble abritant l’Associated Press : Comment les médias sont devenus des acteurs de la guerre contre Israël

May 20 2021, 08:33am

Posted by Pierre Lurcat

 

A la mémoire de Haim Azses,

pionner de la Hasbara en Israël

 

Cela fait belle lurette que la profession de journaliste n’a plus grand chose à voir avec celle d’Albert Londres ou de Joseph Kessel, et ressemble plus à un obscur travail de gratte-papier copiant et collant des “Tweets”, et allant parfois chercher une référence historique - pour combler ses lacunes en culture générale - sur Wikipédia, cette encyclopédie des pauvres. Hélas, la destruction de l’enseignement public en France ne date pas d’hier et nos journalistes sont pour la plupart fraîchement émoulus des “écoles de journalisme”, ces tristes établissements où sont formatés ceux qui sont censés nous “dire l’actualité”, modernes Pythies.

 

Mais le sujet qui nous occupe ici n’est pas la baisse du niveau intellectuel des journalistes, sujet qui mériterait à lui seul une enquête (journalistique?) en bonne et due forme, mais la disparition de leurs critères moraux et professionnels (qu’ils désignent par le terme pompeux de “déontologie”). En effet, ceux qui se targuent de donner des notes de moralité au reste de la planète et qui sont imbus de l’idée que la Liberté de la presse et de l’information serait la Valeur suprême, devant laquelle doivent s’effacer toutes les autres, ne sont pas toujours des parangons de vertu. L’exemple suivant permettra d’illustrer notre affirmation.

 

Depuis samedi dernier, les médias français (et étrangers) se sont émus de la frappe par l’armée d’Israël du bâtiment abritant les locaux de l’Associated Press et d’Al-Jazira à Gaza ville. “La destruction des bureaux d’Al-Jazira et de ceux d’autres médias dans la tour Jala à Gaza est une violation flagrante des droits humains et est considérée internationalement comme un crime de guerre”, dénonce Moustapha Souag, directeur général du groupe qatari (pays qui s’y connaît en la matière), cité sans aucun commentaire par le quotidien Le Monde.  Or, en réalité, la présence d’opérationnels et de services de renseignement militaire du Hamas est un “secret de Polichinelle”, largement connu des médias du monde entier (1). 

 

Si les médias le savent, c’est parce qu’ils ont abandonné depuis bien longtemps leur rôle d’observateurs “neutres” (l’ont-ils jamais été?) pour devenir des acteurs du conflit israélo-arabe, comme l’a bien décrit l’ancien journaliste de l’AP, Matti Friedman :  « La presse occidentale est devenue moins un observateur de ce conflit qu’un acteur de celui-ci, un rôle qui a des conséquences sur les millions de personnes qui tentent de comprendre l’actualité, y compris les décideurs qui dépendent des récits journalistiques pour comprendre une région où ils cherchent constamment à intervenir de manière productive » (2).

 

Légitime défense : le bâtiment de l’AP à Gaza s’effondrant comme un château de cartes


 

Des journalistes servant de “boucliers humains” au Hamas

Ce qui devrait faire scandale, aux yeux des médias des pays démocratiques, c’est justement le fait que des journalistes acceptent de travailler dans le même immeuble que des terroristes du Hamas, auxquels ils servent de “bouclier humain”. Mais en réalité, cela fait longtemps que les journalistes occidentaux qui couvrent le “conflit” israélo-arabe ont accepté de se plier aux diktats du Hamas, de l’AP et des autres mouvements terroristes palestiniens, dont ils relaient avec complaisance le narratif mensonger au détriment d’Israël. Bien entendu, si vous interrogez un de ces journalistes, il vous expliquera doctement qu’il n’a pas le choix, et que le “devoir d’informer” oblige à accepter les conditions du Hamas à Gaza, ou celles de l’AP en Judée-Samarie (“Cisjordanie” dans le lexique autorisé).

 

Comme l’écrit Liliane Messika, “Une vidéo circule sur la Toile, celle d’un journaliste libanais, installé avec des confrères sur un toit d’où ils ont une vue imprenable sur l’immeuble du Renseignement du Hamas (ainsi que d’Al Jazzera et Associated Press), situé à une cinquantaine de mètres et qui va être détruit par Tsahal (Twitter). Cette vidéo a été signalée par la MENA, dont le journaliste a été impressionné par le calme des journalistes installés là, qui ne portent ni casque ni gilet pare-balles et qui ont, manifestement, eu tout le temps nécessaire pour préparer leurs objectifs… Les journalistes qui couvrent les conflits, ailleurs dans le monde, risquent leur vie. Pas ceux-là. Ils font confiance à la technologie de Tsahal et savent qu’ils ne risquent rien, car les Israéliens préfèrent avorter une opération que tuer un civil”.

Voilà bien l’hypocrisie de nos donneurs de leçons au monde entier : ils profitent de la protection de l’armée israélienne pour envoyer en toute tranquillité leurs dépêches mensongères sur les soi-disant “crimes de guerre” israéliens ! Ils se reposent à la piscine de l’American Colony, au coeur de Jérusalem (pardon, Jérusalem-Est) après avoir couvert les dernières émeutes arabes en “Palestine”, préférant le luxe démodé de ce palace à celui des hôtels miteux de Ramallah. Je me souviens d’un de ces plumitifs, G. Malbrunot, qui venait dans les cafés de Jérusalem chercher ses “proies” parmi les jeunes Israéliennes innocentes, il y a une vingtaine d’années, avant de retourner faire son vilain travail de correspondant d’un journal français. Ils soutiennent sans retenue les ennemis jurés d'Israël, et ils viennent pleurnicher quand Tsahal riposte, en détruisant une cible mixte abritant des soldats du Hamas d'une part, et leurs alliés de l'Associated Press d'autre part...

Une conscience morale aussi développée que celle d’un batracien: Charles Enderlin

RECTIFICATIF Bien entendu, ce portrait ne prétend pas décrire TOUS les journalistes français ou étrangers, car il existe des exceptions. Je connais des journalistes honnêtes, qui font leur travail avec conscience professionnelle et s’efforcent de le faire bien. Je connais aussi des journalistes courageux, qui couvrent des zones de guerre plus périlleuses que la ville de Gaza. Mais il faut reconnaître que, pour la majorité des correspondants français, formatés aux dépêches de l’AFP et à la vulgate anti-israélienne qu’ils entendent depuis leur enfance, il n’est pas possible d’envisager une autre façon de penser. Rappelons-nous du fake de Charles Enderlin et de France 2, accusant Tsahal de “crime rituel” à Netsarim, reportage qui a fait couler le sang de dizaines de civils israéliens innocents. 

 

Et rappelons-nous des pétitions organisées pour soutenir le journaliste accusé de faux, pétitions signées par le gratin de la profession de France et de Navarre. M. Enderlin, qui s’est payé le luxe d’intenter des procès pour “diffamation” (3) a continué de couler des jours paisibles à Jérusalem, bien après avoir commis son faux. Pensez-vous que l’image terrible des réservistes de Tsahal déchiquetés vivants par une meute palestinienne l’ait empêché de dormir? Je ne crois pas. Aux dernières nouvelles, Enderlin vient de publier ses mémoires et il vient d’accuser Israël de “manipuler les médias” à Gaza (4)... Ceux qui font profession d’incarner la “conscience de l’humanité” ont parfois une conscience morale très peu développée, sans doute du niveau d’un batracien. Mais peut-être suis-je trop sévère pour les batraciens. 

Pierre Lurçat

NB Article paru initialement sur https://mabatim.info/

1. Sur la collaboration entre l’Associated Press et divers régimes autoritaires de l’Allemagne nazie au Hamas, voir : https://www.tabletmag.com/sections/news/articles/ap-collaboration-nazis-reporting-news

2. https://www.causeur.fr/israel-musele-la-presse-a-gaza-retour-sur-une-fake-news-200866?utm_source=Envoi+Newsletter&utm_campaign=31b159d8b3-Newsletter_4_fevrier_COPY_01&utm_medium=email&utm_term=0_6ea50029f3-31b159d8b3-57602921

3. Y compris un procès contre moi, que j’ai gagné.

4. "Manipuler la presse, ce n’est pas bien, souligne Charles Enderlin, qui rappelle que l’immeuble abritant AP et Al-Jazeera hébergeait aussi "des points de diffusion d’images sortant de Gaza". Résultat, à Gaza, "il reste Reuters et l’Agence France-Presse (AFP), qui ont beaucoup de mal à fonctionner parce qu’en raison des pannes d’électricité, il y a très peu d’Internet et très peu de téléphone".

https://www.rtbf.be/info/monde/detail_charles-enderlin-depuis-des-mois-les-journalistes-internationaux-avaient-beaucoup-de-mal-a-se-rendre-dans-gaza?id=10762713

 

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Du « crime rituel » aux « crimes de guerre » : une explication historique

June 23 2021, 09:48am

Posted by Pierre Lurçat

Du « crime rituel » aux « crimes de guerre » : une explication historique

Pourquoi Israël est-il sans cesse vilipendé et accusé de « crimes de guerre » à Gaza, alors même qu’il fait tout pour éviter les victimes civiles palestiniennes ou pour réduire leur nombre, face à un ennemi qui fait tout, de son côté, pour les multiplier ? Pour comprendre ce paradoxe, un détour par l’histoire de l’antisémitisme de l’Antiquité à nos jours est nécessaire.  Extrait de mon nouveau livre, Les mythes fondateurs de l'antisionisme contemporain, qui paraît ces jours-ci.

Bernard Lazare, auteur d’un ouvrage devenu classique sur l’antisémitisme1, s’est interrogé sur la perpétuation à son époque (celle de l’Affaire Dreyfus) de l’accusation de crime rituel. Son interrogation portait plus précisément sur le paradoxe de cette accusation visant les Juifs, connus pour ne pas consommer de sang et pour avoir « horreur du sang ». Comment les Juifs, opposés aux sacrifices humains, ont-ils pu malgré cela être accusés de crimes rituels ? La réponse paradoxale à cette question est que ce n’est pas malgré, mais bien en raison de leur opposition aux sacrifices – que le judaïsme a été le premier à rejeter dans le monde antique – que les Juifs ont été vilipendés et accusés de crimes rituels. Comme l’explique Pierre-André Taguieff2:

« Tout se passe comme si l’opposition du judaïsme aux sacrifices humains, et en particulier aux sacrifices d’enfants, loin de calmer les passions antijuives, les avait exacerbées. Poliakov a formulé l’hypothèse selon laquelle la haine antijuive proviendrait du scandale provoqué par l’opposition du judaïsme aux sacrifices d’enfants. C’est précisément le respect de la vie humaine qui, chez les Juifs, ferait scandale, comme l’atteste ce passage de Tacite :
‘’Ils ont un grand soin de l’accroissement de la population. Ils regardent comme un crime de tuer un seul des enfants qui naissent ; ils croient immortelles les âmes de ceux qui meurent dans les combats ou les supplices ; de là leur amour d’engendrer et leur mépris de la mort’’ ».

La réponse donnée par Poliakov, qui a consacré sa vie à l’étude de l’antisémitisme à toutes les époques, consiste donc à dire, en s’appuyant sur une réflexion de l’historien romain Tacite, que c’est précisément le respect des Juifs pour la vie humaine qui fait scandale. Nous avons sans doute là une des clés de la compréhension de ce paradoxe : pourquoi Israël est-il sans cesse vilipendé et accusé de « crimes de guerre » à Gaza, alors même qu’il fait tout pour éviter les victimes civiles palestiniennes ou pour réduire leur nombre, face à un ennemi qui fait tout, de son côté, pour les multiplier ?

 

Léon Poliakov au procès Barbie, Lyon 1987

Le « scandale » du respect des Juifs pour la vie humaine

Si nous transposons l’explication très éclairante de Poliakov à l’antisionisme contemporain, nous pouvons proposer l’hypothèse suivante. Plus Israël fait preuve de retenue face aux terroristes du Hamas, plus il se montre soucieux de la vie humaine (allant souvent jusqu’à mettre en danger ses propres soldats, pour épargner la vie de civils dans le camp ennemi), plus le scandale du respect juif pour la vie éclate au grand jour. Rappelons ici la déclaration saisissante, faite à de nombreuses reprises par des dirigeants et membres du Hamas et d’autres mouvements islamistes contemporains :

« Nous aimons la mort plus que vous (les Juifs) aimez la vie !3 »

Selon ce discours, l’amour des Juifs pour la vie est perçu comme le signe incontestable de leur faiblesse, mais aussi comme un symptôme de leur morale scandaleuse.

Ce qui fait scandale chez les Juifs, c’est donc leur amour pour la vie et leur valorisation permanente de la vie (affirmée dans le verset du Deutéronome : « Et tu choisiras la vie ». Face à une culture mortifère comme celle des mouvements islamistes, qui valorisent la mort et la sanctifient, l’affirmation de la vie par Israël est perçue comme incongrue et révoltante. Cette opposition frontale entre deux conceptions radicalement opposées de la vie (et de la mort) permet aussi de comprendre le soutien paradoxal dont bénéficient en Occident les ennemis d’Israël.

Le paradoxe réside ici dans le fait, peu souvent remarqué, que le discours anti-israélien ou antisioniste continue d’accuser Israël, même lorsqu’il fait le bien (par exemple, lorsqu’il approvisionne en médicaments les habitants de Gaza), ou encore qu’il désigne Israël comme le Mal, tout en lui reconnaissant sa qualité de Bien. Comme l’écrit Éric Marty,

« si Sabra et Chatila fait scandale, c’est qu’il s’agit d’un crime qui a quelque chose à voir avec le Bien »,

précisant :

« Qu’est-ce qu’un crime qui a à voir avec le Bien ? C’est le crime qu’on impute au bouc émissaire…4 »[.

C’est sans doute une des raisons pour lesquelles la position morale israélienne est très souvent inopérante, face aux populations arabes soumises à la main de fer du Hamas à Gaza, ou de l’Autorité palestinienne en Judée-Samarie. Ce n’est pas parce qu’Israël approvisionne les habitants de Gaza en électricité ou en denrées alimentaires, ou qu’il laisse entrer l’argent du Qatar à Gaza, que les habitants de la bande de Gaza (ou les médias occidentaux) lui voueront une quelconque reconnaissance. Une telle conséquence impliquerait en effet au préalable que les deux parties partagent les mêmes critères moraux, et plus précisément, la même conception du Bien et du Mal, ce qui est loin d’être le cas. PL

Pierre Lurçat, MABATIM.INFO

(Extrait de mon livre Les mythes fondateurs de l’antisionisme contemporain aux éditions l’éléphant, Jérusalem 2021)


1 Lazare, Bernard, L’antisémitisme, son histoire et ses causes, Chailley, Paris 1894.
2 P.A. Taguieff, « Un exemple d’inversion victimaire : l’accusation de meurtre rituel et ses formes dérivées »,https://journals.openedition.org/aad/3500#bodyftn11
3 Voir par exemple, « Des Brigades Izz ad-Din al-Qassam aux soldats sionistes : Les Brigades Al-Qassam aiment la mort plus que vous aimez la vie », Palestinian Media Watch, Rapport spécial n°5 sur l’opération Pilier de Défense, 20 novembre 2012, https://palwatch.org/page/4286
4 Bref séjour à Jérusalem, Gallimard p. 167.

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